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22/02/2012 | FRANCE | N°10/09141

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 22 février 2012, 10/09141


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 22 Février 2012

(n° 11 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/09141-BVR



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Octobre 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS section Encadrement RG n° 08/00174









APPELANT

Monsieur [P] [U]

[Adresse 1]

[Localité 4]

comparant en personne assisté de Me Bru

no AGID, avocat au barreau de PARIS, toque : P0405







INTIMÉE

SA COMPAGNIE 1818- BANQUIERS PRIVÉS

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par la SCP LEANDRI & ASSOCIES, avocats au barreau de P...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 22 Février 2012

(n° 11 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/09141-BVR

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 Octobre 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS section Encadrement RG n° 08/00174

APPELANT

Monsieur [P] [U]

[Adresse 1]

[Localité 4]

comparant en personne assisté de Me Bruno AGID, avocat au barreau de PARIS, toque : P0405

INTIMÉE

SA COMPAGNIE 1818- BANQUIERS PRIVÉS

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par la SCP LEANDRI & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS substituée par Me Aude MARTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : R271

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 Décembre 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Patrice MORTUREUX DE FAUDOAS, Président

Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Conseillère

Madame Claudine ROYER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Mme Evelyne MUDRY, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Patrice MORTUREUX DE FAUDOAS, Président et par Evelyne MUDRY, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

Suivant jugement en date du 5 octobre 2009, auquel la cour se réfère pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes de Paris a débouté monsieur [P] [U] de ses demandes de requalification de son contrat de prestation de service en contrat à durée indéterminée et de sommes au titre de la rupture.

Monsieur [P] [U] a régulièrement relevé appel de ce jugement.

L'affaire fixée un première fois à l'audience du 31 août 2010 a fait l'objet d'une radiation le même jour pour conclusions tardives de l'appelant n'ayant pas permis à l'intimé de répondre dans de bonnes conditions, avant d'être rétablie le15 octobre 2010.

Vu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile et les conclusions des parties régulièrement communiquées, oralement soutenues et visées par le greffe à l'audience du 13 décembre 2011 conclusions auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé de leurs demandes, moyens et arguments.

******

Il résulte des pièces et des écritures des parties les faits constants suivants :

La Compagnie 1818-Banquiers Privés, devenue Banque Privée 1818, est une banque d'affaires réservée à la gestion de fortunes d'investisseurs privés.

Le 1er novembre 2005, elle a conclu avec la société de conseil Charm, représentée par monsieur [P] [U], un contrat de prestation de conseils, par lequel cette dernière mettait à sa disposition , pour une durée de 6 mois, un consultant senior, en l'occurrence monsieur [U], spécialisé en communication et en relation clients.

Ce contrat de prestation de conseil a été renouvelé les 27 mars et 11 décembre 2006, pour s'achever, s'agissant de ce dernier avenant, le 31 décembre 2007, un délai de prévenance de trois mois étant fixé par les parties avant chaque échéance pour fixer leurs intentions.

Au titre de sa mission d'assistance, monsieur [U] établissait des factures représentant un coût compris entre 15.000 euros et 24.000 euros, auquel s'ajoutait une TVA de 19,60 % .

Par courrier du 26 juillet 2007, la Compagnie 1818-Banquiers Privés a fait connaître à la société Charm son intention de ne pas reconduire le contrat après le 31 décembre 2007.

Prétendant que le contrat de prestation de conseil devait s'analyser en un contrat de travail à durée indéterminée et que dès lors la rupture intervenu était illégitime, monsieur [P] [U] a saisi le conseil de prud'hommes le 8 janvier 2008.

MOTIFS

Considérant qu'à l'appui de ses réclamations, monsieur [P] [U] fait valoir qu'il a été débauché de la société LP Consulting pour entrer au sein de la Compagnie 1818-Banquiers Privés, qu'il avait eu la promesse que le contrat de prestation signé au nom de la société Charm, société n'ayant jamais existé, se transformerait en contrat à durée indéterminée, qu'il a enfin exercé sous la subordination de la Compagnie 1818-Banquiers Privés et a toujours été traité comme un salarié de la structure;

Considérant que la Compagnie 1818-Banquiers Privés conteste l'existence d'un contrat de travail, faisant valoir pour l'essentiel que monsieur [P] [U] était un travailleur indépendant;

Et considérant que c'est à bon droit, que les premiers juges ont conclu à l'absence de tout contrat de travail entre la Compagnie 1818-Banquiers Privés et monsieur [P] [U];

Considérant en effet que la compagnie1818-Banquiers Privés n'a pas conclu un contrat de prestation de conseils avec monsieur [U] mais avec la société Charm société à responsabilité limitée inscrite au registre du commerce de Nanterre dont monsieur [U] était le gérant; que monsieur [U] ne peut nier cette immatriculation qui figure sur le contrat de prestation de services;

Que monsieur [P] [U], qui s'est toujours présenté comme un expert en conseil aux entreprises et qui dirigeait plusieurs sociétés de conseil en communication , s'était par ailleurs inscrit sous cette enseigne et sous le même numéro au registre du commerce en qualité de travailleur indépendant catégorie 'profession libérale' au titre d'une activité de conseils pour les affaires et la gestion;

Que contrairement à ce qu'il indique encore cette inscription est antérieure à la conclusion du contrat litigieux et se situe dans le périmètre de l'activité qu'il exerçait depuis plusieurs années ( gérant des sociétés Essentiall Services , Créateur de Relations à la Marque, société Nouveau siècle);

Et considérant qu'il ressort des dispositions de l'article L8221-6 du code du travail que sont présumés ne pas être liés avec le donneur d'ordre par un contrat de travail dans l'exécution de l'activité donnant lieu à immatriculation ou inscription, les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés;

Que l'article L.8221-6-1 code du travail ajoute qu'est présumé travailleur indépendant celui dont les conditions de travail sont définies exclusivement par lui-même ou par le contrat les définissant avec son donneur d'ordre ;

Considérant en l'espèce que les dispositions du contrat de prestation de service caractérisent des conditions du travail indépendant puisqu'elles prévoient :

- l'établissement de factures à l'en tête de la société Charm 'Chain Reaction Management' incluant le montant des honoraires (forfait mensuel 25.000 euros), une remise commerciale de 10.000 euros ainsi que la TVA de 19,60 % , ce qui représente un total mensuel de TTC de 17.940 euros,

- une refacturation des frais et débours engagés par la société Charm dont les frais kilométriques pour les trajets effectués par monsieur [P] [U],

- un droit unilatéral de résiliation au profit de la société Charm en cas de défaut de paiement d'une facture trente jours après mise en demeure,

- une facturation supplémentaire pour toute mise à disposition d'outils dont la société Charm était propriétaire,

- une compétence juridictionnelle expressément attribuée au tribunal de commerce de Nanterre,

Qu'il s'agit bien, pour la société Charm, qui par ailleurs n'avait aucune exclusivité, de prestations de travail indépendant faisant présumer l'absence de contrat de travail;

Qu'il appartient donc à monsieur [P] [U], qui s'en prévaut, de renverser cette présomption légale;

Considérant que la preuve du contrat de travail se définit par la preuve d'un lien de subordination; que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ;

Et considérant en l'espèce tout d'abord que le contrat de prestation de service prévoit que par la nature de son intervention, le conseiller de la société Charm, est appelé à demeurer dans les murs de la Compagnie 1818-Banquiers Privés et qu'il s'engage à se conformer au règlement intérieur de la Compagnie 1818-Banquiers Privés;

Que la présence dans les locaux de la banque relevait donc, pour monsieur [U], d'une obligation de son contrat de prestation;

Considérant ensuite que le fait qu'il ait disposé de cartes de visites au nom de la Compagnie 1818-Banquiers Privés portant le titre de ' directeur de l'agence de communication', d'un bureau et d'outils de communication et adresse électronique au nom de la société, une place de parking, ne révèlent aucun lien hiérarchique dans la mesure où ils sont l'expression de moyens visant à l'identifier vis à vis des clients de l'établissement bancaire qu'il représentait en sa qualité de mandataire, et de faciliter la communication avec ces tiers et les salariés de la banque qui étaient amenés à le contacter;

Que les échanges de mails versés aux débats participent également de la coopération nécessaire entre les parties, entrent dans le champ du contrat souscrit et sont inhérents à tout rapport entre un prestataire de conseil et son client;

Considérant par ailleurs qu'il n'est aucunement établi qu'il recevait des ordres ou des instructions , qu'il était subordonné à un horaire de travail, qu'il devait rendre compte de son activité;

Qu'à cet égard, l'établissement d'un planning prévisionnel pour faciliter l'organisation de la collaboration au sein de la banque ne caractérise pas une quelconque subordination, puisque précisément monsieur [U] accomplissait sa mission au sein de la banque et était lié à certaines obligations contractuelles relevant de sa mission de prestation;

Que les attestations qu'il produit sont insuffisantes pour asseoir ses affirmations; que si les témoins, des clients de la banque pour la plupart attestent , l'un qu'il n'avait 'pas de doute quant à son statut de salarié', un autre 'qu'il était très clair qu'à mes yeux' il était salarié, un autre encore qu'il 'était intégré au fonctionnement quotidien de la compagnie', leurs propos relèvent de leur seule appréciation subjective;

Que s'agissant enfin de sa rémunération, monsieur [U] adressait à son co contractant des factures d'honoraires, au nom de la société Charm, avec indication du montant toutes taxes comprises et celui de la TVA, comme le révèlent les pièces produites; qu'il facturait également toute prestation supplémentaire non couverte par le contrat initial;

Que ses revenus dont le montant était sans commune mesure, avec un salaire auquel il aurait pu prétendre, étaient déclarés au titre de bénéfices non commerciaux (224.263 euros en 2006);

Qu'il y déduisait ses charges et notamment ses indemnités de déplacement au titre d'une 'jaguar' et différents dépenses tels que achat de matériel, frais divers de gestion;

Que ce mode de rémunération est incompatible avec l'exercice d'un contrat de travail;

Considérant en définitive que les conditions de la mise à disposition par la société Charm de monsieur [P] [U] au sein de la Compagnie 1818-Banquiers Privés est couverte par la présomption de non salariat; que cette présomption , en l'état des éléments produits n'est pas renversée par le demandeur, qui gère en outre aujourd'hui, différentes sociétés commerciales dans le domaine de l'hôtellerie ;

Considérant dès lors que le jugement doit être confirmé ;

Que monsieur [U] qui succombe sera condamné aux dépens outre à une indemnité de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement en toutes ses dispositions

Déboute monsieur [P] [U] de ses demandes,

Le condamne à verser à la Compagnie 1818-Banquiers Privés une indemnité de 2.500 euros ainsi qu'aux dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 10/09141
Date de la décision : 22/02/2012

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°10/09141 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2012-02-22;10.09141 ?
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