RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 9
ARRÊT DU 09 Mai 2012
(n° 11, 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/06287
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Mars 2010 par le conseil de prud'hommes de PARIS section activités diverses - RG n° 09/06559
APPELANT
Monsieur [U] [R]
[Adresse 1]
[Localité 5]
comparant en personne, assisté de Me Laure SERFATI, avocat au barreau de PARIS, toque: C2348
INTIMÉE
SAS DS SECURITE PRIVEE
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Jean-Yves FELTESSE, avocat au barreau de PARIS, toque : K028
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 14 Mars 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Christine ROSTAND, Présidente
Madame Monique MAUMUS, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier : Monsieur Philippe ZIMERIS, lors des débats
ARRET :
- Contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Christine ROSTAND, Présidente et par Evelyne MUDRY, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
M. [R] a été embauché par la société Defor Sécurité en qualité d'agent d'accueil sur le chantier du [Adresse 4] le 31 décembre 2002.
Il a poursuivi son activité au sein de la société DES Sécurité à la suite de la reprise du marché par cette société aux termes d'un avenant en date du 1er juillet 2007 aux termes duquel était stipulé que 'M. [U] [R] exercera ses fonctions sur le site [Adresse 4]. Cependant compte-tenu de la nature de ses fonctions, M. [U] [R] rend (sic) l'engagement d'accepter tout changement de lieu de travail nécessité par l'intérêt du fonctionnement de l'entreprise sur le département de Paris et région Ile de France où la société exerce ou exercera ses activités.'.
Dans des circonstances sur lesquelles les parties sont contraires et qui seront explicitées ci-dessous, une procédure de licenciement a été engagée à l'encontre du salarié et par lettre du 23 février 2009 remise en main propre, il a été licencié pour faute grave.
Le même jour a été conclue une transaction entre les parties aux termes de laquelle il était versé à M. [R] :
- la somme de 1 917,69 € au titre du salaire du mois de février 2009 incluant l'indemnité compensatrice de congés payés,
- celle de 2 000 € à titre d'indemnité transactionnelle.
Le conseil de prud'hommes de Paris saisi par le salarié qui contestait la validité de cette transaction, par jugement du 9 mars 2010, l'a débouté de l'intégralité de ses demandes.
M. [R] a fait appel de ce jugement et aux termes de ses écritures visées par le greffier et soutenues oralement à l'audience du 14 mars 2012, demande à la cour :
- d'infirmer le jugement
et statuant à nouveau de :
- dire que la transaction signée le 23 février 2009 est nulle et de nul effet,
- dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse,
- condamner la société DS Sécurité à lui payer :
- 1 902,52 € à titre d'indemnité légale de licenciement,
- 3 000,54 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,
- 300,55 € de congés payés afférents,
- 36 000 € de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 1 500 € à titre de dommages intérêts pour non proposition du DIF,
- 4 500 € de dommages intérêts pour non proposition de la CRP,
- 1 500 € de dommages intérêts pour non proposition de priorité de réembauchage,
- 3 000 € de dommages intérêts pour violation de la priorité de réembauche,
- 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts.
La société DS Sécurité aux termes de ses écritures visées par le greffier et soutenues oralement à l'audience du 14 mars 2012, demande à la cour :
- de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a débouté M. [R] de toutes ses demandes,
statuant à nouveau,
- condamner M. [R] à lui payer la somme de 4 000 € à titre de dommages intérêts pour procédure abusive,
- dire, à titre subsidiaire que l'éventuel droit au DIF ne saurait être supérieur à la somme de 292,80 €,
- condamner M. [R] à lui payer la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
MOTIFS DE LA DECISION
M. [R] soutient que la transaction est nulle dès lors d'une part qu'aucune lettre de licenciement ne lui a été envoyée par lettre recommandée avec avis de réception et que la transaction a été signée le jour même de la remise en mains propres de la lettre de licenciement et que d'autre part, l'indemnité transactionnelle stipulée de 2 000 € est totalement dérisoire.
L'envoi de la lettre de licenciement par lettre recommandée avec avis de réception n'est qu'un moyen d'empêcher toute contestation sur la date du licenciement.
Cette modalité d'envoi permet d'établir la preuve de la date de licenciement mais son absence ne porte pas atteinte à la validité du licenciement dès lors que la preuve de la volonté de l'employeur de licencier et de l'information du salarié de ce licenciement est établi par d'autres moyens.
Tel est le cas, comme en l'espèce, de la remise en mains propres de la lettre de licenciement contre émargement par le salarié.
La transaction fait état de la procédure de licenciement, de ses motifs et plus précisément de la lettre de licenciement du 23 février 2009, ainsi que des discussions des parties pour mettre fin à leur différend.
Il se déduit de ces mentions que la conclusion de la transaction a été envisagée et mise en oeuvre postérieurement à la remise de la lettre de licenciement et qu'elle n'encourt donc pas la nullité en ce qu'elle serait antérieure au licenciement.
En ce qui concerne l'examen de son caractère dérisoire, il convient de relater les versions de chacune des parties sur le contexte de cette transaction.
M. [R] soutient que son employeur lui avait promis, s'il signait la transaction de le réengager 'sur une autre entreprise' et que cette promesse n'a pas été tenue.
La société intimée expose pour sa part qu'il est arrivé à M. [R] de s'endormir sur son lieu de travail, alors qu'il est dans une fonction de surveillance si bien que le propriétaire des lieux ne voulait plus de lui sur le chantier à partir de janvier 2009 ; qu'elle s'est alors proposée de l'affecter sur un autre chantier conformément à son contrat, mais que M.[R] a indiqué qu'il avait une proposition de stage informatique à l'étranger et qu'il devait faire une formation à cet effet, ce qui l'obligeait à quitter très rapidement l'entreprise; qu'il avait fait une demande de congé du 2 au 8 février 2009 pour préparer son départ; qu'il souhaitait qu'une solution transactionnelle soit rapidement trouvée et que c'est dans ces conditions qu'une procédure de convenance a été mise en place entre les parties quant à la rupture du contrat de travail ; qu'elle a indiqué devant le bureau de conciliation qu'elle acceptait de réembaucher M. [R] s'il y avait eu une méprise dans ses droits, ce que ce dernier a refusé.
Pour établir que la transaction est dérisoire, M. [R] prétend qu'il s'agit en réalité d'un licenciement pour motif économique déguisé, dès lors que le site sur lequel il travaillait ayant fermé fin janvier 2009, la société a souhaité se séparer de lui sans respecter pour autant la procédure pour motif économique.
Ces affirmations en l'absence de tout élément de nature à établir leur réalité sont dépourvues de toute force probante et sont totalement contraires avec la proposition faite par la société devant le bureau de jugement de le reprendre immédiatement dans ses effectifs, l'employeur soulignant en outre que l'entreprise ne souffre d'aucune difficulté économique.
Au vu de ces éléments, la version de l'employeur d'une 'procédure de convenance' permettant au salarié de quitter l'entreprise rapidement aux fins de bénéficier d'une formation apparaît fondée, la version du salarié ne présentant aucune cohérence et se heurtant radicalement à la proposition de son employeur de le reprendre.
En conséquence, la rupture des relations contractuelles au motif d'un refus de rejoindre un nouveau chantier, alors que le contrat comporte une clause de possibilité de changement de lieu de travail dont le salarié n'a pas contesté la validité, correspondait bien à un licenciement pour faute grave exclusif de toute indemnité légale de licenciement et de toute indemnité de préavis, de sorte que le paiement de la somme de 2 000 € dans le cadre d'une transaction, n'avait pas de caractère dérisoire.
M. [R] doit donc être débouté de toutes ses demandes à l'exception de celle au titre du DIF qu'il convient de fixer au vu du décompte produit par la société intimée à la somme de 292,80 €, le jugement du conseil de prud'hommes étant donc confirmé sauf en ce qui concerne cette prétention.
La procédure de l'appelant, mal fondée ne revêt toutefois pas les caractères d'une procédure abusive, de sorte que la demande de la société intimée en paiement de dommages intérêts sera rejetée, la décision du conseil de prud'hommes étant également confirmée de ce chef.
Des considérations tenant à l'équité commandent de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
- Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 9 mars 2010 sauf en ce qu'il a débouté M. [R] de toute demande au titre du DIF,
statuant à nouveau de ce chef,
- Condamne la SAS DS Sécurité Privée à payer à M. [R] la somme de 292,80 € au titre du DIF avec intérêts au taux légal à compter du 27 mai 2009,
- Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens d'appel.
LA GREFFIÈRE, LA PRESIDENTE,