RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 11
ARRET DU 29 Septembre 2011
(n° 34 , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/05627
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 Avril 2009 par le conseil de prud'hommes de LONGJUMEAU - Section ENCADREMENT - RG n° 09/00124
APPELANT
Monsieur [R] [V]
[Adresse 3]
[Localité 1]
représenté par Me Guillaume ROLAND, avocat au barreau de PARIS, toque : P0022
INTIMEE
SAS PARIPRO anciennement dénommée COBETRON
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Gilles MENGUY, avocat au barreau de PARIS, toque : R 252
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Juin 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle BROGLY, Conseillère, chargé d'instruire l'affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président
Madame Evelyne GIL, Conseillère
Madame Isabelle BROGLY, Conseillère qui en ont délibéré
Greffier : Mademoiselle Sandrine CAYRE, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président et par Monsieur Polycarpe GARCIA, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu l'appel régulièrement interjeté par Monsieur [R] [V] à l'encontre du jugement prononcé le 2 avril 2009 par le Conseil de Prud'hommes de LONGJUMEAU, section Encadrement, statuant en formation de jugement sur le litige l'opposant à la SAS COBETRON.
Vu le jugement déféré aux termes duquel le Conseil de Prud'hommes :
- a dit n'y avoir lieu de requalifier le contrat de travail de Monsieur [R] [V].
- a débouté Monsieur [R] [V] de ses demandes.
- a condamné Monsieur [R] [V] aux dépens.
Vu les conclusions visées par le Greffier et développées oralement à l'audience, aux termes desquelles :
Monsieur [R] [V], appelant, poursuit l'infirmation du jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes et demande en conséquence à la Cour :
- de dire et juger que son contrat de travail est un contrat de travail à durée indéterminée.
- de condamner la société COBETRON devenue PARIPRO à lui verser :
principalement :
* 7 500 € à titre d'indemnité de requalification.
* 22 500 € à titre d'indemnité de préavis.
* 2 500 € au titre des congés payés y afférents.
* 60 000 € à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive.
subsidiairement :
* 4 000 € à titre d'indemnité de requalification.
* 12 000 € à titre d'indemnité de préavis.
* 1 200 € au titre des congés payés y afférents.
* 32 000 € à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive.
en tout état de cause :
* les dépens.
* 2 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
La SAS PARIPRO anciennement dénommée COBETRON poursuit principalement la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions et le débouté des demandes formées par Monsieur [R] [V].
Elle demande à la Cour :
subsidiairement :
- de débouter Monsieur [R] [V] de sa demande de dommages-intérêts pour rupture abusive.
- de fixer à la somme de 4 000 € le montant de l'indemnité de requalification et à la somme de 13 200 € le montant de l'indemnité de préavis et de congés payés.
en tout état de cause.
- de juger que Monsieur [V] est l'auteur de la demande d'allocation d'un contrat à durée déterminée et qu'il a violé le protocole d'accord et son économie.
- de fixer le montant du préjudice à la somme dont il a été reconnu créancier par le Conseil de Prud'hommes.
- d'ordonner la compensation judiciaire.
- de juger n'y avoir lieu à dommages-intérêts.
CELA ETANT EXPOSE
La société COBETRON a été créée en 1997 par la famille [V] pour ouvrir plusieurs points de vente sous l'enseigne 'Autour de bébé'.
Monsieur [O] [V] était le Président de la société.
Suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 29 octobre 2003, Monsieur [R] [V] a été nommé Directeur d'exploitation, cadre niveau VIII, moyennant une rémunération brute annuelle de 60 000 € payable par 1 / 12ème assortie de remboursement de frais. Cette rémunération devait être portée à 90 000 € au 1er janvier 2005 et complétée par un intéressement sur le résultat de la société.
La société COBETRON a rencontré de graves difficultés financières se traduisant par des pertes importantes sur les exercices 2004, 2005, 2006 et 2007.
Lors d'une Assemblée Générale extraordinaire du 18 janvier 2005, Monsieur [O] [V], démissionnaire, a été remplacé dans ses fonctions de Président par [R] [V], lequel a continué à exercer ses fonctions de Directeur d'exploitation salarié.
Dans un contexte de cessation des paiements, les actionnaires de la société COBETRON sont convenus que la famille [V] devait sans délai céder ses actions et abandonner la direction de l'entreprise au franchiseur.
C'est ainsi qu'aux termes du protocole signé le 1er mars 2007, Monsieur [R] [V] a remis la démission de son mandat social sans aucune indemnité et a démissionné en outre de ses fonctions exercées au titre de son contrat de travail également sans aucune indemnité.
A cette même date du 1er mars 2007, un contrat à durée déterminée a été régulièrement conclu pour une durée de 6 mois à la demande de Monsieur [R] [V] pour organiser la transmission des dossiers et réorganiser la société. Il a perçu à ce titre une rémunération brute mensuelle de 4 000 €.
Contestant avoir eu la volonté manifeste de démissionner, estimant le contrat à durée déterminée irrégulier quant au motif du recours et considérant que par suite, le contrat de travail à durée indéterminée s'est poursuivi, Monsieur [R] [V] a saisi le Conseil de Prud'hommes en vue d'obtenir la requalification de son contrat de travail en contrat de travail à durée indéterminée et des indemnités de rupture.
SUR CE
Sur la rupture de la relation de travail
Aux termes du chapitre V 'Renonciation à tous mandats sociaux' du protocole de cession d'actions signé le 1er mars 2007 entre Monsieur [R] [V] et Madame [N] [V] épouse [U] d'une part, et la SARL FINANCIERE BASTILLE d'autre part :
'[R] [V] déclare remettre immédiatement la démission de son mandat social sans indemnité. Il déclare en outre démissionner de ses fonctions exercées au titre de son contrat de travail sans aucune indemnité et renoncer à toute ancienneté à ce titre'.
Monsieur [R] [V] a ajouté à la suite la mention manuscrite : 'Le cessionnaire s'engage à régler à A. [V] les arriérés de salaires (oct 07 à fév 07 inclus) ainsi qu'à le reprendre en CDD joint en annexe.
Le protocole dûment signé de la main de Monsieur [R] [V] avec également mention de sa main d'avoir à lui régler les arriérés de salaire, atteste de sa volonté claire et non équivoque de démissionner.
Monsieur [R] [V] ne justifie nullement que sa démission aurait été obtenue sous la pression, étant précisé que la loi n'exige aucune forme particulière pour que la démission soit valable, pouvant être écrite, présentée oralement ou même déduite du comportement du salarié.
Ainsi, Monsieur [R] [V] ne saurait sérieusement prétendre que la démission qu'il a formalisée était liée au sort de ses parts sociales et qu'il n'aurait pas librement décidé d'y recourir.
Le jugement déféré doit donc être confirmé en ce qu'il a considéré que Monsieur [R] [V] a eu la volonté manifeste de démissionner.
Sur la demande de requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée
Monsieur [R] [V] fait valoir que si la Cour estimait que le contrat de travail à durée indéterminée avait été régulièrement rompu, la signature d'un contrat à durée déterminée s'oppose à l'ordre public social puisque les relations des parties était régies par un contrat de travail à durée indéterminée et qu'elles n'ont pas évolué par la suite.
Monsieur [R] [V] fait observer que la signature du contrat à durée déterminée se heurte à l'ordre public social et incidemment découle d'une pression exercée par les nouveaux dirigeants de la société COBETRON à laquelle il aurait cédé ses parts, que la rupture du contrat de travail à durée indéterminée est totalement concomitante avec la signature d'un nouveau contrat, remettant nécessairement en cause ce nouveau contrat. Il s'interroge d'ailleurs sur l'opportunité d'avoir accepté de signer un contrat à durée déterminée alors même qu'il avait un contrat de travail à durée indéterminé.
La SAS PARIPRO anciennement dénommée COBETRON réplique que le contrat à durée déterminée a été signé le 1er mars 2007 simultanément avec le protocole d'accord prévoyant le versement de la somme de 400 000 € au profit d'[R] et de [N] [V], alors qu'elle était confrontée à une faillite virtuelle, que l'octroi d'un contrat à durée déterminée a été ajouté de la main de Monsieur [R] [V] lui-même, qu'en droit, la signature d'un contrat à durée déterminée à la suite d'un contrat de travail à durée indéterminée a été admis et ne heurte nullement l'ordre public social.
La SAS PARIPRO anciennement dénommée COBETRON fait observer qu'en outre et surtout, le demandeur fait preuve d'une mauvaise foi caractérisée dès lors :
- qu'en décembre 2004, alors qu'il était directeur d'exploitation, salarié de la société COBETRON, Monsieur [V] a cotisé mensuellement aux ASSEDIC.
- que lorsqu'il a pris ses fonctions de Président de la société COBETRON à partir de janvier 2005, Monsieur [V] n'a plus cotisé aux ASSEDIC dès le mois d'avril et a même demandé à la société de lui rembourser sa cotisation du mois de mars 2005.
- que sa demande de contrat à durée déterminée à l'issue de son contrat de travail à durée indéterminée a été est exclusivement faite dans le but de lui permettre de cotiser aux ASSEDIC pendant 6 mois pour pouvoir bénéficier, à l'issue dudit contrat à durée déterminée, de l'assurance chômage.
Des pièces versées aux débats, il ressort que le recours à un contrat à durée déterminée de 6 mois dans le but de procéder aux passations de pouvoir et de réorganiser la société en ce qu'il résulte de la commune intention des parties et en ce qu'il avait pour motif précisé au III du Contrat 'réorganisation de la société', est parfaitement régulier. Il y a lieu de faire observer à cet égard que ce motif correspond à un accroissement d'activité prévu à l'article L 1242-2 du Code du Travail.
Là encore, le jugement déféré doit être confirmé en qu'il a dit n'y avoir lieu à requalification du contrat à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée et en ce qu'il a débouté Monsieur [R] [V] de l'indemnité de requalification qu'il sollicitait.
Sur les dépens et l'application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Succombant en son recours, Monsieur [R] [V] sera condamné aux dépens d'appel et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'il a exposés, les dispositions prises sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance étant confirmées.
Il y a lieu en équité de laisser à la SAS PARIPRO anciennement dénommée COBETRON, la charge de ses frais non compris dans les dépens par elle exposés devant la Cour.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.
Déboute Monsieur [R] [V] de toutes ses demandes, y compris de celle formée sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Condamne Monsieur [R] [V] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT