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23/02/2012 | FRANCE | N°10/04832

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 23 février 2012, 10/04832


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRET DU 23 Février 2012

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/04832



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Avril 2010 par le conseil de prud'hommes de MELUN Section INDUSTRIE RG n° 08/00870





APPELANT

Monsieur [T] [X]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

comparant en personne

assisté de Me Lionel PARIENTE, avocat au barrea

u de PARIS, toque : B0372 substitué par Me Olivier GADY, avocat au barreau de PARIS, toque : B.372







INTIMEE

SAS MERSEN FRANCE anciennement SA FERRAZ SHAWMUT

[Adresse 1]

[Adres...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRET DU 23 Février 2012

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/04832

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 Avril 2010 par le conseil de prud'hommes de MELUN Section INDUSTRIE RG n° 08/00870

APPELANT

Monsieur [T] [X]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

comparant en personne

assisté de Me Lionel PARIENTE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0372 substitué par Me Olivier GADY, avocat au barreau de PARIS, toque : B.372

INTIMEE

SAS MERSEN FRANCE anciennement SA FERRAZ SHAWMUT

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Bruno DEGUERRY, avocat au barreau de LYON substitué par Me Marie DAIRION, avocat au barreau de PARIS, toque : A0033

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Janvier 2012, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Jean-Marc DAUGE, Président, chargé d'instruire l'affaire et M. Bruno BLANC, Conseiller.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Marc DAUGE, Président

Monsieur Bruno BLANC, Conseiller

Madame Marie- Antoinette COLAS, Conseiller

Greffier : Mme Evelyne MUDRY, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jean-Marc DAUGE, Président, et par Melle Laëtitia CAPARROS, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par contrat verbal à durée indéterminée à effet du 1er juillet 1980, M. [T] [X] a été engagé en qualité de chef d'atelier.

Dans le dernier état des relations contractuelles, M. [T] [X] occupait les fonctions de dessinateur et percevait une rémunération brute mensuelle moyenne de 2747,83 €.

La convention collective applicable à l'entreprise, qui emploie par ailleurs plus de 10 salariés, est la convention collective des industries métallurgiques, mécaniques, électriques, connexes et similaires du département de la Seine et Marne.

Par lettre remise en main propre le 26 septembre 2008, M. [T] [X] a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement. L'entretien s'est tenu le 3 octobre 2008.

Puis, par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 10 octobre 2008, la SA FERRAZ SHAWMUT a notifié à M. [T] [X] son licenciement pour faute grave.

Contestant son licenciement, M. [T] [X] a saisi le conseil de prud'hommes de Melun le 9 décembre 2008 afin d'entendre condamner la SA FERRAZ SHAWMUT à lui payer les sommes suivantes:

* 8 243,49 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 824,34 € au titre des congés payés afférents,

* 22 211,48 € à titre d'indemnité de licenciement,

* 65 947,92 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par M. [T] [X] du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Melun le 15 avril 2010 qui l'a débouté de l'ensemble de ses demandes. La SA FERRAZ SHAWMUT a également été débouté de sa demande reconventionnelle.

Vu les conclusions en date du 12 janvier 2012, au soutien de ses observations orales, par lesquelles M. [T] [X] demande la cour :

- d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau:

- de condamner la SA FERRAZ SHAWMUT à lui payer les sommes suivantes:

* 8 243,49 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 824,34 € au titre des congés payés afférents,

* 22 211,48 € à titre d'indemnité de licenciement,

* 65 947,92 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Vu les conclusions en date du 12 janvier 2012, au soutien de ses observations orales, par lesquelles la SA FERRAZ SHAWMUT , aujourd'hui dénommée MERSEN FRANCE demande à la cour :

- de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

- de débouter M. [T] [X] de l'intégralité de ses demandes,

- de condamner M. [T] [X] à lui payer la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

SUR CE :

Sur le licenciement :

Considérant que la lettre de licenciement, à laquelle il est expressément fait référence, qui fixe les limites du litige, lie les parties et le juge qui ne peut examiner d'autres griefs que ceux qu'elle énonce, est ainsi motivée :

' ... Nous avons décidé de prendre à votre encontre une sanction qui consiste en un licenciement pour faute grave.

En effet, nous vous avons rappelé dans notre courrier du 18 septembre 2008(remis en main propre le même jour) que nous vous demandions de vous mettre en conformité avec la nouvelle organisation du bureau d'études. Cette organisation vous a été annoncée le 5 septembre 2008 pour mise en application le 15 du même mois. Cette nouvelle organisation a été annoncée en CE le 17 juillet 2008 et présentée le 3 septembre 2008.

Nous constatons que depuis le 18 septembre 2008, vous ne vous êtes toujours pas conformé aux horaires d'équipe mis en place.

Vous refusez de vous conformer à cette organisation en évoquant que

« depuis 28 ans vous faites des horaires de bureau de journée et que vous n'avez pas envie de vous le lever à quatre heures du matin ».

Votre refus est ferme et définitif, nous ne pouvons tolérer un tel comportement. Cette décision prendra effet à la date de réception du présent courrier...';

Considérant que, pour infirmation, M. [T] [X] soutient que son contrat de travail a fait l'objet d'une modification consistant en la révision d'un élément essentiel, à savoir le passage d'un horaire fixe à un horaire variant par cycle; qu'alors qu'il travaillait depuis 28 ans selon des horaires de jours, discontinus et fixes, la SA FERRAZ SHAWMUT lui a imposé, en moins de 10 jours, un passage à un horaire de nuit, continue et variable en cycles; que dès lors, il était en droit de refuser la modification du contrat de travail sans que cela ne constitue une faute;

Considérant que, pour confirmation, la SA FERRAZ SHAWMUT devenue SAS MERSEN FRANCE soutient qu'il ne s'agissait pas d'une modification du contrat de travail mais d'un simple changement des conditions de travail et que l'employeur se trouvait dans l'exercice de son pouvoir de direction, la durée du travail et la rémunération restant identiques; que les nouveaux horaires ont été précédés de consultations des représentants des salariés; que le refus d'accepter la nouvelle répartition de l'horaire de travail au sein de la journée constitue une faute grave ce d'autant qu'elle n'était programmée, à titre provisoire, que jusqu'à la fin du mois de décembre 2008; que dès lors l'insubordination de M. [T] [X] justifiait le licenciement pour faute grave;

Considérant que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié , qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail , d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l'employeur ;

Que c'est à l'employeur qui invoque la faute grave et s'est situé sur le terrain disciplinaire et à lui seul de rapporter la preuve des faits allégués et de justifier qu'ils rendaient impossible la poursuite du contrat de travail de M. [T] [X] même pendant la durée du préavis ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que les horaires antérieurs du salarié étaient établis comme suit:

* 8 heures - 9 heures : plage horaire d'arrivée

* 9 heures - 11 heures 30 : présence obligatoire

* 11 heures 30 - 13 heures 30 : plage horaire pour le déjeuner

* 13 heures 30 - 16 heures : présence obligatoire

* 16 heures - 18 heures 30 : plage horaire de départ ;

Qu'à compter du 15 septembre 2008, le travail du bureau d'études était réparti en deux équipes distinctes:

* une première équipe, travaillant le matin, de 5 heures à 13 heures 02

* une seconde équipe, travaillant l'après-midi, de 12 heures 58 à 21 heures;

Qu'il est constant que le salarié avait vocation à être affecté, selon les besoins de l'entreprise, tantôt à l'équipe du matin tantôt à celle de l'après-midi;

Considérant que si un simple changement d'horaire n'est pas, en principe, une modification du contrat de travail, il peut, néanmoins, caractériser une modification du contrat de travail dès lors qu'il entraîne un bouleversement de l'économie du contrat même temporaire; qu'en l'espèce, le nouvel horaire entraînait un passage partiel d'un horaire de jour à un horaire de nuit puisque le salarié pouvait être amené à commencer son travail avant 6 heures; qu'il s'agissait également d'un passage d'un horaire fixe à un horaire variable par cycle ; qu' en conséquence, le nouvel horaire entraînait une modification du contrat de travail que le salarié était en droit de refuser, étant observé que M. [T] [X] travaillait dans l'entreprise depuis juillet 1980 selon des horaires de bureau de journées, discontinus et fixes;

Qu'en conséquence, il convient d'infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions;

Sur les conséquences:

Considérant que compte tenu de l'effectif du personnel de l'entreprise (plus de 11 salariés), de l'ancienneté ( 28 ans )et de l'âge du salarié (né en février 1949) ainsi que des conséquences matérielles et morales du licenciement à son égard, telles qu'elles résultent des pièces produites et des débats, il lui sera alloué, en application de l'article L.1235-3 du Code du travail une somme de 65 947 € à titre de dommages-intérêts ; Que par ailleurs, les demandes présentées par M. [T] [X] au titre de l'indemnité légale de licenciement, de l'indemnité conventionnelle de licenciement et des congés payés afférents n'étant pas contestées dans leurs montants, il convient d'y faire droit en raison de l'absence de faute grave;

Considérant qu'en vertu l'article L 1235-4 du code du travail dont les conditions sont réunies en l'espèce, le remboursement des indemnités de chômage par la SA FERRAZ SHAWMUT , employeur fautif, est de droit ; que ce remboursement sera ordonné ;

Considérant que l'équité et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif ;

PAR CES MOTIFS,

INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau:

JUGE le licenciement de M. [T] [X] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la SAS MERSEN FRANCE à payer à M. [T] [X] les sommes suivantes:

* 22 211,48 € au titre de l'indemnité légale de licenciement,

* 8 243,49 € à titre d'indemnité conventionnelle compensatrice de préavis,

* 824,34 € au titre des congés payés afférents,

* 65 947  € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêts au taux légal à compter à compter du présent arrêt,

CONDAMNE la SAS MERSEN FRANCE à payer à 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,

ORDONNE, dans les limites de l'article L 122-14-4 alinéa 2, ancien devenu L 1235-4 du code du travail, le remboursement par la SAS MERSEN FRANCE à l'organisme social concerné des indemnités de chômage payées à M. [T] [X] ,

ORDONNE la notification du présent arrêt à PÔLE EMPLOI,

CONDAMNE la SAS MERSEN FRANCE aux entiers dépens de première instance et d'appel,

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 10/04832
Date de la décision : 23/02/2012

Références :

Cour d'appel de Paris K7, arrêt n°10/04832 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-02-23;10.04832 ?
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