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09/03/2012 | FRANCE | N°09/07463

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 11, 09 mars 2012, 09/07463


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS







Pôle 5 - Chambre 11









ARRET DU 09 MARS 2012



(n°83, 7 pages)









Numéro d'inscription au répertoire général : 09/07463





Décision déférée à la Cour : jugement du 17 février 2009 - Tribunal de commerce de PARIS - 6ème chambre - RG n°2007019484







APPELANTE




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[Localité 5]



représentée par Me Laurence TAZE-BERNARD, avocat au b...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 11

ARRET DU 09 MARS 2012

(n°83, 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/07463

Décision déférée à la Cour : jugement du 17 février 2009 - Tribunal de commerce de PARIS - 6ème chambre - RG n°2007019484

APPELANTE

S.A.R.L. EURO FIRST MULTIMEDIA, agissant en la personne de son gérant en exercice et de tous représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé [Adresse 2]

[Localité 5]

représentée par Me Laurence TAZE-BERNARD, avocat au barreau de PARIS, toque L 0068

assistée de Me Grégoire HALPERN, avocat au barreau de PARIS, toque E 593

INTIMEE

S.A.S. 1633, prise en la personne de son président en exercice domicilié en cette qualité au siège social situé

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par la SCP FISSELIER & ASSOCIES (Me Alain FISSELIER), avocat au barreau de PARIS, toque L 0044

assistée de Me Muriel COHEN-ELKAIM plaidant pour la SELARL JACOB, avocat au barreau de PARIS, toque D 1505

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 janvier 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :

Renaud BOULY de LESDAIN, Président

Bernard SCHNEIDER, Conseiller

Françoise CHANDELON, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Carole TREJAUT

Françoise CHANDELON a préalablement été entendue en son rapport

ARRET :

Contradictoire

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

Signé par Renaud BOULY de LESDAIN, Président, et par Carole TREJAUT, Greffier, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

La société Euro First Multimédia (EFM) bénéficie d'une licence exclusive d'exploitation d'un dispositif dénommé 'Lock & Pay' permettant de limiter l'accès de tout ou partie d'un programme gravé sur un DVD aux spectateurs en possession d'un code d'accès qu'ils se procurent par SMS ou appel téléphonique surtaxé.

Les 1er avril et 18 juillet 2006, la société 1633, éditeur de magazines masculins, qui offre des DVD à ses lecteurs, a signé avec la société EFM deux contrats portant sur l'utilisation de ce procédé.

Reprochant à la société 1633 d'avoir violé ses obligations contractuelles, par la promotion d'un système concurrent au sien, la société EFM a engagé la présente procédure par exploit du 8 mars 2007.

Par jugement du 17 février 2009, assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de commerce de Paris a :

- interdit, sous astreinte, à la société 1633 d'exploiter un système reproduisant les fonctionnalités de celui dénommé 'Lock & Pay',

- condamné la société EFM à régler les sommes dues en exécution des deux contrats signés,

- rejeté les autres demandes.

Par déclaration du 25 mars 2009, la société EFM a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, déposées le 27 octobre 2011, la société EFM demande à la Cour de :

- confirmer partiellement le jugement,

- l'infirmer en ce qu'il a rejeté certaines de ses demandes,

- condamner la société 1633 à lui verser 1.200.000 € de dommages intérêts en réparation de son préjudice commercial et 50.000 € en réparation de son préjudice moral,

- nommer un expert pour déterminer la perte de revenus liés à l'exploitation d'un autre procédé que celui de son numéro surtaxé,

- ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans cinq journaux,

- condamner la société 1633 à lui verser 6.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures, au sens de l'article 954 du code de procédure civile, déposées le 25 novembre 2011, la société 1633 demande principalement à la Cour de :

- débouter la société EFM de ses demandes,

- confirmer le jugement du chef de la condamnation de la société EFM au paiement des sommes dues en exécution des contrats signés,

- condamner la société EFM au paiement des sommes qu'elle reconnaît devoir au titre de l'exécution des deux contrats et d'une indemnité de 6.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

CELA ETANT EXPOSE,

LA COUR,

Sur le droit applicable

Considérant que les conclusions de la société EFM ne visant aucun texte, la société 1633 a estimé devoir défendre ses droits sur le terrain de la propriété industrielle, s'employant à démontrer l'absence d'antériorité de l'invention, objet d'une demande de brevet déposée par son créateur, M. [B], le 1er décembre 2005, rejetée le 16 octobre 2006 ;

Mais considérant que bien que l'utilisation d'un procédé breveté constitue un acte de contrefaçon aux termes de l'article L613-3 du code de la propriété intellectuelle, la société EFM, ne fonde pas sa demande sur les dispositions de l'article L615-1 du même code, mais sur les manquements contractuels de la société 1633 ;

Sur l'analyse des contrats signés

Considérant que le premier contrat est daté du 1er avril 2006 ;

Qu'il résulte cependant des pièces produites qu'il a été signé par le gérant de la société 1633, postérieurement à cette date, ce dernier ayant retourné la convention à la société EFM le 11 avril 2006 ;

Qu'aux termes de ce contrat, la société EFM a confié à la société 1633 la promotion du numéro de téléphone [XXXXXXXX01] communiqué à ses lecteurs pour leur permettre d'obtenir le numéro d'accès aux parties bloquées, par le procédé 'lock and pay', du DVD offert lors de l'achat de leur magazine favori ;

Qu'il résulte des pièces produites que les DVD offerts étaient dans la ligne éditoriale de cette presse masculine, les images bloquées correspondant à un ou plusieurs film(s) à caractère pornographique décrit(s) comme 'extra hard' ou 'spécial public averti' ;

Considérant que le contrat signé le 18 juillet 2006 était tripartite et avait pour objet de mettre à la disposition de la société SFEP, qui appartient au groupe Hommell, spécialisé dans la presse automobile, le système 'Lock & Pay'et le numéro d'appel 08 99 65 02 55 ;

Que la société 1633 intervenait à ce contrat comme fournisseur du contenu des scènes bloquées, prestation rémunérée par la rétrocession de 0,50 euro par appel supérieur à 15 secondes, montant équivalant à celui perçu par la société SFEP ;

Qu'il résulte des pièces produites que le procédé a été utilisé par une société soeur de cette dernière, dénommée SEPL, éditeur du magazine 'Super GTI Mag', qui a offert à ses lecteurs, à deux reprises, deux DVD 'Playboy' ;

Considérant que ce second contrat précise :

'Le service dispensé par ce contrat faisant l'objet d'une innovation technique déposée, les sociétés 1633 sa & SFEP s'engagent à ne pas développer de service équivalent et/ou directement concurrentiel a Lock & Pay' ;

Considérant que la société EFM fondant ses demandes sur une violation, par la société 1633, de cet engagement, sa portée doit être analysée ;

Considérant qu'il convient de constater que le projet proposé pour le 1er contrat comportait une clause analogue, refusée par courriel du 6 avril 2006, rédigé en ces termes par le dirigeant de la société 1633 :

'Suppression comme convenu du paragraphe nous interdisant de faire identique ailleurs ou de développer nous mêmes' ;

Considérant qu'au regard de cette manifestation de volonté dépourvue de toute ambiguïté et de l'absence de toute clause contractuelle manifestant un changement d'intention, la société EFM ne peut sérieusement soutenir que parce qu'elle avait seule en charge la promotion de son système, la société 1633 s'était 'engagée à le faire de façon exclusive sur tous les supports qu'elle édite' ;

Considérant encore que le contrat du 18 juillet 2006 n'emporte pas novation faute de toute précision dans l'acte sur une volonté des parties de substituer ou compléter les obligations souscrites par la société 1633 dans le cadre du précédent contrat ;

Que dès lors et au regard de la volonté clairement exprimée par la société 1633 quelques mois plus tôt, l'engagement pris dans le second contrat se limite nécessairement à une interdiction d'utiliser, pour bloquer le contenu fourni à la société SFEP, un procédé autre que le 'Lock & Pay' ;

Considérant qu'il ne résulte d'aucune des pièces produites par la société EFM que la société 1633 ait violé cette obligation, l'huissier requis se bornant à constater que proposaient un numéro de téléphone autre que celui qu'elle avait mis à disposition de la société 1633 les DVD contenus dans les magazines Newlook, Newlook Pinup, QX, Fantasmes, Maximal, Playboy et les filles de Playboy ;

Considérant que les DVD fournis avec le magazine 'Super GTI Mag' n'ont pas été visionnés par l'huissier ;

Considérant que la société EFM ne saurait en conséquence solliciter l'indemnisation d'un manquement contractuel dont elle n'établit pas la réalité et qu'il convient d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a considéré que la société 1633 n'ayant pas 'strictement' respecté son engagement contractuel, il convenait de lui interdire sous astreinte d'utiliser un système reproduisant les fonctionnalités du procédé Lock & Pay alors que le contrat l'y autorisait, dans le respect des dispositions légales régissant la contrefaçon, que la société EFM n'invoque pas dans cette instance ;

Considérant que la société EFM sollicite encore l'indemnisation d'un préjudice moral lié à l'atteinte portée à la fiabilité de son système par une erreur commise dans 'l'authoring'(terme anglais définissant la conception) du DVD offert aux lecteurs du magazine Maximal n°73 ;

Qu'il résulte en effet du constat d'huissier réalisé le 26 décembre 2006 qu'après avoir été invité, pour obtenir le code secret permettant de visionner le DVD, à composer le n° 08 99 78 08 09, le spectateur qui insère un code erroné accède à une page d'erreur l'invitant à appeler le n°08 99 65 01 53 et mentionne en petits caractères : 'SYSTÈME LOCK & PAY' ;

Considérant que la société EFM soutient à juste titre que ce dernier numéro, qu'elle a mis à la disposition de la société 1633 ne permettait pas d'obtenir le code secret correspondant à ce DVD ;

Qu'elle estime que l'intimée a ainsi porté atteinte à sa crédibilité ;

Mais considérant que ce préjudice ne peut être retenu dans la mesure où, cette erreur unique, qui n'a pas été reproduite dans le DVD accompagnant le magazine Maximal n°75, selon le constat dressé le 2 mars 2007 était de faible importance ;

Qu'en revenant à la page d'accueil, le spectateur pouvait se convaincre du 'bon' numéro sans mettre en cause la qualité du système ;

Qu'au surplus, outre que la dénomination sociale de l'appelante ne figure pas dans la page d'erreur elle n'est que licenciée et non concepteur du système dont la crédibilité était susceptible d'être mise en cause ;

Qu'il convient en conséquence de la débouter de toutes ses demandes ;

Considérant que la société 1633 est bien fondée à demander la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société EFM au paiement des sommes prévues par les contrats signés dont aucune des parties ne demande la résiliation ;

Considérant que certains des DVD concernés sont encore proposés à la vente générant des rétrocessions du coût des appels conformément aux stipulations contractuelles ;

Considérant que la société EFM ne saurait conclure au rejet de cette demande au motif que la société 1633 ne chiffre pas sa demande alors qu'elle est seule en mesure de connaître le nombre des appels, à réception du relevé de son opérateur, la société Colt Telecom, et doit, conformément aux dispositions contractuelles, adresser à la société 1663 le montant des sommes dues en fonction de ce document pour permettre à cette dernière d'établir la facture correspondante ;

Considérant que l'équité commande d'allouer à la société 1633 la somme de 5.000 € au titre des frais irrépétibles exposés dans le cadre de cette procédure ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Euro First Multimédia au paiement des sommes dues en exécution des contrats datés des 1er avril et 18 juillet 2006 ;

L'infirme pour le surplus ;

Déboute la société Euro First Multimédia de toutes ses demandes ;

Condamne la société Euro First Multimédia à payer à la société 1633 une somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Euro First Multimédia aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 09/07463
Date de la décision : 09/03/2012

Références :

Cour d'appel de Paris J2, arrêt n°09/07463 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-03-09;09.07463 ?
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