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24/05/2012 | FRANCE | N°09/02307

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 24 mai 2012, 09/02307


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRÊT DU 24 Mai 2012

(n° 1 , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/02307



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Février 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS - section activités diverses - RG n° 07/10654





APPELANT

Monsieur [X] [X]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représenté par Me Dominique BROUSMICHE, avocat au barreau de PARI

S, toque : P0446, substitué par Me Mathilde AUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque L53



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale suite à la décision n° RGC 09/16481 r...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRÊT DU 24 Mai 2012

(n° 1 , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/02307

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Février 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS - section activités diverses - RG n° 07/10654

APPELANT

Monsieur [X] [X]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représenté par Me Dominique BROUSMICHE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0446, substitué par Me Mathilde AUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque L53

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale suite à la décision n° RGC 09/16481 rendue le 14 septembre 2010 par le premier président de la cour d'appel de Paris ou son délégataire sur recours de la décision du bureau d'aide juridictionnelle de PARIS en date du 4 mai 2009)

INTIMÉE

SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DU [Adresse 2], REPRÉSENTÉ PAR SON SYNDIC LE CABINET C.P.C.I.

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Richard ruben COHEN, avocat au barreau de PARIS, toque : C1887

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Mars 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Renaud BLANQUART, Président, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Renaud BLANQUART, Président

Madame Marthe-Elisabeth OPPELT-REVENEAU, Conseillère

Madame Anne DESMURE, Conseillère

Greffier : Monsieur Polycarpe GARCIA, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Renaud BLANQUART, Président et par Monsieur Franck TASSET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Monsieur [X] a été embauché par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2], en vertu d'un contrat de travail à durée indéterminée en date du 10 novembre 2004, en qualité de gardien d'immeuble.

Sa rémunération mensuelle brute était de 1.447, 72 €.

La convention collective applicable est celle des gardiens, concierges et employés d'immeuble.

Le 4 octobre 2007, Monsieur [X] a saisi le Conseil de Prud'hommes de Paris, aux fins de paiement de rappel de salaires et de dommages et intérêts pour non-réfection de la loge qu'il occupait.

Le 11 décembre 2007, il a donné sa démission.

Par jugement de départage, en date du 5 février 2009, le Conseil de Prud'hommes de Paris, aux motifs :

- que Monsieur [X] réclamant un rappel de salaire, du fait que, depuis le mois de septembre 2005, il devait sortir les poubelles à 6h du matin, sans qu'il ait perçu de contrepartie financière, en contrepartie de cet allongement de son amplitude de travail, qu'il ne produisait, pour en justifier, qu'une demande de dérogation, adressée par le syndicat des copropriétaires, à la [Adresse 7], destinée à permettre une sortie des poubelles la veille au soir, pour que soient respectés les horaires de travail du gardien, que cette pièce n'établissait pas que Monsieur [X] avait été contraint de prendre son service à 6h du matin,

- que le syndicat des copropriétaires produisait en ensemble de factures acquittées de travaux d'électricité, peinture, plomberie constituant la remise en état de la loge,

a :

- débouté Monsieur [X] de ses demandes,

- débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande fondée sur l'article 700 du CPC,

- condamné Monsieur [X] aux dépens.

Le 23 février 2009, Monsieur [X] a interjeté appel de cette décision.

Représenté par son Conseil, Monsieur [X] a, à l'audience du 30 mars 2012, développé oralement ses écritures, visées le jour même par le Greffier, aux termes desquelles il demande à la Cour :

- d'infirmer le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

- de requalifier sa démission en prise d'acte de la rupture du contrat de travail, produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- de condamner le syndicat des copropriétaires à lui payer les sommes suivantes :

- 8.686, 32 €, à titre de dommages et intérêts, pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 2.895, 44 €, au titre de son préavis,

- '289, 45 €', au titre des congés payés y afférents,

- 470, 51 €, à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 6.005, 76 €, à titre de rappel de salaires,

- '600, 52"€, au titre des congés payés y afférents,

- 8.686, 32 €, à titre de dommages et intérêts, pour manquement à l'obligation de sécurité,

- 1.447, 72 €, à titre de dommages et intérêts, en réparation de son préjudice de jouissance,

- 'Remise sous astreinte de 100 € par jour de retard et par document, à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir, à liquider par la Cour d'appel de Paris, des pièces suivantes :

- bulletins de paie conformes,

- certificat de travail conforme, incluant le préavis',

- ' Intérêts légaux à compter de la saisine',

- 'Article 700 du CPC : 3.000 €',

- 'Dépens'.

Représenté par son Conseil, le syndicat des copropriétaires a, à cette audience du 30 mars 2012, développé oralement ses écritures, visées le jour même par le Greffier, aux termes desquelles il demande à la Cour :

- de dire l'appel recevable, mais non fondé,

- de confirmer le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

- de constater que Monsieur [X] étant salarié de catégorie B, il n'était astreint à aucun horaire de travail précis,

- de constater que Monsieur [X] n'apporte pas la preuve de ses prétentions,

- de constater que l'employeur a respecté ses obligations contractuelles, relatives à l'amplitude horaire et au repos hebdomadaire,

- de dire que Monsieur [X] n'apporte pas la preuve du préjudice qu'il dit avoir subi, du fait de l'absence de réfection de sa loge,

- de déclarer irrecevable la demande de Monsieur [X], tendant à voir requalifier sa démission en prise d'acte et ses demandes subséquentes,

Subsidiairement,

- de dire que cette démission ne saurait être requalifiée en prise d'acte,

En conséquence,

- de débouter Monsieur [X] de ses prétentions,

- de condamner Monsieur [X] à lui payer la somme de 2.500 €, au titre de l'article 700 du CPC,

- de condamner Monsieur [X] aux dépens.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la Cour se réfère aux écritures, visées le 30 mars 2012, et réitérées oralement à l'audience.

SUR QUOI, LA COUR,

Considérant qu'à l'appui de son appel, Monsieur [X] fait valoir :

- que, des travaux ayant commencé, [Adresse 2], au mois de septembre 2005, cette circonstance a modifié l'heure de passage du service de ramassage des ordures, les containers ne pouvant être sortis la veille au soir ; qu'en dépit d'une demande de dérogation, adressée le 13 octobre 2006, par le syndicat des copropriétaires à la mairie, ses horaires n'ont pas été modifiés ;

- que son travail commençait, ainsi, à 6h, pour s'achever à 19h, avec une pause de trois heures, de 12 à 15h ; qu'en vertu des dispositions de la convention collective applicable, et du fait que l'amplitude de sa journée de travail était passée à 13 heures, il aurait dû bénéficier de deux jours de repos, dont une le lundi ou le samedi ; qu'il n'a jamais récupéré ces heures de travail, aucune rémunération complémentaire ne lui ayant été versée, à ce titre ; que le syndicat national indépendant des gardiens et concierges et professions annexes, a demandé, à de nombreuses reprises, au syndic de régulariser cette situation ; qu'il est, donc, fondé à demander un rappel de salaires correspondant à une demi-journée par semaine, le samedi, de 6h à 12h, de septembre 2005 à janvier 2008 ; que c'est à tort que le syndicat des copropriétaires affirme qu'il n'apporterait pas la preuve de ses dires ;

- que l'employeur est tenu de prendre les mesures de prévention suffisantes lorsqu'un risque professionnel est identifié, le seul fait de ne pas prendre ces mesures constituant un manquement à l'obligation de sécurité ; que cet employeur est tenu, dans ce cas, au paiement de dommages et intérêts, même si le risque considéré n'est pas réalisé ; que les locaux de travail doivent être aménagés de manière à ce que leur utilisation garantisse la sécurité des travailleurs ; que le syndicat des copropriétaires était tenu de délivrer une loge aux normes de sécurité ; que le 19 janvier 2007, une entreprise lui a adressé, à sa demande, un devis de remise aux normes de sa loge, d'un montant de 11.150, 30 € ; que le 12 mars 2007, un médecin du travail, a constaté, dans cette loge, la présence de fils électriques visibles représentant un risque imposant une prise en charge ; que des photographies montrant des fils dénudés à coté d'une arrivée d'eau sont produites ; que le syndicat qu'il a saisi a demandé au syndic de procéder à la réfection de sa loge; que, le 30 mai 2007, l'assemblée générale des copropriétaires a voté la remise en état de la salle de bains de sa loge conformément aux dispositions de la convention collective, électricité, peinture, carrelage ; que la nécessité de cette remise au normes n'est, donc, pas contestable ; que le syndicat des copropriétaires doit, en conséquence, être condamné au paiement de dommages et intérêts pour non-respect de son obligation de sécurité ; que les devis, datant de 2007 et produits par le syndicat des copropriétaires, ne démontrent pas la réalisation de travaux ; que s'il a quitté sa loge, c'est bien du fait du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ;

- qu'il a subi un préjudice de jouissance, du fait qu'en dépit de ce que le syndicat des copropriétaires a sollicité une société de surveillance des ascenseurs, les alarmes de pannes étaient toujours installées dans sa loge, se mettant régulièrement en marche au milieu de la nuit, et que des fissures et moisissures étaient présentes dans cette loge,

- que l'article R 1452-7 du Code du travail prévoit que les demandes nouvelles dérivant d'un même contrat de travail sont recevables, même en appel ; qu'une démission doit être requalifiée en prise d'acte, dès lors qu'elle est équivoque ; qu'un salarié peut remettre en cause sa démission à raison de faits qui ont eu lieu avant ou au moment de sa démission ; que sa démission doit, donc, être requalifiée en prise d'acte, dès lors que le syndicat des copropriétaires a manqué à ses obligations contractuelles ; qu'il avait saisi un syndicat professionnel et déjà saisi le Conseil de Prud'hommes, avant de démissionner ; qu'à la date de cette démission, celle-ci était, donc, équivoque ; que les manquements de l'employeur sont suffisamment graves pour que sa démission, requalifiée en prise d'acte, produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'il est fondé à demander des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, qu'il avait plus de 3 ans et 3 mois d'ancienneté, a dû quitter son emploi, en dépit des très bonnes relations qu'il entretenait avec les résidents, qui témoignent de la qualité de son travail ; qu'en application de la convention collective, il lui est dû un préavis de trois mois, et n'a été payé que pour un mois ; qu'il doit bénéficier d'une indemnité conventionnelle de licenciement ; qu'il est fondé à réclamer la somme de 6.005, 76 €, au titre du rappel de salaires qui lui est dû, à raison d'une perte de congé hebdomadaire, ainsi que les congés payés y afférents; qu'il demande, également, des dommages et intérêts, à concurrence de 6 mois de salaires, du fait du manquement du syndicat des copropriétaires à son obligation de sécurité ; qu'il est fondé, enfin, à obtenir des dommages et intérêts, en réparation de préjudice de jouissance qu'il a subi ;

Le syndicat des copropriétaires fait valoir, pour sa part :

- que, conformément aux dispositions de la convention collective applicable, les salariés de la catégorie B n'ont pas d'horaire de travail précis, que l'évaluation des tâches de Monsieur [X] a, donc, été faite mensuellement, en unité de valeur, en référence à son contrat de travail ;

S'agissant de l'amplitude journalière et des repos hebdomadaires,

- que le contrat de travail de Monsieur [X] fixait les horaires d'ouverture de sa loge de 7h à 12h, du lundi au samedi et de 5h à 19h, du lundi au vendredi ; que la Ville de [Localité 5] a décidé, 'au cours du premier semestre 2006", que le ramassage des ordures ménagères devait, désormais, s'effectuer de 6h à 6h30 ; que le syndic, alerté des risques de verbalisation encourus du fait de la mise sur la voie publique des containers d'ordures, a sollicité de la mairie, une dérogation explicite permettant de sortir ces containers la veille au soir ; que Monsieur [X], qui affirme que l'amplitude journalière de son travail n'aurait pas été respectée, n'apporte pas la preuve de ses allégations ; qu'il est curieux que Monsieur [X] ait accepté l'exécution de cette tâche fastidieuse 'en 2005 et 2006", sans solliciter de paiement et formuler de réclamation ; que l'amplitude de sa journée de travail, de 12 heures, avec 3 heures de pause, a été respectée ; qu'elle conférait à Monsieur [X] le droit de bénéficier d'une journée et demie de repos hebdomadaire et non de deux jours, selon les termes de la convention collective applicable ;

S'agissant des travaux de réfection de la loge et de l'obligation de sécurité,

- que Monsieur [X] a occupé sa loge pendant 2 ans, à compter du mois de décembre 2004, sans émettre la moindre contestation relative à l'état de cette dernière ; qu'il justifie, pour sa part, avoir fait procéder à des travaux, dans cette loge, au mois de mai 2004, avant l'entrée, dans les lieux de Monsieur [X] ; que cette loge répondait aux normes d'hygiène et de sécurité ; qu'à la demande de Monsieur [X], une résolution visant à la réalisation de travaux dans la salle de bains de ladite loge a été inscrite à l'ordre du jour de l'assemblée générale du 30 mai 2007, et adoptée, pour un budget de 3.000 € HT ; que le syndic, alerté de l'existence d'un problème d'électricité dans la salle de bains de la loge, le 13 février 2007, a relayé cette information dans les meilleurs délais pour voir autoriser ces travaux ; que Monsieur [X] ne peut, donc, soutenir qu'il aurait subi un préjudice, de ce chef ; que l'obligation de sécurité concerne les maladies professionnelles, le harcèlement et les décisions de l'employeur mettant en danger la santé ou la sécurité des salariés ; qu'aucune de ces circonstances n'est applicable, en l'espèce ; qu'aucun manquement à l'obligation de sécurité ne peut lui être reproché ;

S'agissant du trouble de jouissance,

- que, s'agissant du déclenchement des alarmes, Monsieur [X] se contente de simples affirmations, sa mauvaise foi étant manifeste ;

S'agissant de la démission de Monsieur [X],

- que, pour la première fois devant la Cour, Monsieur [X] demande la requalifiction de sa démission en prise d'acte de rupture, qu'il s'agit d'une demande irrecevable, comme nouvelle, au sens de l'article 564 du CPC,

Subsidiairement,

- que, dans sa lettre, Monsieur [X] a exprimé de façon non équivoque, sa volonté de ne plus travailler pour son employeur ; que cette lettre ne contient aucun grief à son encontre ; que s'il a été admis le caractère équivoque d'une démission ne comportant aucun grief, du fait d'un acte 'postérieur' à la lettre de démission, c'est à la condition qu'il existe des faits ou manquements imputables à l'employeur ; qu'en l'espèce, il n'a pas modifié l'amplitude journalière de travail du salarié, qui n'a jamais commencé son service avant 7h du matin ; qu'il a mis à la disposition de ce dernier une loge en bon état, conforme aux normes et a fait procéder à des travaux de réfection ultérieurement, à la demande de ce salarié ; qu'aucun manquement fautif ne peut lui être imputé ; que la démission de Monsieur [X] est, par ailleurs, intervenue en cours de procédure de première instance, à sa seule initiative, alors qu'il lui aurait été loisible de faire état d'éventuels griefs ;

Sur la demande de requalification de la démission de Monsieur [X]

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article R 1452-7 du Code du travail, les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail sont recevables, même en appel ; que la demande de Monsieur [X], tendant à la requalification de sa démission en prise d'acte, formée pour la première fois devant la Cour, est, donc, recevable ;

Considérant que la démission d'un salarié peut être requalifiée en prise d'acte de la rupture du contrat de travail :

- lorsque le salarié démissionne en reprochant des faits à l'employeur dans sa lettre de démission,

- lorsque, ne faisant mention d'aucun grief, dans cette lettre, il la remet, ensuite, en cause, en se fondant sur des manquements de son employeur, à raison de circonstances antérieures ou contemporaines du moment de la démission, rendant cette dernière équivoque ; que tel est le cas, lorsque le salarié a saisi le Conseil de Prud'hommes avant de démissionner ;

Qu'en l'espèce, Monsieur [X], a démissionné le 11 décembre 2007, sans formuler expressément de griefs, à l'encontre de son employeur, dans sa lettre de démission ; qu'ayant saisi le Conseil de Prud'hommes avant de démissionner, une telle circonstance rend équivoque cette démission ; qu'il y a, donc, lieu d'analyser cette démission en prise d'acte et d'apprécier si cette dernière produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou d'une démission ;

Que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail ;

Considérant que Monsieur [X] a saisi le Conseil de Prud'hommes, pour réclamer la paiement d'un rappel de salaire et la réfection de sa loge ; qu'il précise, devant la Cour, avoir été privé d'une demi-journée de congés hebdomadaire, du fait de l'extension, à 13 heures, de l'amplitude de sa journée de travail et dénonce un manquement de son employeur à son obligation de sécurité ;

Considérant que Monsieur [X] a été embauché par le syndicat des copropriétaires intimé, en qualité de gardien d'immeuble de catégorie B ;

Qu'en vertu des dispositions de l'article 18 de la convention collective applicable, les salariés se rattachent, s'agissant des conditions générales de travail, soit, pour les salariés de catégorie A, au régime de droit commun, soit à un régime dérogatoire, pour les salariés de catégorie B, excluant toute référence à un horaire, leur taux d'emploi étant déterminé par l'application du barème d'évaluation des tâches en unité de valeur ;

Qu'en vertu des dispositions de l'article 19. 3 de la convention collective applicable, s'agissant du repos hebdomadaire et des jours fériés, le repos hebdomadaire minimal du personnel de catégorie B à service complet ou permanent est porté à 1 jour et demi, la demi-journée étant prise le samedi après-midi ou le lundi matin ;

Qu'en vertu des dispositions de l'article 18.3 de la même convention, le temps de repos peut être limité à trois heures, dans une amplitude de 13 heures, pour les salariés de catégorie B, à service complet ou permanent, qui, dans ce cas, bénéficient de 4 demi-journées consécutives, incluant la journée complète du dimanche ;

Qu'en l'espèce, le contrat de travail de Monsieur [X], établi pour un salarié de catégorie B, définit les heures d'ouverture de sa loge, de 7h à 12h, du lundi au samedi, et de 15h à 19h, du lundi au vendredi, et définit ses tâches en fonction d'un nombre d'unités de valeur, sans référence à un horaire de travail ; que, selon les termes de ce contrat, l'amplitude du temps de travail de Monsieur [X] était, donc, de 12 heures, et son temps de repos de 3 heures ;

Que, pour affirmer que l'amplitude de son temps de travail était, non de 12, mais de 13 heures, Monsieur [X] se prévaut, en premier lieu, des termes d'une lettre d'une lettre, en date du 13 octobre 2006, du syndic de l'immeuble au sein duquel il exerce son emploi ;

Qu'il n'est pas contesté qu'à la fin de l'année 2005, il a été décidé que le ramassage des ordures s'opérerait avant 6h30, à raison de travaux et que, de ce fait, soit les containers d'ordures étaient sortis des immeubles le matin prévu pour leur ramassage, avant 6h30, soit la veille au soir, avec un risque de verbalisation de la copropriété, dans cette hypothèse ;

Que, selon les termes de la lettre du syndic, en date du 13 octobre 2006, ce dernier a demandé à la mairie compétente de bénéficier d'une dérogation, lui permettant d'éviter une telle verbalisation, dans la mesure où, les gardiens d'immeuble commençant leur service à 7 heures, ils sortaient les containers la veille au soir ;

Que le syndicat des copropriétaires intimé ne verse pas aux débats la réponse, faite par la mairie, à cette lettre ;

Que, le 12 janvier 2007, avant, donc, la saisine, par l'appelant, du Conseil de Prud'hommes, le même syndic a écrit à Monsieur [X], pour se plaindre de son absence, dans sa loge, un mercredi à 17h, lui rappelant que ses horaires étaient de 7h à 12h et de 15h à 19h, du lundi au vendredi et de 7h à 12 h, le samedi et une exécution incorrecte de certaines tâches ; qu'il a, ainsi, confirmé que l'amplitude de la journée de travail de l'appelant prenait fin à 19h ;

Que l'appelant produit deux lettres du syndicat professionnel qu'il a saisi, adressées au syndic considéré, contestant, le 13 février 2007, l'effectivité de l'absence reprochée à son adhérent, et indiquant, notamment, que 'la sortie des poubelles matinales était en dehors des heures de l'amplitude de Monsieur [X], celles-ci étant, donc, récupérables' , puis se plaignant, le 13 mars 2007, d'une absence de réponse à sa lettre précitée, pour rappeler, notamment, que Monsieur [X] était 'toujours dans l'attente... pour la sortie des poubelles matinales, en dehors des heures d'amplitude' ; que le syndicat considéré, par lettre du 4 avril 2007, a fait savoir au syndicat des copropriétaires que, sans réponse de sa part, aux deux lettres précédentes, dans un délai de 8 jours, il saisirait le Conseil de Prud'hommes ;

Que le syndicat des copropriétaires ne verse aux débats aucune réponse, de ce sa part, à ces lettres ;

Que Monsieur [X] produit, par ailleurs, une attestation de Monsieur [I], indiquant l'avoir remplacé, pour la période du 14 au 30 août 2006, et précisant que ce dernier lui avait donné pour instructions de sortir les ordures ménagères, le matin avant 7 heures ;

Considérant qu'en l'absence de production, par le syndicat des copropriétaires, de la réponse de la mairie saisie par lui d'une demande de dérogation, et de réponse, de sa part, aux lettres susvisées du syndicat saisi par l'appelant, ainsi qu'au vu des pièces versées aux débats par ce dernier, Monsieur [X] fournit à la présente juridiction les éléments de nature à étayer sa demande, relative à un défaut de compensation de la demi-journée de congés hebdomadaires que supposait l'extension de l'amplitude de sa journée de travail à 13 heures ; qu'au vu des éléments fournis par les parties, la preuve du bien-fondé de la réclamation de l'appelant, sur ce point, est suffisamment rapportée ;

Considérant que, s'agissant de l'obligation de sécurité, le syndicat des copropriétaires justifie de ce qu'avant l'embauche de Monsieur [X], il a fait procéder, au mois de mars 2004, dans la loge destinée à ce dernier, à des travaux d'électricité, dans la salle d'eau et la cuisine, facturés et payés ; qu'il justifie, en outre, avoir fait procéder, dans cette loge, à des travaux de plomberie et d'électricité, en 2005 et 2006 ;

Que le devis que Monsieur [X] verse aux débats et dont il indique qu'il a été établi à sa demande, le 19 janvier 2007, a trait à la remise aux normes de sa loge, s'agissant, essentiellement, du remplacement des équipements sanitaires, mais s'accompagnant, aussi, de travaux de re-création aux normes du réseau électrique de la salle de bains ;

Qu'il produit, par ailleurs, la lettre d'un médecin du travail, en date du 12 mars 2007, mentionnant que, lors d'une visite, il a constaté 'l'existence de fils électriques visibles derrière la porte de la salle de bains' ;

Que, saisi, le 13 février 2007, par le syndicat professionnel de l'appelant, d'une demande relative à l'usure du parquet de sa loge et à la 'protection concernant l'électricité', le syndic de l'immeuble considéré a fait inscrire à l'ordre du jour de l'assemblée générale des copropriétaires du 30 mai suivant, une résolution tendant à la réalisation de travaux de remise en état de la salle de bains de la loge considérée, conformément aux dispositions de la convention collective,

( électricité, peinture et carrelage ), qui a, alors, été adoptée ; que Monsieur [X] faisant valoir que la production de ce devis ne témoigne pas de la réalisation des travaux considérés, le syndicat des copropriétaires verse aux débats trois devis en date des 3, 4 et 5 décembre 2007, mais ne justifie pas de la réalisation effective des travaux considérés ; qu'il ne justifie, donc, pas avoir fait réaliser les travaux de remise aux normes en question et ne peut sérieusement soutenir qu'ils ont été réalisés au mois de mai 2007, date à laquelle il n'a été que décidé de les entreprendre ;

Qu'un risque professionnel ayant été identifié, à raison de l'absence de mise aux normes de l'installation électrique, dans la loge de l'appelant, le syndicat des copropriétaires ne justifie pas avoir pris l'ensemble des mesures de prévention suffisantes pour y remédier, dès lors qu'ayant fait voter les travaux nécessaires, il devait s'employer à les mettre en oeuvre ; que Monsieur [X] justifie, donc, d'un manquement de l'intimé à son obligation de sécurité, à son égard ;

Considérant que Monsieur [X] faisant valoir que le syndicat des copropriétaires a manqué à ses obligations contractuelles à son égard, à raison du préjudice de jouissance qu'il aurait subi, à raison du déclenchement d'alarmes, dans sa loge, et de la présence, dans cette dernière, de fissures et de moisissures, force est de constater que l'appelant n'étaye pas sa réclamation, s'agissant d'un déclenchement intempestif des alarmes, dans sa loge, et que la seule production, par lui, de photographies peu parlantes, non datées, et prises en un lieu indéterminé, ne suffit pas étayer ses doléances, s'agissant de la présence de fissures et moisissures, dans sa loge ; qu'au contraire des précédents, la démonstration d'un manquement invoqué, de ce chef, n'est pas étayée ;

Considérant que Monsieur [X] ayant dénoncé des manquements de son employeur, à ses obligations contractuelles, qui, pour certains d'entre eux, sont établis et graves, sa démission, s'analysant en prise d'acte, a eu les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, à la date du 11 décembre 2007 ;

Considérant que, fût-ce subsidiairement, le syndicat des copropriétaires ne conteste pas le quantum des demandes d'indemnisation formées par l'appelant ; qu'il convient, cependant, d'examiner le bien-fondé de ces demandes, la partie qui se prévaut d'une créance devant en démontrer l'existence et l'étendue ;

Considérant qu'à la date de son licenciement, Monsieur [X] percevait une rémunération mensuelle brute de 1.447, 72 € ; qu'il était âgé de 32 ans, et bénéficiait d'une ancienneté de plus de 3 ans ; que le syndicat des copropriétaires ne conteste pas l'affirmation de l'appelant selon laquelle, il a été contraint de déménager dans le Doubs et vit, désormais, loin de sa famille et de ses amis ; qu'il convient d'évaluer à 8.686, 32 €, le montant de l'indemnité allouée au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse à Monsieur [X], en application de l'article L 1235-5 du Code du travail ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de la convention collective applicable, Monsieur [X] est fondé à réclamer le paiement d'une indemnité de complément de préavis, à concurrence de 2.895, 44 €, et des congés payés y afférents, à concurrence de 289, 54 €, sa réclamation d'une somme de '289, 45 €', à ce titre, résultant, manifestement, d'une erreur matérielle ;

Que Monsieur [X] est, également, fondé à réclamer, en application de l'article 16 de la convention collective applicable, une indemnité conventionnelle de licenciement de 470, 51 € ;

Que, s'agissant de la réclamation, par Monsieur [X], d'un rappel de salaires, au titre des demi-journées de repos dont il a été privé, à raison d'une extension de l'amplitude journalière de son travail, à 13 h, l'appelant produit un décompte détaillé et circonstancié des sommes qui lui sont dues, de ce chef, à concurrence de 6.005, 76 €, décompte qui n'est ni analysé, ni contesté par l'intimé ; qu'il sera fait droit à cette demande, ainsi qu'à celle d'une somme de 600, 57 €, au titre des congés payés afférents au rappel de salaire considéré, la réclamation d'une somme de '600, 52 €', à ce titre, résultant, manifestement, d'une erreur matérielle ;

Considérant que, s'agissant du manquement, par l'employeur, à son obligation de sécurité, un tel manquement cause nécessairement un préjudice au salarié exposé ; qu'il y a lieu, cependant, de prendre en considération le fait que le risque auquel Monsieur [X] a été exposé ne s'est pas réalisé ; qu'il sera fait droit à la demande de ce dernier, de ce chef, dans la limite de 1.447, 72 € ;

Que le préjudice de jouissance invoqué par l'appelant, à raison du déclenchement d'alarmes, de fissures et moisissures, n'étant pas établi, il n'y a lieu a indemnisation, de ce chef ;

Qu'il sera fait droit, enfin, à la demande de Monsieur [X] tendant à la remise de documents sociaux, par le syndicat des copropriétaires, dans les termes du dispositif du présent arrêt ;

Qu'il y a lieu, en conséquence, d'infirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande fondée sur l'article 700 du CPC ;

Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur [X] les frais irrépétibles qu'il a exposés en appel ;

Que le syndicat des copropriétaires, qui succombe, devra supporter la charge des dépens de première instance et d'appel ;

PAR CES MOTIFS

Déclare recevable la demande de Monsieur [X], tendant à la requalification de sa démission en prise d'acte, s'analysant en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Confirme le jugement entrepris, en ce qu'il a débouté le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2], de sa demande fondée sur l'article 700 du CPC,

Infirme le jugement entrepris, pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Requalifie la démission donnée, le 11 décembre 2007, par Monsieur [X], en une prise d'acte de la rupture de son contrat de travail, ayant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2], à verser à Monsieur [X] les sommes suivantes :

- 6.005, 76 €, à titre de rappel de salaire, au titre de demi-journées de repos hebdomadaire,

- 600, 57 €, au titre des congés payés y afférents,

- 2.895, 44 €, à titre d'indemnité de préavis,

- 289, 54 €, au titre des congés payés y afférents,

avec intérêts au taux légal, à compter de la date de réception, par le syndicat des copropriétaires intimé, de la convocation devant le bureau de conciliation,

- 8.686, 32 €, à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 470, 51 €, à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 1.447, 72 €, à titre de dommages et intérêts, pour non respect de l'obligation de sécurité,

avec intérêts, au taux légal, à compter du jour du prononcé du présent arrêt,

Ordonne la remise, par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2], des pièces suivantes :

- bulletins de paye conformes,

- certificat de travail conforme, incluant le préavis,

- attestation destinée à POLE EMPLOI, incluant le préavis,

le tout dans un délai de 15 jours suivant la signification du présent arrêt, et, passé ce délai, sous astreinte de 50 €, par jour de retard et par document,

Rejette le surplus des demandes formées par Monsieur [X],

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2], aux dépens de première instance,

Y ajoutant,

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2] à verser à Monsieur [X], la somme de 2.000 €, au titre de l'article 700 du CPC,

Condamne le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2], aux dépens d'appel.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 09/02307
Date de la décision : 24/05/2012

Références :

Cour d'appel de Paris K5, arrêt n°09/02307 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-05-24;09.02307 ?
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