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06/03/2012 | FRANCE | N°11/02126

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 1, 06 mars 2012, 11/02126


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 1



ARRET DU 06 MARS 2012



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 11/02126



Décision déférée à la Cour : Recours en annulation d'une sentence rendue à Paris le 13 décembre 2010, par le tribunal arbitral ad'hoc, constitué de MM. [Y] et [M], arbitres, et de M. [T], président, statuant en amiable composition





DEMANDERESS

E AU RECOURS :



S.A. CARREFOUR

prise en la personne de ses représentants légaux



[Adresse 3]

[Localité 4]



représentée par la SCP DUBOSCQ-PELLERIN, Me Jacque...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 1

ARRET DU 06 MARS 2012

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 11/02126

Décision déférée à la Cour : Recours en annulation d'une sentence rendue à Paris le 13 décembre 2010, par le tribunal arbitral ad'hoc, constitué de MM. [Y] et [M], arbitres, et de M. [T], président, statuant en amiable composition

DEMANDERESSE AU RECOURS :

S.A. CARREFOUR

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par la SCP DUBOSCQ-PELLERIN, Me Jacques PELLERIN, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : L 0018

assistée de Me Jean-Pierre GRANDJEAN et de Me Sandrine COLLETIER, avocats plaidant du barreau de PARIS, toque : K 112

DÉFENDERESSE AU RECOURS :

Société COOP ATLANTIQUE

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par la SCP GALLAND-VIGNES, Me Philippe GALLAND, avocat du barreau de PARIS, toque : L 0010

assistée de Me Frédéric BECCARIA et de Me François BROCARD, avocats plaidant du barreau de PARIS, toque : R 59

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 2 février 2012, en audience publique, le rapport entendu, devant la Cour composée de :

Monsieur PERIE, Président

Madame GUIHAL, Conseillère

Madame DALLERY, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Madame PATE

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur PERIE, président et par Madame PATE, greffier présent lors du prononcé.

La société COOP ATLANTIQUE est une société coopérative de consommateurs liée à la société CARREFOUR SA, d'une part, par des contrats d'enseigne conclus en 1997 pour l'exploitation de plusieurs hypermarchés et supermarchés, d'autre part, par la constitution d'une filiale commune, CARCOOP, détenue à parité par ses fondatrices. Les relations entre les associées au sein de CARCOOP sont régies par un 'Contrat de partenariat et management', conclu en 1985 et modifié en 1986, dont l'article 9 prévoit qu'en cas de prise de contrôle de l'une d'elles par un concurrent, l'autre aura la faculté de demander à la première de lui céder sa participation.

Des différends étant survenus entre les parties, COOP ATLANTIQUE a engagé une procédure d'arbitrage en application de la clause compromissoire stipulée à l'article 8 du 'Contrat de partenariat'.

Par une sentence rendue à Paris le 13 décembre 2010, le tribunal arbitral ad hoc, constitué de MM. [Y] et [M], arbitres, et de M. [T], président, statuant en amiable composition, a dit, en substance, que les titres des société CARCOOP et CARCOOP France, ainsi que la valeur des six hypermarchés exploités par ces sociétés, devraient être appréciés par des experts désignés par les parties, que CARREFOUR devrait acquérir tous les titres détenus par COOP ATLANTIQUE dans les filiales communes et vendre trois hypermarchés choisis par elle à COOP ATLANTIQUE, sans obligation de maintien par celle-ci de l'enseigne CARREFOUR.

Le 3 février 2011, CARREFOUR a formé un recours contre cette sentence.

Par conclusions du 25 janvier 2012, elle en poursuit l'annulation, demande qu'il lui soit donné acte de son accord pour revenir, après annulation, devant un tribunal arbitral autrement composé, et sollicite la condamnation de COOP ATLANTIQUE à lui payer la somme de 150.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile. Elle fait valoir que le tribunal arbitral était irrégulièrement composé en raison du défaut d'indépendance de son président (article 1492 2° du code de procédure civile) , qu'il a outrepassé sa mission en statuant sur une chose qui n'était pas demandée (article 1492 3° du code de procédure civile) et qu'il a méconnu le principe de la contradiction (article 1492 4° du code de procédure civile).

Par conclusions du 17 janvier 2012, COOP ATLANTIQUE demande à la Cour de dire irrecevables et, subsidiairement, mal fondés les moyens proposés par CARREFOUR et de condamner celle-ci à lui payer la somme de 150.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR QUOI :

Sur le moyen tiré de l'irrégularité de la composition du tribunal arbitral (article 1492 2° du code de procédure civile) :

CARREFOUR expose que trois jours après la sentence, COOP ATLANTIQUE lui a annoncé qu'elle quittait son réseau et que le 5 avril 2011, elle a fait connaître par voie de presse qu'elle adhérait au groupement Système U. CARREFOUR ajoute que son adversaire a refusé de déférer à une sommation de produire tous éléments sur la date des premières négociations avec Système U et souligne que la sentence prévoit une faculté de substitution au profit de COOP ATLANTIQUE. CARREFOUR en déduit qu'elle n'a pas bénéficié d'un tribunal indépendant et impartial dès lors que M. [T] a omis de déclarer qu'il était associé d'un cabinet d'avocats lié au groupement Système U.

COOP ATLANTIQUE rétorque que le moyen est irrecevable pour avoir fait l'objet d'une décision irrévocable du président du tribunal de grande instance de Paris.

Considérant que l'ordonnance rendue le 22 juillet 2011, dans le cadre de l'instance arbitrale, par le président du tribunal de grande instance de Paris saisi en qualité de juge d'appui, qui décide que la composition du tribunal est régulière, est insusceptible de recours et statue irrévocablement sur l'indépendance de l'arbitre, question qui ne peut plus être rejugée par le moyen du recours en annulation, dès lors que l'objet de la contestation, portant sur les liens avec le groupement Système U du cabinet d'avocats dont M. [T] est associé, est identique quant à l'appréciation des causes de récusation;

Que le moyen est donc irrecevable;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance par les arbitres de leur mission (article 1492 3° du code de procédure civile) :

CARREFOUR soutient que l'objet du litige a été méconnu par les arbitres qui ont considéré dans leur délibéré avoir été saisis d'une demande de partage de CARCOOP alors que cette demande n'avait pas été exprimée autrement par COOP ATLANTIQUE que sous forme d'une proposition de conciliation, en cours de délibéré et que les prétentions soumises par COOP ATLANTIQUE tendaient seulement au rachat de l'ensemble des parts de la filiale commune en application de l'article 9 du contrat.

Considérant que la mission des arbitres, définie par la convention d'arbitrage, est délimitée principalement par l'objet du litige tel qu'il est déterminé par les prétentions des parties;

Considérant que les arbitres étaient saisis en application de l'article 8 de la convention de partenariat, rédigé dans les termes suivants : 'En cas de difficulté sur l'interprétation ou l'exécution de l'une des clauses ci-dessus, ou sur la fixation des modalités de dévolution de la société commune en application de l'article trois, les différends éventuels seront réglés par arbitrage (...) Les arbitres prononceront comme amiables compositeurs';

Considérant que si COOP ATLANTIQUE a initialement soumis au tribunal arbitral une demande de cession des parts de CARREFOUR dans le capital de CARCOOP en invoquant, conformément à l'article 9 de la convention de partenariat, le changement de contrôle du groupe CARREFOUR, elle a ultérieurement fait évoluer ses demandes vers la recherche d'une sortie du partenariat;

Considérant, en effet, qu'à la suite de la réouverture des débats par le tribunal arbitral et de la prorogation, acceptée par les deux parties, du délai dans lequel la sentence devait être rendue, COOP ATLANTIQUE, par un mémoire du 24 septembre 2010 en réponse aux questions des arbitres, a expliqué que l'avenant de 1986 avait substitué à l'article 5 de la convention initiale - qui prévoyait une clause de 'buy and sell' en cas de désaccord persistant - le mécanisme de l'article 9; que celui-ci ne pouvait être interprété comme interdisant qu'il soit mis fin à un partenariat déséquilibré qui durait depuis 25 ans et qu'il convenait de rechercher, en amiable composition, une solution pouvant consister dans l'acquisition des parts de CARREFOUR, ou dans la cession de sa propre participation ou encore dans un partage des actifs;

Considérant que les arbitres, saisis en vertu d'une clause d'arbitrage qui leur soumettait toutes contestations relatives à l'interprétation et à l'exécution de la convention, pouvaient, en recherchant l'effet utile de l'article 9 et sans outrepasser la mission d'amiables compositeurs dont ils étaient investis, fixer, comme ils y étaient expressément invités par COOP ATLANTIQUE, les modalité d'une sortie équitable du partenariat, sans s'attacher uniquement à l'énoncé des questions litigieuses dans l'acte de mission;

Que le moyen ne peut donc qu'être écarté;

Sur le moyen tiré de la violation du principe de la contradiction (article 1492 4° du code de procédure civile) :

CARREFOUR fait valoir que les arbitres ont modifié les termes du débat après avoir ordonné sa ré-ouverture sans motif, et qu'ils ont prononcé, en se prévalant d'un 'effet utile' relevé d'office, sur un principe de 'séparation' et sur des modalités de 'partage' dont il n'avait pas été débattu.

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, à la suite de la réouverture des débats et de la prorogation du délai d'arbitrage acceptée par les deux parties, COOP ATLANTIQUE, par un mémoire du 24 septembre 2010, après s'être expliquée, à la demande des arbitres, sur la genèse de l'article 9, a sollicité l'examen de toutes solutions de sortie du partenariat sous forme de cession de parts ou de partage de l'actif de CARCOOP; que CARREFOUR, qui a répondu par une note du 6 octobre 2010, et qui a été ainsi mise en mesure de débattre de l'ensemble des termes du litige, ne peut se faire un grief d'avoir refusé de répondre aux nouveaux éléments avancés par COOP ATLANTIQUE, ni reprocher aux arbitres, qui n'avaient pas l'obligation de soumettre à la discussion des parties l'argumentation juridique qui étaye leur motivation, d'avoir retenu, en vertu du principe général de l'effet utile des stipulations, une interprétation de l'article 9 de la convention permettant une solution de partage des actifs de la filiale commune;

Que le moyen ne peut donc qu'être écarté;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le recours doit être rejeté;

Que CARREFOUR, qui succombe, devra payer à COOP ATLANTIQUE la somme de 100.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile;

PAR CES MOTIFS :

Rejette le recours en annulation de la sentence rendue entre les parties le 13 décembre 2010.

Condamne la société CARREFOUR SA à payer à la société COOP ATLANTIQUE la somme de 100.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société CARREFOUR SA aux dépens et admet Me [V] au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 11/02126
Date de la décision : 06/03/2012

Références :

Cour d'appel de Paris A1, arrêt n°11/02126 : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-03-06;11.02126 ?
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