Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 4
ARRET DU 14 DECEMBRE 2011
(n° 268 , 13 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 08/10733
Sur renvoi après un arrêt de la Cour de cassation prononcé le 15 mai 2008 emportant cassation d'un arrêt rendu par la Cour d'appel de PARIS - 25ème chambre - section A le
8 septembre 2006 sur appel d'un jugement rendu le 23 janvier 2004 par le Tribunal de commerce de PARIS sous le n° RG 200161888.
DEMANDERESSES A LA SAISINE
S.N.C. SGABI SIMSON
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 13]
[Localité 35]
INTERVENANTS VOLONTAIRES
S.C.I. MENZAN
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 21]
[Localité 30]
S.N.C. DB INVEST
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 63]
[Adresse 59]
[Localité 58]
S.N.C. LES SOURCES
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 63]
[Adresse 59]
[Localité 58]
S.A.R.L. LE FLAMBOYANT
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 65]
[Adresse 69]
[Localité 58]
S.A.R.L. SODEREST
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 65]
[Adresse 69]
[Localité 58]
Rep/assistant : la SCP FISSELIER CHILOUX BOULAY (avoués à la Cour)
assistées de Maître BOYTCHEV Nicolas, avocat au barreau de PARIS - toque L0301
plaidant pour la SELARL RACINE, avocat
DEFENDERESSES A LA SAISINE
Monsieur [U] [B]
[Adresse 16]
[Localité 33]
Rep/assistant : la SCP SCP TAZE-BERNARD BELFAYOL BROQUET (avoués à la Cour)
S.C.I. RESFLAM 2
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 67]
[Localité 58]
Monsieur [EP] [RM]
[Adresse 18]
[Localité 1]
S.A.R.L. SAINT MARTIN EQUIPEMENT radiée au REGISTRE DU COMMERCE
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 67]
[Localité 58]
EURL èsdyNETTLE GESTION IMMOBILIERE
nouvelle dénomination de la SNC NETGIM
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Localité 58]
E.U.R.L. ASTAREA
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 59]
[Localité 58]
S.A.R.L. BIAUSSAT J ET G LES BOUGAINVILLIERS
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 59]
[Localité 58]
S.A.R.L. CLAVI
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 67]
[Localité 58]
Monsieur [TH] [A]
[Adresse 12]
[Localité 25]
E.U.R.L. LOCMARTIN
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 59]
[Localité 58]
Monsieur [NE] [R]
[Adresse 66]
[Localité 46]
S.A. L'OFFICE PARISIEN DE RENOVATION
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux
[Adresse 15]
[Localité 36]
Monsieur [XJ] [G]
[Adresse 7]
[Localité 45]
Monsieur [K] [F]
[Adresse 4]
[Localité 49]
Monsieur [UB] [T]
DECEDE
E.U.R.L. LOCATEMPLE
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 10]
[Localité 37]
S.N.C. IMMOBILIERE DU LAGON
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 14]
[Localité 39]
E.U.R.L. EQUINOXE
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 59]
[Localité 58]
SOCIETE JACQUES MERCIER PROMOTION
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 11]
[Localité 32]
E.U.R.L. RONSARD
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 59]
[Localité 58]
Monsieur [L] [KP]
[Adresse 60]
[Localité 47]
S.A.R.L. MALTORNE
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 59]
[Localité 58]
S.A.R.L. VASEL RESIDENCES nouvelle dénomination de la société TRANSBETON agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 62]
[Localité 3]
S.C.I. RESFLAM 1
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 59]
[Localité 58]
Monsieur [E] [GN]
[Adresse 23]
[Localité 29]
S.A.R.L. JYMOR
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 31]
[Localité 53]
Monsieur [E] [UV]
[Adresse 5]
[Localité 48]
Madame [W] [N]
[Adresse 24]
[Localité 44]
Monsieur [S] [V]
[Adresse 22]
[Localité 43]
S.A.R.L. ROSY
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 71]
[Adresse 64]
[Localité 51]
S.A.R.L. CARAIBES 90
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 59]
[Localité 58]
Monsieur [Y] [O]
[Adresse 50]
[Localité 56]
Monsieur [Z] [D]
[Adresse 26]
[Localité 55]
Monsieur [X] [J]
[Adresse 27]
[Localité 41]
Monsieur [WP] [BK]
[Adresse 17]
[Localité 57]
S.A.R.L. BAB
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 61]
[Adresse 68]
[Localité 9]
Monsieur [E] [P]
[Adresse 20]
[Localité 38]
S.A.R.L. PHILIPPOR INVEST
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 34]
[Localité 52]
Monsieur [M] [I]
[Adresse 6]
[Localité 40]
E.U.R.L. LAODICE
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 67]
[Localité 58]
E.U.R.L. LOUY
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 67]
[Localité 58]
Monsieur [MK] [H]
[Adresse 19]
[Localité 54]
S.A.R.L. HURE INVEST
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 8]
[Localité 2]
S.A.R.L. LEM VIP
agissant poursuites et diligences de son représentant légal
[Adresse 8]
[Localité 2]
Monsieur [PT] [GA]
[Adresse 28]
[Localité 42]
Rep/assistant : la SCP SCP TAZE-BERNARD BELFAYOL BROQUET (avoués à la Cour)
assistés de Maître PAPIN Philippe, avocat au barreau d'ANGERS
plaidant pour la SCP PAPIN, avocat
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 9 novembre 2011 en audience publique, après qu'il ait été fait rapport par Mme LUC, conseiller, conformément aux dispositions de l'article 785 du Code de procédure civile, devant la Cour composée de :
- M.ROCHE, président
- M.VERT, conseiller
- Mme LUC, conseiller
Greffier lors des débats : Mme CHOLLET
ARRET
- contradictoire
- prononcé publiquement par M. ROCHE, président
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. ROCHE, président et Mme CHOLLET, greffier.
LA COUR,
Vu le jugement en date du 23 février 2004 par lequel le Tribunal de commerce de Paris a condamné la société SGABI-SIMSON à payer à la société NETGIM la somme de 281 165, 84 euros avec intérêts au taux légal et capitalisation de ces intérêts, outre celle de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, les sociétés LE FLAMBOYANT, SODEREST et MENZAN étant par ailleurs condamnées sur le même fondement à lui payer la somme de 800 euros ;
Vu l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 8 septembre 2006, infirmant le jugement déféré;
Vu l'arrêt rectificatif rendu par cette même Cour le 20 octobre 2006 ;
Vu l'arrêt de la Cour de cassation du 15 mai 2008 cassant et annulant dans toutes ses dispositions les deux arrêts de la Cour d'appel de Paris et renvoyant la cause et les parties devant la Cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Vu la déclaration de saisine de la Cour d'appel de Paris, après renvoi de cassation, du 27 mai 2008, effectuée par les sociétés SGABI-SIMSON, LE FLAMBOYANT, SODEREST, MENZAN, DB INVEST et LES SOURCES et leurs conclusions enregistrées les 29 décembre 2010 et 20 mai 2011 et tendant à faire :
- réformer le jugement du 23 février 2004,
- débouter comme sans droit en cause d'appel 47 copropriétaires, associés de la SEP défunte, ayant cédé leurs biens à la société DB INVEST et ayant renoncé à toute action contre les sociétés SGABI-SIMSON et LE FLAMBOYANT,
- constater que les intimés lui doivent la somme de 1 844 327 F, soit 281 165,84 euros et que c'est à bon droit que la société SGABI-SIMSON a compensé cette créance sur les sommes dues par elle aux copropriétaires,
- condamner les intimés in solidum à leur payer la somme de 30 000 euros pour procédure abusive et celle de 7 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Vu les conclusions de MM. [B], [P], [A], [H], [G], [C], [KP], [GN], [BK], [UV] et [GA], Mme [J], ainsi que des sociétés EQUINOXE, LAODICE, LOCATEMPLE, LOCMARTIN, LOUY, NETTLE GESTION IMMOBILIERE, RONSARD, BAB, CLAVI, BIAUSSAT J. ET G. LES BOUGAINVILLIERS, HURE INVEST, JYMOR, LEM VIP, MALTORNE, PHILIPPOR INVEST, ROSY, IMMOBILIERE DU LAGON, RESTFLAM 1, RESTFLAM 2, JACQUES MERCIER PROMOTION et L'OFFICE PARISIEN DE RENOVATION, enregistrées le 11 janvier 2011 et tendant à faire :
- mettre hors de cause les sociétés ELYS et BAIE NETTLE,
constater que les demandeurs en première instance ayant cédé leurs biens à la société DB INVEST ont renoncé au bénéfice du jugement,
- dire les sociétés LE FLAMBOYANT, SODEREST, MENZAN, DB INVEST et LES SOURCES irrecevables en leur intervention volontaire,
- condamner la société SGABI-SIMSON à payer entre les mains de la société NETTLE GESTION IMMOBILIERE (venant aux droits de la société NETGIM), représentée par son gérant M. [FG], à charge pour elle de la répartir entre les intimés concernés, la somme de 135 712 euros, dont 36 791 euros avec intérêts au taux légal à compter du 31 janvier 2001 et 98 921 euros avec intérêts au taux légal à compter du 24 janvier 2003, avec capitalisation des intérêts échus, outre celles de 75 609 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 26 mai 2005 et capitalisation des intérêts échus et de 1 euro à titre de dommages-intérêts,
- condamner les sociétés SGABI-SIMSON, LE FLAMBOYANT, SODEREST, MENZAN, DB INVEST et LES SOURCES in solidum à payer aux intimés la somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts et celle de 10 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile;
SUR CE,
Considérant qu'il résulte de l'instruction les faits suivants :
La société LE FLAMBOYANT a réalisé à [Localité 70] aux Antilles une opération immobilière portant sur deux cent soixante quatorze lots soumis au régime de la copropriété et affectés à l'usage de résidence de tourisme et hôtelière, les lots se répartissant entre l'hôtel et des meublés.
Les « investisseurs LMP », aujourd'hui intimés, ont acquis un ou plusieurs appartements dans la copropriété RESIDENCE LE FLAMBOYANT, et ont pris le statut de loueurs en meublé professionnel. Aussitôt après la construction de l'immeuble et avant que la première vente intervienne, le promoteur, la société LE FLAMBOYANT, avait, par contrat du 13 octobre 1989, confié à la société SIMSON GESTION (ancienne dénomination de la société SGABI-SIMSON) un mandat de gestion de la RESIDENCE LE FLAMBOYANT, c'est-à-dire la mission « de gérer la location de l'ensemble des lots meublés et équipés par le mandant, pour une occupation à la journée, à la semaine ou au mois à une clientèle touristique ». Le mandataire avait reçu pour mission, notamment, de réceptionner les biens du mandant à la livraison, de gérer les biens et droits immobiliers dont il consentait la location meublée aux prix, charges et conditions qu'il aurait préalablement communiqués au mandant, de donner ou accepter tout congé, dresser tout état des lieux, exercer toutes poursuites en cas de défaut de paiement, acquitter toutes les dépenses et charges nécessaires à la bonne exploitation de l'ensemble et en particulier tous
les frais de publicité et annonces nécessaires à la bonne commercialisation des locaux. Selon l'article 8 de ce mandat, « le mandataire (doit) souscrir(e) au nom du mandant auprès d'une compagnie de son choix, une assurance couvrant le risque locatif et le mobilier pour les risques incendie, explosion, dégâts des eaux, recours de voisins, vol ».
Au fur et à mesure des ventes, chaque acquéreur s'est substitué à la société LE FLAMBOYANT pour continuer l'unique mandat confié à la société SGABI-SIMSON. Au total, 45 mandats individuels se sont agrégés au précédent, consentis par 45 propriétaires, regroupés sous le vocable « investisseurs LMP ».
La société en participation regroupant les investisseurs des autres lots, affectés à l'usage d'hôtel, dits les « investisseurs SEP », a confié un mandat à la société SGABI SIMSON le 2 avril 1993. Ce mandat n'est pas dans le litige pendant devant la Cour.
Par protocole du 14 mars 1997, les investisseurs LMP ont conclu avec la société SGABI-SIMSON, la société d'exploitation hôtelière (SEH) et la société NETTLE GESTION IMMOBILIERE, un accord prévoyant une garantie d'exploitation pour les investisseurs et précisant le régime de gestion conjointe des assurances de l'hôtel-résidence entre la société NETGIM, aux droits de laquelle vient la société NETTLE GESTION IMMOBILIERE, syndic de la copropriété et la société SGABI-SIMSON. En premier lieu en effet, la maison-mère de la société SGABI-SIMSON, la société SEH, garantit un revenu minimum aux copropriétaires, leurs résultats nets d'exploitation prenant en compte « tous les frais et charges relatifs à l'exploitation commerciale de la résidence, notamment les travaux d'entretien, de réparation et de renouvellement des équipements mobiliers, de peinture, d'électricité, de gardiennage, de toiture, d'assurance des parties communes et privatives et de nettoyage ». En second lieu, s'agissant des assurances, cet accord prévoit que le reliquat des indemnités versées par les compagnies d'assurance à la suite du cyclone LUIS sera affecté à des travaux concernant la résidence LE FLAMBOYANT sous le contrôle conjoint du syndic et de la société SGABI-SIMSON et « qu'il en sera de même pour toutes les indemnités concernant les éventuels sinistres à venir après le cyclone LUIS ». Enfin, selon l'article 8 du même protocole, « les décisions d'affectation devront être prises par écrit dans un document signé par le syndic et SGABI SIMSON, qui devront en rendre compte, respectivement devant l'Assemblée générale de la copropriété et devant l'assemblée générale de la coexploitation » (article 8) .
Prenant acte de l'intervention de la société SGABI-SIMSON dans la gestion des lots auxquels sont attachées les parties communes, gérées par le syndic, la société NETGIM, les deux parties ont signé le 2 avril 1999 une convention d'assistance et de coopération selon laquelle « la société SGABI-SIMSON prend à sa charge la gestion des assurances, couvrant « la communauté d'intérêts », constituée des parties communes, privatives, immobilières et hôtelières et notamment : 1. appel d'offres, 2. paiement des primes, 3. déclaration des sinistres, 4. exécution de travaux éventuels de réparation pour tout ce qui touche au risque intitulé PNO-RC PROPRIETAIRES, et, d'une façon générale, le multirisque habitation » ; « que la société NETGIM se réserve exclusivement la gestion de la police d'assurance DOMMAGES OUVRAGES ».
Le 28 septembre 1999, la société SGABI-SIMSON a souscrit, tant pour le compte de la copropriété « LE FLAMBOYANT », que pour son propre compte, un contrat d'assurance auprès de la société GROUPAMA, sous la forme d'un avenant au contrat signé le 7 mai 1996 par la société NETGIM, l'ancien souscripteur.
A la suite d'un cyclone ayant causé d'importants dommages tant aux biens immobiliers que mobiliers de la résidence, en novembre 1999, l'assureur a versé sur le compte de la société SGABI SIMSON une indemnité de 24 072 732 F, représentant le montant des dommages immobiliers et mobiliers, déduction faite d'une franchise de 10 %. L'assemblée générale extraordinaire des copropriétaires réunie le 25 janvier 2000 avait décidé que les fonds à provenir de la compagnie d'assurance seraient déposés sur un compte bancaire fonctionnant sous les signatures conjointes du gestionnaire et du syndic. L'assemblée générale annuelle de la copropriété tenue le 27 avril 2000, après le dépôt du rapport d'expertise, qui avait chiffré à 13 828 405 F les dégâts immobiliers et à 10 244 327 F les dégâts mobiliers, a affecté à la réparation des dommages mobiliers une somme de 8 400 F seulement, affectant le reliquat à la réparation des dommages immobiliers. La société SGABI-SIMSON, à laquelle cette somme de 8 400 000 F était payée sur 10 244 327 F, s'estimant indument privée de la différence, soit de la somme de 1 844 327 F (281 165,84 euros), a retenu cette somme par compensation sur les sommes dues aux investisseurs au titre du résultat net d'exploitation des exercices 2000 et 2002.
Par acte du 31 juillet 2001, les 91 investisseurs ont assigné la société SGABI-SIMSON en paiement devant le Tribunal de commerce de Paris, devant lequel sont intervenus volontairement, en demande, les sociétés RESFLAM 2, SAINT-MARTIN EQUIPEMENT et NETGIM, ainsi que M. [RM], et en défense les sociétés LE FLAMBOYANT, SODEREST et MENZAN, venant aux droits d'un certain nombre d'investisseurs. Le Tribunal a déclaré irrecevable l'intervention des sociétés LE FLAMBOYANT, SODEREST et MENZAN, donné acte aux autres sociétés de leurs interventions volontaires et fait droit aux demandes des requérantes, la société SGABI-SIMSON n'ayant pas, selon le Tribunal, démontré que la somme dont elle avait été privée l'empêchait d'exploiter normalement la résidence hôtelière.
Les sociétés SGABI SIMSON, LE FLAMBOYANT, SODEREST, MENZAN, DB INVEST et LES SOURCES ont interjeté appel de ce jugement. La Cour d'appel de Paris a relevé, dans un arrêt du 8 septembre 2006, que le contrat d'assurance avait été conclu par la société SGABI-SIMSON à la suite d'un mandat des copropriétaires, mais que ce contrat avait été souscrit par elle, tant au nom des copropriétaires, qu'en son nom propre. Elle a jugé que la somme de 10 244 327 F revenait en conséquence à la société SGABI-SIMSON, les copropriétaires ne pouvant exciper du mandat de gestion conclu avec cette société, aux termes duquel « tous les frais et charges relatifs à l'exploitation commerciale de la résidence notamment les travaux d'entretien de réparation et de renouvellement des équipements mobiliers » leur incombent, que cette somme leur revenait, en tant que destinée à couvrir les charges de renouvellement des meubles figurant dans leurs charges d'exploitation. La Cour estime que les charges exceptionnelles nées du cyclone ne rentrent pas dans cette catégorie de charges. Elle a donc infirmé le jugement entrepris.
Dans un arrêt du 15 mai 2008, la Cour de cassation a jugé qu' « en statuant ainsi, sans rechercher si la société (gestionnaire) (') avait un intérêt d'assurance distinct de celui de ses mandataires, lui conférant la qualité d'assurée en cas de survenance d'un des évènements garantis, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ».
SUR CE,
SUR LA MISE HORS DE CAUSE DES INVESTISSEURS SEP
Considérant qu'il convient de donner acte aux demandeurs en première instance constituant le groupe d'investisseurs SEP et ayant cédé leurs parts à la société DB INVEST qu'ils ont renoncé au bénéfice du jugement et de les mettre hors de la cause, soit les sociétés ANDRE, FLAM DOM, SAINT MARTIN EQUIPEMENT, SAMEB, PLAISANCE, LA PALMERAIE, CYCLAMEN, MARHUG, BGJ, PIERRE PONCE, FRANDELA, CANDICE, FOURNIER, PIERRE LUCAS, LA FONTAINE, APTRIMOINE INVESTISSEMENT, CARRERA, CHANNA, SAONE HOTEL, NIEPCE HOTEL, VITTELOR HOTEL, LA SEVRIENNE, KEREON, LES SOURCES, MIVA CARAIBES, LS HOTEL, CORAIL, THOMY, GACELUC, MJA OUTREMER, MANPO, L'ANTILLAISE, BOUGAINVILLIERS, MIKE GYVER, ALEX HUGO, D'ABBANS, LES GLYCYNES, SERVONNAT-LAURENT ainsi que MM. [IO] et [JW] ; qu'il y a lieu également de mettre hors de la cause les sociétés ELYS et BAIE NETTLE, ainsi que l'avait décidé le jugement entrepris ;
SUR L'IRRECEVABILITE DE L'INTERVENTION VOLONTAIRE DES SOCIETES LE FLAMBOYANT, SODEREST, MENZAN, DB INVEST et LES SOURCES
Considérant que l'intervention accessoire d'une partie n'est recevable que si elle appuie les prétentions d'une partie et si son auteur a intérêt pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie ; que les sociétés LE FLAMBOYANT, SODEREST et MENZAN intervenaient en défense aux côtés de leur mandataire la société SGABI-SIMSON, les sociétés DB INVEST et LES SOURCES s'étant jointes à elles devant la Cour d'appel ; que les intimés exposent à juste titre que les sociétés LE FLAMBOYANT, SODEREST et MENZAN, DB INVEST et LES SOURCES, représentant des investisseurs copropriétaires n'ont pas d'intérêt à agir au côté de la société SGABI- SIMSON, dans le litige opposant cette société aux copropriétaires et concernant l'exécution du protocole d'accord du 14 mars 1997 auquel aucun des intervenants volontaires n'a été partie, et visant à obtenir paiement d'une somme qui n'est due que par la société SGABI-SIMSON ; que le litige est relatif à une compensation effectuée par la société SGABI-SIMSON entre une créance qu'elle prétend avoir et la rémunération due aux investisseurs-loueurs de meublés, amputée au détriment de ceux-ci ; que si ces sociétés ont intérêt à ce que les dommages causés aux meubles dans chaque appartement loué soient réparés, et, donc, à ce que l'indemnité d'assurance revenant à la société SGABI-SIMSON, à laquelle revient cette charge, soit effectivement versée à son bénéficiaire légitime, cet intérêt est trop indirect par rapport au litige principal portant sur la réduction de leur rémunération par la société SGABI-SIMSON ; qu'il y a, donc, lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevable l'intervention volontaire des trois premières sociétés et, y ajoutant, de déclarer semblablement irrecevables les interventions des sociétés DB INVEST et LES SOURCES;
SUR L'INDEMNITE D'ASSURANCE VERSEE POUR LES DOMMAGES MOBILIERS
Considérant que la question de la propriété de l'indemnité d'assurance litigieuse de 10 244 327 F dépend de la qualité d'assurée de la société SGABI-SIMSON au titre des meubles détruits ou endommagés pendant le cyclone, elle-même dépendante de la possession, par cette société, d'un intérêt d'assurance distinct de celui de ses mandataires ;
Considérant que par avenant du 28 septembre 1999, à effet rétroactif au 1 er janvier 1999, la société SGABI-SIMSON a souscrit « tant pour le compte de la copropriété « LE FLAMBOYANT » que pour le compte du gestionnaire unique de la co-exploitation de l'ensemble touristique », une police d'assurance pour incendie, attentat, évènements naturels (tempêtes, ouragans, cyclones), dommages électriques, dégâts des eaux, bris de glaces, perte d'exploitation, reprenant ainsi la police d'assurance souscrite par la société NETGIM ; qu'ainsi le cyclone LENNY, survenu à la fin de novembre 1999, était couvert par cet avenant, d'application immédiate en l'absence de dispositions contraires, contrairement aux allégations des intimés qui prétendent que la police souscrite par la société NETGIM s'appliquait encore au moment des faits;
Considérant que le gestionnaire s'est assuré tant en son nom propre qu'au nom de ses mandants, tant pour les dommages causés à l'immeuble que pour les dommages causés aux biens mobiliers; que seuls sont en débat les dommages causés aux meubles et leur indemnisation ; qu'il résulte du mandat de la société SGABI-SIMON, ce qui n'est d'ailleurs contesté par aucune partie, qu'elle doit acquitter toutes les dépenses et charges nécessaires à la bonne exploitation de l'ensemble, ce qui implique pour elle d'effectuer les travaux de remise en état d'exploitation de la résidence, à la suite d'évènement exceptionnels, tels des cyclones ou autres circonstances climatiques ; que l'article 9 du mandat originaire du 13 octobre 1989 prévoit que « le mandataire procédera au cours de l'exploitation au remplacement des éléments volés ou défectueux, de manière à ce qu'en fin de mandat, et lorsqu'il sera procédé à l'inventaire desdites installations et éléments mobiliers, les éléments de l'inventaire initial ou leur équivalent se retrouvent en nature dans les locaux » ; que conscients des difficultés résultant d'une assurance unique couvrant tous les biens et de la coexistence de la copropriété et de la co exploitation, la société SGABI-SIMSON et le syndic la société NETGIM ont conclu le 2 avril 1999 une convention d'assistance et de coopération selon laquelle « la société SGABI-SIMSON prend à sa charge la gestion des assurances, couvrant « la communauté d'intérêts », constituée des parties communes, privatives, immobilières et hôtelières et notamment : 1. appel d'offres, 2. paiement des primes, 3. déclaration des sinistres, 4.exécution de travaux éventuels de réparation pour tout ce qui touche au risque intitulé PNO-RC PROPRIETAIRES, et, d'une façon générale, le multirisque habitation » ; « que la société NETGIM se réserve exclusivement la gestion de la police d'assurance DOMMAGES OUVRAGES » ; que le partage de responsabilité résultant de cette convention est clair, la société NETGIM gérant la police afférente aux dommages qui compromettent la solidité de l'immeuble ou le rendent impropre à sa destination, la société SGABI-SIMSON gérant les dommages mobiliers, et devant exécuter les travaux de réparation nécessaires ; qu'ainsi, lui incombe la remise en état ou le remplacement des meubles garnissant les parties communes, qui constituent sa propriété, ainsi que des meubles garnissant les meublés, qui appartiennent aux propriétaires ; qu'elle justifie donc bien d'un intérêt distinct de ses mandataires qui réside dans l'exploitation de la résidence, et la nécessité de remplir son obligation de remise en état des biens mobiliers ; que souscripteur du contrat, s'acquittant sur ses propres deniers des cotisations annuelles d'assurance, désignée comme bénéficiaire des primes sur un compte ouvert par elle à son propre nom, elle est donc bien la bénéficiaire naturelle de l'indemnité afférente aux biens mobiliers ; qu'en décidant de la répartition des sommes allouées et en affectant aux réparations immobilières une partie de l'allocation destinée à réparer les biens mobiliers, l'assemblée générale des copropriétaires a porté une atteinte indue aux droits de la société SGABI-SIMSON ; qu'il y a donc lieu de constater que l'indemnité versée au titre de la réparation des dommages mobiliers constituait la propriété de la société SGABI-SIMSON et qu'il appartient à la société NETTLE GESTION IMMOBILIERE, venant aux droits de la société NETGIM, de lui restituer la part de cette somme indument retenue par elle, soit la somme de 281 165,84 euros ;
SUR LES SOMMES DUES AUX COPROPRIETAIRES
Considérant en revanche que le protocole du 14 mars 1997, qui fixe la rémunération annuelle minimum des investisseurs, constituant leur résultat net d'exploitation fiscalement déclarable, à 2 % des capitaux net investis TTC, puis à 2,5 % par avenant du 5 octobre 1999, ne permet pas à la société SGABI-SIMON de retenir la somme dont elle a été privée sur la rémunération des copropriétaires ; qu'en effet, à supposer que les charges exceptionnelles telles que les cyclones puissent être considérées comme des charges d'exploitation, ce qui n'est pas démontré, la société SGABI-SIMSON n'aurait pu que déduire les sommes effectivement dépensées par elle pour remettre le mobilier des meublés en l'état ; que n'ayant engagé de dépenses que pour un montant de 1 275 904,67 euros, inférieur à l'indemnité qui lui a été octroyée par le syndic, 1 280 571,70 euros, elle ne pouvait déduire de la rémunération des investisseurs la somme correspondant au montant de l'indemnité dont elle avait été privée, ce montant ne correspondant pas à des dépenses engagées et dûment justifiées par elle ; qu'ainsi, il convient de constater que les sommes de 76 224,51 euros et de 204 941,33 euros ont été indument prélevées sur le compte des copropriétaires et sont dues à la société NETTLE GESTION IMMOBILIERE (venant aux droits de la société NETGIM), représentée par son gérant, M. [FG], qui est chargée de reverser les rémunérations aux propriétaires de meublés ;
SUR LA DEMANDE EN PAIEMENT DE LA SOMME DE 75 609 EUROS
Considérant que la demande en paiement de la somme de 75 609 euros, invoquée à l'encontre de la société SGABI-SIMSON par onze investisseurs, est nouvelle, car fondée sur une cause différente de celle fondant la demande en paiement des deux autres sommes, dont la retenue avait été opérée par SGABI-SIMSON pour compenser l'indemnité d'assurance ; qu'en effet, cette somme correspond, selon les parties elles-mêmes, aux rémunérations qui leur seraient dues au titre des années 2004 et 2005 par la société SGABI-SIMSON, alors que la société SGABI-SIMSON a renoncé au mandat de gestion conclu avec ces sociétés par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 juin 2003, conformément aux dispositions de l'article 12 du mandat de gestion du 13 octobre 1989 ; qu'ainsi, les sociétés ne démontrant pas que la dénonciation du mandat aurait été effectuée pour compenser la créance d'assurance de la société SGABI-SIMSON, l'objet de cette demande est nouvelle ; qu'elle est donc irrecevable ;
SUR LA COMPENSATION
Considérant qu'il convient de prononcer la compensation judiciaire entre les deux créances, d'un montant équivalent ; que la circonstance que les créances dont le paiement est aujourd'hui réclamé soient d'un montant inférieur à ceux de l'assignation initiale, à la suite du retrait de l'instance des investisseurs SEP, est indifférente et ne saurait donner lieu à paiement de la part de la société NETTLE GESTION IMMOBILIERE du différentiel entre la créance de SGABI-SIMSON et la sienne, l'effet extinctif de la compensation judiciaire s'étant produit au jour de l'exigibilité de la première créance, soit au jour de l'exigibilité de l'indemnité d'assurance ;
SUR LA DEMANDE DE DOMMAGES-INTERETS POUR PROCEDURE ABUSIVE
Considérant que la société SGABI-SIMSON, qui ne caractérise ni l'abus qu'elle impute à la société NETTLE GESTION IMMOBILIERE, laquelle s'est bornée à user des voies de droit à sa disposition, ni le préjudicie spécifique qui en serait résulté pour elle, ne peut qu'être déboutée de sa demande ;
SUR LA DEMANDE DE DOMMAGES-INTERETS DES INTIMES
Considérant que les intimés ne démontrent l'existence d'aucune faute imputable à la société SGABI-SIMSON, distincte de la rétention des sommes susmentionnées, ni de préjudice qui ne serait pas réparé par la restitution des sommes concernées ; que ces demandes seront donc rejetées ;
PAR CES MOTIFS
-Infirme le jugement entrepris,
et statuant à nouveau,
- Met hors de cause les sociétés ANDRE, FLAM DOM, SAINT MARTIN EQUIPEMENT, SAMEB, PLAISANCE, LA PALMERAIE, CYCLAMEN, MARHUG, BGJ, PIERRE PONCE, FRANDELA, CANDICE, FOURNIER, PIERRE LUCAS, LA FONTAINE, PATRIMOINE INVESTISSEMENT, CARRERA, CHANNA, SAONE HOTEL, NIEPCE HOTEL, VITTELOR HOTEL, LA SEVRIENNE, KEREON, LES SOURCES, MIVA CARAIBES, LS HOTEL, CORAIL, THOMY, GACELUC, MJA OUTREMER, MANPO, L'ANTILLAISE, BOUGAINVILLIERS, MIKE GYVER, ALEX HUGO, D'ABBANS, LES GLYCYNES, SERVONNAT-LAURENT, ELYS, BAIE NETTLE et M.M [IO] et [JW],
- Déclare irrecevable l'intervention volontaire des sociétés LE FLAMBOYANT, SODEREST, MENZAN, DB INVEST et LES SOURCES,
- Déclare irrecevable la demande en paiement de la somme de 75 609 euros de la société NETTLE GESTION IMMOBILIERE,
- Oordonne la compensation judiciaire entre la somme de 281 165,84 euros due par la société NETTLE GESTION IMMOBILIERE à la société SGABI-SIMSON et les deux prélèvements opérés par la société SGABI-SIMSON sur la rémunération des copropriétaires qui aurait due être versée à la société NETTLE GESTION IMMOBILERE par la société SGABI-SIMSON, à charge de la répartir entre eux, soit les sommes de 76 224,51 euros et 204 941,33 euros,
- Déboute les parties du surplus de leurs prétentions,
- Laisse à chaque partie la charge des dépens de première instance et d'appel exposés par elle, qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du Code de procédure civile ;
- Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT