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09/05/2012 | FRANCE | N°10/06303

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 09 mai 2012, 10/06303


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRÊT DU 09 Mai 2012

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/06303



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Juin 2010 par le conseil de prud'hommes de LONGJUMEAU section Industrie RG n° 08/01018





APPELANT



Monsieur [Y] [O]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de M. [F] [V] (Délégué s

yndical ouvrier)





INTIMEE



SA [P] ET [G]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Fabienne FENART, avocat au barreau d'ESSONNE,

En présence de M. Philippe DUBOURG (Président du con...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRÊT DU 09 Mai 2012

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/06303

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Juin 2010 par le conseil de prud'hommes de LONGJUMEAU section Industrie RG n° 08/01018

APPELANT

Monsieur [Y] [O]

[Adresse 1]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de M. [F] [V] (Délégué syndical ouvrier)

INTIMEE

SA [P] ET [G]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Fabienne FENART, avocat au barreau d'ESSONNE,

En présence de M. Philippe DUBOURG (Président du conseil d'administration)

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 Mars 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente

Madame Anne-Marie DEKINDER, Conseillère

Madame Dominique LEFEBVRE-LIGNEUL, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mademoiselle Sandrine CAYRE, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente et par Mlle Sandrine CAYRE, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

M. [Y] [O] a été engagé par la société [P] ET [G] suivant un contrat à durée indéterminée du 17 mars 2000 prenant effet le 20, en qualité de chauffeur poids lourds moyennant une rémunération brute mensuelle qui s'élevait en dernier lieu à 1 965, 44 €, les relations contractuelles étant soumises à la convention collective nationale des travaux publics et l'entreprise occupant à titre habituel au moins onze salariés lors de la rupture du contrat de travail.

Le 14 avril 2008 il demandait à son employeur de l'inscrire à un stage FCOS «dans les plus brefs délais» et de respecter les dispositions de l'accord d'entreprise sur les 35 heures puis l'informait par courrier du 19 mai 2008 de son intention de démissionner avec effet au 20 juin 2008, compte tenu d'un préavis d'un mois, au motif qu'il n'avait jamais eu d'augmentation de salaire et que les heures effectuées réellement n'étaient pas prises en compte.

Le 3 novembre 2008, M. [Y] [O] a saisi le conseil de prud'hommes de Longjumeau, section industrie, qui, par jugement rendu le 11 juin 2010 en formation de départage, l'a débouté de l'ensemble de ses demandes en rejetant celle de la société [P] ET [G] formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La cour est saisie de l'appel de cette décision, interjeté le 20 juillet 2010 par M. [Y] [O].

Par conclusions développées à l'audience du 30 mars 2012, auxquelles il est référé expressément pour l'exposé des moyens, M. [Y] [O] demande à la cour :

* d'infirmer le jugement déféré,

* de requalifier sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* de condamner la société [P] ET [G] à lui verser les sommes suivantes :

- 14 430 € à titre de rappel d'heures supplémentaires sur cinq ans congés payés inclus,

- 11 792, 64 € au titre de la sanction pour travail dissimulé,

- 3 930 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 393 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur le préavis,

- 2 538 € à titre d'indemnité de licenciement,

- 23 585 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1 965, 44 € à titre de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure,

- 1 965, 44 € à titre de dommages-intérêts pour non respect de la visite médicale annuelle obligatoire,

- 240 € au titre des «bleus» et remboursement de visites médicales poids lourd et déplacements,

- 1 500 € à titre d'indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions visées par le greffier, reprises et soutenues oralement à l'audience du 20 mars 2012, auxquelles il est également fait référence pour l'exposé des moyens, la société [P] ET [G] demande à la cour :

* de confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Longjumeau le 11 juin 2010 en toutes ses dispositions,

* de débouter M.[O] de toutes ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE

Sur la demande de rappel des heures supplémentaires

Aux termes des dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail "En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié", étant observé qu'il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

Soutenant qu'il travaillait 45 heures par semaine alors qu'il était rémunéré sur une base de 151,67 heures par mois, M. [Y] [O] sollicite le paiement de la somme de 14 430 € comprenant les congés payés, au titre des 239 heures supplémentaires qu'il indique avoir effectuées chaque année de 2003 à 2008.

Sans produire aucun relevé des heures qu'il aurait effectuées, ni attestation ni tout autre document à l'appui de ses dires, se limitant à verser aux débats les copies de disques chrono-tachygraphes sans commentaires et inexploitables, il affirme qu'un chauffeur arrivé à 7 heures du matin doit, avant de «partir vers 7 h 20, 7 h 30 voire avant si nécessaire», vérifier les niveaux d'huile, eau, pneus, bouteille d'air pour le freinage et faire chauffer le moteur et que ce temps n'est pas enregistré sur le disque et que la fiche individuelle de gestion du temps de travail n'est jamais remise au salarié.

S'agissant du temps préalable au départ effectif, la société [P] ET [G] verse aux débats les attestations de M. [B] [G], employé de la société depuis le 8 septembre 1969, actuellement chef de transport qui explique :

* qu'il assure depuis 2006 l'entretien courant de tous les camions, qu'il est présent le matin au démarrage des véhicules et le soir à leur retour, que chaque jour le chauffeur en arrivant au dépôt insère le disque, met en route son camion, se rend en salle de repos récupérer sa feuille de route pour la journée et se rend sur le chantier,

* que le soir il fait le plein de son camion si nécessaire, se gare, ôte son disque et se rend au bureau pour rendre sa feuille de journée et prendre les instructions pour le lendemain,

* que les feuilles de présence sont disponibles et consultables à tout moment par l'ensemble du personnel dans le bureau de M. [K],

ainsi que celle de M. [L] [J], chauffeur ayant repris le camion de M. [O], qui précise que son camion ne nécessite pas de préchauffage le matin et que le temps démarrage (à peine 5 minutes) est comptabilisé sur le disque.

Concernant l'application de l'accord sur les 35 heures, selon le projet d'accord d'entreprise établi lors d'une réunion du 13 décembre 2001 les horaires des chauffeurs ont été fixés du lundi au jeudi de 7 h 15 à 12 h avec une pause de 45 minutes à prendre en fonction des temps de conduite et de 13 h à 16 h 45 avec une pause de 15 minutes et le vendredi même horaire avec un départ à 15 h 45 soit un temps effectif de travail de 36 h 30 par semaine.

L'accord complémentaire d'entreprise du 31 décembre 2001, accepté à l'unanimité par les salariés y compris M. [O] aux termes du procès verbal du personnel- référendum- du 20 décembre 2001, ayant annualisé le temps de travail avec des périodes de basse et de haute activité, prévoit au total 1591 heures annuelles réparties sur 215 jours travaillés, le temps de pause total d'une heure étant rémunéré bien que n'étant pas du temps de travail effectif.

La société [P] ET [G], qui produit la lettre de la direction régionale de l'équipement d'Ile de France du 6 octobre 2005 ayant procédé à l'analyse de 104 feuilles d'enregistrement pour la période du 6 au 19 juin 2005 portant sur l'activité des 11  onducteurs de l'entreprise à la suite du contrôle intervenu le 30 août 2005 sur le respect de l'application des dispositions de la réglementation sociale européenne dans les entreprises de transport routier, aux termes de laquelle aucune infraction n'a été relevée, a effectué un décompte précis du temps de présence de M. [O] à partir notamment de l'analyse des disques chrono tachygraphes de ce salarié mois par mois à partir du 1er janvier 2003 jusqu'au mois de juin 2008, établissant que ce salarié a été réglé de l'intégralité du travail accompli et qu'il n'effectuait pas, n'effectuait pas comme il le prétend, 45 heures par semaine.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, il convient de confirmer le jugement rendu le 11 juin 2010 par le conseil de prud'hommes de Longjumeau et de débouter M. [Y] [O] de l'ensemble de ses demandes faites au titre de rappel d'heures supplémentaires, de repos compensateur, de travail dissimulé et de violation de l'accord sur les 35 heures.

Sur la demande de visite annuelle obligatoire

Indiquant que « rien n'était mis en place par l'employeur » en contravention avec les dispositions de l'article R 4624-10 et R 4624-16 du code du travail, M. [Y] [O] sollicite le paiement de la somme de 1 965, 44 €.

Il convient de confirmer le jugement déféré ayant rejeté cette demande, la société [P] ET [G] ayant versé aux débats la fiche d'aptitude médicale établie le 24 janvier 2005 concernant M. [Y] [O] ainsi que les états nominatifs des salariés établis pour les années 2007 et 2008 par l'association paritaire de santé au travail établissant qu'elle a respecté les dispositions des articles sus visés.

Sur la fourniture de vêtements de protection

Se plaignant également du non respect des dispositions des articles R 4321-4 et R4323-95 du code du travail, M. [Y] [O] sollicite le paiement de la somme de 240 € correspondant à son préjudice ainsi évalué :

« 5 « bleus » pendant 8 ans = 40 « bleus » X 40€ = 160, 00 €

1 visite poids lourd avec déplacement : 80, 00 € »

Aux termes de l'article R.4321-4 du code du travail « l'employeur met à la disposition des travailleurs, en tant que de besoin, les équipements de protection individuelle appropriés et, lorsque le caractères particulièrement insalubre ou salissant des travaux l'exige, les vêtements de travail appropriés », l'article R.4323-95 prévoyant que ces équipements sont fournis gratuitement par l'employeur qui assure leur bon fonctionnement et leur maintien dans un état hygiénique satisfaisant par les entretiens, réparations et remplacements nécessaires.

L'ensemble de cette demande sera rejeté, M. [O] ne justifiant ni des frais exposés pour se rendre à une visite médicale ni de ce que la société [P] ET LES CARVES avait l'obligation de lui fournir des « bleus » pour assurer ses fonctions de chauffeur.

Sur la rupture du contrat de travail

Il convient de rappeler que la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail et que lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués le justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission.

Faisant valoir que sa démission était imputable à son employeur qui ne lui avait pas accordé d'augmentation de salaire, qui avait une attitude discriminatoire à son égard, qui ne lui réglait pas ses heures supplémentaires conformément à l'accord sur les 35 heures, qui ne lui avait pas permis d'effectuer une formation et qui n'avait pas respecté les dispositions ci-dessus rappelées concernant la visite médicale annuelle et la fourniture de vêtements de protection, M. [Y] [O] demande que sa démission notifiée à son employeur par lettre recommandée du 19 mai 2008 soit requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Les griefs tirés du non respect de l'accord des 35 heures, du défaut de paiement d'heures supplémentaires et de l'absence de visite médicale et de fourniture de «bleus » ci-dessus examinés et qui ne sont pas établis, ne peuvent constituer un manquement de l'employeur justifiant une requalification de la démission de M. [O] en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

S'agissant du non respect des dispositions concernant la formation de M. [O] la société [P] ET [G], qui justifie de sa carte professionnelle d'entrepreneur de travaux publics, verse aux débats l'attestation de présence en qualité de conducteur routier « valant » attestation de formation initiale minimale obligatoire établie le 29 juillet 2005 de M. [O], la copie du recours effectué par la société [P] ET [G] à la direction départementale de la sécurité publique ainsi que l'avis d'annulation du timbre amende de la contravention du 12 février 2007 ainsi que la confirmation de demande d'inscription au stage FCOS Marchandises fixé du 7 au 9 avril 2008 et le bon de commande accompagné d'un chèque de 419, 91 €.

Enfin, M. [O], qui se plaint d'un comportement discriminatoire de son employeur, ne verse aux débats aucun élément de fait susceptible de caractériser une inégalité de rémunération, étant observé qu'il a bénéficié d'augmentation de salaire.

Il convient, en conséquence de confirmer le jugement déféré ayant retenu que M. [O] avait « assumé pleinement sa décision de démissionner » et de le débouter de l'intégralité de ses demandes formées à ce titre.

Sur les frais et dépens

Eu égard à la situation financière respective des parties il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Les demandes formées à ce titre seront rejetées.

M. [Y] [O] sera condamné aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement rendu le 11 juin 2010 par le conseil de prud'hommes de Longjumeau en toutes ses dispositions,

Ajoutant,

Rejette toutes les demandes formées en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [Y] [O] aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 10/06303
Date de la décision : 09/05/2012

Références :

Cour d'appel de Paris K4, arrêt n°10/06303 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-05-09;10.06303 ?
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