RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 9
ARRET DU 25 Janvier 2012
(n° , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/04195
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 Décembre 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS RG n° 07/07883
APPELANT
Monsieur [C] [C]
[Adresse 3]
[Localité 4]
comparant en personne, assisté de Me Bettina JOLY, avocat au barreau de PONTOISE, toque : 83
INTIMEE
SA NATIONAL CITER
[Adresse 5]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Mme [K], directrice des moyens infrastructures, assistée de Me Elisabeth MEYER, avocat au barreau de PARIS, toque : A0686 substitué par Me Laurence CHAZE, avocat au barreau de PARIS, toque : R087
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Novembre 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Benoît HOLLEAUX, Conseiller, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Christine ROSTAND, Présidente
Monsieur Benoît HOLLEAUX, Conseiller
Madame Monique MAUMUS, Conseillère
Greffier : Madame Chantal HUTEAU, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Christine ROSTAND, Présidente et par Monsieur Philippe ZIMERIS, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu le jugement du Conseil de prud'hommes de Paris du 14 décembre 2009 ayant débouté Mr [C] [C] de toutes ses demandes .
Vu la déclaration d'appel de Mr [C] [C] reçue au greffe de la Cour le 11 mai 2000 .
Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 21 novembre 2011 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de Mr [C] [C] qui demande à la Cour :
- D'infirmer le jugement entrepris.
- Statuant à nouveau, de condamner la SA NATIONAL CITER à lui régler les sommes suivantes :
- 2.351,10 de dommages-intérêts pour une absence de précision sur le DIF ;
- 2.351,10 euros d'indemnité pour licenciement irrégulier ;
- 59.328 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- 14.106,60 euros de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire ;
- 3.217,94 euros de frais de téléphone portable ;
- 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- D'ordonner la remise par la SA NATIONAL CITER des bulletins de paie et d'une attestation ASSEDIC conformes à l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard.
Vu les écritures régulièrement communiquées et oralement soutenues à l'audience du 21 novembre 2011 auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens de la SA NATIONAL CITER qui demande à la Cour de confirmer le jugement déféré et condamner Mr [C] [C] à lui payer la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA COUR :
La SA NATIONAL CITER a recruté Mr [C] [C] en contrat de travail à durée indéterminée du 1er avril 1998 en qualité de Responsable préparation à l'indice 70 ' position A de la Convention Collective Nationale des Services de l'Automobile, moyennant une rémunération mensuelle de 7.324,88 francs pour 38,50 heures hebdomadaires.
Dans le dernier état de la relation contractuelle de travail, Mr [C] [C] percevait un salaire de base de 2174 euros mensuels, auquel s'ajoutait une prime sur ventes, pour un emploi de Technicien expert ' qualification conventionnelle Z4 ' échelon 18.
Après sa convocation par lettre du 6 mars 2007 à un entretien préalable s'étant tenu le 16 mars, la SA NATIONAL CITER a licencié le 26 mars suivant Mr [C] [C] pour le motif suivant : «Alertés par la plainte d'un client , [I] [I], District Manager de la Zone Ile de France et [B] [B] , Gestionnaire maintenance pour Citer France ont audité le 25 janvier 2007 certains de vos dossiers de maintenance . Ils ont décelé des manquements notoires dans la qualité de gestion de vos dossiers . Les investigations ultérieures ont confirmé ce manque de rigueur et de fiabilité».
Sur la régularité de la procédure de licenciement :
Au soutien de cette demande indemnitaire, Mr [C] [C] considère que son licenciement était déjà décidé avant même l'entretien préalable, puisqu'il était exclu des déjeuners professionnels en vue de mettre en place la nouvelle organisation interne, ce qui démontrerait selon lui «avec éclat» l'irrégularité de la procédure de rupture menée par l'employeur.
Cette seule indication concernant les déjeuners professionnels auxquels Mr [C] [C] n'aurait pas participé, prétendant en avoir été évincé sans toutefois le démontrer, n'est pas constitutive d'une irrégularité de procédure, dès lors que rien ne permet de dire que l'intimée avait déjà pris sa décision avant le déroulement de l'entretien préalable.
Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté Mr [C] [C] de sa demande indemnitaire pour licenciement irrégulier (2.351,10 euros).
Sur le bien fondé du licenciement :
L'intimée verse aux débats (pièces 9 à 41) des documents internes techniques - factures, bons de commande, échanges de courriels - venant illustrer, selon elle, le «manque de rigueur et fiabilité incompatible avec l'exercice de (la) mission de responsable maintenance» de Mr [C] [C], ce qui lui aurait occasionné un préjudice minimum de 523,27 euros.
Les exemples de ces prétendues insuffisances professionnelles, tels qu'énoncés dans la lettre de licenciement de mars 2007, remontent tous à la période novembre-décembre 2006.
En complément de ces pièces disparates, rassemblées pour les besoins de la cause, force est de constater que la SA NATIONAL CITER ne verse aucun audit interne sur l'exécution par Mr [C] [C] de ses fonctions de responsable maintenance des véhicules donnés en location, audit qui aurait pu être conduit par Mme [I] et Mr [B], respectivement, District Manager et Gestionnaire Maintenance.
La SA NATIONAL CITER préfèrera finalement se contenter d'approximations et de généralités en énonçant dans la lettre de licenciement «des manquements notoires» imputables à Mr [C] [C].
L'importance des insuffisances reprochées par l'intimée à Mr [C] [C] ,après neuf années de temps de service, est en complet décalage avec sa dernière évaluation professionnelle d'août 2006 à l'occasion de laquelle il était relevé sa «bonne implication et disponibilité» avec des appréciations allant de «satisfaisant» à «très satisfaisant» (pièce 50).
Il apparaît en définitive que ce licenciement repose sur un fallacieux prétexte, à une époque où l'intimée procédait à une réorganisation interne au sein de laquelle Mr [C] [C] n'avait manifestement plus sa place (sa pièce 37).
Le licenciement de Mr [C] [C] est ainsi dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Le jugement entrepris sera en conséquence infirmé en ce qu'il a débouté Mr [C] [C] de sa demande indemnitaire pour licenciement injustifié, et la SA NATIONAL CITER condamnée à lui payer la somme à ce titre de 28.200 euros représentant 12 mois de salaires, en application des dispositions de l'article L.1235-3 du code du travail, en considération de son âge (39 ans) et de son ancienneté dans l'entreprise (9 ans), avec intérêts au taux légal partant du présent arrêt.
Il y a lieu sur le fondement de l'article L.1235-4 du même code d'ordonner le remboursement par la SA NATIONAL CITER aux organismes concernés de la totalité des indemnités de chômage versées à Mr [C] [C], dans la limite de six mois.
Sur la demande indemnitaire pour licenciement vexatoire :
Il n'est pas établi, contrairement à ce que prétend Mr [C] [C], que l'employeur ait divulgué auprès de ses collègues de travail la nouvelle de son licenciement, avant même sa convocation à l'entretien préalable.
La pièce qu'il verse au soutien de cette demande (n° 37) n'est en effet qu'un courriel envoyé le 23 mars 2007 par Mme [E], chef d'agences [6], à d'autres salariés de l'entreprise , courriel faisant part d'une «nouvelle organisation sur le traitement des véhicules carrosseries à compter du 1er avril 2007».
Mr [C] [C] ne démontrant pas avoir été victime d'un licenciement vexatoire générateur d'un préjudice distinct de celui lié à la perte injustifiée de son emploi, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande de ce chef.
Sur les frais de téléphone portable :
En raison de ses fonctions itinérantes de responsable maintenance, étant tenu de se déplacer dans les différents sites de location, Mr [C] [C] devait être joignable facilement.
La SA NATIONAL CITER ne peut pas ainsi se contenter de soutenir dans ses écritures (page 17) l'absence d'engagement de sa part quant à un remboursement des frais d'achat et d'utilisation d'un téléphone portable que Mr [C] [C] a exposés.
En effet, dès lors que Mr [C] [C] a supporté le coût de frais téléphoniques en lien direct avec son activité professionnelle, s'agissant ainsi de frais professionnels, la SA NATIONAL CITER doit les lui rembourser.
Au vu des pièces justificatives produites (factures / pièce 33), la décision critiquée sera infirmée en ce qu'elle a rejeté la demande de Mr [C] [C], et la SA NATIONAL CITER condamnée en conséquence à lui payer la somme de 3.217,94 euros avec intérêts au taux légal partant du 13 juillet 2007, date de réception par l'employeur de la convocation en bureau de conciliation.
Sur la demande indemnitaire nouvelle au titre du Droit Individuel à la Formation (DIF) :
La lettre de licenciement énonce : «Nous vous informons que vous pouvez bénéficier, pendant votre préavis, d'actions ouvertes dans le cadre de vos 60 heures de droit individuel à la formation» .
Contrairement aux affirmations de Mr [C] [C] qui considère que ladite lettre ne mentionne pas «de manière explicite» son droit de demander en cours de préavis un bilan de compétence et une formation, la SA NATIONAL CITER s'est conformée aux dispositions de l'article L.6323-19 du code du travail.
La demande indemnitaire de Mr [C] [C] à ce titre (2.351,10 euros) sera en conséquence rejetée.
Sur la remise de documents conformes :
La SA NATIONAL CITER délivrera si nécessaire à Mr [C] [C] les documents (bulletins de paie , attestation POLE EMPLOI) conformes au présent arrêt, sans qu'il y ait lieu au prononcé d'une astreinte.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :
La SA NATIONAL CITER sera condamnée en équité à payer à Mr [C] [C] la somme de 1000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, déboutée de sa demande du même chef, et condamnée aux entiers dépens tant de première instance qu'en appel.
PAR CES MOTIFS :
La Cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe.
Confirme le jugement déféré sauf en ses dispositions sur le caractère bien fondé du licenciement et les frais de téléphone portable.
Statuant à nouveau sur ces deux chefs de demandes,
condamne la SA NATIONAL CITER à payer à Mr [C] [C] les sommes suivantes :
- 28.200 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêts au taux légal partant du présent arrêt ;
- 3.217,94 euros au titre des frais professionnels de téléphone portable avec intérêts au taux légal à compter du 13 juillet 2007 .
Y ajoutant :
Ordonne le remboursement par la SA NATIONAL CITER aux organismes concernés de la totalité des indemnités de chômage versées à Mr [C] [C] dans la limite de 6 mois.
Déboute Mr [C] [C] de sa demande indemnitaire au titre du DIF.
Ordonne la remise par la SA NATIONAL CITER à Mr [C] [C] des documents conformes au présent arrêt sans prononcé d'une astreinte.
Condamne la SA NATIONAL CITER à payer à Mr [C] [C] la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code du procédure civile.
Rejette la réclamation de la SA NATIONAL CITER sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la SA NATIONAL CITER aux entiers dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENTE,
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