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10/04/2012 | FRANCE | N°10/22395

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 10 avril 2012, 10/22395


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 10 AVRIL 2012
(no 122, 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 22395
Décision déférée à la Cour : sentence arbitrale du 15 octobre 2010- Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS-no 740/ 199910

DEMANDERESSE AU RECOURS

SELAS ALTEXIS 107, rue de Courcelles 75017 PARIS assistée de l'Association FARTHOUAT ASSELINEAU ET ASSOCIES (Me Vincent ASSELINEAU) (avocats au barreau de PARIS, toque : R130)



DÉFENDEUR AU RECOURS

Monsieur Olivier X... ...75007 PARIS assisté de Me Didier DALIN (avo...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 10 AVRIL 2012
(no 122, 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 22395
Décision déférée à la Cour : sentence arbitrale du 15 octobre 2010- Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS-no 740/ 199910

DEMANDERESSE AU RECOURS

SELAS ALTEXIS 107, rue de Courcelles 75017 PARIS assistée de l'Association FARTHOUAT ASSELINEAU ET ASSOCIES (Me Vincent ASSELINEAU) (avocats au barreau de PARIS, toque : R130)

DÉFENDEUR AU RECOURS

Monsieur Olivier X... ...75007 PARIS assisté de Me Didier DALIN (avocat au barreau de PARIS, toque : P0337)

COMPOSITION DE LA COUR :

Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 27 février 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre Madame Brigitte HORBETTE, Conseiller Madame Dominique GUEGUEN, Conseillère qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Noëlle KLEIN

ARRET :
- prononcé publiquement par Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.- signé par Monsieur François GRANDPIERRE, président et par Mme Noëlle KLEIN, greffier à qui la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

***************

La Selas Altexis, société d'avocats inscrite au Barreau de Paris et créée le 6 février 2004, spécialisée dans le conseil en matière fiscale, dans laquelle a exercé d'abord Mme Marylène Bonny B..., rejointe dès 2005 par M. Vincent B... et une collaboratrice salariée, a, du fait de son développement, proposé en Juin 2006 à un confrère, M. Olivier X..., de rejoindre ce cabinet.
M. X..., avocat au barreau de Paris depuis 1993, spécialisé en droit fiscal, réinscrit audit barreau en 2006 après avoir exercé en dernier lieu le poste de directeur du département fiscal au sein des sociétés Eurotunnel et Euro Disneyland, a, le 1er août 2006, signé avec le cabinet Altexis un contrat qualifié dans son préambule de " contrat de partenariat libéral ", pour une durée indéterminée, définissant les modalités d'une collaboration exclusive de tout lien de subordination, aux termes duquel M. X... s'est engagé à participer à temps complet aux activités de la société en lui réservant l'exclusivité de son activité professionnelle, avec la possibilité d'utiliser le titre d'associé et/ ou de " partner " notamment sur sa carte de visite et de siéger au comité des associés, sans avoir la qualité d'actionnaire de la société, pouvant simplement le devenir par priorité en cas d'augmentation du capital, et ne pouvant en aucun cas être conduit à participer aux pertes de la société.
Pendant la durée du contrat, les honoraires rémunérant M. X... ont été facturés et encaissés par la société, les parties étant convenues que ces honoraires seraient ensuite répartis entre elles selon les modalités énoncées à l'article 11 du contrat, laquelle clause prévoit que M. X... participe aux charges du cabinet en contrepartie de la mise à disposition par celle-ci des services et moyens détaillés à l'article 4 et fait mention d'un barème précisant le mode de répartition des honoraires ainsi que le montant de sa contribution minimale aux charges sous la forme d'un forfait mensuel de 3000 € (soit annuel de 36 000 €) et, par ailleurs, M. X... acquitte directement ses charges à caractère personnel, tels que frais de représentation, cotisations sociales et professionnelles, taxe professionnelle.
Il est prévu encore que le barème figurant à l'article 11 sera révisé d'un commun accord si les conditions d'exploitation du cabinet changeaient de manière significative, c'est à dire dans le cas d'une modification de plus de 50 % des coûts d'exploitation.
En octobre 2009, la société Altexis a soumis à M. X... un projet d'avenant au contrat modifiant les conditions financières du contrat, fixant de manière forfaitaire à 214 000 € le montant des honoraires qui lui sont rétrocédés pour la période 2006-2008, modifiant le mode de répartition des honoraires à compter du 1er Janvier 2009 en substituant au barème de l'article 11 un pourcentage fixe de rétrocession fixé à 55 % sous la condition que M. X... réalise sur les dossiers qu'il traite un montant minimum de facturation de 320 000 € HT par an, modification contractuelle qu'il a refusée dans un courrier électronique du 25 octobre 2009, dans lequel il a manifesté sa décision de mettre fin au contrat, ce dont la société Altexis lui a donné acte le 29 octobre 2009 mais en invoquant l'existence d'une " impasse juridique ".
A la fin de 2009, s'estimant placé en situation d'asphyxie financière dans la mesure où la société Altexis contrôlait le montant de sa rémunération et décidait de manière unilatérale de son versement, M. X..., par lettre du 18 décembre 2009, a demandé l'organisation de son départ, demande réitérée les 17 janvier, 3 février et 5 mars 2010, empruntant la somme de 100 000 € le 24 décembre 2009 pour constituer son propre cabinet et a considéré que la société Altexis qui n'avait pas exécuté de bonne foi ses engagements contractuels a engagé sa responsabilité à son égard, tant au titre de la rupture que dans les obligations postérieures, lui restant en conséquence redevable des sommes de 142 780, 60 € au titre de la stricte exécution du contrat, de 25 000 € au titre de la réparation de son préjudice financier, de 25000 € au titre de son préjudice personnel et moral, et de 30 000 € au titre de son préjudice professionnel.
Les parties ayant une interprétation divergente de l'article 11susvisé ne sont pas parvenues à un accord, la rupture du contrat est intervenue, sans que M. X... n'ait effectué le préavis de 6 mois contractuellement prévu.
C'est dans ce contexte que M. X... a saisi par requête M. Le Bâtonnier du litige et les parties ont signé le 29 mars 2010 un acte de mission, selon lequel l'arbitre statue en droit et à charge d'appel.
Par sentence arbitrale en date du 15 octobre 2010, M. Chiffaut D..., agissant en qualité d'arbitre unique désigné par M. le Bâtonnier du Barreau de Paris, a condamné la Selas Altexis à payer à M. Olivier X... la somme de 125 000 € HT à titre de reversement de la fraction lui revenant sur le montant des honoraires encaissés pour son compte en application du contrat de partenariat libéral ayant existé entre les parties, la somme de 5000 € à titre de dommages et intérêts pour la réparation du préjudice résultant du défaut de reversement des sommes lui revenant, liquidé à la somme de 5000 € HT outre la TVA au taux de 19, 60 % le montant des frais d'arbitrage répartis par moitié entre les parties, déboutées de toutes autres demandes, dit n'y avoir lieu à paiement d'une quelconque indemnité au titre de frais irrépétibles, laissé à chaque partie la charge de ses dépens.
CELA ETANT EXPOSE, la COUR :
Vu l'appel interjeté le 12 Novembre 2010 par la Selas Altexis,
Vu les conclusions déposées le 16 mai 2011 et soutenues par l'appelante qui demande, au visa des articles 1134 et 1156 du code civil, l'infirmation de la sentence sauf en ses dispositions ayant débouté M. X... de certaines de ses demandes, statuant à nouveau, faisant application de la convention de partenariat libéral et en particulier de son article 11, aux constats que la société Altexis a exécuté de bonne foi ses obligations contractuelles, que M. X... est à l'origine de la rupture du contrat qu'il n'a pas exécuté de bonne foi, en particulier de ses manquements pour *absence de facturation à la fin de l'année 2009 en corrélation avec les diligences accomplies grâce aux moyens mis à sa disposition par Altexis, *émission d'avoirs injustifiés à l'adresse des clients de la société Altexis concomitamment à son départ sans en informer Altexis, *non respect du délai de préavis prévu au contrat de partenariat libéral, la condamnation de M. X... à lui payer, avec intérêts de droit, les sommes de * 28212 € au titre de la stricte exécution de l'article 11 du contrat sur la période de septembre 2006 à octobre 2009 et ce par application du barème révisé, le seuil de déclenchement contractuel de 50 % ayant été atteint et M. X...ayant atteint un chiffre d'affaires de 335 000 € en 2009, * 28 312 € correspondant au barème révisé de participation aux charges calculé sur la base du chiffre d'affaires révisé réalisé en 2009 par M. X..., * 48 000 € correspondant à la mise à disposition des moyens par Altexis du 1er Janvier 2010 au 25 avril 2010, date de la fin du préavis, * 200 000 € au titre du préjudice commercial subi par Altexis du fait du départ brutal de M. X..., ainsi que la somme de 15 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre le paiement des dépens en ce compris les frais d'arbitrage et les éventuels frais d'expertise.

Vu les conclusions déposées le 21 février 2012 et soutenues par M. X... qui demande la confirmation de la sentence arbitrale sauf en ses dispositions l'ayant débouté de certaines demandes, statuant à nouveau, la condamnation de la société Altexis à lui payer les sommes suivantes :-144 932 € au titre de l'application du barème de l'article 11 du contrat de partenariat libéral,-25 000 € au titre de son préjudice financier, à concurrence de 8705 € au titre de la souscription d'un emprunt pour se réinstaller, incluant 6669 € d'intérêts financiers, 1536 € d'assurances et 500 € de frais de dossier et de 16295 € au titre de l'amortissement des équipements et documentation conservés par la Société Altexis, (dont 4500 € de mobilier, 1500 € de matériel informatique et 10 295 € de documentation), compris dans la somme fixe et forfaitaire de 36000 € ceci sur une période de 3 ans,-25000 € au titre de son préjudice personnel et moral,-30 000 € au titre de son préjudice professionnel, la réinstallation de M. X... ayant eu une incidence sur son activité professionnelle entre novembre 2009 et février 2010, à hauteur de 7500 € par mois, outre la somme de 15000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que le paiement des dépens, en ce compris les frais d'arbitrage et les éventuels frais d'expertise.

SUR CE :
Considérant que la société Altexis, appelante, fait valoir qu'elle était prête à verser à M. X... le montant des honoraires lui revenant à condition qu'un accord rapide intervienne sur le montant de la rétrocession, lui reprochant un manquement à l'obligation de bonne foi et un refus abusif de négocier ; qu'elle analyse le contrat signé entre les parties en une convention sui generis communément pratiquée sous le vocable de contrat " of counsel ", M. X... n'étant ni son collaborateur, ni son associé, ayant une totale liberté pour développer sa clientèle, bénéficiant des moyens du cabinet mais participant aux charges d'exploitation de la structure, sans participation en revanche aux dépenses d'investissement, ajoutant que cette convention était adéquate pour un avocat comme lui sans clientèle, ne souhaitant pas prendre les risques financiers liés à une installation professionnelle, tout en entendant bénéficier du dispositif d'aide aux chômeurs créateurs d'entreprise (ACCRE) ce qui impliquait qu'il exerce sa nouvelle activité dans le cadre du statut d'entrepreneur libéral, raison pour laquelle M. X... n'a pas déterminé le montant des honoraires devant lui être rétrocédés pour les années 2006, 2007 et 2008 pour ne pas perdre le bénéfice des indemnités allouées ;
Considérant que la Selas Altexis, appelante, revendique donc l'existence entre les parties d'un contrat de partenariat, satisfaisant au regard du but poursuivi par les parties, exposant notamment que M. X... compte tenu de son profil, de son expérience et de son âge, ne souhaitait pas conclure un contrat de collaboration libérale, n'ayant par ailleurs ni la clientèle lui permettant d'accéder à une association au sein d'un cabinet d'avocats, ni les moyens financiers nécessaires pour s'installer ; qu'il était à la recherche d'un contrat " sur mesure ", acceptant d'être rémunéré, éventuellement de façon différée, sur la base de rétrocessions d'honoraires en fonction du chiffre d'affaires généré ; que de son côté, en croissance, elle voyait en lui un avocat expérimenté, apte à traiter de façon autonome les dossiers du cabinet et à développer une clientèle propre, avec la possibilité de partager les charges de fonctionnement du cabinet, listées dans le contrat, entre trois avocats confirmés, d'où l'insertion d'une clause de révision des charges en cas de changement significatif des conditions d'exploitation du cabinet, offrant en outre à M. X... la possibilité de devenir associé dès qu'il disposerait d'une clientèle suffisante ; que toute l'économie du contrat serait remise en cause et contraire à l'intention des parties dans le cas d'un remplacement de la répartition proportionnelle des charges en fonction du chiffre d'affaires généré par un loyer forfaitaire, d'autant que les parties avaient négocié les termes dudit contrat ;
Considérant que l'appelante, sur l'exécution de ce contrat, fait valoir qu'elle a effectivement orienté les nouveaux clients prioritairement vers l'intimé, dont les honoraires facturés ont connu une forte évolution entre 2006 et 2009, que la première facture d'honoraires est intervenue le 8 octobre 2008, (mais ce volontairement dès lors que M. X... ne souhaitait pas facturer d'honoraires en 2006 et 2007 pour percevoir ses allocations ACRE de créateur d'entreprise), que de janvier 2008 à octobre 2009, il a perçu 199 000 € soit une moyenne mensuelle de 9045 €, qu'il a pu épargner, que du côté des charges de fonctionnement, peu élevées lors de la signature du contrat, Altexis a pris à bail de nouveaux locaux à compter d'août 2007, le montant total des charges, entre 2006 et 2009, passant de 546 494 € à 1 185 574 €, qu'ainsi le montant sur lequel la quote-part de 22 % devait s'appliquer est passé de 162 242 € en 2006 à 468 729 € en 2009 ; que M. X..., qui participait aux réunions hebdomadaires d'associés, n'ignorait pas cette hausse et bénéficiait, sur tous les points à l'ordre du jour, y compris pour les questions financières, d'un droit de veto, exercé en juillet 2009 pour manifester son désaccord au projet de déménagement d'Altexis vers des locaux plus adaptés mais engendrant une légère augmentation des charges ; qu'il n'était donc nullement en retrait, que ses honoraires sont passé de 0 à 241 138 € en l'espace de 28 mois, équivalent à un tiers du total des honoraires encaissés par le cabinet ; qu'elle soutient donc que l'article 11 du contrat prévoit un seuil de déclenchement lié à l'évolution de la totalité des coûts d'exploitation du cabinet, à l'exclusion des salaires des professionnels salariés ; que dès 2008, les charges avaient augmenté de façon significative, qu'une révision nécessaire, sur laquelle l'intimé n'avait pas manifesté son désaccord se contentant de reporter à plus tard la discussion, avait été régulièrement évoquée par Mme Marylène Bonny B... ; que finalement en octobre, il lui est apparu que M. X... usait d'une attitude tactique pour se soustraire à une révision, d'où le projet d'avenant qui lui a été adressé et qui n'a reçu qu'une réponse inacceptable, afin de susciter un refus de la part d'Altexis, l'intimé offrant seulement de payer une somme forfaitaire supplémentaire mensuelle de 1000 € puis, dénonçant le contrat ; qu'elle soutient que l'intimé n'a pas respecté de bonne foi son engagement ni l'intention commune des parties ; que lors de la rupture, elle a informé M. X... de la nécessité de respecter un préavis de 6 mois, conformément à l'article 13 du contrat mais que l'intimé est parti avant, lui indiquant aux termes d'un courrier daté du 15 décembre 2009 son intention de :- facturer les clients directement (et non sous l'en-tête d'Altexis)- continuer à bénéficier des locaux-s'acquitter de la charge mensuelle de 3000 €, (en vertu de l'article 4 du contrat) ;

Considérant que l'appelante invoque encore les agissements fautifs de M. X... après la dénonciation du contrat, pour avoir, au moment de son départ, émis plusieurs avoirs sur factures et demandé au prestataire informatique de procéder à une extraction confidentielle de certains dossiers clients, ainsi que pour avoir adressé des courriers recommandés à la société Altexis pour dénoncer son comportement abusif en sachant qu'ils seraient ouverts par son secrétariat, outre le non-respect du préavis contractuel ; qu'elle soutient n'avoir de son côté commis aucune faute, conteste le bien fondé de toutes les demandes financières de M. X..., en particulier celles formées au titre des préjudices personnel, moral et professionnel dont il a fait état, la rupture du contrat étant imputable à l'intimé et qu'elle demande l'application des dispositions de la convention de partenariat libéral, en particulier de son article 11, d'où ses demandes reconventionnelles ;
Considérant que l'appelante reproche en conséquence à la sentence déférée d'avoir considéré à tort qu'aucune obligation de négociation ne pesait sur les parties, l'article 11 du contrat du 1er Août 2006 étant seul applicable, de l'avoir condamnée à payer des dommages et intérêts de 5000 € au titre de la réparation du préjudice résultant du défaut de reversement des honoraires revenant à l'intimé à compter de novembre 2009, et d'avoir admis l'existence d'un accord sur le principe d'une rupture anticipée, sans retenir à l'encontre de M. X... le non respect du délai de préavis, ni les manquements de ce dernier, en particulier quant aux avoirs émis que l'arbitre a considérés comme sans incidence pour elle, " qui a la possibilité de poursuivre le paiement de l'intégralité des sommes facturées " ; qu'elle conteste, insiste sur l'absence de facturation qui lui ait été soumise et également sur l'absence de la production d'une note d'honoraires correspondant au montant réclamé, indispensable au plan comptable, alors que le contrat, s'il prévoit les modalités de calcul et de répartition des honoraires, ne fait pas référence à la date de leur paiement, ce qui exclut que l'intimé puisse se prévaloir d'un préjudice pour défaut de paiement des honoraires ;
Considérant que M. X..., intimé, soutient pour sa part avoir été confronté à une modification unilatérale et rétroactive par la société Altexis et au seul avantage de cette dernière, du contrat signé, entraînant dans ce cas pour lui des charges mensuelles de 10 796 € sur la période de septembre 2006 à octobre 2009, au lieu du montant résultant de l'application du contrat, soit un montant mensuel de 5173 € ; qu'il précise que le bureau qu'il occupait est actuellement loué pour un montant mensuel de 1500 € avec des services annexes (salle de réunion, EDF, téléphone, photocopieurs, etc) ; qu'ainsi une telle modification lui aurait fait supporter une très grande part des charges fixes du cabinet Altexis dans lequel il n'était pas associé et n'avait pas vocation à le devenir, ne décidant pas, au surplus, du montant de ces charges ; qu'en raison de son refus de signer l'avenant ainsi pensé, la société Altexis lui a refusé le paiement de ses rétrocessions d'honoraires, ce qui, quoique l'appelante s'en défende, ressort très clairement des termes du courrier du 4 novembre 2009 et lui a réclamé de surcroît un complément de charges de 28 212 € ;
Considérant que l'intimé fait valoir que lors de la négociation du contrat du 1er août 2006, il ne lui a jamais été indiqué que le montant forfaitaire annuel de 36 000 € correspondait à 22 % des charges de 2005 du cabinet Altexis ; que le mail de M. Vincent B... du 26 juin 2006 décrit et chiffre avec précision les services inclus dans le forfait annuel de 36000 € et propose une allocation du chiffre d'affaires entre 36000 € et 400 000 € ; que le forfait est extrêmement détaillé mais simple ; qu'il n'a pas été fait état d'un pourcentage de frais pour justifier les frais fixes et forfaitaires, que tel n'était pas l'esprit de l'accord, qu'il n'était en effet pas un associé ; que le contrat lui a été présenté comme un contrat type, signé avec tous les associés présents, à l'époque M. Vincent B..., et futurs ; que le mail de M. Vincent B... du 26 juin 2006 décrit et chiffre avec précision les services inclus dans le forfait annuel de 36000 € et propose une allocation du chiffre d'affaires entre 36000 € et 400 000 € ;
Considérant que l'intimé s'appuie sur les termes de la clause de révision, l'article 11 précisant " dans l'hypothèse où les conditions d'exploitation du cabinet changeraient de façon significative, ces premiers 36000 € seraient revus d'un commun accord. Par changement significatif, il faut entendre une modification de plus de 50 % des coûts d'exploitation du cabinet hors salaires des professionnels salariés... ", la modification ne comprenant que les moyens mis à la disposition de l'intimé, c'est à dire que seuls les coûts des services listés dans l'article 4 devraient être pris en considération dans le calcul du seuil de 50 % ; or ces moyens sont restés stables ; que l'intimé considère que les négociations entreprises en octobre 2009 n'ont donc pas été initiées sur la base de l'article 11 mais en réalité à la demande d'Altexis ; qu'aucun accord n'a été trouvé ; que d'ailleurs la clientèle générée par M. X... était développée hors Altexis ; que l'intimé avait seulement concédé une participation supplémentaire aux frais fixes forfaitaire de 1000 € par mois, proposition d'abord acceptée le 14 octobre 2009, mais Altexis est revenue sur cet accord en proposant l'avenant du 25 octobre 2009, ne reflétant pas les discussions, ce qui démontre que le refus abusif de négocier qui lui est imputé est, factuellement, mensonger ;

Considérant que l'intimé explicite ses principaux motifs de refus puisque, selon l'avenant proposé, :- il devrait alors participer aux charges du cabinet pour un montant minimum de 144 000 € par an, soit 12000 € par mois, en plus de ses cotisations personnelles,- le chiffre de 320 000 € HT de chiffre d'affaires minimum sur l'année 2009 est totalement irréaliste dès lors que les collaborateurs du cabinet ont consacré moins de 10 % de leur temps sur ses dossiers et qu'il ne peut, par sa seule activité, atteindre ce résultat,- le statut de " of counsel " invoqué par la société est incompatible avec la mise à disposition des moyens du cabinet et d'un bureau pour un coût représentant jusqu'à 12000 € par mois.

Considérant que dans la sentence déférée, l'arbitre n'a pas envisagé de tenter de définir la nature juridique des relations contractuelles ayant existé entre les parties, mais s'est attaché à apprécier les conditions dans lesquelles le contrat dit " contrat de partenariat libéral " a été exécuté et résilié, position qui doit être pleinement approuvée dès lors qu'il observe, pertinemment, que la validité dudit contrat n'est contestée par aucune des parties ; que l'arbitre s'est ensuite attaché à la rédaction des clauses dudit contrat et notamment à celle de l'article 11 du contrat ;
Considérant que l'article 4 du contrat, intitulé " Moyens mis à la disposition de Maître Olivier X...", dispose qu'Altexis met ainsi à la disposition de Me Olivier X...sans restriction l'ensemble des moyens du cabinet et notamment :- informatique-bureautique,... selon ensuite une liste détaillée en 14 rubriques, ainsi qu'un bureau... ;

Considérant que l'article 11 du contrat, intitulé " Honoraires ", dans les trois premiers alinéas, en prévoit les modalités d'allocation entre Altexis et M. X..., selon un barème comportant des taux différents par tranches, la première tranche de 36000 € étant acquise en totalité à Altexis, puis, dans un quatrième alinéa dispose que : " Les premiers 36000 € correspondant à la quote-part forfaitaire de l'ensemble des moyens du cabinet mis à la disposition de Maître Olivier X...seront révisés annuellement du montant de l'inflation. Dans l'hypothèse où les conditions d'exploitation du cabinet changeraient de façon significative, ces premiers 36 000 € seraient revus d'un commun accord. Par changement significatif, il faut entendre une modification de plus de 50 % des coûts d'exploitation du cabinet hors salaires des professionnels salariés. " ;

Considérant que l'arbitre a justement considéré que le contrat ne fait pas référence à une répartition des charges d'exploitation du cabinet selon un pourcentage fixe mais se réfère uniquement à l'application du barème mentionné sous l'article 11 ; qu'il observe encore que la clause n'est pas ambigüe et exprime la commune intention des parties ; que dès lors, c'est par un raisonnement non critiquable qu'il poursuit en observant que la société Altexis n'est pas fondée à vouloir appliquer une quote-part de charges estimée par elle à environ 22 % du total des charges, prétention sans lien avec le contrat ; qu'en effet, il convient selon l'arbitre de se référer, toujours à l'article 11, aux stipulations suivantes selon lesquelles, " en cas de changement significatif des conditions d'exploitation, soit de plus de 50 % des coûts d'exploitation du cabinet hors salaires des professionnels salariés, il sera possible de revoir la quote-part forfaitaire de 36 000 € mais dans cette hypothèse, il faudra, outre le constat de ce changement significatif des conditions d'exploitation, un accord, c'est à dire un accord des parties pour modifier la répartition des honoraires et définir un nouveau barème ;
Considérant que la cour ne peut qu'approuver cette analyse, de laquelle il se déduit nécessairement que c'est la société Altexis qui a tenté de modifier unilatéralement les modalités de répartition des honoraires et qu'elle ne peut dès lors sérieusement soutenir que le refus de négocier de son co-contractant aurait été fautif ;
Considérant que les longs développements de l'appelante, sus-rappelés, relatifs essentiellement à l'économie du contrat, appréciée au demeurant de son point de vue, n'ont donc aucune réelle pertinence ni utilité dès lors que la survenance à un moment donné du seuil de déclenchement de la révision du barème, si elle ouvrait effectivement la possibilité de négociations, ne pouvait en aucune manière modifier les droits et obligations des cocontractants tels que librement fixés lors de la formation du contrat ;
Considérant que les négociations n'ont pas abouti, que M. X... ne saurait se le voir reprocher, qu'il a été contraint de mettre fin au contrat devant le refus de la société Altexis de respecter ses obligations ; qu'en effet, dans le courrier du 4 novembre 2009, Altexis lui indique " Comme je te l'ai déjà indiqué, notre impossibilité de trouver un accord nous met dans une impasse juridique qui t'interdit en théorie de solliciter une rétrocession d'honoraires et qui nous interdit de te la régler " ;
Considérant que sur la rupture du contrat et le compte de répartition des honoraires, les parties ne font que reprendre, sans y ajouter d'argumentation nouvelle ou déterminante, les prétentions qu'elles ont développées devant l'arbitre qui y a répondu par des motifs pertinents que la cour fait siens ; qu'en effet, chaque partie pouvait librement décider de rompre le contrat à tout moment, sous réserve du respect d'un préavis de 6 mois ; qu'il ressort des pièces produites, notamment de la lettre du 29 octobre 2009 (pièce 17 de l'intimé) que la société Altexis a clairement pris acte en l'acceptant de la proposition de M. X... de mettre fin au contrat de manière anticipée, pour la date du lundi 26 octobre 2009, indiquant " j'ai pris bonne note de ta décision " et " conformément aux dispositions de l'article 13 précité ce délai peut être réduit d'un commun accord. A cet égard nous sommes convenus qu'une rupture anticipée serait souhaitable " ; qu'ainsi un accord est intervenu sur le principe d'une rupture anticipée, ce qui exclut que l'appelante puisse imputer à faute à M. X... de ne pas avoir respecté le préavis ; que de même l'arbitre a rejeté les autres griefs invoqués par l'appelante notamment celui relatif à des avoirs injustifiés, en faveur de clients et pour des factures déjà émises, à propos desquels l'appelante accuse M. X... d'avoir cherché à bloquer l'encaissement de ces factures, non seulement du fait que ces avoirs étaient limités à 4 clients non enregistrés en comptabilité mais encore de la liberté dont disposait l'intimé, non associé, pour négocier et fixer le montant des honoraires facturés par lui à ses clients ; que s'agissant du montant de rétrocessions d'honoraires qui est dû à l'intimé, chiffré dans ses dernières écritures à la somme de 144 932 €, le calcul effectué par l'intimé n'est pas utilement contesté et sera retenu, la sentence étant en conséquence infirmée du chef de ce seul quantum ;
Considérant que s'agissant des demandes indemnitaires formées respectivement par chacune des parties, la sentence n'est pas critiquable dans l'appréciation qu'elle porte sur les obligations respectives des parties vis à vis de la clientèle et sera approuvée en ce qu'elle n'accorde de dommages et intérêts qu'à M. X..., dont il a été ci-dessus constaté qu'il a subi un préjudice à la fois financier et personnel certain en raison de l'attitude fautive de la société dans l'exécution du contrat pour ne lui avoir pas versé la fraction des honoraires lui revenant ; que pour autant il n'établit pas avoir subi de préjudice moral et professionnel indemnisable ; que de son côté, la société appelante ne démontre pas davantage avoir subi un préjudice indemnisable ; que la sentence sera confirmée en conséquence en toutes ses autres dispositions ;
Considérant que l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une quelconque des parties ; que chacune d'elles conservera la charge de ses dépens d'appel ;
PAR CES MOTIFS :
Infirme la sentence déférée uniquement sur le quantum de la condamnation prononcée à l'encontre de la Selas Altexis au titre de la fraction des honoraires due à M. X...,
Statuant à nouveau quant à ce :
Condamne la Selas Altexis à payer à M. Olivier X... la somme de 144 932 € au titre du versement de la fraction des honoraires lui revenant sur le montant des honoraires encaissés pour son compte en application du contrat de partenariat libéral ayant existé entre les parties,
Confirme la sentence déférée pour le surplus de ses dispositions,
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
Dit n'y avoir lieu à application au profit de l'une des parties des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 10/22395
Date de la décision : 10/04/2012
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2012-04-10;10.22395 ?
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