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08/12/2011 | FRANCE | N°09/02797

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 08 décembre 2011, 09/02797


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5



ARRET DU 08 DECEMBRE 2011



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 09/02797



Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Décembre 2008 -Tribunal de Commerce de BOBIGNY - RG n° 2007F01376





APPELANTE



S.A. COMPOSANTS ACQUISITION TRAITEMENT SIGNAL (CATS) - nom commercial MICROELSOLUTEC

ayant son siÃ

¨ge : [Adresse 1]



représentée par la SCP BAUFUME GALLAND VIGNES, avoués à la Cour

assistée de Me Marguerite TRZASKA-LABAERE, avocat au barreau de Paris, substituant Me Cyril FABRE...

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRET DU 08 DECEMBRE 2011

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/02797

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Décembre 2008 -Tribunal de Commerce de BOBIGNY - RG n° 2007F01376

APPELANTE

S.A. COMPOSANTS ACQUISITION TRAITEMENT SIGNAL (CATS) - nom commercial MICROELSOLUTEC

ayant son siège : [Adresse 1]

représentée par la SCP BAUFUME GALLAND VIGNES, avoués à la Cour

assistée de Me Marguerite TRZASKA-LABAERE, avocat au barreau de Paris, substituant Me Cyril FABRE de la SELARL OJFI - ALISTER, avocat au barreau de PARIS, toque : K0037,

INTIMEE

S.A.S QUALITAIR & SEA INTERNATIONAL

ayant son siège : [Adresse 2]

représentée par la SCP MONIN ET D'AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour

assistée de Me Olivier DECOUR de la AARPI GODIN CITRON & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R259

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Octobre 2011, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Colette PERRIN, Présidente et Madame Patricia POMONTI, Conseillère chargée d'instruire l'affaire .

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Colette PERRIN, présidente

Madame Patricia POMONTI, conseillère

Madame Irène LUC, conseillère

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Anne BOISNARD

ARRET :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Colette PERRIN, présidente et par Mademoiselle Anne BOISNARD, greffier des services judiciaires auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE

La SA Composants Acquisition Traitement Signal (CATS) dont le nom commercial est Microel Solutec (ci après société Microel) commercialise depuis la fin des années 1980 des alimentations commercialement référencées « AC/DC Power Supply » fabriquées par la société Mean Well Entreprises à Taiwan.

Dans le cadre de cette activité, la société Microel a été amenée à importer et à dédouaner ces produits par l'intermédiaire de son commissionnaire en douane, la société Qualitair & Sea International (ci-après société Qualitair).

A l'occasion d'un contrôle à posteriori sur les périodes 1998, 1999, 2000 et 2001, le CERDOC de Roissy a remis en cause la position tarifaire déclarée, assujettie à 0% de droits de douanes, estimant que les articles concernés relevaient d'une position tarifaire assujettie à 3,9% de droits de douanes.

Par procès-verbal du 9 mars 2001, les agents du CERDOC ont notifié à la société Qualitair une infraction qualifiée de fausse déclaration d'espèce tarifaire ayant permis d'éluder des droits et taxes pour un montant de 63.865,01 euros.

Dans un avis du 21 octobre 2003, la Commission de Conciliation et d'Expertise Douanière (CCED), s'est rangée à la position défendue par l'Administration des Douanes et le 14 juin 2004, la Recette Principale des Douanes de Roissy a notifié d'une part à la société Qualitair un Avis de Mise en Recouvrement (AMR) n° 619/04/238 pour la somme de 63.865,01 euros et d'autre part à la société Microel un AMR d'un même montant référencé n°619/04/239.

Par courrier recommandé du 2 juillet 2004, la société Microel a contesté l'AMR émis à son encontre et, le 7 juin 2005, l'Administration des Douanes l'a informée de l'annulation de l'AMR émis à son encontre.

Par courrier recommandé du 15 septembre 2004, la société Qualitair a contesté, elle aussi, l'AMR qui lui a été opposé et, le 14 décembre 2004, l'Administration des Douanes a rejeté cette contestation.

La société Qualitar a alors saisi le tribunal d'instance d'Aulnay-sous-Bois par assignation du 14 février 2005 pour voir annulé l'AMR émis à son encontre, se voir dégrevée de la somme de 63.065,01 euros et a appelé la société Microel en garantie.

Par jugement du 26 juillet 2007, le tribunal d'instance d'Aulnay-sous-Bois s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de commerce de Bobigny sur la question de l'appel en garantie.

Par jugement en date du 13 novembre 2008, le tribunal d'instance d'Aulnay-sous-Bois a débouté la société Qualitair de ses demandes relatives à l'annulation de l'AMR n° 619/04/238 et l'a condamnée à payer à l'Administration des Douanes la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement rendu le 9 décembre 2008, le tribunal de commerce de Bobigny a dit que la société Qualitair était bien fondée à bénéficier de la garantie de Microel et que le niveau de cette garantie sera fixée dans son quantum par la connaissance d'une décision exécutoire à intervenir dans le litige qui oppose la société Qualitair aux Douanes. Le tribunal a par ailleurs débouté la société Qualitair de sa demande au titre des frais d'avocat et condamné la société Microel à payer à la société Qualitair la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Qualitair a interjeté appel du jugement du tribunal d'instance d'Aulnay-sous-Bois rendu le 13 novembre 2008 et par arrêt rendu le 9 novembre 2010, la chambre 5-7 de la Cour d'Appel de Paris a infirmé ce jugement et, statuant à nouveau, a annulé l'AMR du 14 juin 2004. L'Administration des Douanes s'est désistée du pourvoi en cassation qu'elle avait formé contre l'arrêt du 9 novembre 2010.

Vu l'appel interjeté le 10 février 2009 par la SA Microel Division Cats contre le jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 9 décembre 2008.

Vu les dernières conclusions signifiées le 30 juin 2011 par lesquelles la société Composants Acquisition Traitement Signal (CATS), dont le nom commercial est Microel Solutec, demande à la Cour de :

- de constater que la société Qualitair est un spécialiste de la réglementation douanière à laquelle la société Microel a eu précisément recours en raison de sa compétence professionnelle,

- de constater que le classement tarifaire des alimentations Mean Well était, et reste à ce jour, particulièrement problématique puisque cette question est pendante d'une part devant la Cour d'appel de Paris, d'autre part devant la Commission Européenne,

- de constater que la société Qualitair n'a cependant pas jugé utile de solliciter un RTC auprès des autorités douanières compétentes, ni même de l'informer de l'existence de cette procédure,

- de dire et juger, par conséquent, que la société Qualitair est mal fondée dans son appel en garantie à l'encontre de la société Microel,

- de constater qu'en tout état de cause l'AMR litigieux a été annulé par arrêt rendu par la Cour d'Appel de Paris le 9 novembre 2010,

Par conséquent,

- d'infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Bobigny le 9 décembre 2008 en ce qu'il a :

- dit que Qualitair était bien fondée à bénéficier de la garantie de Microel et que le niveau de cette garantie serait fixée dans son quantum par la connaissance d'une décision exécutoire à intervenir dans le litige qui oppose Qualitair aux Douanes,

- condamné Microel à payer à Qualitair la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

- de débouter la société Qualitair de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- de condamner la société Qualitair au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Microel rappelle que les alimentations Mean Well sont usuellement utilisées par des sociétés d'électronique dans des domaines industriels tels que principalement, les télécommunications, les réseaux, la monétique ou encore la domotique; c'est pourquoi elles ont été déclarées sous la position tarifaire 8504.40.20, assujettie à 0% de droits de douane.

Elle explique que cette position correspondant aux « convertisseurs statistiques du type utilisé avec les appareils de télécommunication, les machines de traitement de l'information et leurs unités » alors que, selon l'Administration des Douanes, ces produits correspondaient à la position tarifaire 8504.40.99 prévue pour les« autres convertisseurs statiques ».

La société Microel souligne que l'évolution des technologies complique le classement des marchandises et que le classement tarifaire des alimentations pose des difficultés également dans d'autres Etats membres.

Enfin, l'appelante s'appuie sur l'arrêt rendu le 9 novembre 2010, par la chambre 5-7 de la Cour d'Appel de Paris pour asseoir sa demande au motif que celle-ci a confirmé la position de l'importateur en annulant l'AMR contesté fondant sa décision sur les arguments développés par la société Microel.

Selon la société Microel, la société Qualitair a manqué à son devoir de conseil car il lui appartenait, en tant que spécialiste de la législation douanière, d'effectuer la demande d'un Renseignement Tarifaire Contraignant (RTC).

Vu les dernières conclusions signifiées le 14 septembre 2011 par lesquelles la société Qualitair & Sea demande à la Cour de :

- recevoir la société Qualitair en ses conclusions d'appel,

- constater que la demande en garantie relative aux droits de douane formée par la société Qualitair à l'encontre de la société Microel est devenue sans objet,

Vu les articles 1999 et 2000 du code civil, dire que la société CATS-Microel doit rembourser intégralement la société Qualitair des frais qu'elle a engagés dans le cadre de son mandat et de ses suites,

En conséquence, condamner la société CATS-Microel à payer à la société Microel la somme de 15.200 euros en remboursement de ses frais d'avocat,

- constater que la dernière facture d'avocat de la société Qualitair est relative aux prestations effectuées jusqu'au 5 juillet 2010,

- dire et juger que les frais d'avocat postérieurs à cette date, en ce qui concerne la procédure douanière et la présente procédure, seront justement indemnisés par une somme de 6.000 euros,

- en conséquence, condamner la société CATS-Microel à payer ladite somme en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Qualitair affirme que sa demande en garantie au titre des droits de douane n'a plus lieu d'être dès lors que la douane a été définitivement déboutée de sa demande.

Toutefois, elle s'appuie sur l'article 2000 du code civil pour revendiquer une indemnisation de la part de son mandant pour compenser les pertes qu'elle a essuyées à l'occasion de sa gestion, sans imprudence, à savoir l'intégralité des frais qu'elle a dû engager pour se défendre face au redressement douanier dont elle a fait l'objet.

L'intimée affirme que compte tenu des informations communiquées par son mandant le choix de la position tarifaire pouvait se faire sans difficulté et qu'elle ne pouvait solliciter de RTC de l'administration ou consulter sa banque de données, qui n'existait pas à l'époque des faits.

Elle ajoute qu'un RTC aurait été sans efficacité et n'aurait en aucune façon empêché l'administration de contester le classement tarifaire choisi des marchandises.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions initiales des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Le litige tarifaire en cause dans la présent espèce a été définitivement jugé par l'arrêt rendu le 9 novembre 2010 par la chambre 5-7 de la Cour d'Appel de Paris qui a annulé l'AMR du 14 juin 2004 de sorte qu'il y a lieu de constater que la demande en garantie relative aux droits de douane formée par la société Qualitair à l'encontre de la société CATS-Microel est devenue sans objet.

La société Qualitaire demande cependant, en application des articles 1999 et 2000 du code civil, que la société CATS-Microel soit condamnée à lui rembourser intégralement les frais qu'elle a engagés dans le cadre de son mandat et de ses suites.

Il est cependant constant que la société Qualitair est un spécialiste de la réglementation douanière à laquelle la société CATS-Microel a eu précisément recours en raison de sa compétence professionnelle.

S'il est certain que le classement tarifaire des alimentations Mean Well était, et reste à ce jour, particulièrement problématique puisque cette question est pendante d'une part devant la Cour d'appel de Paris, d'autre part devant la Commission Européenne, la société Qualitair aurait pu avoir recours à un Renseignement Tarifaire Contraignant (RTC), avis officiel rendu par les Autorités douanières concernant le classement tarifaire d'une marchandise et qui présente l'avantage de lier, une fois obtenu, l'ensemble des services douaniers des états membres pendant une durée de six ans.

La société Qualitair n'a cependant pas jugé utile de solliciter un RTC auprès des autorités douanières compétentes, ni même d'informer son cocontractant de l'existence de cette procédure.

Il ne saurait être soutenu que les RTC produits par la société CATS-Microel dateraient de 2005 et qu'il ne serait pas démontré que la procédure existait au moment des importations litigieuses, dans la période 1998/2001, alors que la procédure de renseignements tarifaires liant les administrations des Etats membres est prévue par le règlement CEE n° 2913/92 du Conseil du 12 octobre 1992 et le règlement CEE n° 2454/93 de la Commission du 2 juillet 1993 et, qu'en conséquence, une demande de RTC pouvait être faite par la société Qualitair dès 1998.

En application des articles 395 et 396 du code des douanes et 1992 du code civil, le commissionnaire en douane est responsable tant sur le plan civil que sur le plan pénal des conséquences des erreurs, omissions ou infractions retenues du seul fait de sa déclaration.

Par ailleurs, il est incontestable que le commissionnaire en douane est tenu d'un véritable devoir de conseil vis à vis de ses clients.

La société Qualitaire n'a manifestement pas respecté les textes susvisés et a manqué à son obligation de conseil, de sorte qu'elle ne peut se prévaloir des dispositons des articles 1999 et 2000 du code civil et solliciter de la société CATS-Microel la prise en charge des frais qu'elle a engagés dans le cadre de son mandat et de ses suites.

Contrairement à l'affirmation de la société Qualitair, la société CATS-Microel, dans son courrier du 21 septembre 2004, ne s'est pas engagée à prendre en charge l'ensemble des frais qui pourraient découler du litige tarifaire en cause dans la présente espèce, mais n'a accepté de couvrir que les honoraires du Cabinet d'avocat Famchon concernant l'assitance de la société Qualitair devant la CCED.

Le jugement dont appel doit donc être infirmé et la société Qualitair déboutée de l'intégralité de sa demande.

L'équité commande d'allouer à la société CATS-Microel une indemnité de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Et, adoptant ceux non contraires des Premiers Juges,

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

INFIRME le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

CONSTATE que la demande en garantie relative aux droits de douane formée par la société Qualitair à l'encontre de la SA Composants Acquisition Traitement Signal (nom commercial Microel Solutec) est devenue sans objet,

DEBOUTE la SAS Qualitair & Sea International de l'ensemble de ses demandes,

CONDAMNE la SAS Qualitair & Sea International à payer à la SA Composants Acquisition Traitement Signal (nom commercial Microel Solutec) la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SAS Qualitair & Sea International aux dépens d'appel,

AUTORISE la SCP Baufume-Galland-Vignes, avoué, à recouvrer directement les dépens d'appel conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier

A. BOISNARD

La Présidente

C. PERRIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 09/02797
Date de la décision : 08/12/2011

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°09/02797 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-12-08;09.02797 ?
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