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23/11/2011 | FRANCE | N°09/00359

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 23 novembre 2011, 09/00359


.RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 23 Novembre 2011

(n° 1 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/00359-BVR



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Février 2007 par le conseil de prud'hommes de MEAUX section Industrie RG n° 06/00587









APPELANT

Monsieur [J] [K]

[Adresse 1]

[Localité 2]

comparant en personne, assisté de M. [D]

[H] (Délégué syndical muni d'un pouvoir)







INTIMÉE

SA SODIS

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Sophie LALLEMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : C0699







COM...

.RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 23 Novembre 2011

(n° 1 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/00359-BVR

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Février 2007 par le conseil de prud'hommes de MEAUX section Industrie RG n° 06/00587

APPELANT

Monsieur [J] [K]

[Adresse 1]

[Localité 2]

comparant en personne, assisté de M. [D] [H] (Délégué syndical muni d'un pouvoir)

INTIMÉE

SA SODIS

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Sophie LALLEMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : C0699

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 11 Octobre 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Patrice MORTUREUX DE FAUDOAS, Président

Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Conseillère

Madame Claudine ROYER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Chantal HUTEAU, lors des débats

ARRET :

- Contradictoire,

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Patrice MORTUREUX DE FAUDOAS, Président et par Evelyne MUDRY, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

Par jugement en date du 7 février 2007, auquel la cour se réfère pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes de Meaux a débouté Monsieur [J] [K] de ses demandes au titre de la rupture de son contrat de travail.

Monsieur [K] a régulièrement relevé appel de ce jugement.

L'affaire fixée un première fois à l'audience du 6 octobre 2008 a fait l'objet d'une radiation le même jour pour défaut de diligences de l'appelant avant d'être rétablie le 20 janvier 2009.

Une mesure de médiation ultérieurement ordonnée, n'ayant pas abouti, l'affaire, après deux autres renvois successifs, a été fixée à la présente audience.

Vu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile et les conclusions des parties régulièrement communiquées, oralement soutenues et visées par le greffe à l'audience du 11 octobre 2011 conclusions auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé de leurs demandes, moyens et arguments.

******

Il résulte des pièces et des écritures des parties les faits constants suivants:

Monsieur [J] [K] a été embauché le 15 septembre 1997, par la société Sodis ayant pour activité la vente de livres, en qualité de manutentionnaire polyvalent avant d'être nommé magasinier cariste et affecté à l'équipe de nuit à compter du 1er juillet 2002, moyennant un salaire mensuel brut en dernier lieu de 2.043 euros.

Les relations contractuelles entre les parties étaient régies par la convention collective nationale de l'édition, la société comptant près de 500 salariés.

Le 7 juillet 2003, le salarié a fait l'objet d'un avertissement pour avoir manqué de respect et insulté son chef d'équipe.

Le 7 octobre 2003, il a été mis à pied à titre disciplinaire pendant 3 jours pour absence injustifiée avant d'être de nouveau sanctionné, pour des faits similaires, par avertissements successifs des 13 avril 2004 et 25 avril 2005.

Le 10 mai 2005, il a fait l'objet d'une convocation pour un entretien préalable fixé au 19 mai 2005 pour des faits d'agression commise sur son supérieur, monsieur [U].

Ayant déclaré au cours de cet entretien, être victime de harcèlement moral dans le cadre de son travail, il a été temporairement affecté sur un poste de jour, l'employeur ordonnant une enquête et suspendant dans l'attente, la procédure de licenciement.

A l'issue des investigations, monsieur [K] a été convoqué à un nouvel entretien fixé le 11 juillet 2005 auquel il ne s'est pas présenté.

Il a été licencié le15 juillet 2005 et le 21 octobre 2005 a saisi le conseil de prud'hommes.

MOTIFS

sur le licenciement

Considérant que la lettre de licenciement reproche en substance au salarié des attitudes de provocation et de perturbation, s'étant caractérisées par une agression sur son supérieur, monsieur [U], dans la nuit du 25 au 26 avril 2005,un comportement menaçant vis à vis du médecin du travail auquel il avait réclamé un avis d'inaptitude, un refus d'être affecté en équipe de jour, un abus de son droit de retrait et une plainte infondée de harcèlement moral;

Et considérant qu'en l'état des pièces produites, force est de constater que ces griefs ne sont pas établis ;

Considérant en effet s'agissant du 1er grief, que s'il est avéré qu'un différend est né, au cours du poste de nuit, entre monsieur [K] et monsieur [U], agent de maîtrise de l'équipe de nuit, au sujet d'une pause indue que le second a reproché au premier d'avoir prise, aucun élément objectif extérieur n'est produit pour conforter les affirmations de monsieur [U] selon lesquelles monsieur [K] l'aurait bousculé avec les épaules, et plaqué contre le mur, en le regardant fixement et hargneusement;

Que l'employeur affirme sans l'établir que monsieur [K] aurait reconnu les faits, les autres membres de l'équipe de nuit , absents lors de l'échange, soulignant que les frictions entre ce salarié et son supérieur étaient fréquentes, qu'ils ne s'entendaient pas, monsieur [U] n'étant pas à l'aise avec le relationnel tandis que monsieur [K] était difficile à manager;

Considérant s'agissant ensuite de l'esclandre du salarié dans le cabinet du médecin du travail, le 6 juin 2005, que l'infirmière du service, dont la société Sodis produit le témoignage, indique que monsieur [K] s'était certes emporté, lors de son passage à l'infirmerie, en réclamant de manière véhémente, une fiche médicale sur son aptitude au travail, mais qu'il s'était aussi rapidement excusé, en imputant sa colère aux pressions qu'il subissait au travail et à son manque de sommeil; que cet incident, eu égard aux tensions existants dans l'entreprise qui procédait aux auditions sur les faits qu'il a avait dénoncés, ne constitue pas un grief valable;

Considérant sur son refus d'être affecté à une équipe de jour les 6 et 7 juin 2005,que la preuve d'une quelconque insubordination de sa part n'est pas rapportée,

Que s'agissant de l'usage prétendument abusif de son droit de retrait, ce grief ne peut être allégué sérieusement, le salarié étant dans l'exercice d'un droit qu'il n'a, en tout état de cause pas exercé, après s'être rapproché du CHSCT ;

Considérant enfin, sur ses accusations prétendument mensongères à l'encontre de monsieur [U], qu'il ne saurait davantage être reproché au salarié d'avoir, à l'occasion de la procédure de licenciement engagée à son encontre, informé l'employeur des mauvaises relations qu'il entretenait avec ce supérieur hiérarchique, de la dégradation de ses conditions de travail , du harcèlement moral qu'il déclarait subir , autant d'éléments pris au sérieux par la société Sodis qui a diligenté une enquête auprès des membres de l'équipe de nuit;

Qu'il ne pouvait en conséquence, être davantage sanctionné pour avoir exercé son droit d'alerte, peu important les résultats des investigations diligentées ;

Considérant que la société Sodis ne rapporte pas la preuve des faits qu'elle invoque de sorte que le licenciement sera déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse;

Que licencié abusivement, monsieur [K] peut prétendre à l'octroi de dommages et intérêts qui compte tenu de son ancienneté et des quelques éléments qu'il a produit sur son préjudice, seront fixés à la somme de 14.000 euros représentant environ 7 mois de salaires;

Sur le harcèlement moral

Considérant qu'aux termes de l'article L.1152-1 du Code du travail, les agissements répétés de harcèlement moral ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du salarié susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel;

Que selon l'article L.1154-1 du contrat de travail, en cas de litige relatif à l'application des articles L 1152-1, dès lors que le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à la partie défenderesse, au vu des ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, le juge formant sa conviction après avoir ordonné toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ;

Considérant que monsieur [K] prétend que son licenciement est intervenu après qu'il ait subi un harcèlement moral de la part de monsieur [U], les difficultés relationnelles datant selon lui de 2003 et ayant été dénoncées déjà à cette époque par les délégués du personnel ;

Et considérant que s'il produit aux débats des attestations de certains salariés qui indiquent que monsieur [U] le surveillait, usait d'un ton familier, le poussait à bout , faisait régner une tension explosive dans le service, il n'en demeure pas moins que les 21 auditions précises, détaillées et circonstanciées, réalisées par l'employeur dans le cadre de son enquête interne révèlaient que monsieur [K] était un salarié difficile, ayant des problèmes avec la hiérarchie, notammment lorsqu'elle était exercée par un salarié plus jeune, comme c'était le cas pour monsieur [U], qui ne savait pas travailler en équipe, démarrait au quart de tour, se mettait en congé maladie dès qu'il n'obtenait pas satisfaction, s'était créé des inimitiés parmis les membres de son équipe de nuit ;

Que de nombreux témoins ajoutaient que monsieur [U], de son côté n'était pas à l'aise dans le relationnel car il était perfectionniste, qu'il avait parfois des problèmes de communication , était trop direct dans ses consignes ; qu'ils soulignaient surtout que les tensions entre les deux salariés résultaient pour l'essentiel d'une incompatibilité d'humeur, l'un ne supportant pas l'autre, et qu'il y avait des torts partagés;

Considérant que si les délégués du personnel ont alerté la direction en 2002 de faits d'abus de pouvoirs, de la part d'un agent de maitrise, aucun élement ne demontrait que ce supérieur était monsieur [U] ;

Que si la société Sodis a entreprispar ailleurs un audit sur le harcèlement moral à la demande des représentants du personnel en 2003, l'affrontement évoqué dans le rapport très complet déposé, stigmatisait en ce qui concerne le service de nuit, les tensions entre les équipes diurnes et nocturnes, mais ne mentionnait aucun fait de harcelement moral au sein du service ;

Considérant enfin que le certificat médical produit pas le salarié et daté de janvier 2006, soit 6 mois après le licenciement, n'est pas probant de l'existence d'un lien de causalité entre la depression constatée et la relation professionnelle passée ;

Considérant que la preuve d'un harcèlement moral n'est en conséquence pas établie;

Que le salarié sera débouté de sa demande de di de ce chef ;

Considérant que les éléments de la cause justifient d'allouer à monsieur [K] au titre de ses frais non répétibles une indemnité de 1.000 euros, la société Sodis étant condamnée aux dépens ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement en ce qu'il a dit que le licenciement était fondé,

Statuant à nouveau de ce chef,

Condamne la société Sodis à payer à monsieur [K] une somme de 14.000 euros pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Y ajoutant ,

Déboute le salarié de sa demande au titre du harcèlement moral,

Rejette toutes autres prétentions des parties,

Condamne l'employeur à une indemnité de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 09/00359
Date de la décision : 23/11/2011

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°09/00359 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-11-23;09.00359 ?
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