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20/03/2012 | FRANCE | N°10/06179

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 20 mars 2012, 10/06179


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 20 Mars 2012

(n° 12 , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/06179



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Juin 2010 par le conseil de prud'hommes de MELUN section encadrement RG n° 09/00461





APPELANT

Monsieur [B] [V]

[Adresse 3]

[Localité 4]

comparant en personne, assisté de Me Stéphane FRIEDMANN, avocat au barr

eau de PARIS, toque : P0425







INTIMÉE

SAS EMPREINTE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Frédérique REA-SABATIER, avocat au barreau de MONTPELLIER subs...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 20 Mars 2012

(n° 12 , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/06179

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 29 Juin 2010 par le conseil de prud'hommes de MELUN section encadrement RG n° 09/00461

APPELANT

Monsieur [B] [V]

[Adresse 3]

[Localité 4]

comparant en personne, assisté de Me Stéphane FRIEDMANN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0425

INTIMÉE

SAS EMPREINTE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Frédérique REA-SABATIER, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Michel ISSERT, avocat au barreau de MONTPELLIER

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Février 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Brigitte BOITAUD, Présidente, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Brigitte BOITAUD, président

Madame Marie-Aleth TRAPET, conseiller

Madame Catherine COSSON, conseiller

Greffier : Monsieur Polycarpe GARCIA, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Madame Brigitte BOITAUD, Présidente

- signé par Madame Brigitte BOITAUD, Présidente, et par Monsieur Polycarpe GARCIA, greffier présent lors du prononcé.

Monsieur [B] [V] engagé à compter du 1er août 1995 en qualité de VRP Multicartes par la société EMPREINTE, spécialisée dans la corsetterie et les maillots de bains grande taille, exclusivement rémunéré à la commission, affecté au secteur 75 concédé en exclusivité, à l'exclusion des grands magasins suivants: Galeries Lafayette Haussman, Samaritaine, Bon Marché et Printemps Haussman, a été licencié par lettre en date du 12 février 2008 au motif économique énoncé suivant:

Notre société pour des raisons économiques et de gestion impérieuse ne peut plus maintenir la prospection du département '75" par un VRP Multicarte et la prospection des grands magasins par la direction.

Pour sauvegarder la compétitivité de notre entreprise , nous avons décidé de remplacer le poste de VRP Multicarte par un poste de Responsable des ventes chargé de l'animation, du suivi et de la prospection de toute notre clientèle de détaillants et de grands magasins sur [Localité 5] et province.

Nous vous avons proposé en priorité de devenir Responsable des ventes avec un statut cadre. Vous avez refusé cette proposition par courrier...nous n'avons d'autres alternatives que de supprimer votre poste de travail (...)

Par jugement du 29 juin 2010 le conseil de prud'hommes de Melun a débouté M. [V] de toutes ses demandes.

M. [V] a relevé appel de cette décision.

Pour les prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux conclusions visées par le greffier et reprises oralement par les parties à l'audience des débats.

* *

*

Sur le bien fondé du licenciement

La société EMPREINTE explique que son activité de fabrication de corsetterie et maillots de bains grands modèles relève d'un secteur très spécialisé; que ni son chiffre d'affaires ni ses résultats ne lui permettaient d'assurer sa pérennité face à ses concurrents; qu'elle est d'autant plus vulnérable qu'elle ne fabrique qu'une seule catégorie de produits à destination des poitrines généreuses ; que le secteur de [Localité 5] s'est appauvri en nombre de clients détaillants multi marques au profit des grands magasins qui traitent via leur directeur de centrale d'achats; que les acheteuses en grands magasins réclament une présence accrue des fournisseurs; que l'activité des grands magasins inclut le suivi et l'animation des démonstratrices; qu'il était devenu indispensable d'assurer une présence accrue sur les stands des grands magasins d'où la création d'un poste à temps complet de responsable de ventes; qu'aucune économie n'a été réalisée du fait de la création de ce poste à temps complet plus coûteux que le poste à temps partiel d'un VRP Multicartes; que cette réorganisation était indispensable pour limiter les effets de la crise du textile; que le comité d'entreprise a donné un avis favorable à cette transformation d'emploi offerte à l'intéressé qui l'a refusée;

Considérant que si la cause économique du licenciement est celle de la nécessité d'une sauvegarde de la compétitivité de la société, c'est néanmoins à juste titre que M. [V] fait observer que le chiffre d'affaires réalisé par la société EMPREINTE depuis le 31 décembre 2005 n'a cessé d'augmenter hormis à la fin de l'exercice 2009, soit l'exercice postérieur au licenciement de l'intéressé; que ce chiffre d'affaires est compris entre 12 000 000 et 14 900 000 € avec un bénéfice passant de 780 000 € à 1 255 000 € ; que ces chiffres témoignent de la bonne santé économique de la société; qu'il appartient à la société EMPREINTE d'établir le risque économique encouru à maintenir l'emploi de M. [V] comme VRP multicartes;

Or considérant que la société EMPREINTE se borne à faire état de motifs d'ordre général tenant à la situation du marché et à son environnement concurrentiel; qu'elle ne produit pas d'éléments propres à caractériser l'existence d'une réelle menace pesant sur sa compétitivité; qu'en particulier la société EMPREINTE ne produit aucune donnée chiffrée permettant de retenir qu'une menace pesait sur sa compétitivité dans un futur proche du licenciement; que les seuls chiffres qu'elle produit, propres à la seule activité auprès des clients détaillants, ne rendent pas compte de la menace pesant sur sa compétitivité laquelle doit résulter de l'ensemble de son activité, grands magasins inclus; que la société EMPREINTE a seulement tenté d'améliorer sa rentabilité sur les grands magasins parisiens; qu'un tel objectif ne peut justifier le licenciement économique d'un salarié;

Considérant qu'en application de l'article L1235-3 du code du travail qu'à la date du licenciement M. [V] percevait une rémunération mensuelle brute moyenne de 2658,77 €, était âgé de 45 ans et bénéficiait d'une ancienneté de 13 années au sein de l'entreprise; qu'il a perdu 30% de sa rémunération qu'il n'a toujours pas récupérée; qu'il convient d'évaluer à la somme de 30 000 € , le montant des dommages et intérêts alloués au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse;

Sur le complément d'indemnité de préavis

Considérant qu'il n'est pas contesté que la collection d'hiver est présentée de fin janvier à fin avril pour être livrée de juillet à fin septembre; que si M. [V] avait effectué son préavis, il aurait été commissionné sur les livraisons effectuées à compter du mois de juillet; que les commissions qui ont été réglées à M. [V] pendant son préavis correspondent à celles qui étaient déjà dues à M. [V] sur un travail précédent; qu'en l'absence de justificatif fourni par la société EMPREINTE sur le montant des ventes réalisés après présentation de la collection d'hiver sur son secteur pendant la période de préavis qu'il aurait effectuée, M. [V] est bien fondé à se référer au montant des commissions perçues l'année précédente, soit la somme, non subsidiairement discutée en son montant, de 3953 € ;

Sur les commissions de retour sur échantillonnages

Considérant qu'il est constant qu'au titre des commissions de retour sur échantillonnage pour la période 2007, M. [V] a perçu la somme de 7532,56 €; que pour l'année 2008, la société EMPREINTE lui a réglé une somme nettement inférieure de 1417,31 € pour les commandes de réassort qui auraient été prises par sa clientèle jusqu'en octobre 2008; que M. [V] en déduit que la société EMPREINTE ne lui a pas réglé la totalité de ses commissions sur commandes de réassort en affectant un nombre d'ordres à d'autres commerciaux, notamment à ses successeurs; que l'attestation du commissaire aux comptes produite par la société EMPREINTE ne fait pas la preuve de ce que M. [V] a été rempli de ses droits ; que le commissaire aux comptes atteste seulement que les informations figurant sur le tableau récapitulatif ont été extraite de la comptabilité ou de données statistiques; que ce faisant il n'atteste pas de l'exacte affectation des commandes de réassort entre les commerciaux;

Considérant que la société EMPREINTE ne fournit aucune explication sur la différence de commandes de réassort d'une année sur l'autre sur le secteur confié à M. [V]; qu'elle seule est en mesure de rapporter cette preuve; qu'en particulier elle ne produit pas les justificatifs des commandes de réassorts passées en 2008 par les clients de M. [V]; qu'il y a donc lieu de faire droit à la demande de M. [V] qui se réfère à la somme qu'il a perçu à ce titre en 2007, soit une somme restant due de 6115,25 €;

Sur l'indemnité de clientèle

Considérant qu'en vertu de l'article L. 7313-13 du code du travail, une indemnité de clientèle est due au représentant qui établit qu'il a perdu, du fait de la rupture du contrat de travail, une clientèle qu'il avait personnellement apportée, créée ou développée;

Considérant que les listings de la société dont elle se prévaut font apparaître l'existence de 82 clients sur le secteur de M. [V] lorsque celui-ci a commencé son activité; qu'il n'est pas contesté que 55 d'entre eux ont cessé leur activité; qu'il ne restait donc plus que 27 clients d'origine lors du départ de M. [V]; qu'il n'est pas davantage contesté que celui-ci a créé 93 points de vente dont 61 étaient encore en activité au moment de son départ; qu'il a donc bien créé une clientèle; qu'il a donc droit à une indemnité pour la part qui lui revient personnellement dans l'importance en nombre et en valeur de la clientèle créée ou développée par lui;

Considérant que selon le contrat de travail de M. [V], le chiffre d'affaires réalisé sur le secteur confié à M. [V] s'élevait au 30 juin 1995 à 391 260 € , sans distinction entre magasins spécialisés et grands magasins; que selon la société EMPREINTE le chiffre d'affaires réalisé par M. [V] était au 31 décembre 2007 de 185 101,95 € au titre des détaillants et 134 980 € au titre des grands magasins soit un total de 320 081,95 € ; que le maintien par M. [V] d'un tel chiffre d'affaires malgré la perte de 55 clients d'origine démontre le développement par lui de la clientèle; que la cour fixe cette indemnité à 29 477 € après déduction de la somme de 10 193 € réglée par la société EMPREINTE au titre de l'indemnité de licenciement;

PAR CES MOTIFS

INFIRME le jugement ,

CONDAMNE la société EMPREINTE à payer à M. [V]:

- 3953 € à titre de complément d'indemnité de préavis,

- 395,30 € à titre de congés payés afférents ,

- 6115,25 € à titre de commissions de retour sur échantillonnage,

- 611,52 € à titre de congés payés afférents ,

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la société EMPREINTE de sa convocation devant le conseil de prud'hommes,

- 29 477 € à titre de solde dû sur l'indemnité de clientèle,

- 30 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de la notification du présent arrêt

- 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT que la société EMPREINTE doit remettre à M. [V] un bulletins de salaire et une attestation Pôle Emploi conforme au présent arrêt,

MET les dépens à la charge de la société EMPREINTE.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 10/06179
Date de la décision : 20/03/2012

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°10/06179 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-03-20;10.06179 ?
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