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22/11/2011 | FRANCE | N°10/19938

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 22 novembre 2011, 10/19938


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2- Chambre 1

ARRET DU 22 NOVEMBRE 2011

(no 356, 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 19938

Décision déférée à la Cour :
jugement du 6 octobre 2010- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 09/ 17818

APPELANT

Monsieur Mohamed X...
...
...
...
représenté par la SCP BASKAL CHALUT-NATAL, avoués à la Cour
assisté de Me Fabrice DUBEST, avocat au barreau de PARIS, toq

ue : L 15
AARPI DARTEVELLE et DUBEST

INTIMES

Madame Dominique Y...
...
75012 PARIS
représentée par la SCP OUDINOT-FLAURAUD, av...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 2- Chambre 1

ARRET DU 22 NOVEMBRE 2011

(no 356, 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 19938

Décision déférée à la Cour :
jugement du 6 octobre 2010- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 09/ 17818

APPELANT

Monsieur Mohamed X...
...
...
...
représenté par la SCP BASKAL CHALUT-NATAL, avoués à la Cour
assisté de Me Fabrice DUBEST, avocat au barreau de PARIS, toque : L 15
AARPI DARTEVELLE et DUBEST

INTIMES

Madame Dominique Y...
...
75012 PARIS
représentée par la SCP OUDINOT-FLAURAUD, avoués à la Cour
assistée de Me Marie-Christine CHASTANT MORAND, avocat au barreau de PARIS, toque : P 72 SCP GARAUD SALOME CHASTANT BERRUX

Monsieur Gilbert Z...
...
92100 BOULOGNE BILLANCOURT
représenté par la SCP OUDINOT-FLAURAUD, avoués à la Cour
assisté de Me Marie-Christine CHASTANT MORAND, avocat au barreau de PARIS, toque : P 72 SCP GARAUD SALOME CHASTANT BERRUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 12 octobre 2011, en audience publique, le rapport entendu conformément à l'article 785 du code de procédure civile, devant la Cour composée de :

Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre
Madame Brigitte HORBETTE, Conseiller
Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Noëlle KLEIN

ARRET :
- contradictoire
-rendu publiquement par Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre
-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur François GRANDPIERRE, Président et par Madame Noëlle KLEIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

******************

Les docteurs Y...et Z..., experts désignés par le magistrat instructeur de Paris pour procéder aux investigations techniques rendues nécessaires du fait de l'accident du 31 août 1997 dans lequel la princesse de Galles, Lady Diana A..., et Emad El Din Mohamed Abdel Moneim X...ont trouvé la mort, ont refusé de se rendre au Royaume Uni ou de se soumettre à une visio-conférence pour y être entendus par un juge anglais, saisi d'un " inquest ", sur les conditions de réalisation et les conclusions de leur expertise, arguée de faux, après que les juridictions françaises aient prononcé un non lieu, aujourd'hui définitif.

M. Mohamed X..., père de l'une des victimes, leur reproche ce refus dont il estime qu'il a été opposé en contravention avec les termes de leur serment prévu à l'article 22 du décret du 23 décembre 2004 qui leur impose d'apporter leur concours à la justice et que leur responsabilité est engagée sur le fondement des articles 1382 du code civil, 245 et 283 du code de procédure civile, 168 du code de procédure pénale et L1140 du code de la santé publique ; il leur réclame 1 € de dommages et intérêts pour le préjudice qui résulte pour lui du fait de n'avoir pu les interroger dans la procédure anglaise et d'avoir ainsi nui à la manifestation de la vérité, ce que le " coroner " saisi a regretté.

Par jugement du 6 octobre 2010, le tribunal de grande instance de Paris l'a débouté de sa demande et condamné à payer à Mme Y...et à M. Z..., qu'il a déboutés de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, la somme totale de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

CECI ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR,

Vu l'appel de ce jugement par M. X...en date du 12 octobre 2010,

Vu ses dernières conclusions déposées le 10 décembre 2010 selon lesquelles, poursuivant l'infirmation du jugement, il demande, sous de nombreux visas et considérations sans portée juridique, tenant aux circonstances de fait liées au refus de comparaître et de témoigner, de condamner solidairement Mme Y...et M. Z...à lui payer, en réparation de son préjudice, la somme de 1 € de dommages et intérêts et celle de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les dernières conclusions déposées le 27 septembre 2011 par lesquelles Mme Y...et M. Z...demandent la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté M. X...et sollicitent sa condamnation à leur payer la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et, appelants incidents, demandent sa condamnation à leur payer la somme de 1 € de dommages et intérêts pour procédure abusive,

SUR CE,

Considérant que M. X...soutient que les experts étaient tenus de comparaître devant le " coroner " qui les avait convoqués, comme cela est le cas pour la comparution devant un juge français, du fait de la demande d'entraide internationale formulée par la justice britannique et par application des articles 434-15-1 du code pénal et 694-5 du code de procédure pénale relatif à la vidéoconférence, qu'ils ne pouvaient le refuser n'étant pas des " personnes poursuivies " au sens de l'article 434-13 du code pénal, la procédure pénale ouverte à la cour d'appel de Versailles les considérant comme simples témoins, que leur qualité d'experts judiciaires leur impose d'apporter leur concours à la justice en général, fut-elle étrangère, et pas seulement au juge qui les a saisis, que l'obligation de témoigner est usuelle en procédure civile et pénale, qu'elle participe du procès équitable au sens de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qu'à supposer que, liés par le secret de l'instruction, qui ne leur est pas applicable, ils aient refusé de répondre aux questions, cela ne les dispensait pas de comparaître pour s'en expliquer, que le secret n'était plus opposable au " coroner " anglais déjà détenteur de l'intégralité de la procédure, qu'aucun secret ne peut être opposé à un juge, que leur coopération avec les services de police britanniques délégués par ce magistrat ne les dispensait pas de comparaître devant le juge et le jury devant lesquels se déroule le débat contradictoire, que leur absence l'a privé de la possibilité de leur poser des questions, que le juge anglais a dit que ce refus avait nui à la procédure ;

Que Mme Y...et M. Z...lui opposent qu'à l'époque du déroulement de l'" inquest " ils étaient interrogés également dans le cadre d'une information ouverte au tribunal de grande instance de Versailles du chef de falsification de données ou de résultat d'expertise, ce qui leur interdisait de témoigner en même temps, de manière publique, sur les expertises qu'ils ont menées sans risquer de violer le secret de l'instruction en cours, qu'ils n'ont de comptes à rendre, comme experts, qu'au juge qui les a désignés, qu'ils ont été longuement et à plusieurs reprises interrogés sur la commission rogatoire internationale du " coroner " par des policiers français accompagnés de leurs collègues britanniques et ont également répondu par écrit aux nombreuses questions posées, qu'ils ont donc apporté leur concours à la justice de ce pays, recevant d'ailleurs les remerciements de leurs services d'enquête, qu'en outre les conclusions de l'" inquest " sont les mêmes que celles de la justice française quant aux causes des décès et aux résultats des prélèvements effectués sur Henri B..., attribués avec certitude grâce aux marqueurs ADN, que le texte relatif aux experts ne saurait trouver application au Royaume Uni où les experts judiciaires n'existent pas, que l'article 247 du code de procédure civile limite strictement le contenu des divulgations permises à un expert, qu'il n'existait aucune contrainte à leur comparution selon la loi britannique, la loi française qui le prévoit ne pouvant jouer dans un autre pays, qu'ils sont en outre liés par le secret professionnel, que M. Z...devait témoigner en même temps devant la cour d'assises et ne pouvait donc se libérer, que leur témoignage ne pouvait rien apporter de plus que le contenu et le résultat de leurs rapports d'expertises qui avaient été vérifiés par des contre-expertises au cours de l'information ; que les accusations de M. X...quant à leur probité leur cause un préjudice du fait de leur réputation, qui justifie sa condamnation à leur verser 1 euro de dommages et intérêts ;

Considérant que M. X..., qui ne conteste pas qu'il n'existe, en droit anglais, aucune obligation légale de témoigner devant un jury britannique pour les deux experts visés ni que le " coroner " ait jamais formellement exigé leur présence, physique ou par voie de vidéo-conférence, soutient néanmoins qu'une telle obligation leur était faite par les textes français régissant leur statut, ainsi que ceux du droit civil, de la procédure civile, du droit pénal ou de la procédure pénale qu'il invoque ;

Considérant toutefois que Mme Y...et M. Z...lui rétorquent justement que ces textes sont rigoureusement inapplicables à une procédure menée hors du territoire national, sans que puisse être sérieusement allégué le fait que, la justice du Royaume Uni ayant sollicité la coopération internationale de la justice française, cela rendrait nécessairement applicables à la procédure britannique de recherche des causes de la mort l'ensemble des textes français qui prévoient cette même procédure en France ;

Qu'en fait, et à supposer que le " coroner " chargé de la recherche des causes de la mort de la princesse de Galles et de Emad X...ait jugé indispensable à la bonne marche de sa procédure la comparution personnelle de Mme Y...et de M. Z..., ce qu'il n'a pas manifesté, ce sont les seules autorités judiciaires du Royaume Uni qui auraient pu s'en plaindre dans le cadre de la coopération demandée ; que de ce point de vue il ressort tout au contraire des lettres versées que les services enquêteurs délégués par ce magistrat se sont félicités de la disponibilité et de la participation des deux experts sollicités et qu'il est constant que l'entier dossier de l'information menée en France a été transmis aux services du " coroner " ;

Qu'en réalité, le grief essentiel invoqué par M. X...à l'encontre de Mme Y...et de M. Z...porte sur le fait que ses avocats n'ont pu, à l'occasion de l'" inquest ", les interroger publiquement sur les détails de la manière dont ils avaient conduit leurs missions et qui ont abouti à ce que l'information conclue à la causalité directe de l'imprégnation alcoolique de Henri B...dans son défaut de maîtrise du véhicule dans lequel se trouvaient les victimes ; que cependant M. X..., qui s'était constitué partie civile dans le dossier d'information ouvert sur la plainte avec constitution de partie civile des parents d'Henri B..., qui contestaient ces résultats d'expertise et mettaient directement en cause les deux experts, et avait donc eu accès à l'ensemble des pièces du dossier d'instruction, incluant les auditions de ces deux experts, qui avait la possibilité, comme toute partie, de demander au magistrat instructeur saisi tous actes qui lui semblaient opportuns, faculté dont il a usé, n'explique pas en quoi la comparution de Mme Y...et de M. Z...devant la juridiction du " coroner ", qui avait entre ses mains l'entier dossier transmis par la justice française, aurait pu lui apporter plus d'informations qu'il n'en n'avait déjà, étant souligné que l'" inquest " portant exclusivement sur la recherche des causes de la mort, les experts n'auraient pu y témoigner d'autres choses que des conclusions contenues dans leurs rapports ;

Que, partant, au delà des manquements qu'il croit pouvoir relever à l'encontre de ces deux experts, il ne justifie en rien de l'éventuel préjudice, sauf purement hypothétique, qui en serait résulté pour lui ; qu'en particulier il ne démontre pas, ayant eu personnellement accès à toutes les données judiciaires existantes, en quoi la non comparution des deux experts devant le " coroner " aurait violé son droit à un procès équitable au sens de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qu'il invoque, ce alors que ce magistrat, aboutissant in fine aux mêmes conclusions que la justice française, ait convenu que l'absence des deux experts n'était pas forcément de nature à modifier l'appréciation du jury ;

Que pour ces motifs, joints à ceux des premiers juges, le surplus du détail de l'argumentation de M. X...devient inopérant, le jugement qui l'a débouté ne pouvant qu'être confirmé ;

Considérant que le jugement sera également confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts formulée par Mme Y...et M. Z...qui ne démontrent pas le préjudice que l'action de M. X...leur aurait causé, le fait que le père d'une victime dont le décès a suscité, au delà de l'émotion, nombre d'interrogations et de doutes sur ses circonstances, récemment relancés par la presse britannique, use de tous les moyens procéduraux en sa possession pour trouver les réponses aux questions qu'il se pose, ne pouvant, par définition, caractériser l'abus qu'ils y voient ;

Considérant que les circonstances légitiment néanmoins l'octroi, à Mme Y...et à M. Z..., d'indemnités procédurales dans la mesure précisée au dispositif ;

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Condamne M. X...à payer à Mme Y...et à M. Z...la somme globale de 5 000 € (cinq mille euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 10/19938
Date de la décision : 22/11/2011
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2011-11-22;10.19938 ?
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