Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 3
ARRÊT DU 1er FÉVRIER 2012
(n° ,4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 2010/04194
Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 janvier 2010 rendu par le Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 07/02193
APPELANTE :
- La société MAPLE EUROPE LTD
prise en la personne de ses représentants légaux
dont le siège social est : [Adresse 9]
GRANDE BRETAGNE
ayant son principal établissement : [Adresse 3]
Représentée par la SCP GARNIER, avoué près la Cour d'Appel de PARIS
assistée de Maître Philippe Hubert BRAULT, du CABINET BRAULT ET ASSOCIÉS, avocats au barreau de PARIS, toque : J82.
et
INTIMÉE :
- La S.A COMPAGNIE FONCIERE PARISIENNE
prise en la personne de ses représentants légaux
dont le siège social est : [Adresse 1]
Représentée par la SCP VERDUN-STEVENO, avoué à la Cour
assistée de Maître Jean-Bernard LHEZ, avocat au barreau de Paris, toque : A 352.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 novembre 2011, en audience publique, l'avocat de l'appelant et l'avocat de l'intimé ne s'y étant pas opposés, devant Mme Isabelle REGHI, Conseillère, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
- Mme Chantal BARTHOLIN, Présidente
- Mme Marie Odile BLUM, Conseillère
- Mme Isabelle REGHI, Conseillère
GREFFIER, lors des débats : M. Benoît TRUET-CALLU
ARRÊT :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Chantal BARTHOLIN, présidente et par Melle Fatia HENNI, greffier auquelle la minute du présent arrêt a été remise.
* * * * * *
FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Suivant acte sous-seing privé du 12 septembre 1996, la société Compagnie foncière parisienne a donné en location à la société Maple Europe des locaux commerciaux situés [Adresse 3] et [Adresse 2], pour une durée de 9 ans à compter du 1er janvier 1996, pour un loyer annuel en principal de 326 798 €. Le loyer a été révisé le 1er janvier 2002 et porté à la somme de 363 854,37 €.
Par acte du 3 août 2004, la société Maple Europe a demandé le renouvellement du bail.
Dans sa réponse du 28 décembre 2004 à la demande de renouvellement, la société Compagnie foncière parisienne a fait connaître qu'elle proposait un loyer annuel de 714 000 € à compter du 1er janvier 2005.
Par acte du 9 février 2007, la société Compagnie foncière parisienne a saisi le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Paris d'une demande tendant à voir fixer le loyer du bail renouvelé. Par jugement du 5 octobre 2007 un expert a été désigné, qui a rendu son rapport le 5 mai 2009.
Par jugement du 27 janvier 2010, le juge a :
- fixé le loyer annuel des locaux commerciaux à compter du 1er janvier 2005 à la somme de 515965 €, sans modification aux clauses et conditions du bail antérieur,
- dit que les compléments de loyers consécutifs à la fixation produiront intérêts au taux légal à compter de chaque échéance nouvelle, avec capitalisation,
- rejeté la demande d'exécution provisoire,
- rejeté le surplus des demandes,
- condamné chacune des parties par moitié aux dépens.
La société Maple Europe a fait appel du jugement.
Dans ses dernières conclusions, signifiées le 10 novembre 2011, la société Maple Europe demande :
- l'infirmation du jugement,
- le débouté de la demande de déplafonnement,
subsidiairement :
- l'irrecevabilité et le mal fondée de la demande au titre de la modification notable du montant de l'impôt foncier,
- de fixer le loyer annuel du bail renouvelé à la somme de 404 744 € hors taxes et hors charges,
à titre infiniment subsidiaire :
- la confirmation du jugement sur la fixation du montant du loyer,
- son infirmation sur les intérêts dus sur les rappels de loyer et de dire que ces intérêts ne seront dus qu'à compter de la décision,
en tout état de cause :
- la condamnation de la société Compagnie foncière parisienne au paiement de la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions, signifiées le 21 septembre 2011, la société Compagnie foncière parisienne, formant appel incident, demande :
- la confirmation du jugement en ce qui concerne les intérêts,
- le débouté des demandes de la société Maple Europe,
- la fixation du loyer annuel à la somme de 714 000 €,
- la condamnation de la société Maple Europe au paiement de la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 16 novembre 2011.
CELA EXPOSE,
Considérant que la société Maple Europe rappelle que l'avis de l'expert était plus que réservé concernant la qualité de l'emplacement ; que le juge a écarté l'avis de l'expert au motif que tous les éléments constituaient des synergies caractérisant une amélioration notable de la commercialité du quartier, alors que l'évolution des facteurs locaux de proximité, comme les lignes nouvelles de métro, la création d'un ensemble immobilier Edouard VII et l'implantation de grandes enseignes nationales et internationales sur les [Localité 4], ne peuvent avoir d'impact déterminant sur un commerce connu depuis un siècle et jouissant d'une clientèle drainée dans toute la région parisienne ; que le bailleur se fonde sur un second motif qui tient à la modification de l'impôt foncier qu'il acquitte, qui serait passé de 41 390 € en 1996 à 68 325 € en 2005, alors que, d'une part l'année 2005 ne devrait pas être prise en compte car elle est postérieure à la prise d'effet du bail renouvelé, que, d'autre part, la part concernant effectivement les lieux loués ne peut être déterminée ni que l'augmentation alléguée constitue une modification notable des obligations ;
Considérant que la société Compagnie foncière parisienne réplique que la situation des lieux est privilégiée, sur une voie privée piétonne dans le centre de [Localité 6] et à proximité des grands boulevards et de la [Localité 7], excellemment desservie par les transports en commun, avec une assez bonne visibilité depuis la [Adresse 8] et l'accès au RER ; que les lieux loués dépendent d'un ensemble immobilier de type haussmannien, avec un caractère particulièrement adapté à l'activité exercée ; que l'évolution de la population vers une population active tertiaire dans les bureaux, les nouveaux habitants du quartier et la fréquentation accrue des stations de métro drainant de nouveaux chalands, constituent une modification notable des facteurs locaux de commercialité ; que, sur la modification des charges relative à l'impôt foncier, il faut inclure l'année 2005 pour obtenir une variation sur 9 ans, ce qui conduit à constater une augmentation notable de 65 % ;
Considérant que les lieux loués, à destination de commerce de meubles et de décoration intérieure haut de gamme, sont situés à l'angle d'une artère secondaire, la [Adresse 3], et du [Adresse 2] ; que la [Adresse 3] comporte pour l'essentiel des restaurants avec plusieurs emplacements fermés ou neutralisés ; que le [Adresse 2] présente une commercialité limitée ; qu'il en résulte que l'emplacement ne peut, contrairement à ce que soutient la société Compagnie foncière parisienne, être considéré, en tant que tel, comme privilégié ;
Considérant que s'il est incontestable qu'avec la création de 264 appartements, de 40 000 m2 de surfaces commerciales et de 126 000 m2 de bureaux, l'évolution de la population de l'arrondissement a été caractérisée par une baisse des composantes les plus modestes au profit de l'augmentation des cadres, qui, en principe, constituent plutôt la clientèle du commerce considéré, si la fréquentation des stations de métro, grâce à la création du RER en 1999 et de celle de la nouvelle ligne en 1998, a augmenté et si, à proximité immédiate des lieux loués, un parc de stationnement public s'est ouvert, pour autant de tels éléments ne permettent pas de retenir une modification notable des facteurs locaux de commercialité ; qu'en effet, il s'agit d'un commerce, établi depuis 1978 dans les lieux, dont la clientèle n'est pas réduite au rayon de 500 mètres des lieux loués mais se trouve au moins dans l'ensemble de la région parisienne ; que, dès lors, la société Compagnie foncière parisienne, en se contentant d'évoquer l'augmentation des moyens de communication, des surfaces commerciales, des emplacements de stationnement et d'une population active tertiaire, n'établit pas que de tels facteurs auraient une incidence sur un commerce de meubles haut de gamme, à l'écart des artères de passage, dans un axe secondaire, et à peine visible de la [Adresse 8], ainsi que l'a d'ailleurs, exactement, constaté le premier juge ; que la société Compagnie foncière parisienne ne justifie pas davantage en quoi l'implantation de grandes enseignes nationales ou internationales sur le [Localité 4] ou la restructuration de [5] auraient un impact significatif sur ce magasin de meubles d'une catégorie supérieure, situé à distance de l'un et l'autre de ces lieux ;
Considérant que la société Compagnie foncière parisienne soutient que ses obligations ont été modifiées par l'augmentation importante de l'impôt foncier ;
Considérant toutefois qu'à retenir ce qu'il convient de supposer être le montant correspondant aux seuls lieux loués, il ne résulte pas des pièces versées aux débats, soit les avis d'imposition des années 1996, 2004 et 2005, une augmentation de l'impôt foncier constituant une modification notable des charges pesant sur le bailleur ;
Considérant, en conséquence, qu'il n'y a pas lieu à déplafonnement ; qu'en conséquence, le loyer doit être fixé au montant du loyer plafonné, soit 404 744 € ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu à paiement au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Considérant que la société Compagnie foncière parisienne doit être condamnée aux dépens de première instance et de l'appel.
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement,
Statuant à nouveau et y ajoutant :
Fixe à la somme annuelle de 404 744 €, le loyer du bail renouvelé, hors taxes et hors charges, dû à compter du 1er janvier 2005, pour les locaux situés [Adresse 3] et [Adresse 2],
Dit n'y avoir lieu à paiement au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Compagnie foncière parisienne aux dépens de première instance et de l'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER
LA PRESIDENTE