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07/03/2012 | FRANCE | N°09/20532

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 07 mars 2012, 09/20532


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 3



ARRÊT DU 7 MARS 2012



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 09/20532



Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Juin 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 06/17473





APPELANTE



SAS NOUVELLE DU REGENCE HOTEL

agissant poursuites et diligences en la personne de son repr

ésentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 6]



représentée par Me Lionel MELUN, avoué à la Cour

assistée de Maître Fabian BACHEM plaidant pour la SELARL ...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRÊT DU 7 MARS 2012

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/20532

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Juin 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 06/17473

APPELANTE

SAS NOUVELLE DU REGENCE HOTEL

agissant poursuites et diligences en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 6]

représentée par Me Lionel MELUN, avoué à la Cour

assistée de Maître Fabian BACHEM plaidant pour la SELARL VINCI, avocat au barreau de PARIS, toque : L 047

INTIMES

Madame [R] [Y] [H] épouse [J]

[Adresse 10]

[Localité 11]

Madame [C] [S] [R] [J] épouse [V]

[Adresse 1]

[Localité 7]

Monsieur [F] [I] [J]

[Adresse 4]

[Localité 5] AUSTRALIE

Monsieur [A] [M] [H] [J]

[Adresse 9]

[Localité 7]

Madame [G] [B] [J] épouse [O]

[Adresse 1]

[Localité 7]

Monsieur [Z] [P] [E] [J]

[Adresse 1]

[Localité 7]

Monsieur [L] [T] [J] veuf de MME [U]

[Adresse 2]

[Localité 8]

représentés par la SCP NABOUDET-HATET, avoués à la Cour

assistés de Maître Sébastien REGNAULT plaidant pour la SCP REGNAULT et ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R 197

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 octobre 2011, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Odile BLUM, conseillère chargée du rapport.

Madame BLUM a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée

de :

Madame BARTHOLIN, Présidente

Madame BLUM, Conseiller

Madame REGHI, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame BASTIN.

ARRÊT :

- contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Madame BARTHOLIN, Présidente, et par Monsieur PARESY greffier,auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

*************

Par acte du 4 novembre 2002, la société nouvelle Regence Hôtel a pris à bail en renouvellement, pour une durée de neuf années à compter du 1er janvier 1997, des locaux dépendants d'un immeuble situé au [Adresse 3], à usage de commerce d'appartements meublés et pension de famille, moyennant un loyer fixé judiciairement à la somme de 290.000 francs (44.210,20 €) en principal et porté à compter du 17 juillet 2002 à la somme de 299.971 francs (45.730,28 €).

Par acte extrajudiciaire du 12 mai 2006, les consorts [J], bailleurs, ont donné congé à leur locataire pour le 31 décembre 2006, avec offre de renouvellement moyennant un loyer de 120.000 €.

Les parties s'étant accordées sur le renouvellement du bail mais non sur le prix, le juge des loyers commerciaux a été saisi et a ordonné une expertise. L'expert a déposé son rapport le 12 mars 2008 puis un rapport complémentaire le 11 décembre 2008, concluant à une valeur locative brute de 74.000 €, sans prise en compte de la loi du 1er juillet 1964 et de 66.600 € après prise en compte d'un abattement de 10% au titre de ladite loi.

Par jugement rendu le 17 juin 2009, le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Paris a :

- fixé à la somme de 73.761 € par an en principal à compter du 1er janvier 2007, le loyer du bail renouvelé depuis cette date,

- dit que les éventuels compléments de loyers consécutifs à cette fixation produiront intérêts au taux légal depuis le 1er janvier 2007 et à compter de chaque échéance nouvelle et capitalisation,

- rejeté le surplus des demandes,

-condamné chacune des parties par moitié aux dépens qui incluront le coût de l'expertise.

La s.a.s. nouvelle Regence Hôtel a relevé appel de cette décision le 2 octobre 2009. Par ses dernières conclusions du 20 septembre 2011, elle demande à la cour :

- d'infirmer le jugement sur le montant du loyer du bail renouvelé,

- de fixer ce loyer à la somme de 50.453 € par an en principal, à compter du 1er janvier 2007,

- de condamner les consorts [J] au paiement des dépens.

Les consorts [J], par leurs dernières conclusions du 4 octobre 2011, demandent à la cour, au visa des articles 9 et 15 du code de procédure civile, R.145-10 du code de commerce, 1356, 1720 et 1754 du code civil et L.331-1 et suivants du code du tourisme, de :

- débouter la société nouvelle Regence Hôtel de ses demandes,

- écarter des débats les jurisprudences citées par la société nouvelle Regence Hôtel dont les références de publication ne sont pas citées et qui n'ont pas été communiquées,

- infirmer le jugement sauf sur le point de départ des intérêts et leur capitalisation,

- fixer le loyer à la somme de 85.100 €/HT/HC/par an et dire n'y avoir lieu à abattement pour travaux,

- à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où il serait jugé que les travaux réalisés par le preneur devraient être pris en compte, dire que l'abattement de 10 % pour travaux sera appliqué au loyer renouvelé du 1er janvier 2007 au 8 janvier 2008,

- condamner la société nouvelle Regence Hôtel à leur payer la somme de 3.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

SUR CE,

Considérant à titre liminaire que les consorts [J] sont bien fondés à voir écarter les jurisprudences citées par la société nouvelle Regence Hôtel qui ne les verse pas aux débats et n'en donne pas les références de publication :

Considérant que les locaux considérés sont situés, [Adresse 14], quasiment en face de l'Institut national de la propriété industrielle (Inpi), dans le quartier de l'Europe, quartier calme le soir mais actif en journée se trouvant entre la gare [15] et la [Localité 13] ; qu'ils constituent la quasi-totalité d'un immeuble de cinq étages plus entresol, occupés au rez-de-chaussée par un grand café, non concerné par le litige, dont l'exploitant a l'usage de trois chambres au 6ème étage avec libre passage par l'escalier pour s'y rendre ; que la société nouvelle Regence Hôtel y exploite un hôtel de 27 chambres au confort usuel mais modeste, classé en 3 étoiles depuis 1998, après rénovation ;

Considérant que l'expert judiciaire a proposé une estimation de la valeur locative selon la méthode dite hôtelière, conforme aux usages de la profession, sur le principe de laquelle les parties s'accordent comme sur les étapes de calcul, la société nouvelle Regence Hôtel ne critiquant que l'abattement pour segmentation de la clientèle de 27,5 % retenu par l'expert au lieu des 30 % qu'elle estime justifiés, le taux d'occupation qu'elle entend voir fixer à 70 % au lieu de 73 % et le coefficient sur recettes qu'elle demande à voir fixer à 12 % au lieu de 13 % :

Considérant que les consorts [J] opposent à tort à la société nouvelle Regence Hôtel un prétendu aveu judiciaire de la société nouvelle Regence Hôtel sur les taux et coefficients critiqués dès lors qu'ils ne s'appuient que sur un simple dire du 6 février 2008 à l'expert tendant au surplus à la contestation d'autres points du projet de rapport ;

Considérant qu'il ressort du rapport d'expertise que compte tenu de l'implantation de l'établissement, entre la gare [15] et la [Localité 13], la clientèle de l'hôtel, exactement qualifié de "petit 3 étoiles", est constituée à 40% de clients dits "société et affaires" ; qu'il demeure que les clients de l'hôtel restent en majorité des touristes en provenance à 70% des tours opérateurs pour lesquels les rabais, remises et délais de paiement sont plus importants ce qui a pertinemment conduit le premier juge à arrêter un abattement de 30% pour segmentation de la clientèle ;

Considérant que c'est encore par une exacte appréciation des faits de la cause et des motifs pertinents que la cour approuve, que le premier juge a retenu le taux d'occupation de 73 % et le coefficient sur recettes de 13 % proposé par l'expert ; qu'il suffit d'ajouter que le taux d'occupation moyen des hôtels 3 étoiles a été à [Localité 12] de 76,60 % en 2005, que la société locataire ne démontre pas une "désertion" de la clientèle en 2006 et que l'expert a parfaitement pris en considération le caractère moyennement touristique du quartier pour estimer à 73% le taux d'occupation de l'hôtel considéré ; que par ailleurs, il est admis que le pourcentage sur recettes est d'autant plus faible que la catégorie de l'hôtel est meilleure ; que l'argumentation de la société nouvelle Regence Hôtel conduirait dès lors à augmenter ce taux de recettes et non à le diminuer ainsi qu'elle le demande ;

Considérant que le premier juge a relevé à juste titre que l'économie générale du bail, qualifié par l'expert de "plutôt favorable au preneur", est exorbitante du droit commun des baux hôteliers au détriment des propriétaires ; qu'en effet, contrairement aux usages observés dans la branche d'activité considérée, le locataire n'a que la charge des réparations locatives, les parties convenant de ce que les travaux de gros entretien dont le ravalement, sont à la charge des bailleurs ; que la société locataire se réfère vainement, au regard des dispositions de l'article R 145-9 du code de commerce, au droit commun du louage d'immeuble ; que la majoration de 15% est en l'espèce justifiée ;

Considérant qu'au vu de ces éléments et des éléments non contestés suivant :

- recette théorique annuelle TTC : 1.138.986,10 €

- après abattement de 30 % : 797.290,20 €

- après coefficient d'occupation de 73% : 582.021,84 €

- après déduction TVA 5,5% : 551.679,47 €

- après déduction taxe de séjour 2006 (3.451,70 €) : 548.227,77 €

- compte tenu du pourcentage sur recettes de 13% : 71.269,61 €

- majoration de 15% pour charges supplémentaires (+10.690,44 €)

la valeur locative s'établit en conséquence à 81.960 € ;

Considérant enfin qu'en vertu de l'ancien article 2 de la loi du 1er juillet 1964 codifié à l'époque des faits sous l'article L 311-3 du code du tourisme (désormais article L 311-2) "le locataire doit, avant de faire procéder aux travaux, notifier son intention à son propriétaire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Un plan d'exécution et un devis descriptif et estimatif des travaux projetés sont joints à cette notification ... ; que selon ce même texte, dans le cas où les travaux affectent le gros oeuvre de l'immeuble, "le propriétaire dispose d'un délai de deux mois pour informer dans la même forme le locataire de son acceptation ou de son refus. Le défaut de réponse est réputé valoir accord" ;

Que l'article L 311-4 du code du tourisme, applicable à l'époque des faits (actuellement L 311-3 du même code) dispose que "pendant toute la durée du bail en cours et celle du bail renouvelé qui lui fait suite et pour une durée de douze années à compter de l'expiration du délai d'exécution mentionné à l'article L 311-3, le propriétaire ne peut prétendre à aucune majoration de loyer du fait de l'incorporation de l'immeuble des améliorations résultant de l'exécution des travaux mentionnés à l'article L 311-2" ;

Considérant qu'en l'espèce, le gérant de la société nouvelle Regence Hôtel a notifié au propriétaire son intention d'entreprendre des travaux de modernisation de son établissement afin de le rendre conforme aux nouvelles normes hôtelières par lettre recommandée avec avis de réception du 20 décembre 1995 en indiquant qu'il s'agissait principalement de rénovation dans les chambres, les salles de bain, peintures des lieux communs et hall d'entrée ; que le propriétaire a donné son accord par lettre du 8 janvier suivant en demandant que ses services et l'architecte de l'immeuble soient informés en cas d'intervention sur le gros oeuvre ; qu'après que les plans d'avant-projet de réhabilitation eurent été remis à l'architecte de l'immeuble, le propriétaire a donné son accord sur ceux-ci le 2 février 1996 ; qu'il n'est pas contesté que les travaux n'ont pas débuté avant la parfaite connaissance par le propriétaire de la nature et de l'ampleur des travaux ;

Considérant qu'il apparaît ainsi que la société locataire a satisfait à la formalité substantielle de notification par lettre recommandée avec avis de réception de son intention de procéder à des travaux le 20 décembre 1995 et que par lettre du 2 février 1996, soit avant même l'expiration du délai de deux mois visé par l'article L 311-3 du code du tourisme et avant le début des travaux, le propriétaire a donné son accord parfaitement éclairé par les plans préalablement communiqués à l'architecte de l'immeuble, au vu de ceux-ci ; que les consorts [J] ne sont en conséquence pas fondés à soutenir qu'aucun plan d'exécution ni devis estimatif des travaux n'ayant été annexés à la notification du 20 décembre 1995, il n'a pas été satisfait à une formalité essentielle permettant de déterminer le point de départ du délai de douze ans et que la société nouvelle Regence Hôtel est ainsi privée du bénéfice des dispositions

légales ;

Considérant qu'il ressort des pièces produites ainsi que du rapport de l'expert judiciaire que le prix affiché des chambres tient compte des travaux de rénovation et que le coût total des travaux relevant de l'ancien article 1 de la loi du 1er juillet 1964 s'élève à près de 215.000 € hors taxes ; que contrairement à ce que soutient la société nouvelle Regence Hôtel, l'abattement de 10% proposé par l'expert et retenu par le premier juge tient exactement compte de l'importance de ces travaux ;

Considérant qu'en application de l'article L 311-4 (devenu L 311-3) du code du tourisme, et au vu de l'acceptation du propriétaire par lettre du 2 février 1996, la société nouvelle Regence Hôtel bénéficiera de l'abattement de 10% sur le montant du loyer à compter du 1er janvier 2007 jusqu'au 2 février 2008, date d'expiration du délai de douze années ;

Considérant que le jugement qui n'est pas critiqué sur les intérêts alloués, leur point de départ et leur capitalisation, ne peut qu'être confirmé sur ces chefs ;

Considérant que la société nouvelle Regence Hôtel qui succombe sur son recours, sera condamnée aux dépens d'appel, le jugement devant être confirmé sur le sort des dépens de première instance ; que vu l'article 700 du code de procédure civile, les demandes à ce titre seront rejetées ;

PAR CES MOTIFS

Écarte des débats les jurisprudences citées sans référence de publication et non communiquées par la société nouvelle Regence Hôtel ;

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a dit que les éventuels compléments de loyers consécutifs à cette fixation produiront intérêts au taux légal depuis le 1er janvier 2007 et à compter de chaque échéance nouvelle et capitalisation et en ce qu'il a condamné chacune des parties par moitié aux dépens de première instance qui incluront le coût de l'expertise ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Fixe à la somme de 81.960 € par an en principal à compter du 1er janvier 2007, le loyer du bail renouvelé depuis cette date ;

Dit que la société nouvelle Regence Hôtel bénéficie d'un abattement pour travaux de 10% sur le montant de ce loyer du 1er janvier 2007 jusqu'au 2 février 2008 ;

Rejette toutes autres demandes ;

Condamne la société nouvelle Regence Hôtel aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 09/20532
Date de la décision : 07/03/2012

Références :

Cour d'appel de Paris I3, arrêt n°09/20532 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-03-07;09.20532 ?
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