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09/05/2012 | FRANCE | N°10/16337

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 09 mai 2012, 10/16337


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3



ARRÊT DU 09 MAI 2012



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 10/16337



Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Juillet 2010- Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 09/09391





APPELANTE



La S.A. PARISIENNE DE PARKING, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux


[Adresse 1]

[Localité 4]



représentée par Me Patricia HARDOUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056, avocat postulant

assistée de Maître Bernard COUDRAY, avocat au bar...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRÊT DU 09 MAI 2012

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/16337

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Juillet 2010- Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 09/09391

APPELANTE

La S.A. PARISIENNE DE PARKING, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Patricia HARDOUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056, avocat postulant

assistée de Maître Bernard COUDRAY, avocat au barreau de PARIS, toque C116, avocat plaidant

INTIMÉ

Maître [Z] [V]es-qualités d'administrateur provisoire de la SCI SAINT ANTOINE DE BEARN

[Adresse 3]

[Localité 5]

représenté par Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2090, avocat postulant

assisté de Maître Stéphane DUMAINE-MARTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D062, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 février 2012, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme REGHI, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame BARTHOLIN, Présidente

Madame BLUM, Conseillère

Madame REGHI, Conseillère

Greffier lors des débats : Madame CHOLLET

ARRÊT

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Chantal BARTHOLIN, Présidente et par Madame Alexia LUBRANO, Greffière, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

* * * * * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Faits et prétentions des parties :

Suivant acte sous seing privé du 23 juin 1963, la société Saint Antoine de Bearn a donné en location à la société Parisienne de parking des locaux à destination de garage pour automobiles, réparations, vente de voiture et accessoires et d'habitation personnelle des associés ou employés de la société, situés [Adresse 1].

Les dirigeants de la société Parisienne de parking sont associés dans la société Saint Antoine de Bearn, ce qui est à l'origine d'un certain nombre de difficultés de gestion et d'engagement de procédures en fixation de loyer. Par jugement du 17 avril 2008, confirmé par la cour d'appel de Paris, le juge des loyers commerciaux a fixé le loyer au montant résultant de l'application de l'évolution indiciaire.

Mme [V] a été désignée en qualité d'administrateur provisoire de la société Saint Antoine de Bearn et autorisé, par ordonnance du 30 juin 2008 du président du tribunal de grande instance de Paris, à faire délivrer à la société Parisienne de parking un congé avec offre de renouvellement moyennant un loyer fixé à la valeur locative des locaux, dans l'attente de la décision des associés de la société à réunir par Mme [V] dans le courant du mois de septembre 2008.

Par acte du 30 juin 2008, Mme [V] a délivré congé avec offre de renouvellement pour un loyer de 600 000 € par an. Les associés de la société Saint Antoine de Bearn ont confirmé le congé précédemment délivré et donné pouvoir à Mme [V] d'engager l'instance en fixation de loyer.

Parallèlement, par acte du 29 mai 2009, la société Parisienne de parking a fait assigner Mme [V] ès qualité d'administrateur judiciaire de la société Saint Antoine de Bearn en remboursement de trop perçu de charges devant le tribunal de grande instance de Paris qui, par jugement du 8 juillet 2010, assorti de l'exécution provisoire, a :

- déclaré la société Parisienne de parking irrecevable en ses demandes en restitution de charges locatives pour la période antérieure au 29 mai 2004,

- dit que les charges de copropriété correspondent aux prestations visées au bail,

- dit que la société Parisienne de parking est redevable des charges de copropriété à proportion des millièmes que représentent les lots formant l'assiette des locaux loués dans l'état descriptif de division de l'immeuble, à l'exception des grosses réparations de l'article 606 du code civil, des dépenses d'électricité et d'eau calculées à proportion des millièmes que représentent les lots 251 et 12 et de 80 % des dépenses de personnel calculées à proportion des millièmes que représentent les lots 251 et 12, les 20% restants devant être répartis sur l'ensemble des lots y compris les lots 251 et 12,

- avant dire-droit sur le montant des charges locatives et sur l'action en répétition de la société Parisienne de parking à ce titre :

- désigné un expert aux fins de fournir tous éléments permettant de déterminer le montant des charges locatives dues par la société Parisienne de parking, selon les principes fixés,

- sursis à statuer sur l'ensemble des autres demandes,

- réservé les dépens.

Par déclaration du 4 août 2010, la société Parisienne de parking a fait appel du jugement.

Dans ses dernières conclusions, signifiées le 29 novembre 2011, la société Parisienne de parking demande :

- l'infirmation du jugement,

- la condamnation de la société Saint Antoine de Bearn représentée par son administrateur judiciaire au paiement de la somme de 165 283,63 € au titre des charges indues à fin 2008, avec intérêts au taux légal à compter de chacun des versements,

très subsidiairement :

- de dire de façon limitative, les charges auxquelles elle serait astreinte,

- le débouté des demandes de la société Saint Antoine de Bearn en dommages et intérêts et article 700,

- sa condamnation au paiement de la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, dont distraction.

Dans ses dernières conclusions, signifiées le 10 février 2011, Mme [V], formant appel incident, demande :

- l'infirmation du jugement et le débouté des demandes de la société Parisienne de parking,

à titre subsidiaire :

- la confirmation du jugement,

en tout état de cause :

- la condamnation de la société Parisienne de parking au paiement de 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- sa condamnation au paiement de la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, dont distraction.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 1er février 2012.

CELA EXPOSE,

Considérant que la société Parisienne de parking fait valoir que le bail met à sa charge le paiement des impôts et taxes et les charges locatives précisément énumérées ; que l'immeuble a été placé sous le régime de la copropriété en 1983 ; qu'elle a fini par constater qu'elle réglait des charges qui n'étaient pas dues ; que les locaux qu'elle loue comprennent une boutique sur rue et un lot à usage de garage-hôtel formant à lui seul le bâtiment C, outre une cave et une réserve, l'ensemble de ces lots étant totalement indépendant du reste de la copropriété et ne bénéficiant d'aucune prestation ou avantage de cette copropriété ; qu'il est donc parfaitement illogique de lui faire supporter des charges de copropriété ; que le chapitre du bail intitulé loyer prévoit que celui-ci sera perçu par la bailleresse net de tout impôt et taxe, la formule utilisée 'prestations de toute nature' étant relative à ces taxes et impôts ; qu'il a été ainsi normalement indiqué de façon limitative les différentes charges d'entretien qui lui incombent, auxquelles s'ajoute l'ensemble des impôts et taxes ;

Considérant que Mme [V] réplique que le fait que l'immeuble ait été soumis au régime de la copropriété n'a pas modifié la nature des charges qui doivent être supportées par la société Parisienne de parking puisque, en vertu du bail, le loyer doit être net pour la bailleresse ; que, dans un bail commercial, les parties sont libres de prévoir à qui incombera la charge du paiement des charges récupérables ; qu'en l'espèce, le bail a mis à la charge de la société Parisienne de parking l'ensemble des prestations fournies par la bailleresse se rapportant à l'immeuble et à son environnement ; que le bail ne pouvait prévoir que la société Parisienne de parking supporterait la totalité des charges de copropriété, uniquement au motif qu'il est antérieur à la mise en copropriété de l'immeuble ; que, pour autant, le bail n'en prévoit pas moins expressément que le loyer doit être net pour la bailleresse ;

Considérant que le bail met à la charge de la locataire les réparations de quelque nature que ce soit, sauf la réfection de la couverture entière et la réfection des gros murs, et lui fait obligation de contracter des abonnements directs pour l'eau, le gaz et l'électricité ; qu'en sus du loyer, la locataire doit rembourser à la bailleresse la totalité des impôts, taxes et prestations de toute nature, même foncière ou temporaires, qui pourront grever les lieux loués de manière que le loyer soit absolument net pour la bailleresse ; que, contrairement à ce que soutient la société Parisienne de parking le paiement d'une imposition ne peut se confondre avec le paiement d'une prestation, les prestations de toute nature ne se rapportant pas à des impôts ou à des taxes mais désignant exactement toutes les charges liées à l'occupation des lieux ; que la société locataire ne peut, par ailleurs, prétendre qu'il n'existait, à l'époque de la conclusion du bail, aucune charge locative, le bail prévoyant expressément leur remboursement par la locataire de toutes celles pouvant grever les lieux loués ;

Considérant toutefois que, s'il n'est versé aux débats que des quittances postérieures au placement de l'immeuble sous le régime de la copropriété, ce qui ne permet pas de vérifier la nature et le montant des charges dont le remboursement était réclamé par le bailleur antérieurement, il résulte des éléments produits, notamment les procès-verbaux de l'assemblée générale des copropriétaires, que les charges afférentes aux lieux loués ont été nécessairement modifiées dans leur nature et dans leur calcul, en passant du statut d'immeuble appartenant à un seul propriétaire au statut de la copropriété, avec une répartition des charges par millièmes, et que le mode même de paiement par la locataire a été changé, passant du remboursement contractuellement prévu à un appel de provisions ; que ces modifications apportées en cours de bail quant au paiement des charges locatives, qui n'ont pas font l'objet d'un avenant au bail qui mentionnait clairement le remboursement par la locataire des charges réglées par le bailleur en sa qualité de seul propriétaire, ne sauraient lier les parties à défaut de démontrer une volonté claire en ce sens ;

Considérant que c'est à tort que les premiers juges ont cru pouvoir conclure du paiement par la société Parisienne de parking des charges de copropriété depuis 1984, sans émettre de contestation, la reconnaissance implicite du principe de cette obligation en exécution du bail, alors que le seul paiement par un locataire de charges appelées par le bailleur n'implique pas la renonciation du locataire à en contester le bien fondé ; que, faute pour la société Saint Antoine de Bearn d'établir la volonté claire et non équivoque de la société Parisienne de parking d'accepter la modification du contrat en ce sens, celle-ci est mal fondée à opposer la renonciation de la société locataire à contester les charges telles qu'elles lui sont réclamées ;

Considérant que la société Parisienne de parking demande la restitution du trop versé de charges depuis 1983 ; que la société Saint Antoine de Bearn lui oppose la prescription quinquennale de l'ancien article 2277 du code civil dans sa rédaction issue de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 et confirmée par la loi du 17 juin 2008 ;

Considérant que si le délai de prescription institué par la loi du 18 janvier 2005, repris par l'article 2224 dans sa rédaction issue de la loi du 17 juin 2008, s'applique aux instances introduites postérieurement, il commence à courir, s'agissant d'un délai qui réduit la durée de la prescription, du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans pouvoir excéder le délai prévu par la loi antérieure ainsi que le rappelle l'article 2222 du code civil en son second alinéa ; que, contrairement à ce que soutient la société Saint Antoine de Bearn, la prescription trentenaire pour la restitution d'un trop perçu ne résultait pas d'une jurisprudence mais de l'article 2262 du code civil dans sa rédaction antérieure à 2005 ;

que la demande introductive d'instance étant antérieure au 18 janvier 2010, c'est donc la prescription trentenaire qui continue de s'appliquer ;

Considérant, en revanche, qu'ainsi qu'il a été dit, la société Parisienne de parking ne peut prétendre n'avoir aucune charge à régler et établir un décompte additionnant toutes les charges réglées pour en demander la restitution intégrale ; qu'il convient, en conséquence, de désigner un expert qui aura pour mission, en comparant les charges remboursées avant la mise en copropriété de l'immeuble et les charges appelées postérieurement, de donner tous éléments permettant de faire le récapitulatif des charges effectivement dues par la locataire ; qu'il y a donc lieu de surseoir à statuer sur toutes les demandes.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement,

Reçoit la société Parisienne de parking en sa demande en restitution de charges locatives,

Avant dire-droit au fond sur les demandes :

Désigne Mme [I] [B]

[Adresse 2]

[Localité 5],

avec pour mission, les parties ayant été convoquées :

- de se faire communiquer tous documents et pièces utiles à l'accomplissement de sa mission,

- de fournir tous éléments utiles permettant de vérifier la nature et le montant des charges qui étaient remboursées par la locataire avant la mise en copropriété de l'immeuble et la nature et le montant des charges appelées auprès de la locataire après la mise en copropriété,

- de dire s'il existe un solde en faveur de la société Parisienne de parking et, dans l'affirmative, d'en indiquer le montant,

Dit que l'expert déposera son rapport avant le 5 décembre 2012,

Fixe à la somme de 10 000 € la provision à valoir sur la rémunération de l'expert, qui devra être consignée par la société Parisienne de parking au greffe de la cour d'appel de Paris avant le 15 juin 2012,

Dit que faute de consignation de la provision dans ce délai, la désignation de l'expert sera caduque,

Renvoie l'affaire à l'audience de la mise en état du 20 juin 2012 pour vérification de la consignation,

Sursoit à statuer et réserve les dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 10/16337
Date de la décision : 09/05/2012

Références :

Cour d'appel de Paris I3, arrêt n°10/16337 : Expertise


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-05-09;10.16337 ?
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