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08/03/2012 | FRANCE | N°11/00132

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 08 mars 2012, 11/00132


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRÊT DU 08 Mars 2012

(n° 15 , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/00132



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Janvier 2008 par le conseil de prud'hommes de PARIS - Section INDUSTRIE - RG n° 05/09213





APPELANTE

Madame [U] [I]

[Adresse 3]

[Localité 1]

comparant en personne

assistée de M. [P] [L] (Délégu

é syndical ouvrier)







INTIMÉE

SA EDITIONS OBERTHUR

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Nicolas CARABIN, avocat au barreau de RENNES







COMPOSITION DE LA COUR :...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRÊT DU 08 Mars 2012

(n° 15 , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 11/00132

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Janvier 2008 par le conseil de prud'hommes de PARIS - Section INDUSTRIE - RG n° 05/09213

APPELANTE

Madame [U] [I]

[Adresse 3]

[Localité 1]

comparant en personne

assistée de M. [P] [L] (Délégué syndical ouvrier)

INTIMÉE

SA EDITIONS OBERTHUR

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Nicolas CARABIN, avocat au barreau de RENNES

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 26 Janvier 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Renaud BLANQUART, Président

Madame Marthe-Elisabeth OPPELT-REVENEAU, Conseillère

Madame Anne DESMURE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Violaine GAILLOU, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Renaud BLANQUART, Président et par M. Franck TASSET, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Mme [I] a travaillé au service de la SA Editions Oberthur en qualité de vendeuse démonstratrice, en vertu de contrats à durée déterminée, qui se sont échelonnées entre novembre 1993 et décembre 2004.

Mme [I] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris d'une demande, pour l'essentiel, de requalification de la relation contractuelle en un contrat à durée indéterminée.

Par jugement du 24 janvier 2008, le conseil de prud'hommes a, en sa composition de départage, débouté Mme [I] de sa prétention.

Régulièrement appelante, Mme [I] demande à la cour d'infirmer ce jugement et, statuant à nouveau, de requalifier les contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée ayant débuté le 9 novembre 1993, et condamner la SA Oberthur à lui verser les sommes de :

- 3 088,70 euros à titre d'indemnité de requalification,

- 4 127,38 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 412,73 euros de congés payés afférents,

- 4 263,50 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 2 063,69 euros d'indemnité pour inobservation de la procédure de licenciement,

- 24 764,28 euros de dommages-intérêts pour licenciement abusif,

- 40 059,74 euros de rappel de salaire 2001-2004,

- 4 005,97 euros de congés payés afférents,

- 2 769,66 euros de rappel de participation,

- 6 143,55 euros de rappel de prime de 13ème mois.

Mme [I] demande, également, la remise des bulletins de paie rectifiés et une indemnité de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Intimée, la SA Editions Oberthur requiert la cour de débouter Mme [I] de ses prétentions ou, subsidiairement, de faire une application stricte des articles L.1235-2 et L.1235-3 du code du travail, et condamner Mme [I] à lui verser 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un complet exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère expressément aux écritures que les parties ont déposées et développées oralement à l'audience du 26 janvier 2012.

MOTIFS

Sur la demande de requalification :

Considérant qu'à l'appui de sa demande, Mme [I] fait valoir qu'elle a occupé pendant 10 ans, de façon durable, un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, que les contrats ne lui étaient jamais transmis dans le délai légal de 2 jours ouvrables suivant l'embauche, et que l'activité de la société n'est pas au nombre de celles autorisées à conclure des contrats saisonniers;

Que, pour combattre cette prétention, la société Oberthur soutient, en substance, qu'elle a fait appel à Mme [I] à des périodes très précises, d'une durée maximale de 4 mois, avec des périodes d'interruption très longues, à l'occasion de 12 contrats à durée déterminée et contrats de mission, le 1er ayant débuté le 9 novembre 1993 et le dernier s'étant achevé le 24 décembre 2004, en qualité de démonstratrice, pour une tâche temporaire, à savoir la promotion de produits dits millésimés (agendas, organisers) dont les ventes se déroulent pendant une période limitée de l'année, que l'affirmation de Mme [I], pour la première fois en cause d'appel, selon laquelle les contrats ne lui étaient pas transmis dans les délais légaux, ne repose sur aucun élément sérieux, enfin, que l'article L.1242-2 du code du travail distingue les emplois à caractère saisonnier de ceux pour lesquels dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par convention ou accord collectif, il est d'usage de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée ;

Considérant cependant qu'à supposer même acquis que la société Oberthur a fait appel à Mme [I] pour faire face à un besoin structurel, pour une tâche occasionnelle et par nature non pérenne, c'est à dire pour occuper un emploi qui n'était pas lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise au sens de l'article L. 1242-1 du code du travail, il résulte de l'article L.1242-13 du code du travail que le contrat à durée déterminée doit être transmis au salarié au plus tard dans les deux jours ouvrables suivant l'embauche, que lorsqu'un tel contrat n'est pas rédigé ou transmis au salarié dans les deux jours suivant l'embauche, il est requalifié en contrat à durée indéterminée, que la transmission tardive pour signature équivaut à une absence d'écrit entraînant requalification, et que la charge de la preuve du respect de cette obligation pèse sur l'employeur qui en est débiteur ;

Or, considérant qu'en réponse à l'affirmation de Mme [I] selon laquelle les contrats querellés lui ont tous été transmis avec retard, la société Oberthur se borne à émettre un doute sur la fiabilité d'une télécopie versée au débat par la partie adverse à l'appui de sa thèse, mais ne produit strictement aucune pièce susceptible de justifier qu'elle a respecté le délai légal dont elle disposait pour établir et transmettre à Mme [I] chacun des contrats à durée déterminée ;

Considérant, partant, que Mme [I] demande légitimement que les contrats qui l'ont liée à la société Oberthur soient requalifiés en un unique contrat à durée indéterminée ayant pris effet le 9 novembre 1993 ; que le jugement entrepris sera donc infirmé ;

Considérant que Mme [I] sera en conséquence accueillie en sa prétention tendant, sur le fondement de l'article L.1245-2 du code du travail, au paiement de la somme de 3 088,70 euros, correspondant au montant de sa dernière rémunération, à titre d'indemnité spécifique de requalification ;

Considérant qu'il s'ensuit que la rupture de la relation contractuelle s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ouvrant droit au paiement des indemnités de rupture ;

Considérant, à cet égard, que les demandes de Mme [I] ne suscitent pas de débat entre les parties et sont justifiées en ce qu'elles ont trait à l'indemnité compensatrice de préavis (d'un montant égal à deux mois de salaire) et à l'indemnité conventionnelle de licenciement (correspondant à 1/5ème de mois par année de présence) ; que Mme [I] sera, par conséquent, accueillie en sa demande en paiement de la somme de 4 127,38 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 412,73 euros au titre des congés payés afférents, et de la somme de 4 263,50 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

Considérant que la société Oberthur soutient exactement que Mme [I] ne justifie pas d'un préjudice résultant du licenciement sans cause réelle et sérieuse excédant la somme de 12 382,14 euros, correspondant à six mois de salaire ; que cette somme sera, donc, allouée à Mme [I] en application de l'article L.1235-3 du code du travail ;

Considérant que la société Oberthur devra rembourser aux organismes concernés, parties au litige par l'effet de la loi, les indemnités de chômage qu'ils ont versées à Mme [I], dans la limite de six mois ;

Considérant que la société Oberthur fait justement valoir que la demande d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement n'est pas cumulable avec l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que Mme [I] sera donc déboutée de cette prétention ;

Considérant, s'agissant de la prétention, émise par Mme [I] pour la première fois en cause d'appel, tendant à un rappel de salaire au titre des périodes d'intercontrats, que la société Oberthur oppose, à bon droit, à Mme [I], le moyen pris de la prescription quinquennale, puisque cette demande, portant sur la période du 21 janvier 2001 au 15 juin 2004, a été formulée pour la première fois en décembre 2010 ; que Mme [I] a, au demeurant, convenu lors des débats que sa demande était atteinte par la prescription ;

Considérant partant, que sont de la même manière prescrites les demandes qui en sont la suite, à savoir la demande de rappel de participation au titre des exercices 2002, 2003 et 2004 également formée pour la première fois en décembre 2010, et la demande de rappel de prime qui y est attaché;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Requalifie les contrats à durée déterminée ayant lié Mme [I] à la Sas Oberthur en un contrat à durée indéterminée ayant pris effet le 9 novembre 1993,

Condamne la Sas Oberthur à payer à Mme [I] la somme de 3 068,70 euros à titre d'indemnité spécifique de requalification,

Dit que la rupture de la relation contractuelle s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ouvrant droit aux indemnités de rupture,

Condamne en conséquence la Sas Oberthur à verser à Mme [I] la somme de 4 127,38 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, la somme de 412,73 euros au titre des congés payés afférents, la somme de 4 263,50 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement et la somme de 12 382,14 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l'article L.1235-3 du code du travail,

Déboute Mme [I] de sa demande d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,

Déclare prescrites les prétentions de Mme [I] à un rappel de salaire pour les années 2001 à 2004, à un rappel de participation et à un rappel de prime,

Condamne la Sas Oberthur à rembourser aux organismes concernés, parties au litige par l'effet de la loi, les indemnités de chômage qu'ils ont versées à Mme [I], dans la limite de six mois,

Vu l'article 700 du code de procédure civile :

Condamne la Sas Oberthur à verser à Mme [I] la somme de 1 000 euros en indemnisation de ses frais irrépétibles et rejette la prétention de la Sas Oberthur sur le même fondement juridique,

Condamne la Sas Oberthur aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 11/00132
Date de la décision : 08/03/2012

Références :

Cour d'appel de Paris K5, arrêt n°11/00132 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-03-08;11.00132 ?
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