La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/12/2011 | FRANCE | N°10/11533

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 06 décembre 2011, 10/11533


COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 6 DECEMBRE 2011
(no 381, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 11533
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 19 mai 2010- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 09/ 08262

APPELANT

Monsieur Guy X...... 75008 PARIS représenté par la SCP JEAN PHILIPPE AUTIER, avoués à la Cour assisté de Me Zohra MAHI, avocat au barreau de PARIS, toque : D 1961

INTIMEES

Madame Tal Adir Z...... BEER SHEVA 0 ISRAËL représentée par la SCP SCP TAZE-BERNARD BELFAYOL BROQUET,

avoués à la Cour assistée de Me Tamar KATZ, avocat au barreau de PARIS, toque : G. 326

Madame Iscah B....

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 6 DECEMBRE 2011
(no 381, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 11533
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 19 mai 2010- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 09/ 08262

APPELANT

Monsieur Guy X...... 75008 PARIS représenté par la SCP JEAN PHILIPPE AUTIER, avoués à la Cour assisté de Me Zohra MAHI, avocat au barreau de PARIS, toque : D 1961

INTIMEES

Madame Tal Adir Z...... BEER SHEVA 0 ISRAËL représentée par la SCP SCP TAZE-BERNARD BELFAYOL BROQUET, avoués à la Cour assistée de Me Tamar KATZ, avocat au barreau de PARIS, toque : G. 326

Madame Iscah B...... BEER SHEVA ISRAËL représentée par la SCP SCP TAZE-BERNARD BELFAYOL BROQUET, avoués à la Cour assistée de Me Tamar KATZ, avocat au barreau de PARIS, toque : G. 326

COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 octobre 2011, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Dominique GUEGUEN, conseiller chargé du rapport, en présence de Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre Madame Brigitte HORBETTE, Conseiller Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Noëlle KLEIN
ARRET :
- contradictoire-rendu publiquement par Monsieur François GRANDPIERRE, président de chambre-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.- signé par Monsieur François GRANDPIERRE, président et par Madame Noëlle KLEIN, greffier à qui la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire. **********

M. Guy X..., avocat, de nationalité française et israélienne, sur la plainte déposée courant 1999 par une de ses clientes Mme Rina C..., contestant ses honoraires et l'accusant de viol, a été poursuivi par Mmes Iscah B... et Tal Adir Z..., de nationalité israélienne, respectivement responsable et responsable adjointe du Bureau du procureur de la Région-Sud d'Israël (Praklitout) sur la base d'un acte notarié dressé par Mme Dominique G..., de nationalité française, avocate/ notaire à Raanana (Israël) retranscrivant l'enregistrement réalisé à son insu d'une conversation avec ladite cliente.
Invoquant la violation du secret professionnel, l'usage fautif de l'enregistrement, au surplus retranscrit de manière partielle et erronée, estimant avoir subi un préjudice moral et matériel en raison du " harcèlement judiciaire et de la dénonciation calomnieuse dont il a été l'objet ", sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil, M. X..., par des actes des 25 et 27 mai 2009 a assigné devant le tribunal de grande instance de Paris, Mmes B..., Z..., G... et M. Elie C..., pour les voir condamner solidairement à lui verser en réparation la somme de 1 million d'euros outre une indemnité de procédure.
L'assignation concernant Mmes B... et Z... leur a été notifiée par les soins de Maître H..., huissier de justice à Paris, par acte du 25 Mai 2009 à l'adresse du parquet israélien et à leur hiérarchie, doublé d'une lettre recommandée avec accusé de réception.

Mmes B... et Z..., opposant que l'action intentée par M. X... ne relève pas de matières civiles et commerciales mais trouve son origine dans des actes de la puissance publique qui se rattachent à la souveraineté de l'Etat Israélien ce qui a pour conséquence que la convention de La Haye du 15 novembre 1965 n'est pas applicable, que ladite convention serait-elle applicable, la voie de transmission prévue par cette dernière n'a pas été en l'espèce respectée, l'acte ne comportant pas de signature de l'huissier, au constat de ce que le doublement de la signification au parquet par l'envoi d'une lettre recommandée de la copie de l'acte d'huissier en date du 25 mai 2009 porte atteinte à l'immunité de juridiction dont elles bénéficient, ont saisi le juge de la mise en état d'un incident tendant à voir constater le non respect par M. X... des dispositions de l'article 684 § 2 du code de procédure civile qui leur sont applicables et dire nul l'acte en date du 25 mai 2009 ainsi que la signification à parquet, outre l'octroi d'une indemnité de procédure.
En réponse, M. X... a soutenu qu'il a respecté les dispositions des articles 684 et 688 du code de procédure civile et de la Convention de la Haye du 15 novembre 1965 à laquelle ont adhéré la France et Israël faisant valoir que les destinataires, procureurs, ne sont pas des magistrats au sens français du terme ni autorité judiciaire au sens de la cour européenne mais des avocates mandataires chargées de la défense des intérêts de l'Etat, au sens américain du terme, tel l'attorney et que dès lors qu'elles ont violé le secret professionnel, elles ne jouissent pas de l'immunité judiciaire : il a demandé une somme de 10 000 € de dommages et intérêts pour action dilatoire et le versement d'une indemnité de procédure de même montant.
Le ministère public a conclu le 24 février 2010 à la nullité de la convocation en justice de Mmes B... et Z....
Par ordonnance en date du 19 mai 2010, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Paris a :- dit nul et de nul effet l'acte d'assignation de Mmes B... et Z... par acte du 25 mai 2009,- rejeté les autres demandes,- condamné M. X... aux dépens de l'incident et à payer à Mmes B... et Z... la somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,- renvoyé à l'audience de mise en état du 9 septembre 2010 pour conclusions de M. X... sur les demandes visant Mme G....

CELA ETANT EXPOSE, la COUR :
Vu l'appel interjeté le 2 juin 2010 par M. X...,
Vu les conclusions déposées le 21 septembre 2010 par l'appelant qui demande d'infirmer l'ordonnance susvisée, en conséquence de dire régulière l'assignation délivrée le 25 mai 2009 à Mmes B... et Z..., de renvoyer l'affaire à se poursuivre devant le tribunal, avec condamnation solidaire des intimées à lui payer la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à payer les dépens,
Vu les conclusions déposées le 24 février 2011 par les intimées qui demandent à titre principal, à voir dire nul l'acte d'appel de M. X... en date du 2 juin 2010 ainsi que la procédure subséquente pour non respect de l'article 684 alinéa 2 du code de procédure civile, à titre subsidiaire, la confirmation de l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions, en tout état de cause, le débouté de l'appelant de toutes ses demandes, la condamnation de M. X... à leur verser à chacune pour appel abusif et dilatoire au visa de l'article 559 du code de procédure civile, la somme de 5000 € de dommages et intérêts, la somme complémentaire de 3500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, ainsi qu'à payer tous les dépens.
SUR CE :
Sur la nullité de l'acte d'appel et de la procédure d'appel :
Considérant que les intimées font valoir que la procédure d'appel intentée par M. X... est en elle-même irrégulière et frappée de nullité, dès lors qu'aucune notification internationale de l'acte d'appel lui-même n'a été effectuée dans le respect des dispositions d'ordre public des articles 684 alinéa 2 et 693 du code de procédure civile, textes qui définissent des règles de portée générale, dont les intimées estiment qu'elles sont en conséquence applicables à tous les actes intervenant au cours d'une procédure, dont ceux relatifs aux voies de recours, alors que c'est par lettre simple que la procédure d'appel leur a été notifiée ;
Considérant que si l'article 693 alinéa 1er prévoit que ce qui est prescrit par l'article 684, en son alinéa 2, relatif à la notification des actes à l'étranger, et plus particulièrement à celle des actes destinée à un Etat étranger ou à tout autre bénéficiaire de l'immunité de juridiction, doit être observé à peine de nullité, les dispositions distinctes relatives à la déclaration d'appel, telles qu'elles résultent, pour la procédure avec représentation obligatoire, des dispositions des articles 900 et suivants du code de procédure civile, sont seules applicables aux modalités de l'acte d'appel ; que ces dispositions ont été respectées par l'appelant, l'acte d'appel étant en conséquence régulier ; que par ailleurs, sur la déclaration d'appel remise par l'avoué de M. X... le 2 juin 2010 au secrétariat-greffe de la cour d'appel de Paris, Mesdames B... et Z... ont constitué avoué le 26 août 2010, que d'ailleurs les intimées avaient élu domicile en France chez leur avocat du barreau de Paris dans l'acte par lequel elles ont fait signifier à l'appelant l'ordonnance déférée ; que dès lors, la saisine de la cour d'appel étant régulière et les intimées ne justifiant pas d'un quelconque grief susceptible d'entraîner la nullité soit de la déclaration d'appel soit de la procédure d'appel subséquente, ce moyen de nullité de la procédure sera rejeté ;
Sur la nullité de l'assignation délivrée le 25 mai 2009 ;
Considérant que l'appelant qui reprend le bénéfice de son argumentation de première instance, soutient préalablement que le juge de la mise en état n'a pas respecté les dispositions de l'article 74 du code de procédure civile, selon lequel les exceptions doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non recevoir ; qu'il fait valoir que les intimées ont abordé le fond de l'affaire sans se limiter à la discussion relative au mode de signification de l'assignation, qu'ainsi l'incident de nullité par elle formé était tardif et que le juge de la mise en état n'aurait pas dû retenir sa compétence ;
Considérant toutefois que le simple exposé par les parties des circonstances de fait, lorsque ces dernières sont indispensables à l'appréciation de l'incident de nullité, ne saurait être assimilé au fait d'évoquer le débat de fond ; que la nature de l'incident, relatif à l'application de la protection offerte par des règles particulières de notification et par l'immunité de juridiction, rendait indispensable que la juridiction soit informée de la nature des poursuites engagées en Israël contre M. X..., de la nature de l'intervention de Mmes B... et Z... et de leur qualité ; que ce moyen d'irrecevabilité de l'appelant, mal fondé, sera écarté ;
Considérant que l'appelant soutient ensuite l'argumentation selon laquelle l'article 684 § 2 du code de procédure civile prévoit in fine une autre possibilité " à moins qu'en vertu d'un règlement communautaire ou d'un traité international la transmission puisse être faite par une autre voie " ; qu'ainsi il estime pouvoir invoquer la convention de la Haye relative à la signification et la notification à l'étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale ; qu'il soutient que l'huissier de justice qu'il a mandaté a agi selon les règles posées par cette convention, applicable, en matière civile ou commerciale, dans tous les cas où un acte judiciaire ou extrajudiciaire doit être transmis à l'étranger pour y être signifié ou notifié, que la décision déférée n'est pas motivée en ce qu'elle n'indique pas pour quel motif la convention ne serait pas applicable ;
Considérant que par des motifs pertinents que la cour approuve, la décision déférée a retenu que Mmes B... et Z..., membres du parquet et mises en cause pour des décisions prises dans l'exercice de leur mission de poursuite, constituant des actes de puissance publique se rattachant à la souveraineté de l'Etat d'Israël, bénéficient de l'immunité de juridiction et devaient être citées dans les formes prévues à l'article 684 § 2 du code de procédure civile, les dispositions de la convention de la Haye n'étant pas applicables ; qu'en conséquence il convenait que l'acte soit remis au parquet et transmis par l'intermédiaire du ministre de la justice aux fins de signification par voie diplomatique, ce qui n'a pas été fait ; que le fait de leur avoir adressé un courrier recommandé avec accusé de réception porte atteinte aux exigences de la souveraineté et aux exigences de courtoisie internationale ; que par ailleurs, les voies de transmission alternatives prévues par la Convention de la Haye ne sont pas applicables compte tenu de la nature du litige, qu'en effet, ce n'est pas la nature de l'action en justice, quant bien même il s'agirait d'une action pouvant être qualifiée de civile, qui constitue le critère d'appréciation ; qu'en l'espèce l'action ne relève pas de la matière civile car la prétention du demandeur prend sa source dans un acte de puissance publique d'un Etat, un procureur israélien étant un fonctionnaire d'Etat ; qu'il n'existe aucun doute sur la nature pénale des deux poursuites dont M. X... a été l'objet le 10 décembre 2003, diligentées par le bureau du procureur du district Beer-Sheva, l'une pour viol à plusieurs reprises de Mme Rita C..., une cliente, laquelle procédure a entraîné une condamnation à l'encontre de M. X..., l'autre pour vol d'une somme d'argent obtenue à titre de dommages et intérêts en faveur de la même cliente, toujours pendante, M. X... ayant de son côté engagé en vain diverses actions en Israël contre le bureau du procureur et les deux intimées, ainsi qu'à l'encontre des personnes appartenant aux plus hautes autorités judiciaires israéliennes ; qu'ainsi l'appelant, pour se livrer dans ses conclusions à une critique politique et sociologique de l'Etat d'Israël, ne présente pour autant aucune argumentation nouvelle pertinente et que la décision déférée sera confirmée en toutes ses dispositions ;
Sur la demande de dommages et intérêts :
Considérant que les intimées sollicitent qu'il soit fait application en faveur de chacune d'elles des dispositions de l'article 559 du code de procédure civile qui dispose qu'" en cas d'appel principal dilatoire ou abusif, l'appelant peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 3000 € sans préjudice des dommages-intérêts qui lui seraient réclamés " ; que le simple fait d'exercer une voie de recours ne saurait caractériser l'appel abusif et dilatoire visé par l'article susvisé et que cette demande sera rejetée ;
Sur l'article 700 du code de procédure civile :
Considérant que l'équité commande de faire application de ces dispositions au profit de chacune des intimées dans les termes du dispositif ci-après et de débouter l'appelant de sa demande formée sur le même fondement ;
Considérant que les dépens d'appel resteront à la charge de l'appelant.
PAR CES MOTIFS :
Déboute Mesdames B... et Z... de leur demande de nullité de l'acte d'appel et de la procédure subséquente,
Confirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute Mesdames B... et Z... de leur demande d'application des dispositions de l'article 559 du code de procédure civile,
Condamne M. Guy X... à payer à Mesdames B... et Z... chacune la somme de 2000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. Guy X... aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 dudit code.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 10/11533
Date de la décision : 06/12/2011
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2011-12-06;10.11533 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award