La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/11/2011 | FRANCE | N°07/06426

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 03 novembre 2011, 07/06426


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 6



ARRÊT DU 3 NOVEMBRE 2011



(n° , 16 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 07/06426



Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Mars 2007 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 05/12966





APPELANTE



Madame [I] [B] [J] épouse [P] [U]

[Adresse 5]

[Localité 6]



repr

ésentée par Me Lionel MELUN, avoué à la Cour

assistée de Me Cataldo CAMMARATA de la SELARL SQUADRA ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0538





INTIMÉE



Société JP MORGAN CHASE BANK NATIONAL ASSO...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRÊT DU 3 NOVEMBRE 2011

(n° , 16 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/06426

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Mars 2007 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 05/12966

APPELANTE

Madame [I] [B] [J] épouse [P] [U]

[Adresse 5]

[Localité 6]

représentée par Me Lionel MELUN, avoué à la Cour

assistée de Me Cataldo CAMMARATA de la SELARL SQUADRA ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0538

INTIMÉE

Société JP MORGAN CHASE BANK NATIONAL ASSOCIATION venant aux droits de la société MORGAN GUARANTY TRUST COMPANY OF NEW YORK agissant poursuites et diligences en la personne de son Directeur

[Adresse 2]

[Localité 6]

représentée par la SCP DUBOSCQ et PELLERIN, avoué à la Cour

assistée de Me Mauricia COURREGE, avocat au barreau de PARIS, toque : R 224

PARTIE INTERVENANTE :

SOCIÉTÉ BELEGGINGSMAATSCHAPPIJ BV (ci-après dénommée BELENSAS)

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 7] (PAYS-BAS)

représentée par Me Lionel MELUN, avoué à la Cour

assistée de Me Cataldo CAMMARATA de la SELARL SQUADRA ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0538

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 Mars 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Claude APELLE, Présidente de chambre

Madame Marie-Josèphe JACOMET, Conseillère

Madame Caroline FEVRE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : M. Sébastien PARESY

ARRÊT :

- contradictoire

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Josèphe JACOMET, Conseillère au lieu et place de Madame Marie-Claude APELLE, Présidente empêchée, et par M. Sébastien PARESY, greffier présent lors du prononcé.

****************

Mme [I] [J] épouse [F] [U] est appelante du jugement rendu par le 14 mars 2007 par le tribunal de grande instance de Paris, qui :

- a dit n'y avoir lieu à sursis à statuer ;

- l'a condamnée à payer à la société J.P. Morgan Chase Bank la somme de quatre millions cent soixante-quatre mille six cent vingt-six euros et onze centimes (4.164.626,11 €), représentant le solde débiteur de son compte n° 020037G0040 au 28 février 2001, augmentée des agios échus postérieurement au 17 mars 2001, calculés trimestriellement en fonction du taux indiqué sur le décompte d'agios pour le trimestre précédent ;

- l'a condamnée, au titre de son engagement de caution, à payer à la société J.P. Morgan Chase Bank la somme de six millions quatre cent deux mille huit cent cinquante-neuf euros (6.402.859 €), au titre de son engagement de caution, outre les intérêts au taux légal à compter du 28 mai 1991, date de la mise en demeure ;

- a dit que les intérêts dus à la société J.P. Morgan Chase Bank seront capitalisés à compter du 18 juillet 2005 ;

- a autorisé la société J.P. Morgan Chase Bank à vendre à son profit, à due concurrence de sa créance sur Mme [U], les trente-quatre mille cent quatre-vingt--sept (34.187) parts du fonds commun de placement J.P.M. Euro Monétaire Plus C, nanties à son profit ;

- a débouté Mme [U] de ses demandes reconventionnelles ;

- a dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure

civile ;

- a ordonné l'exécution provisoire de la décision ;

- a condamné Mme [U] aux dépens

' ' '

Pour la clarté de la discussion, il est nécessaire de rappeler les données factuelles et contractuelles du litige et les procédures antérieures.

1.- Les parties au litige :

La société J.P. Morgan Chase Bank, National Association (ci-après, la Banque J.P. Morgan Chase), société régie par le droit américain et celui de l'État de New York, vient aux droits de la société Morgan Guaranty Trust Company of New York (ci-après, la Banque Morgan Guaranty Trust), société également régie par le droit américain et celui de l'État de New York, qu'elle a absorbée par suite d'une fusion-absorption intervenue le 10 novembre 2001, régulièrement publiée.

La Banque Morgan Guaranty Trust était une société de droit américain, qui exerçait une activité de banque de dépôts. Elle n'avait pas de filiale française, mais simplement un bureau à [Localité 6]. C'est elle qui a consenti les trois crédits des 5, 12 et 29 mars 1990.

Elle ne doit pas être confondue avec la société J.P. Morgan & Cie S.A., société de droit français et filiale du groupe Morgan, qui a conclu trois conventions de conseil financier des 3 août 1989, 29 novembre 1989 et 29 mars 1990.

Mme [I] [J] épouse [F] [U] (ci-après, Mme [U]) et la société à responsabilité limitée Urbinvest (ci-après, la société Urbinvest), qui avait pour seuls actionnaires Mme [U] et son époux, étaient propriétaires indivis d'un immeuble d'habitation sis à [Adresse 8], constitué d'un bâtiment sur rue, d'un bâtiment sur parc et d'un parc.

Mme [U] est citoyenne française et, à l'époque des faits et accords litigieux, était résidente syrienne sur le plan fiscal.

La société Belenggingsmaatschappij Belensas B.V. (ci-après, la société Belensas) est une société de droit néerlandais, dont la gestion était assurée par une autre société de droit néerlandais, la société Trust, Management and Finance-T.M.F. (ci-après, la société T.M.F.), spécialisée dans la gestion de sociétés.

La société Belensas appartient à une société Shadowdance, incorporée aux Antilles néerlandaises (territoire d'outre-mer autonome des Pays-Bas), et a pour bénéficiaire économique la société Chardon, société incorporée aux Îles Vierges britanniques (territoire d'outre-mer du Royaume-Uni) et appartenant à Mme [U].

Les sociétés Belensas et Shadowdance étaient mises à la disposition des vendeurs, Mme [U] et la société Urbinvest, par la société T.M.F.

Dans le cadre d'un montage juridico-fiscal, la société Belensas a acquis de Mme [U] et de la société Urbinvest leurs quotes-parts de l'immeuble.

La société Belensas devait dédommager une professionnelle de l'immobilier de nationalité libanaise, Mme [Y], bénéficiaire d'une promesse de vente, et évincer deux locataires, MM. [V] et [R], auxquels elle devait régler des indemnités d'éviction.

2.- La problématique du financement :

Courant 1989, à une date qui ne peut être précisément déterminée, et dans des conditions qui sont controversées ' la Banque J.P. Morgan Chase exposant que la future cliente a pris l'initiative de la contacter par l'entremise de M. [A], un intervenant dans le secteur de l'immobilier qui se disait directeur de la société Urbinvest, Mme [U] soutenant qu'elle a été démarchée par la banque ', Mme [U] et la société Morgan Guaranty Trust sont entrées en relation au sujet du financement d'une opération de vente de l'immeuble.

Au vu des pièces produites aux débats, il est incontestable que se posaient différentes questions, notamment :

a.- le remboursement de la société Kuweiti French Bank, qui avait consenti aux propriétaires un crédit qui arrivait à expiration et disposait d'une hypothèque conventionnelle sur l'immeuble ;

b.- la recherche d'un acquéreur au prix exigé par les vendeurs, soit cent vingt-cinq millions de francs (125.000.000 F), correspondant à dix-neuf millions cinquante-six mille cent vingt-sept euros et quinze centimes (19.056.127,15 €), prix justifié selon les propriétaires par la situation exceptionnelle du bien (dans le VIIe arrondissement de [Localité 6], aux limites du VIe), en une période de hausse très importante des prix de l'immobilier (1989), et quelque soit son état de dégradation, et le financement de l'acquéreur ;

c.- un projet assez imprécis de transformation de l'immeuble, en hôtel ou en résidence pour personnes âgées fortunées ' la banque J.P. Morgan Chase indiquant que M. [A], représentant de Mme [U], se prévalait d'un permis de construire, qui, en réalité, n'avait pas et n'a jamais été obtenu ;

d.- la volonté de Mme [U] de trouver une solution juridico-fiscale lui permettant d'échapper à l'imposition des plus-values, ou du moins de la minorer, car elle avait reçu le bien par donation, à un prix déclaré au fisc très modeste.

3.- Le fournisseur de crédits et les prestataires de services :

Quatre sociétés ont prêté leurs concours ou leurs services dans le cadre de l'opération mise en 'uvre :

a.- la banque Morgan Guaranty Trust, qui a consenti les crédits et pris des garanties;

b.- la société J.P. Morgan et Cie S.A., qui, comme il a été dit, a conclu les conventions de conseil financier ;

c.- la société K.P.M.G., spécialisée dans le conseil juridique et fiscal et l'audit ' son intervention a eu particulièrement pour objet de concevoir et mettre en 'uvre un montage juridico-fiscal destiné à permettre à Mme [U] d'«'optimiser'» sa situation fiscale, particulièrement au regard de l'impôt sur les plus-values ;

d.- la société Infoburo, cabinet immobilier, qui a été chargée de la recherche d'un acquéreur au prix souhaité par les vendeurs ; pour être complet, il doit être indiqué qu'une société lyonnaise exerçant l'activité d'agent immobilier a été également mandatée pour la recherche d'un acquéreur, mais n'a pas présenté de candidat.

4.- Le montage juridico-fiscal :

Il a été formellement établi par les procédures pénales, dont de larges extraits sont versés aux débats, que la société K.P.M.G., et plus particulièrement un de ses juristes,

M. [T], a élaboré un montage juridique et fiscal destiné à minorer les sommes dues par Mme [U] au titre de l'impôt sur les plus-values, ainsi qu'à contourner l'obligation pour une personne imposable sur les plus-values résidente fiscale à l'étranger (situation de Mme [U]) de maintenir tout ou partie du prix de vente en France pendant cinq ans.

Les parties sont en complet désaccord sur la paternité de ce montage. À ce stade, il suffit de relever que, selon Mme [U] et les deux sociétés appelantes, la banque Morgan Guaranty Trust a eu un rôle essentiel dans sa conception et sa mise en 'uvre, la banque étant en outre mandatée pour trouver l'acquéreur et lui faire régler le prix avant de consentir tout prêt, tandis que la Banque J.P. Morgan Chase réplique que la Banque Morgan Guaranty Trust, aux droits desquels elle vient, n'a jamais été qu'un fournisseur de crédits et n'a jamais reçu pour mission de trouver un acquéreur, ce qui était du ressort des deux cabinets immobiliers mandatés à cet effet, pas plus que de concevoir et réaliser un montage juridico-fiscal, qui relevait exclusivement de la société K.P.M.G., chargée d'une mission de conseil juridique et fiscal, et particulièrement d'un fiscaliste de cette société, M. [T] ' la société J.P. Morgan et Cie S.A., dont la banque Morgan Guaranty Trust est totalement distincte, n'ayant, en ce qui la concerne, signé que des conventions de conseils financiers, qui ne comportent aucune mission de conception et réalisation d'un montage juridico-fiscal.

En tous cas, au vu des pièces produites aux débats, le montage conçu et appliqué est incontestablement le suivant :

Mme [U] et la société Urbinvest vendaient leurs quotes-parts indivises à la société Belensas B.V. (ci-après, la société Belensas), société de droit néerlandais, dont la gestion était assurée par une autre société de droit néerlandais, la société Trust, Management and Finance-T.M.F. (ci-après, la société T.M.F.), spécialisée dans la gestion de sociétés.

La société Belensas devait dédommager une professionnelle de l'immobilier de nationalité libanaise, Mme [Y], bénéficiaire d'une promesse de vente, et évincer deux locataires, MM. [V] et [R], auxquels elle devait régler des indemnités d'éviction.

Dans ses écritures, la Banque J.P. Morgan Chase met clairement en doute la «'réalité'» de la promesse de vente à Mme [Y], et l'éviction de deux locataires, MM. [V] et [R], auxquels elle devait régler des indemnités d'éviction, qui n'auraient eu d'autre finalité que de donner un habillage juridique à des versements sur un compte mis à la disposition de Mme [U] dans les livres d'une banque suisse ' question sur laquelle Mme [U] et la société Belensas conservent le silence.

Il est en revanche incontestable que Mme [Y] et MM. [V] et [R] ont réalisé une interposition au profit de Mme [U], qui a reçu en définitive les sommes leur étant théoriquement dues sur le compte d'une société Chardon mise à sa disposition, ouvert dans les livres de la Banque J.P. Morgan Suisse.

La société Belensas devait ensuite revendre l'immeuble libre au prix convenu.

5.- Les conventions de crédit Morgan Guaranty Trust/Belensas, l'autorisation de découvert Morgan Guaranty Trust/Mme [U] et les garanties consenties par Mme [U] :

La banque Morgan Guaranty Trust a consenti à la société Belensas trois crédits :

a.- le 5 mars 1990, un prêt de quarante millions de francs (40.000.000 F), correspondant à six millions quatre-vingt-dix-sept mille neuf cent soixante euros et soixante-neuf centimes (6.097.960,69 €), en principal, au taux de base n° 2 de la banque dit T.N.B.2 (de 11,50% l'an au jour du prêt, toute modification devant être notifiée) majoré de 1,25 point, remboursable le 5 mars 1991, le défaut de paiement de toute somme en capital ou intérêts emportant intérêts de retard à un taux majoré de deux points ; ce prêt était destiné à l'acquisition des droits indivis de la société Urbinvest ;

b- le 29 mars 1990, un prêt de quarante-deux millions de francs (42.000.000 F), correspondant à six millions quatre cent deux mille huit cent cinquante-huit euros et soixante-douze centimes (6.402.858,72 €), en principal, remboursable le 29 mars 1991, au même taux que le précédent ; ce prêt était destiné à l'acquisition des droits indivis de Mme [U] ;

c.- le 12 mars 1990, une ligne de crédit de vingt millions de francs (20.000.000 F), soit trois millions quarante-huit mille neuf cent quatre-vingt euros et trente quatre centimes (3.048.980,34 €), portée ensuite à trente-huit millions de francs (38.000.000 F), soit six millions quatre-vingt-dix-sept mille neuf cent soixante euros et soixante-neuf centimes (6.097.960,69 €), au taux Euribor 3 mois augmenté d'un point, remboursable le 12 mars 1991, le défaut de paiement de toute somme due en capital ou intérêts à l'échéance convenue emportant intérêts de retard à un taux majoré de deux points; ce crédit a servi à l'indemnisation de Mme [Y] et MM. [V] et [R], et son montant est en définitive parvenu sur le compte [S] dans les livres de la Banque Morgan Suisse, appartenant à Mme [U].

Les concours consentis à la société Belenas ont été assortis de différentes garanties au profit de la société Morgan Guaranty Trust : nantissement des avoirs de la société Chardon dans le compte ouvert dans les livres de la Banque J.P. Morgan Suisse ; nantissements d'une partie des parts de fonds communs de placement acquises par Mme [U] avec le prix de vente de sa part indivise ; caution solidaire fournie par Mme [U] pour le prêt du 29 mars 1990.

Par ailleurs, le 23 mars 1990, Mme [U] a ouvert un compte personnel n° 404 20037 X 0039 dans les livres de banque Morgan Guaranty Trust, qui lui a consenti une autorisation de découvert sur ce compte. L'action en recouvrement du solde débiteur de ce compte et en paiement des sommes dues au titre du cautionnement fait l'objet d'une procédure distincte.

6.- Les conventions de conseils financiers Morgan et Cie S.A./Mme [U]- société Urbinvest et la convention de conseils financiers Morgan et Cie S.A./Belensas :

Trois conventions de conseil financiers, souvent évoquées dans la procédure, mais auxquelles la société Morgan Guaranty Trust n'est pas partie, ont été signées :

a.- le 3 août 1989, une convention de conseils financiers entre la société Morgan et Cie S.A., d'une part, Mme [U] et la société Urbinvest, d'autre part, conclue pour une durée d'un an ;

b.- le 29 novembre 1989, s'y est substituée une nouvelle convention entre les mêmes parties, conclue elle-aussi pour une durée d'un an ;

c.- le 29 mars 1990, s'est substituée à la précédente une convention de conseils financiers entre la société Morgan et Cie S.A. et la société Belensas, conclue également pour une durée d'un an.

7.- L'ouverture d'un compte [S] à la disposition de Mme [U] dans les livres de la Banque J.P. Morgan Suisse :

Suivant acte sous seings privés du 9 mars 1990, la Banque J.P. Morgan Suisse, société de droit suisse, distincte de la société américaine Morgan Guaranty Trust comme de la société de droit français Morgan et Cie S.A., a mis à la disposition de Mme [U], sur sa demande, la société Chardon et ouvert à cette société un compte dans ses livres.

8.- La vente des parts indivises de Mme [U] et de la société Urbinvest à la société Belensas :

La cession des parts indivises de Mme [U] et de la société Urbinvest a été effectuée de la manière suivante :

a.- La vente Mme [U]/société Belensas :

Suivant acte notarié du 15 juin 1990, Mme [U] a vendu à la société Belensas sa moitié indivise de l'immeuble moyennant de prix de quarante-deux millions de francs (42.000.000 F).

b.- La vente société Urbinvest/société Belensas :

Il a été procédé ainsi :

'.- suivant acte du 22 janvier 1990, la société Urbinvest a promis de vendre à la société Belensas sa part indivise de l'immeuble moyennant le prix de trente-huit millions de francs (38.000.000 F), correspondant à cinq millions sept cent quatre-vingt-treize mille soixante-deux euros et soixante-six centimes (5.793.062,66 €) ;

'.- suivant acte du 12 mars 1990, Mme [Y] a cédé sa promesse de vente à la société Belensas moyennant le prix de vingt millions de francs (20.000.000 F), correspondant à trois millions quarante-huit mille neuf cent quatre-vingts euros et trente-quatre centimes ((3.048.980,34 €) ; '.- suivant acte notarié du 12 mars 1990, la société Belensas a acquis la part indivise de la société Belensas au prix de trente-huit millions de francs (38.000.000 F), correspondant à cinq millions sept cent quatre-vingt-treize mille soixante-deux euros et soixante-six centimes (5.793.062,66 €) ;

'.- la société Belensas a ensuite procédé à l'éviction des deux locataires ; aux termes d'actes passés en août 1990, elle a accepté de régler, à titre d'indemnité d'éviction, à M. [V] la somme de quatre millions trois cent mille francs (4.300.000 F), correspondant à six cent cinquante-cinq mille cinq cent trente euros et soixante-dix-sept centimes

(655.530,77 €) et à M. [R] celle de onze millions sept cent mille francs (11.700.000 F), correspondant à un million sept cent quatre-vingt-trois mille six cent cinquante-trois euros et cinquante centimes (1.783.653,50 €).

9.- La réalisation des interpositions au profit de Mme [U] :

Mme [Y], réalisant une simulation et une interposition au profit de Mme [U], le prix de cession de la promesse de vente a été versé sur le compte [S], appartenant à Mme [U].

De manière identique, les indemnités d'éviction censées dues à MM. [V] et [R] ont été versées sur le compte [S].

10.- L'utilisation des prix de vente par la société Urbinvest et Mme de

[E] :

Il est démontré que la société Urbinvest a perçu le prix lui revenant pour la vente de sa part indivise, utilisé la somme de trente-six millions de francs (36.000.000 F) à rembourser la société Kuweiti French Bank, obtenant ainsi mainlevée de l'hypothèque, et disposé comme bon lui semblait du solde.

Mme [U] a reçu le montant lui revenant au titre de sa part indivise et, au moyen des interpositions, les montants du prix de cession de la promesse de vente de Mme [Y] à la société Belensas et des indemnité d'éviction de M. [V] et [R]

11- La promesse de vente Belensas/S.E.T.I.C. et S.I.V.M.I. :

Le 27 novembre 1989, l'agence immobilière Infoburo a indiqué avoir trouvé, au prix demandé par les vendeurs, des acquéreurs, à savoir la Société européenne de transactions immobilière et commerciales-S.E.T.I.C. (ci-après, la société S.E.T.I.C.) et la Société d'investissement de valeurs mobilières et immobilières S.I.V.M.I. (ci-après la société S.I.V.M.I.), qui devaient s'associer à un très important intervenant immobilier, la société Cogédim.

Suivant acte notarié du 29 mars 1990, la société Belensas a promis de vendre aux sociétés S.E.T.I.C. et S.I.V.M.I. l'immeuble moyennant le prix de cent vingt-cinq millions de francs (125.000.000 F).

12.- Le défaut de réitération de la promesse de vente :

Les consorts [Z], parents de Mme [U], se sont alors manifestés, arguant que la parcelle [Cadastre 1] [Cadastre 1] BF [Cadastre 1], objet de la promesse de vente, était grevée d'une servitude de court de tennis au profit de la parcelle [Cadastre 1] BF [Cadastre 3], leur appartenant.

La société Belensas a fait délivrer aux sociétés S.I.V.M.I. et S.E.T.I.C. une somation de comparaître le 11 décembre 1990 devant notaire pour se porter acquéreurs de l'immeuble.

Les parties à la promesse de vente ont comparu. Me [M], huissier de justice requis par la société Belensas, a constaté le désaccord des parties, les sociétés S.I.V.M.I. et S.E.T.I.C., bénéficiaires de la promesse de vente, indiquant que n'était pas produite l'attestation des propriétaires du fonds voisin renonçant à se prévaloir de la servitude de court de tennis, de sorte qu'aucun projet de réhabilitation et de transformation de l'immeuble n'était envisageable faute de possibilité de clore.

Suivant acte d'huissier de justice du 2 janvier 1991, les consorts [Z] ont fait assigner celle-ci et les sociétés Belinsas et Urbinvest à fin de voir dire que la parcelle objet de la promesse de vente, était grevée d'une servitude de court de tennis au profit de la parcelle propriété des demandeurs.

13.- Les procédures pénales :

En date du 20 février 1992, Mme [U] a déposé plainte avec constitution de partie civile devant le doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance de Paris des chefs de faux, faux en écritures authentiques, escroqueries et infractions à la loi n°70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce. Elle exposait qu'elle avait été «'dépouillée de la propriété de [son] bien au profit de la banque [...] sans rien recevoir en contrepartie, cette banque [lui] réclamant au contraire des sommes considérables». La société Belensas s'est constituée partie civile postérieurement.

Dans le cadre de cette information, le juge d'instruction a mis en examen Mme [U] pour faux en écritures authentiques dans le cadre de la procédure qu'elle avait elle-même initiée.

Cette procédure s'est achevée par un arrêt de la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de Paris condamnant un salarié de la société J.P. Morgan et Cie S.A. à une amende amnistiable pour infraction à l'article 18 de loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 (présentation d'une facture d'honoraires avant finalisation de la vente). Cet arrêt est définitif à la suite du rejet par la chambre criminelle de la Cour de cassation le 23 février 2004 du pourvoi formé par les parties civiles. Tous les autres salariés mis en cause ont bénéficié de décisions définitives de non-lieu ou de relaxe.

Le 9 février 1994, la Banque Morgan Guaranty Trust a déposé plainte avec constitution de partie civile devant le doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance de Paris contre Mme [U] des chefs de faux et escroquerie.

Cette procédure s'est achevée par un arrêt définitif de non-lieu du 17 octobre 2000.

14.- L'instance civile :

La société J.P. Morgan Chase, venant aux droits de la société Morgan Guaranty Trust, a assigné en paiement devant le tribunal de grande instance de Paris.

Cette procédure a abouti au jugement entrepris.

La société Belensas est intervenue volontairement dans la procédure en cause d'appel.

Une seconde procédure oppose Mme [U] et les société Belensas et Urbinvest, d'une part, la Banque J.P. Morgan Chase, venant aux droits de la Banque Morgan Guranty Trust, d'autre part.

' ' '

Vu les écritures signifiées le 7 mars 2011, valant conclusions récapitulatives conformément aux dispositions de l'article 954, alinéa 2, du Code de procédure civile, aux termes desquelles Mme [U] et la société Belensas, intervenante volontaire en cause d'appel, demandent à la Cour :

à titre principal,

- d'infirmer le jugement entrepris ;

- de dire que seront écartées des débats les pièces n° 220 à 231 communiquées par la Banque J.P. Morgan Chase et tirer toutes conséquences de droit, par application des articles 11, 15 et 16 du Code de procédure civile, du refus de la Banque J.P. Morgan Chase de communiquer les originaux des mandats Mme [U]/société Urbinvest du 3 août 1989, Mme [U]/société Urbinvest du 29 novembre 1989, société Belensas/Banque Morgan Guaranty Trust du 29 mars 1990 et société Belensas B.V./société Shadowdance/société Chardon/société T.M.F. du 29 mars 1990 ;

- de dire Mme [U], la société Belensas et la société Urbinvest recevables en leurs demandes à l'encontre de la Banque J.P. Morgan Chase tirées tant des conventions de crédit avec celle-ci que des mandats de vente et de conseil avec la société J.P. Morgan & Cie S.A., motifs pris de la confusion de ces deux entités, la première s'étant substituée à la seconde, et, conformément aux dispositions de l'article 4 du Code de procédure pénale, de l'autorité de chose jugée résultant d'arrêt rendu par la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de Paris le 24 mai 2004 ;

- de dire que les conventions de prêt des 5 mars 1990, 12 mars 1990 et 29 mars 1990 et les mandats des 3 août 1989, 29 novembre 1989, 9 mars 1990 et 29 mars 1990 constituent un ensemble indivisible de contrats, dont l'obligation essentielle préalable, à la charge de la Banque J.P. Morgan Chase, était la vente de l'immeuble litigieux ou l'obtention d'un engagement irrévocable ;

- de dire inopposable à la société Belensas l'ensemble des contrats et actes conclus en son nom, et notamment, les contrats de prêt des 5, 12 et 29 mars 1990, ensemble les concours financiers relatifs aux indemnités d'éviction des l'acte de vente du 12 mars 1990, le mandat du 29 mars 1990 de la société Belensas à la Banque Morgan de passer tous actes juridiques en son nom, la vente de la part indivise de la société Urbinvest à la société Belensas du 12 mars 1990, les promesses de vente de l'immeuble du 29 mars 1990 (Sivmi-Sétic), la cession de promesse de vente Eddé/Belensas du 12 mars 1990, le vente de la part indivise de Mme [U] à la société Belensas du 15 juin 1990 et le mandat des 29 mars et 25 avril 1990 autorisant

M. [N] à signer la promesse de vente de l'immeuble pour le compte de la société Belensas ; en conséquence, de constater, en vertu de la théorie de l'accessoire, que la banque J.P. Morgan Chase ne dispose d'aucune créance sur la société Belensas, débiteur principal, ni contre Mme [U], caution ;

- en conséquence, de dire que la Banque J.P. Morgan restituera à Mme [U] l'ensemble des sommes qu'elle a appréhendées en exécution du jugement rendu le 14 mars 2007 par le tribunal de grande instance de Paris, outre les sommes qu'elle a perçues en exécution des actifs nantis à son profit, avec intérêts de droit capitalisés à compter de l'assignation devant le tribunal de commerce du 5 août 1991 par application des articles 1153-1, alinéa 1er, et 1154 du Code civil, et donner acte à Mme [U] qu'elle est demeurée propriétaire de sa part indivise de l'immeuble ;

- de dire bien fondée l'exception d'inexécution opposée par les sociétés Belensas et Urbinvest et Mme [U] à la demande en paiement des conventions de crédit formée par la Banque J.P. Morgan Chase, faute pour cette dernière d'avoir exécuté ses propres obligations souscrites au titre de l'ensemble indivisible de contrats comprenant les mandats de vente de l'immeuble litigieux, les contrats de conseil et les contrats de crédit, ces derniers ne devant être exécutés qu'après la vente de l'immeuble;

- en conséquence, par application des articles 1184 et 1134 du Code civil, de juger résolu le groupe indivisible de contrats comprenant les conventions de prêt des 5 mars 1990, 12 mars 1990 et 29 mars 1990, et à leur suite le contrat de découvert sur le compte 404 20037 X 0039, ainsi que les mandats des 3 août 1989, 29 novembre 1989, 9 mars 1990 et 29 mars 1990, et ordonner le retour au statu quo ante, en assortissant cette résolution de dommages-intérêts ;

à titre subsidiaire,

- de dire caducs les contrats de crédit des 5 mars 1990, 12 mars 1990 et 29 mars 1990, motifs pris de l'existence d'un ensemble indivis de contrats comprenant notamment les mandats de vente et de conseils et des contrats de crédit et de l'inexistence de la vente de l'immeuble ou d'un engagement irrévocable préalable à l'octroi des prêts ;

- de déclarer nul le cautionnement souscrit le 29 mars 1990 par Mme [U], motifs pris à la fois de la nullité ou de la résolution du prêt cautionné, le cautionnement n'étant que l'accessoire, et de la nullité du cautionnement lui-même par application des articles 134 du Livre des procédures fiscales, 1131 et 1133 du Code civil ; en conséquence, de tirer toutes conséquences de droit et de fait de la nullité du cautionnement ;

- de dire les conventions de crédit des 5, 12 et 29 mars 1990 nulles de nullité absolue comme affectées d'une cause illicite pour financement d'une opération immobilière visant une fraude fiscale par application des articles 134 du Livre des procédures fiscales, 1131 et 1133 du Code civil ; en raison du caractère indivisible de l'ensemble contractuel, de prononcer la nullité de l'ensemble des conventions (mandats et prêts) ;

- de dire que les conventions de crédit des 5, 12 et 29 mars 1990 sont nulles de nullité absolue par application des articles 1109, 1116 du Code civil, du fait du comportement dolosif, par action et par réticence, de la banque J.P. Morgan Chase, qui a amené la société Belensas et Mme [U] à lui confier la vente de l'immeuble litigieux sur la foi d'une fausse qualité d'agent immobilier et d'une prétendue capacité de la banque à optimiser la fiscalité de l'opération, conditions déterminantes sans lesquelles elles ne se seraient pas obligées ;

- de dire que le dol a été aggravé par les manquements de la banque à ses obligations de conseil et de mise en garde, la banque laissant ses cocontractants s'endetter à hauteur de cent dix-huit millions quarante-cinq mille francs (118.045.000 F), alors qu'elle savait que les capacités de remboursement de la sociétés Belensas étaient inexistantes et que la charge des intérêts était insurmontable ;

- de déclarer la Banque J.P. Morgan Chase fautive dans l'exécution des ses obligations contractuelles, motifs pris de l'inexécution de ses obligations de mandataire, de l'inexécution de son obligation d'étude et de conseil et du manquement à son devoir de mise en garde ;

- de dire que la Banque J.P. Morgan Chase n'a pas exécuté ses obligations de mandataire en contravention aux trois contrats de mandat des 3 août 1989, 29 novembre 1989 et 29 mars 1990, en faisant conclure par la société Belensas, largement garantie par Mme [U], des prêts pour un total de cent dix-huit millions quarante-cinq mille francs (118.045.000 F) et un groupe indivisible de contrats, tout en n'exécutant pas l'obligation essentielle et préalable de la vente de l'immeuble litigieux ou de l'obtention d'un engagement irrévocable et en octroyant de manière déloyale des prêts subordonnés à cette vente dans son intérêt exclusif, sachant la société Belensas dans l'incapacité de rembourser ses prêts, en s'abstenant de vérifier la capacité juridique de la société T.M.F. de souscrire des prêts aussi importants, en faisant souscrire une promesse unilatérale de vente au lieu d'une promesse synallagmatique, en stipulant un délai de réitération de la vente anormalement long, de seize mois au lieu de trois habituellement, sans exiger une indemnité d'immobilisation, mais en y substituant une fausse garantie à première demande, en résiliant prématurément les crédits le 6 mars 1991 et le mandat T.M.F. du 29 mars 1990, tout en sollicitant le paiement de la commission de 3% en l'absence de vente, ce qui sera sanctionné pénalement par la cour d'appel de Paris le 24 mai 2004, et en adoptant illégalement et dolosivement le statut d'agent immobilier, ce qui a été reconnu, mais amnistié ;

- de condamner la Banque J.P. Morgan Chase à payer à Mme [U], en réparation de son préjudice matériel en sa qualité de mandante, la somme de trente-et-un millions cinq cent quatre-vingt-dix-sept mille trois cent soixante-huit euros (31.597.368 €), outre la totalité des intérêts, frais et accessoires réclamés par la banque ;

- de déclarer recevable, comme n'étant pas nouvelle, la demande de Mme [U] fondée sur le manquement de la Banque J.P. Morgan Chase à son obligation d'étude et de conseil en exécution des trois contrats de mandat des 3 août 1989, 29 novembre 1989 et 29 mars 1990 ;

- de dire que la demande fondée sur l'obligation de conseil n'est pas prescrite en raison du sursis à statuer prononcé par jugement du tribunal de grande instance de Paris du 12 juin 1992, de la suspension de la prescription confirmée par la condamnation définitive par arrêt de la cour d'appel de Paris du 24 mai 2004 du directeur général de la banque pour infraction à la loi Hoguet, infraction à l'origine du groupe indivisible de contrat, et d'une plainte pénale ayant mise en mouvement l'action publique ; de dire, en toute hypothèse, que la demande fondée sur le manquement à l'obligation de conseil n'est pas prescrite comme relevant de la prescription trentenaire, l'article 26 de la loi du 17 juin 2008 n'étant pas applicable ;

- de dire que la Banque J.P. Morgan Chase a manqué à son obligation de conseil en proposant un montage totalement inutile, à tout le moins, en ne dissuadant pas ses cocontractants d'y recourir, et encore en ne leur déconseillant pas de laisser la société Belensas souscrire une promesse unilatérale de vente au lieu d'une promesse synallagmatique de vente, en laissant stipuler un délai de réitération de la ventre anormalement long de seize mois et en n'exigeant pas une indemnité d'immobilisation, mais, au contraire, en y substituant une fausse garantie à première demande ;

- plus subsidiairement, si le préjudice découlant du mandat ne devait pas être retenu, de condamner la Banque J.P. Morgan Chase à payer à Mme [U], en sa qualité de créancière d'une obligation de conseil, la somme de vingt-huit millions quatre cent trente-sept mille six cent trente-deux euros (28.437.632 €), outre la totalité des intérêts, frais et pénalités réclamés par la banque ;

- plus subsidiairement encore, si le préjudice précédent ne devait pas être retenu, de condamner la Banque J.P. Morgan Chase à payer à Mme [U], en sa qualité de caution, sur le terrain de l'inexécution des mandats, la somme de douze millions huit cent trente-cinq mille cinq cent un euros (12.835.501 €), représentant la totalité des sommes appelées par la banque, incluant la réalisation du nantissement des fonds commun de placement ;

- encore plus subsidiairement, de condamner la Banque J.P. Morgan Chase à payer à Mme [U], en réparation du préjudice causé par le manquement au devoir de mise en garde, la somme de douze millions cent quatre-vingt-quinze mille deux cent quinze euros

(12.195.215 €) ;

en toute hypothèse,

- de donner acte aux sociétés Belensas et Urbinvest et à Mme [U] que leur demande est limitée à due concurrence du préjudice réellement subi, la cour d'appel disposant en ce domaine d'un pouvoir souverain d'appréciation pour déterminer l'indemnisation appropriée du préjudice ;

- de condamner la Banque J.P. Morgan Chase à payer à Mme [U], au titre de la réparation du préjudice lié à la privation de l'indemnité d'immobilisation et de la tromperie commise à son égard, la somme de quatorze millions six cent soixante-sept mille six cent trente-quatre euros (14.667.634 €), sauf à parfaire ;

- de condamner la Banque J.P. Morgan Chase à payer à Mme [U], à titre de dommages-intérêts punitifs, la somme d'un million d'euros (1.000.000 €), en raison des nombreuses fautes de la banque Morgan ;

- de condamner la Banque J.P. Morgan Chase à payer à Mme [U], à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral, la somme de cinq millions d'euros

(5.000.000 €) ;

- de dire que la Banque J.P. Morgan Chase devra garantir Mme [U] et/ou la société Belensas de toutes sommes qui leur seraient réclamées par l'administration fiscale au titre des impôts et taxes découlant du pontage, notamment au titre du droit annuel de 3% de la valeur de l'immeuble possédé en France pour les années 1991 à 2003 ;

- de débouter la Banque J.P. Morgan Chase de sa demande au titre des intérêts correspondant aux trois prêts consentis à la société Belensas et à l'autorisation de découvert consentie à Mme [U], pour l'avoir privée de l'indemnité d'immobilisation et trompée sur ce point ;

- de condamner la Banque J.P. Morgan Chase à lui payer la somme de cent cinquante mille euros (150.000 €) au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ;

- de condamner la Banque J.P. Morgan Chase aux dépens ;

Vu les écritures signifiées le 28 février 2011, valant conclusions récapitulatives conformément aux dispositions de l'article 954, alinéa 2, du Code de procédure civile, aux termes desquelles la Banque J.P. Morgan Chase, venant aux droits de la Banque Morgan Guaranty Trust, demande à la Cour de :

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

en conséquence,

- condamner Mme [U] à lui payer, au titre du solde débiteur de soin compte, la somme de quatre millions cent soixante-quatre mille six cent vingt-six euros et onze centimes (4.164.626,11 €), représentant le solde débiteur de son compte n° 020037G0040 au 28 février 2001, augmentée des agios échus postérieurement au 17 mars 2001, calculés trimestriellement en fonction du taux indiqué sur le décompte d'agios pour le trimestre précédent, subsidiairement, la somme de neuf cent quarante-deux mille huit cent quarante-deux euros et vingt centimes (942.842,20 €), avec les intérêts au taux légal à compter du 21 mai 1991 ;

- condamner Mme [U], en qualité de caution de la société Belensas, à payer à la Banque JP Morgan Chase la somme de six millions quatre cent deux mille huit cent cinquante-neuf euros (6.402.859 €), outre les intérêts au taux légal à compter du 28 mai

1991 ;

- dire pour chacune de ces créances que les intérêts seront capitalisés dans les conditions prévues à l'article 1154 du Code civil à compter du 18 juillet 2005, date de la demande de capitalisation faite ;

- dire que le montant de la vente des 34.197 parts du fonds commun de placement ' JPM Euromonétaire Plus C' réalisée en exécution du jugement du 14 mars 2007 viendra en déduction de la créance que la Banque détient sur Mme [U] ;

- dire les appelantes et intervenantes aussi irrecevables que mal fondées en leurs demandes reconventionnelles et les en débouter,

- condamner Mme [U] à lui payer la somme de cinquante mille euros - 50.000 € - au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

SUR CE,

1.- Sur la demande de rejet des pièces formée par Mme [U] et la société Belensas :

Considérant qu'en application de l'article 132 du Code de procédure civile, le juge doit veiller à la communication loyale des pièces, y compris en originaux si ceux-ci sont requis ; qu'en cause d'appel, une nouvelle communication des pièces déjà versées en première instance n'est pas exigée, mais peut être demandée ; que la communication loyale des pièces est un des aspects du droit au procès équitable, garanti par l'article 6, § 1er, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de sorte que juge doit à la fois vérifier leur communication dans un temps normal, de manière à ce que l'autre partie soit en mesure de les discuter de manière effective, et ne pas permettre que des contestations dilatoires et injustifiées sur leur production portent atteinte au droit à une décision de justice dans un temps raisonnable ;

Considérant que la société Belensas et Mme [U] soutiennent que les pièces numérotées 220 à 231 du bordereau de la société J.P. Morgan Chase, ainsi que les originaux des contrats Mme [U]/société Urbinvest du 3 août 1989, Mme [U]/société Urbinvest du 29 novembre 1989, société Belensas/société Morgan Guaranty Trust du 29 mars 1990 et société Belensas/société Shadowdance/société Chardon/société T.M.F. du 29 mars 1990 n'ont pas été communiquées en dépit de la sommation du 14 décembre 2010 et du 21 janvier 2011, et d'une sommation itérative s'agissant des pièces n° 220 à 231 ;

Considérant que la Cour constate que toutes les pièces sus-énoncées avaient déjà été produites en première instance, sans que leur communication soit contestée ; que la communication des pièces n'a pas fait l'objet de demandes démontrées en cause d'appel avant les conclusions signifiées par les appelants la veille de la date prévue pour l'ordonnance de clôture, après plus de vingt ans de procédure; qu'il est relevé que les deux sommations invoquées par les appelantes ne sont pas mentionnées au bordereau annexé à leurs écritures récapitulatives, ni ne figurent à leur dossier, et que le magistrat de la mise en état n'a pas été saisi d'un incident ; que les pièces n° 220 à 231 ne font pas l'objet d'une discussion par les parties, même à titre subsidiaire par les appelantes quant aux problèmes posés; qu'en ce qui concerne les quatre contrats, leur sens et portée ont été discutés en première instance et en cause d'appel, sans que leur texte ait été contesté, y compris dans les écritures des appelants du 7 mars 2011 ;

Considérant qu'il s'évince de ces constatations que la demande de rejet des pièce n'est pas fondée, de sorte que Mme [U] et la société Belensas en seront déboutées ;

2.- Sur l'irrecevabilité des demandes formées par Mme [U] et la société Belensas contre ou au nom de la société Urbinvest :

Considérant qu'en application de l'article 14 du Code de procédure civile, nul ne peut être jugé sans avoir été entendu ou appelé ;

Qu'il s'ensuit que Mme [U] et la société Belensas doivent être déclarées irrecevables à demander à la Cour de déclarer inopposable à la société Belensas la vente à celle-ci de la part indivise de la société Urbinvest, non appelée dans la procédure [§ 5, (iii) du dispositif de leurs écritures récapitulatives] ;

Considérant qu'il résulte du principe selon lequel nul ne plaide par procureur qu'une partie n'est pas recevable à former une demande pour le compte d'une personne physique ou morale non appelée dans la cause ;

Qu'il s'ensuit que Mme [U] et la société Belensas sont irrecevables à demander à la Cour de dire la société Urbinvest recevable en ses demandes à l'encontre de la Banque J.P. Morgan Chase et la société J.P. Morgan et Cie S.A. [§ 3 du dispositif de leurs écritures récapitulatives] et de donner acte à cette société que sa demande d'indemnisation est limitée au préjudice matériel réellement subi [§ 19 du dispositif de leurs écritures récapitulatives] ;

3.- Sur l'irrecevabilité des demandes de Mme [U] et de la société Belensas relatives aux ventes immobilières :

Considérant qu'en application de l'article 28, 4°, c) du décret n°55-22 du 4 janvier 1955, portant réforme de la publicité foncière, doivent être obligatoirement publiées au bureau des hypothèques du lieu de l'immeuble les demandes en justice tendant à obtenir la résolution, la révocation, l'annulation ou la rescision d'une convention portant sur la mutation de droits réels immobiliers ; que l'article 30, cinquième alinéa, du même texte énonce que ces demandes ne sont recevables devant les tribunaux que si elles ont été elles-mêmes publiées conformément aux dispositions de l'article 28-4°, c, et s'il est justifié de cette publication par un certificat du conservateur ou la production d'une copie de la demande revêtue de la mention de publicité ;

Considérant que Mme [U] et la société Belensas, alors que la question de l'irrecevabilité a été mise aux débats et que la charge de la preuve leur incombe, ne justifient pas de la publication légale ;

Considérant qu'il échet de déclarer irrecevables les demandes de Mme [U] et de la société Belensas tendant à voir déclarer inopposable à la société Belensas la vente de la part indivise de Mme [U] à cette société et donner acte à Mme [U] de ce qu'elle est demeurée propriétaire de sa part indivise de l'immeuble ;

4.- Sur la prescription décennale des demandes de Mme [U] en nullité et en opposition des conventions :

Considérant que, conformément aux dispositions de l'article L. 110-4 du Code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-51 du 17 juin 2008, applicable à l'espèce, les actions de toute nature entre commerçants et entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par dix ans, de sorte que les actions en nullité et en inopposabilité sont soumises à la prescription décennale, sauf si la nullité ou l'inopposabilité est soulevée par voie d'exception ; que, contrairement à ce que soutiennent Mme [U] et la société Belensas, la règle de la prescription décennale des nullités s'applique non seulement aux actes de commerce, mais aussi aux actes mixtes, entre commerçants et non-commerçants, et que la nullité soit absolue ou relative ;

Considérant que Mme [U] soulève la nullité et l'inopposabilité des conventions par voie d'exception ;

Mais considérant que l'exception de nullité soulevée par voie d'exception n'est perpétuelle que si l'action en exécution de l'action litigieuse est introduite après l'expiration du délai de prescription ;

Or considérant qu'il est démontré par les pièces produites aux débats que la Banque J.P. Morgan Chase a agi en paiement dans le délai de dix ans contre Mme [U], qui n'a soulevé la nullité des contrats de prêts et de cautionnement que le 26 septembre 2006, soit plus de dix ans après la souscription des conventions, et en outre, en ce qui concerne les contrats de crédit, la remise des fonds au débiteur principal ;

Considérant que le jugement de sursis à statuer rendu le 12 juin 1992 par le tribunal de grande instance de Paris n'a pu suspendre le cours de la prescription, alors qu'il est démontré, tant par les écritures de première instance que par les énonciations de cette décision, que la société Belensas n'avait formé à cette date aucune demande en inopposabilité ou nullité des actes, quels qu'ils soient, étant observé que le sursis à statuer ne fait aucunement obstacle à la signification d'écritures destinées à interrompre le cours de la prescription extinctive ; qu'il en va de même de la procédure pénale, dans laquelle la Banque Morgan Guaranty Trust n'a jamais été mise en cause comme personne morale, étant ajouté que la seule infraction retenue contre un préposé, à savoir la demande de paiement d'une prestation dans des conditions non conformes à la loi du 2 janvier 1970 ne peut en aucune manière déterminer la nullité ou l'inopposabilité des conventions ;

Considérant qu'il se déduit de ces constatations, tous autres arguments étant surabondants ou inopérants, que Mme [U] est prescrite à agir en inopposabilité comme en nullité des contrats;

5.- Sur la prescription décennale des demandes de la société Belensas en inopposabilité et en nullité des contrats :

Considérant que, conformément aux dispositions de l'ancien article L. 110-4 du Code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-51 du 17 juin 2008, applicable à l'espèce, les actions de toute nature entre commerçants et entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par dix ans, cette règle s'appliquant aux actes mixtes et aux nullités absolues comme relatives ;

Considérant qu'en l'espèce, les demandes de la société Belensas en inopposabilité de l'ensemble des actes qu'elle a conclus [§ 5 du dispositif de ses écritures récapitulatives], en opposition de l'exception d'inexécution et en résolution [§§ 5 et 6 du dispositif de ses écritures récapitulatives], en caducité [§ 7 du dispositif de ses écritures récapitulatives] et en nullité des conventions de crédit des 5, 12 et 29 mars 1990 [§§ 9 et 10 du dispositif de ses écritures récapitulatives], étant constaté que les fonds ont été immédiatement mis à la disposition de l'emprunteur, ont été formées par écritures déposées en 2006, soit plus de quinze ans après la signature des actes contestés, et, s'agissant spécifiquement des trois conventions de crédit, après la mise à disposition des fonds prêtés ;

Considérant que les actions en inopposabilité et en nullité ont été formées par la société Belensas par voie d'action et non d'exception, de sorte que cette société ne peut se prévaloir d'une exception perpétuelle ;

Considérant que les deux jugements de sursis à statuer prononcés par le tribunal de commerce n'ont pu suspendre le cours de la prescription, dès lors qu'il est démontré que la société Belensas n'avait formé à leurs dates aucune demande en inopposabilité ou nullité des actes et que le sursis à statuer prononcé par une juridiction ne fait en aucun cas obstacle à la signification et/ou au dépôt d'écritures destinées à interrompre le cours de la prescription ; qu'il en va de même de la procédure pénale, pour les raisons ci-dessus exposées ;

Considérant qu'il s'évince de ces constatations, tous autres arguments étant surabondants ou inopérants, que les demandes de la société Belensas en inopposabilité de l'ensemble des contrats et actes conclus en son nom, notamment, les contrats de crédit des 5, 12 et 29 mars 1990, les concours financiers relatifs aux indemnités d'éviction, le mandat du 29 mars 1990 de la société Belensas à la Banque Morgan de passer tous actes juridiques en son nom, la vente de la part indivise de la société Urbinvest à la société Belensas du 12 mars 1990, les promesse de vente de l'immeuble du 29 mars 1990 (Sivmi-Sétic), la cession de promesse de vente à Mme [Y]/[K] du 12 mars 1990, le vente de la part indivise de Mme [U] à la société Belensas du 15 juin 1990 et le mandat des 29 mars et 25 avril 1990 autorisant M. [N] à signer la promesse de vente de l'immeuble pour le compte de la société Belensas, ainsi que ses demandes en nullité des contrats de crédit des 5, 12 et 29 mars 1990 sont prescrites ;

6.- Sur les sommes dues par Mme [U] à la Banque J.P. Morgan Chase, venant aux droits de la société J.P. Morgan Guranty Trust, au titre du découvert du compte 020037G0040 :

Considérant qu'en application de l'article 1134, alinéa 1er, du Code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'en application de l'article 1315 du même code, celui qui se prévaut d'une condition à laquelle est subordonnée l'exécution de son obligation, doit prouver l'existence de cette condition ;

Considérant qu'ainsi que l'ont relevé exactement les premiers juges, Mme [U] ne rapporte pas la preuve que l'exigibilité du solde débiteur de son compte dans les livres de la Banque Morgan Guaranty Trust était subordonnée à la réalisation de la vente ou au paiement d'une somme d'un montant important définitivement acquise aux vendeurs, même dans l'hypothèse où la condition suspensive, stipulée à la promesse de vente, de l'absence de servitude, n'était pas levée ;

Considérant qu'en conséquence de la prescription quinquennale de la contestation des intérêts, Mme [U] n'ayant contesté les intérêts prélevés par la banque que par conclusions du 17 mars 2006, est prescrite à contester les intérêts prélevés sur son compte antérieurement au 17 mars 2001;

Considérant que, s'il n'existe pas de convention écrite sur le taux d'intérêt débiteur, il est démontré que les décomptes d'agios ont été adressés trimestriellement à Mme [U] et qu'ils comportaient mention du taux effectif global ; que Mme [U] ne justifie pas avoir formulé de réclamation, de sorte qu'elle est présumée avoir accepté le taux de trimestre en trimestre ;

Considérant que les relevés et décomptes produits démontrent que les intérêts ont bien été calculés sur trois cent soixante-cinq (365) jours, et non sur trois cent soixante jours

(360) ;

Considérant qu'en l'état de ces énonciations, il échet, confirmant le jugement entrepris, de condamner Mme [U] à payer à la Banque J.P. Morgan Chase la somme de quatre millions cent soixante-quatre mille six cent vingt-six euros et onze centimes (4.164.526,11 €), sur lesquels sont dus les intérêts au taux contractuel valable pour le trimestre précédent ;

7.- Sur les sommes dues par Mme [U] au titre du cautionnement consenti le 22 mars 1990 :

Considérant qu'aux termes de l'acte du 22 mars 1990, Mme [U] s'est portée caution personnelle et solidaire du remboursement du prêt consenti le même jour par la Banque Morgan Guranty Trust pour un montant de quarante-deux millions de francs (42.000.000 F), soit six millions quatre cent deux mille huit cent cinquante-huit euros et soixante-douze centimes (6.402.858,72 €), en principal, frais et accessoires ;

Considérant que Mme [U] n'est pas fondée à invoquer la nullité du contrat principal, la demande du débiteur principal, la société Belensas, à cette fin ayant été déclarée prescrite ;

Considérant qu'elle est prescrite à invoquer le dol, qu'elle n'a soulevée que le 26 septembre 2005, soit plus de cinq ans après la souscription du cautionnement ;

Considérant qu'il se déduit de ces constatations que, le jugement entrepris étant confirmé sur ce point, Mme [U] doit être condamnée à payer à la Banque J.P. Morgan Chase, venant aux droits de la Banque Morgan Guranty Trust, la somme de six millions quatre cent deux mille huit cent cinquante-huit euros et soixante-douze centimes (6.402.858,72 €), avec les intérêts au taux légal à compter du 28 mai 1991, date de la mise en demeure ;

8.- Sur la capitalisation des intérêts :

Considérant que, le créancier en faisant la demande, la capitalisation des intérêts est de droit, conformément à l'article 1154 du Code civil ;

9.- Sur les demandes reconventionnelles de Mme [U] en dommages-intérêts :

Considérant qu'en application de l'article 564 du Code de procédure civile, les parties sont irrecevables à soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions, si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ;

Considérant qu'il résulte des textes clairs et précis des contrats, qu'il s'agisse des trois contrats de crédit ou des autres conventions invoquées par les appelantes, que la Banque Morgan Guranty Trust n'a contracté aucun mandat de vendre l'immeuble, un tel mandat étant confié par les vendeurs à deux agences, l'une parisienne, l'autre lyonnaise ;

Considérant qu'il découle sans contestation possible des conventions versées aux débats que la Banque Morgan Guaranty Trust ne s'est jamais engagée à ne remettre les fonds prêtés qu'après obtention d'un contrat d'achat ferme ou versement par les candidats acquéreurs d'une somme déterminée ou après acquisition de la levée des servitude; qu'outre que l'argument ne repose sur aucun fondement textuel, il est déraisonnable, puisque Mme [U] avait un besoin impérieux des fonds pour obtenir mainlevée de l'hypothèque prise par une précédente banque qu'elle n'était pas en mesure de rembourser, et les acquéreurs, qui devaient revendre, de disposer des fonds indispensables au paiement du prix ;

Considérant que l'autorisation de découvert consenti par la Banque Morgan Guaranty Trust à Mme [U] sur compte personnel n° 404 20037 X 0039 n'avait aucun caractère disproportionné, alors que la cliente avait indiqué être propriétaire d'un appartement non grevé d'hypothèque sis avenue de Saxe, dans un des quartiers de [Localité 6] où les prix de l'immobilier étaient les plus élevés ;

Considérant que, Mme [U], en sa qualité de caution du prêt consenti le 29 mars 1990, soutient qu'elle est créancière d'une obligation de mise en garde sur le risque lié au cautionnement ;

Or considérant que le risque pris par Mme [U] était inexistant, puisqu'en s'engageant à hauteur de quarante-deux millions de francs (42.000.000 F), Mme [U] recevait corrélativement, directement ou indirectement (via la société Urbinvest et au moyen des interpositions Eddé, Finat de Rojas et [R]) une somme de même

montant ; qu'en outre, dans l'hypothèse où des acquéreurs n'auraient pas été trouvés, la réalisation des fonds communs de placement nantis permettait de remettre Mme [U] dans l'état où elle se trouvait, sans endettement supplémentaire, avant de contracter avec la Banque Morgan Guranty Trust, qui n'avait donc pas à la mettre en garde par rapport à un risque d'endettement qui n'existait pas ' la dette ne s'étant ensuite alourdie qu'en raison du blocage généré par l'attitude de Mme [U] ;

Considérant que l'infraction commise par un salarié de la banque (demande de paiement d'une commission avant achèvement de l'opération en méconnaissance des dispositions de la loi Hoguet du 2 janvier 1970) n'a pu causer un préjudice à Mme [U], cette commission n'ayant pas été payée, et étant en outre sans rapport aucun avec les autres dommages allégués ;

Considérant que la banque, qui n'a été que prêteur de deniers et n'a jamais contracté aucun mandat, ni aucune mission de montage juridique et fiscal, n'a pu commettre une faute en ne déconseillant pas à Mme [U] et à la société Belensas de souscrire une promesse unilatérale de vente au lieu d'une promesse synallagmatique de vente, en laissant stipuler un délai de réitération de la vente de seize mois et en n'exigeant pas une indemnité d'immobilisation, mais, au contraire, en acceptant une garantie à première demande ; qu'à titre surabondant, comme le relève exactement la Banque J.P. Morgan Chase, il était impossible, au regard de la réalité du marché, d'obtenir d'un candidat acquéreur une indemnité d'immobilisation, alors que l'immeuble, très délabré et devant être complètement réhabilité et transformé, était grevé d'une servitude interdisant de clore et de réaliser des travaux tant qu'elle n'avait pas été levée ;

Considérant qu'il s'évince de ces constatations que la Banque Morgan Guraranty Trust, aux droits de laquelle vient la Banque J.P. Morgan Chase, n'a commis aucune faute, de sorte que sa responsabilité civile ne peut être engagée ; que Mme [U] doit être déboutée de toutes ses demandes en dommages-intérêts ;

10.- Sur la réalisation des fonds de communs de placement nantis et sa conséquence quant à la dette de Mme [U] :

Considérant qu'en conséquence de la constatation de l'existence de la dette exigible de Mme [U], il échet de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a ordonné la réalisation du nantissement et, étant constant que le nantissement a été réalisé sur le fondement du jugement assorti de l'exécution provisoire, de dire que les sommes perçues à ce titre par la Banque J.P. Morgan Chase viendront en déduction de la dette de Mme [U] au titre du solde débiteur du compte courant et du cautionnement ;

11.- Sur les demandes des parties au titre des frais irrépétibles :

Considérant qu'en raison de la nature et des circonstances de l'affaire, il serait contraire à l'équité de laisser à la charge de la Banque J.P. Morgan Chase les frais irrépétibles qu'elle a exposés en cause d'appel ;

Que Mme [U] et la société Belensas seront condamnées, solidairement, à lui payer la somme de dix mille euros (10.000 €) par application de l'article 700 du Code de procédure civile;

Considérant qu'en raison de leur succombance, Mme [U] et la société Belensas, doivent être déboutées de leurs demandes à ce titre ;

12.- Sur les dépens :

Considérant que les dispositions du jugement entrepris relatives aux dépens de première instance doivent être confirmées et que Mme [U] et la société Belensas, parties succombantes, doivent être condamnées solidairement aux dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS,

Déboute Mme [I] [J] épouse [F] [U] et la société de droit néerlandais Beleggingsmaatschappij Belensas B.V. de leurs demandes de rejet des pièces.

Déclare Mme [B] [J] épouse [F] [U] et la société Beleggingsmaatschappij Belensas B.V. irrecevables à demander à la Cour de déclarer inopposable à la société Belensas la vente à celle-ci de la part indivise de la société Urbinvest

Constate que la société Urbinvest n'est pas intervenue volontairement à la cause, aucune conclusion n'ayant été déposée en son nom;

Déclare Mme [B] [J] épouse [F] [U] et la société Beleggingsmaatschappij Belensas B.V. irrecevables en leurs demandes tendant à voir dire la société Urbinvest recevable en ses demandes à l'encontre de la Banque J.P. Morgan Chase et la société J.P. Morgan et Cie S.A. et de voir donner acte à la société Urbinvest que sa demande d'indemnisation est limitée au préjudice matériel réellement subi.

Déclare irrecevables, pour défaut de publication au bureau des hypothèques, les demandes de Mme [I] [J] épouse [F] [U] et de la société de droit néerlandais Beleggingsmaatschappij Belensas B.V. tendant à voir déclarer inopposable à la seconde la vente de la part indivise de la première et donner acte à Mme [U] de ce qu'elle est demeurée propriétaire de sa part indivise de l'immeuble.

Déclare prescrites les demandes de Mme [I] [J] épouse [F] [U] en inopposabilité de l'ensemble des contrats et actes conclus en son nom, notamment, les contrats de crédit des 5, 12 et 29 mars 1990, les concours financiers relatifs aux indemnités d'éviction, le mandat du 29 mars 1990 de la société Belensas à la Banque Morgan de passer tous actes juridiques en son nom, la vente de la part indivise de la société Urbinvest à la société Belensas du 12 mars 1990, les promesse de vente de l'immeuble du 29 mars 1990 (Sivmi-Sétic), la cession de promesse de vente Mme [Y]/[K] du 12 mars 1990, le vente de la part indivise de Mme [U] à la société Belensas du 15 juin 1990 et le mandat des 29 mars et 25 avril 1990 autorisant M. [N] à signer la promesse de vente de l'immeuble pour le compte de la société Belensas, ainsi que ses demandes en nullité des contrats de crédit des 5, 12 et 29 mars 1990.

Déclare prescrites les demandes de la société de droit néerlandais Beleggingsmaatschappij Belensas B.V. en inopposabilité de l'ensemble des contrats et actes conclus en son nom, notamment, les contrats de crédit des 5, 12 et 29 mars 1990, les concours financiers relatifs aux indemnités d'éviction de l'acte de vente du 12 mars 1990, le mandat du 29 mars 1990 de la société Belensas à la Banque Morgan de passer tous actes juridiques en son nom, la vente de la part indivise de la société Urbinvest à la société Belensas du 12 mars 1990, les promesses de vente de l'immeuble du 29 mars 1990 (Sivmi-Sétic), la cession de promesse de vente Eddé/Belensas du 12 mars 1990, la vente de la part indivise de Mme [U] à la société Belensas du 15 juin 1990 et le mandat des 29 mars et 25 avril 1990 autorisant

M. [N] à signer la promesse de vente de l'immeuble pour le compte de la société Belensas, ainsi que ses demandes en nullité des contrats de crédit des 5, 12 et 29 mars 1990.

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

Dit que les sommes perçues par la société J.P. Morgan Chase Bank, National Association, venant aux droits de la société Morgan Guaranty Trust of New York, au titre de la réalisation du nantissement des parts de fonds commun de placement appartenant à Mme [I] [J] épouse [F] [U] viendront en déduction de la dette de celle-ci au titre du solde débiteur de son compte courant et de son engagement de cautionnement.

Condamne Mme [I] [J] épouse [F] [U] et la société de droit néerlandais Beleggingsmaatschappij Belensas B.V., solidairement, à payer à la société J.P. Morgan Chase Bank, National Association, venant aux droits de la société Morgan Guaranty Trust of New York, la somme de dix mille euros (10.000 €) par application de l'article 700 du Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

Déboute Mme [I] [J] épouse [F] [U] et la société de droit néerlandais Beleggingsmaatschappij Belensas B.V. de leurs demande au titre des frais irrépétibles.

Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires.

Condamne Mme [I] [J] épouse [F] [U] et la société de droit néerlandais Beleggingsmaatschappij Belensas B.V., solidairement, aux dépens d'appel, avec bénéfice pour la S.C.P. Duboscq et Pellerin, avoué, de recouvrer directement ceux dont elle at fait l'avance sans avoir reçu provision suffisante, dans les conditions prévues à l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER POUR LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 07/06426
Date de la décision : 03/11/2011

Références :

Cour d'appel de Paris I6, arrêt n°07/06426 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-11-03;07.06426 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award