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08/03/2012 | FRANCE | N°08/20557

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 08 mars 2012, 08/20557


COUR D'APPEL DE PARISPôle 5 - Chambre 5
ARRET DU 8 MARS 2012
(no 60, 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 08/20557
Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Septembre 2008 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG no 2007043991

APPELANTE
SARL ESTIMEayant son siège : Zone Industrielle Secteur A - 8 Allée des Imprimeurs - 06700 SAINT LAURENT DU VAR
représentée par Me Jean-jacques FANET, avocat au barreau de PARIS, toque : D0675,assistée de Me Jean-Louis DAVID, avocat au barreau de GRASSE,

INTIMEE
SARL SKIDATA FRANCEayant son siège

: 141/145 rue Michel Carré - Bâtiment Le Sophocle - 95100 ARGENTEUIL
représentée par la SCP DUBO...

COUR D'APPEL DE PARISPôle 5 - Chambre 5
ARRET DU 8 MARS 2012
(no 60, 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 08/20557
Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Septembre 2008 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG no 2007043991

APPELANTE
SARL ESTIMEayant son siège : Zone Industrielle Secteur A - 8 Allée des Imprimeurs - 06700 SAINT LAURENT DU VAR
représentée par Me Jean-jacques FANET, avocat au barreau de PARIS, toque : D0675,assistée de Me Jean-Louis DAVID, avocat au barreau de GRASSE,

INTIMEE
SARL SKIDATA FRANCEayant son siège : 141/145 rue Michel Carré - Bâtiment Le Sophocle - 95100 ARGENTEUIL
représentée par la SCP DUBOSCQ-PELLERIN (Me Jacques PELLERIN), avocats au barreau de PARIS, toque : L0018,assistée de Me Marie-Christine CIMADEVILLA, avocat au barreau de PARIS, toque : D0316,

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 2 février 2012, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Colette PERRIN, Présidente et Madame Patricia POMONTI, Conseillère chargée d'instruire l'affaire.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :Madame Colette PERRIN, présidenteMadame Patricia POMONTI, conseillèreMadame Irène LUC, conseillère désignée par ordonnance de Monsieur le Premier Président de la cour d'appel de Paris en vertu de l'article R312-3 du code de l'organisation judiciaire pour compléter la chambre.

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Anne BOISNARD

ARRET :
- contradictoire- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.- signé par Madame Colette PERRIN, présidente et par Madame Noëlle KLEIN, greffier des services judiciaires auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE

La SARL Estime est une société spécialisée dans la commercialisation et la distribution de matériel de parking et plus précisément de systèmes de parcs de stationnement. La SARL Skidata France est la filiale de distribution de la société autrichienne Skidata AG, concepteur et fabriquant de systèmes d'accès et parkings.
Par contrat en date du 9 décembre 1997, la société Estime a conclu avec la société Skidata une concession de distribution exclusive de matériels de péages. Cette exclusivité était limitée aux systèmes 450, avec obligation de quantités minimums à commercialiser par la société Estime, durant les années 1998, 1999,2000 pour un périmètre géographique de 24 départements.
Par avenant en date du 27 septembre 1999, le contrat a été reconduit avec une prolongation d'une durée de cinq ans pour certaines parties du périmètre géographique et de trois ans pour le reste dudit périmètre. En outre, le périmètre géographique a été réduit aux seuls départements des Alpes Maritimes, du Var et au territoire de la principauté de Monaco.
Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 7 novembre 2001, la SARL Skidata a fait part à la SARL Estime de son intention de résilier le contrat de distribution exclusive, au motif qu'elle n'avait commandé aucun appareil APT 450 depuis le début de l'année 2001 et cette résiliation est devenue effective au 31 décembre 2001.
La SARL Estime, considèrant que la résiliation était abusive, a assigné la SARL Skidata, par acte en date du 17 décembre 2003.
Par un jugement en date du 29 septembre 2008, le tribunal de commerce de Paris a :
- débouté la Sarl Estime de toutes ses demandes, fins et conclusions; - débouté la Sarl Skidata France de ses demandes reconventionnelles; - dit qu'il n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,- condamné la Sarl Estime et la Sarl Skidata France aux dépens par moitié chacune.
Vu l'appel interjeté le 29 octobre 2008 par la société Estime.

Vu les dernières conclusions signifiées le 14 décembre 2011 par lesquelles la société Estime demande à la Cour de :
- la recevoir en son appel et l'y déclarer bien fondée;
Statuant à nouveau,
-réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions;
Sur les objectifs et/ou clause de quota : - dire et juger qu'en régularisant l'avenant, l'intention des parties était naturellement de voir la clause de quota ne plus pouvoir produire effet sur un périmètre géographique réduit de 25 à 3 départements;
- dire et juger que constitue une mise en oeuvre abusive de la résiliation la rupture du contrat initiée par Skidata qui revendique une clause de quota souscrite à une époque où Estime s'était vue octroyer un périmètre géographique de 25 départements, alors que l'avenant avait réduit ce territoire à 3 départements; - dire et juger que doit être réputée non écrite, pour absence de cause, la clause de quota et/ou d'objectif en l'état de l'avenant ayant réduit le périmètre concédé de 25 à 3 départements,- constater et en tant que de besoin dire et juger qu'aucune clause de quota n'était opposable à Estime au titre de l'exercice 2001,
En conséquence,
-dire et juger que la résiliation signifiée par Skidata est infondée.
Très subsidiairement,
- dire et juger que le tribunal a inversé la charge de la preuve en considérant que la société Estime ne démontrerait pas qu'elle aurait pu vendre du matériel Skidata entre le 7 novembre et le 31 décembre 2001.- constater que Skidata avait une obligation de formation de son partenaire Estime et ne rapporte pas la preuve d'avoir procédé aux formations idoines, notamment au regard de l'évolution du marché et des matériels; - constater qu'il ressort des pièces produites aux débats que la société Estime a rencontré des problèmes relatifs à des livraisons de matériels défectueux et/ou à une modification unilatérale des prix et/ou des modifications de modalités de paiement ( exigence de paiement à la commande) et/ou paiement des commissions dans les délais.-constater qu'il ressort des pièces produites aux débats que la société Estime a rencontré des problèmes relatifs à des livraisons de matériels défectueux et/ou à une modification; unilatérale des prix et/ ou des modifications de modalités de paiement ( exigence de paiement à la commande ) et/ou paiement des commissions dans les délais;-constater et dire et juger que Skidata n'a pas exécuté la convention de bonne foi;
En conséquence;
-dire et juger abusive la résiliation de la convention;
Sur la concurrence déloyale
- constater et dire et juger que la société Skidata a commis des actes de concurrence déloyale en violant l'exclusivité consentie à Estime avant la résiliation de la convention;- constater et dire et juger que la société Skidata a commis des actes de refus de vente;
Sur les préjudices subis du fait de la résiliation abusive, d'une part, et de la concurrence déloyale, d'autre part,
- condamner la société Skidata à payer à la société Estime les sommes liées aux préjudices subis à savoir :
- 948 970.00 euros H.T au titre de la perte de marge;-71 095.00 euros H.T au titre de la remise sur la vente de pièces détachées;- 24 000.00 euros H.T au titre de la perte du marché Port Grimaud;- 158 000.00 euros H.T au titre de la perte du marché CCI;- 1 500 000. 00 euros H.T au titre du préjudice financier résultant de la perte de contrat;- 500 000.00 euros H.T au titre de l'atteinte à l'image commerciale;- 1 000 000.00 euros H.T au titre de la concurrence déloyale.
Subsidiairement :
-faire application de l'article 144 du code de procédure civile et désigner tel expert qu'il plaiera à la Cour avec mission d'établir un rapport relatif à l'évaluation des préjudices.
Sur les demandes reconventionnelles de Skidata ;
-constater et dire et juger que Skidata ne rapporte pas la preuve d'une atteinte à son image de marque et à l'image de ses produits qui serait la conséquence de faits d'Estime;- constater et dire et juger que Skidata ne rapporte pas la preuve d'un préjudice égal à 3 750 000 euros;-dire et juger que Skidata ne démontre pas la réunion des éléments de droit et de fait nécessaires à la condamnation de la société Estime à lui payer la somme de 3 750 000 euros;-constater et dire et juger que skidata ne démontre pas que la présente procédure aurait un caractère abusif;
En conséquence,
-débouter Skidata de toutes ses demandes, fins et conclusions contraires aux présentes, - condamner la société Skidata au paiement d'une somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

La société Estime affirme tout d'abord que la résiliation du contrat par la société Skidata est abusive car la clause de quota étant inapplicable pour l'exercice 2001, elle ne pouvait pas être opposée à Estime et servir de base à une résiliation. Elle considère donc que l'intention des parties était naturellement de voir la clause de quota ne plus produire effet sur un périmètre géographique réduit de 25 à 3 départements et que doit être réputée non écrite, pour absence de cause, la clause de quota et/ou objectif stipulée à la signature d'un contrat initial aux termes duquel une partie s'est vu reconnaître une exclusivité sur un territoire géographique de 25 départements et qui a fait l'objet d'un avenant réduisant ledit territoire à 3 départements. Très subsidiairement, la société Estime affirme la mauvaise foi de la société Skidata dans la mise en oeuvre de cette clause car, d'une part, la société Skidata n'a pas attendu la fin de l'exercice pour décider de la résiliation, d'autre part, elle n'a pas respecté le périmètre d'exclusivité qui lui était dévolu et lui a causé des difficultés dans la le cadre de l'exécution du contrat.En outre, elle allègue que la société Skidata a commis des actes constitutifs de concurrence déloyale en ne respectant pas l'exclusivité consentie sur le territoire attribué à Estime aux termes dudit contrat.Par conséquent, la société Estime soutient qu'elle a subi des préjudices devant être réparés découlant notamment de la résiliation hors de toute clause de quota et en tout état de cause abusive, ainsi que des actes de concurrence déloyale de Skidata. Enfin, la société Estime conteste toutes les demandes reconventionnelles de la société Skidata car cette dernière n'établirait pas l'existence des éléments nécessaires pour que soit caractérisée sa responsabilité.
Vu les dernières conclusions signifiées le 12 janvier 2012 par lesquelles la société Skidata France demande à la Cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Estime de l'ensemble de ses demandes;
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Skidata France de sa demande de condamnation d'Estime au versement de dommages et intérêts pour inexécution dolosive de ses obligations contractuelles. En conséquence, condamner Estime à payer à Skidata la somme de 3.750.000 euros à titre de dommages et intérêts pour inexécution dolosive de ses obligations contractuelles;- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Skidata de sa demande de condamnation d'Estime pour procédure abusive et en application de l'article 700 du code de procédure civileEn conséquence,- condamner Estime au paiement de la somme de 5.000 € pour procédure abusive et de 15.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Skidata considère que la rupture du contrat litigieux, à la date du 7 novembre 2001, est régulière et bien fondée car la clause résolutoire parfaitement claire et précise figurant dans la convention des parties lui permettait de rompre le contrat dès lors que Estime avait violé son obligation de vente de quantités minimum,Elle ajoute que la clause de quota était applicable et que l'avenant au contrat avait pour effet de proroger le contrat initial, son objet étant uniquement de modifier le territoire donné en exclusivité et de modifier, en conséquence, la durée de cette exclusivité. Selon la société Skidata, la violation par Estime de son obligation contractuelle de lui transmettre des prévisions annuelles de vente justifiait la rupture du contrat, de même que l'inexécution par Estime, en tant que distributeur exclusif, de son obligation générale de promotion et de vente des produits Skidata France.La société Skidata soutient en outre que les prétentions et réclamations d'Estime sont injustifiées car, la rupture du contrat étant bien fondée, sa responsabilité contractuelle ne saurait être engagée et dans la mesure où Estime ne rapporte pas la preuve, ni de s'être trouvée en état de dépendance économique, ni de l'abus de dépendance économique soi-disant commis par la société Skidata, ni de la violation par elle de son obligation d'exclusivité sur certains marchés.
La société Skidata conteste avoir procédé à une livraison de matériel défectueux, avoir unilatéralement modifié des prix et conditions de paiement, avoir fait de l'obstruction à toute actualisation, ne pas avoir transmis des devis, avoir commis un quelconque refus de livraison ou refus de vente ou avoir supprimé les coordonnées d'Estime sur les plaquette.La société Skidata soutient également que la société Estime s'appuie sur une série de chiffres non certifiés et incontrôlables pour quantifier le préjudice qu'elle aurait soi-disant subi. La société Skidata demande la réparation du préjudice d'image que sa marque et ses produits ont subi.
La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions initiales des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
-Sur la rupture du contrat à l'initiative de la société Skidata France :La société Estime n'a présenté sur ce point en appel aucun moyen nouveau de droit ou de fait qui justifie de remettre en cause le jugement attaqué, lequel repose sur des motifs pertinents, non contraires à l'ordre public, résultant d'une analyse correcte des éléments de la procédure, notamment des pièces contractuelles et de la juste application de la loi et des principes régissant la matière.En effet, le contrat de concession exclusive du 9 décembre 1997 comporte en son article 5 une clause prévoyant des quantités minimum que Estime s'engageait à acheter à Skidata et Skidata s'engageait à vendre à Estime, soit "un minimum de 30 systèmes, sur une période de 3 années calendriers", "échelonnées comme suit :-durant l'année 1998 : 8 Systèmes-durant l'année 1999 : 9 Systèmes -durant l'année 2000 : 13 SystèmesUn système étant composé en moyenne de 3 bornes, 3 barrières levantes, 1 caisse automatique, 1 caisse manuelle, 1 centrale de gestion".Même si le contrat n'indiquait les quantités annuelles que pour les trois premières années, correspondant à la phase de lancement, d'où des prévisions progressives, il est évident que les quantités minimales annuelles étaient de 10 systèmes, ce qui imposait à la société Estime de vendre au moins cette quantité en 2001.L'avenant du 27 septembre 1999 a eu pour effet de proroger le contrat initial pour une durée de trois ans, son objet étant uniquement de modifier le territoire donné en exclusivité à compter de 1999 et, en conséquence, la durée de cette exclusivité.Ainsi, après avoir étendu la durée du contrat, l'avenant réduit le territoire où il s'exerce aux départements des Alpes Maritime et du Var ainsi qu'à la Principauté de Monaco, ce qui n'a fait que mettre le contrat en conformité avec la réalité puisqu'en 1998 et 1999, la société Estime n'a pas vendu de matériels Skidata en dehors de ces territoires.
Toutes les autres dispositions du contrat du 9 décembre 1997 sont restées inchangées, notamment la clause de quota ainsi que la clause de résiliation figurant à l'article 23 du contrat.La société Estime ne peut soutenir qu'il n'y aurait pas eu d'objectif fixé pour l'année 2001 ou que la réduction du territoire géographique entraînait la réduction des quotas, alors que de fait, elle n'a été active que sur ce territoire les années précédentes et que, comme l'a relevé le tribunal, même à périmètre géographique réduit, la clause de quota ne pouvait être égale à zéro. Au demeurant, elle n'a jamais protesté, en soutenant qu'elle n'avait pas de quota à respecter, à réception des lettres d'avertissement des 22 août et 10 septembre 2001.En effet, le contrepartie de l'exclusivité est l'activité de promotion des produits en cause et les ventes qui en résultent, les quotas constituant en conséquence une des obligations essentielles du distributeur.En outre, la société Estime ne saurait arguer d'une novation, car elle ne se présume pas et ne peut résulter que de la volonté claire et non équivoque des parties.Celle-ci n'existe pas en l'espèce, bien au contraire, puisque l'avenant ne modifie que le territoire et la durée du contrat, les points non modifiés étant reconduits purement et simplement.Il faut encore ajouter qu'aucune disposition du contrat ne lie le quota de machines et l'étendue du territoire et que la cause de la clause de quota ne réside pas dans l'étendue du territoire concédé mais dans l'exclusivité que la société Skidata a continué à garantir à la société Estime, de sorte qu'il n'y a pas lieu, comme le voudrait la société Estime, de déclarer caduque ou non écrite la clause de quota.Par ailleurs, la clause résolutoire vise non seulement le respect des quantités minimum contractuellement prévues mais également le respect de l'obligation prévue à l'article 16 du contrat prévoyant l'obligation pour la société Estime, "au moins une fois par année et pour la première fois, au plus tard le 30 septembre 1997", d'établir "un budget et un plan d'activités qui reprendront le nombre de systèmes prévus pour l'année à venir, leur estimation et, dans la mesure du possible, l'échelonnement des livraisons". Or, la société Estime n'a jamais communiqué à la société Skidata ses prévisions annuelles malgré des demandes écrites de cette dernière, notamment des 15 décembre 1999 et 8 décembre 2000. La société Estime ne saurait prétendre que la société Skidata aurait été de mauvaise foi au motif qu'elle n'aurait pas attendu la fin de l'exercice 2001 pour décider de la résiliation du contrat puisque la lettre lui notifiant cette résiliation pour le 31 décembre 2001 date du 7 novembre 2001.Il apparaît cependant qu'il est non seulement invraisemblable que la société Estime, qui n'avait vendu aucun système au cours des 10 premiers mois de l'année 2001, ait pu respecter le quota de 10 systèmes entre le 7 novembre et le 31 décembre 2001, mais également que la rupture n'est pas intervenue brutalement puisque la société Skidata lui a adressé deux courriers d'avertissement en date des 22 août et 10 septembre 2001. Au demeurant, il n'y a eu, ni commande, ni vente, pendant toute l'année 2001.La société Skidata souligne à juste titre, que la commande par la société Estime, pour 139.840 € de prestations dans la perspective des opérations de passage à l'euro sont sans incidence sur le bien-fondé de la résiliation, dès lors qu'il ne s'agit pas de l'achat de nouveaux systèmes mais de la mise à jour des systèmes installés.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la décision de la société Skidata de résilier le contrat à effet du 31 décembre 2001 était justifiée.Pour s'y opposer, la société Estime fait valoir qu'elle aurait été dans un état de dépendance économique.Il résulte cependant des éléments chiffrés produits en annexe par les parties que le chiffre d'affaires de la société Estime était en hausse pour l'exercice 2001, alors qu'elle n'a vendu aucun système Skidata durant cette période. En outre, en 2001, le marché Skidata ne représente que 18 % du chiffre d'affaires global et 21,5 % du chiffre d'affaires relatif à l'objectif péage.Dès lors l'état de dépendance économique allégué n'est pas avéré.La société Estime reproche également à la société Skidata une concurrence déloyale et une violation de l'exclusivité prévue au contrat.Il convient tout d'abord de préciser que la société Estime ne peut invoquer la clause d'exclusivité pour prétendre à une rémunération pour des marchés exclus du champ d'application du contrat et qu'elle n'a versé aux débats aucun document prouvant la réponse de la société Skidata à des appels d'offres entre 1999 et 2001 en contradiction avec l'article 14 du contrat.S'agissant de l'affaire Interparking-Gray d'Albion, c'est le client qui a directement sollicité la société Skidata, hypothèse expressément prévue à l'article 14, et cette dernière n'a finalement pas été retenue pour ce marché.Pour les affaires Vinci, Louvre, Massena, Barla et Acropolis, il s'agit d'appels d'offre nationaux réservés au constructeur par le groupe Vinci/Sogeparc, auxquels la société Estime ne pouvait répondre directement. Par contre elle a été informée et consultée en vue d'une intervention comme sous-traitant. S'agissant de l'affaire CCI Aéroport de Toulon, la société Skidata a répondu dans l'urgence pour pallier la carence d'Estime.Les marchés des centres commerciaux Nouvelles Galeries-Nice TNL ont été remportés par la société Time-Designa, concurrente de Skidata, avec l'appui de la société Estime.Pour le marché de l'Aéroport de Nice Côte d'Azur, l'intervention directe de la société Skidata lors du passage à l'euro avait été contractuellement prévue et était gratuite.La société Estime ne démontre pas que la société Skidata ait répondu à l'appel d'offres Palais de Justice-Cours Saleya à Nice.La société Estime reproche ensuite à la société Skidata la livraison de matériel défectueux mais, comme l'ont relevé les premiers juges, une telle livraison qui est restée minime ne traduit pas une intention de nuire de l'intimée alors au surplus que la maintenance ne faisait pas l'objet de l'exclusivité.De même, les reproches adressés par la société Estime à la société Skidata relatifs à une modification unilatérale des prix et des conditions de paiement, à une absence de formation et une obstruction à toute actualisation, à une absence de transmission de devis, à des refus de livraison et de vente ainsi qu'à la suppression de ses coordonnées sur les plaquettes Skidate ne sont, ni prouvés, ni fondés. Il n'est donc pas établi que la société Skidata ait exécuté la convention de mauvaise foi, que la résiliation serait abusive et que celle-ci se serait rendue coupable de concurrence déloyale, de sorte que la société Estime ne peut invoquer aucun préjudice.
Le jugement dont appel doit, en conséquence, être confirmé en ce qu'il a débouté la société Estime de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions.
-Sur les demandes reconventionnelles de la société Skidata France :La société Skidata fait état d'une atteinte à son image de marque, en relevant que sa clientèle potentielle est constituée, d'une part d'entreprises de droit privé qui exploitent des parcs de stationnement sur l'ensemble du territoire français, d'autre part d'exploitants locaux ou de sociétés d'économie mixte liés aux collectivités locales et des collectivités locales elles-mêmes, et qu'elle constitue un marché local très sensible à toute information négative ou positive concernant un fournisseur.Cependant, comme l'a relevé le tribunal, la preuve des faits de dénigrement imputables à la société Estime, qui auraient provoqué une image désastreuse de la société Skidata, n'est pas rapportée. Par contre, la collaboration de la société Estime avec la société Time Designa, concurrente directe de la société Skidata, pendant la période contractuelle dans le cadre du marché du Centre Commercial Nice TNL est avérée.Cette inexécution dolosive par la société Estime de ses obligations contractuelles doit être sanctionnée par l'allocation de dommages et intérêts, à hauteur de la perte de marge brute estimée à 10 % sur le marché du Centre Commercial Nice TNL, attribué à la société Time Designa, et pour lequel la société Skidata avait fait une offre de 2.708.788 €, soit 270.000 €.Le jugement dont appel doit donc être infirmé sur ce point.En outre, la société Skidata fait valoir à juste titre, qu'en faisant le choix d'engager la présente procédure, alors qu'elle avait par ailleurs pris l'initiative occulte de la rupture en favorisant un concurrent direct de la société Skidata France, et en persistant au moyen d'un appel alors que le jugement était bien motivé, la société Estime a incontestablement commis un abus de procédure qui doit être sanctionné par sa condamnation à lui verser la somme de 5.000 € pour procédure abusive. L'équité commande en outre d'allouer à la société Skidata France une indemnité de 8.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
CONFIRME le jugement déféré, sauf en ce qui concerne la demande reconventionnelle de la société Skidata France,
Statuant à nouveau sur cette demande,
CONDAMNE la société Estime à payer à la société Skidata France la somme de 270.000 € à titre de dommages et intérêts pour inexécution dolosive de ses obligations contractuelles,
CONDAMNE la société Estime à payer à la société Skidata France la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
DEBOUTE la société Estime de toutes ses demandes,
CONDAMNE la société Estime à payer à la société Skidata France la somme de 8.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société Estime aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Le Greffier

N. KLEINLa Présidente

C. PERRIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 08/20557
Date de la décision : 08/03/2012
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2012-03-08;08.20557 ?
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