Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 5
ARRÊT DU 28 SEPTEMBRE 2011
(n° 205, 12 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/17993
Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Juin 2009 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 04/10326
APPELANTE :
- SA SEMIDEP
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège [Adresse 19]
et ses bureaux [Adresse 5]
représentée par la SCP ALAIN RIBAUT ET VINCENT RIBAUT, avoués à la Cour
assistée de Me Didier EPSTEIN, plaidant pour la SCP FRECHE et Associés (A.A.R.P.I.), avocat au barreau de PARIS, toque : R 211
INTIMÉS :
- Société TRAVAUX GILBERT MISIRACA
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège [Adresse 6]
[Localité 16]
représenté par Me Lionel MELUN, avoué à la Cour
assisté de Me Brigitte DE CASAS, avocat au barreau de PARIS, toque : A0752
- Société SMABTP
prise en la personne du Président de son Conseil d'Administration
ayant son siège [Adresse 1]
[Localité 12]
représentée par Me Jean-yves CARETO, avoué à la Cour
assistée de Me Delphine ABERLEN de la SCP NABA ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0325
- S.A.R.L. DPM PATRASCO ARCHITECTES
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège [Adresse 7]
[Localité 10]
- M.A.F. prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège [Adresse 14]
[Localité 13]
représentées par la SCP BOMMART FORTSER FROMANTIN, avoués à la Cour
assistées de la SCP MARTIN JEAN PIERRE ET ASSOCIES (Me Hélène CHAUVEL), avocats au barreau de PARIS
- S.A. CET INGENIERIE
agissant poursuites et diligences de son directeur général
ayant son siège [Adresse 3]
[Localité 17]
représenté par la SCP DUBOSCQ et PELLERIN, avoués à la Cour
ayant pour avocat Maître LEGUEVAQUES, avocat
- GENERALI ASSURANCES IARD, venant aux droits de la CIE CONTINENT IARD dénommée CONTINENT ASSURANCES
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège [Adresse 9]
[Localité 11]
représenté par la SCP ROBLIN CHAIX de LAVARENNE, avoués à la Cour
ayant pour avocat de Me Jacques CHEVALIER, avocat au barreau de PARIS, toque : R085
- SA FRANKI FONDATION
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège [Adresse 8]
[Localité 15]
représenté par Me Louis-Charles HUYGHE, avoué à la Cour
assisté de Me Laurent FILMONT, plaidant pour la SELARL YMFL MILON et Associés, avocats au barreau de PARIS, toque K 156
- G.I.E. CETEN APAVE INTERNATIONAL
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège [Adresse 2]
[Localité 12]
représenté par la SCP ARNAUDY ET BAECHLIN, avoués à la Cour
assisté de Me Alice BRYDEN, plaidant pour la SELARL GVB, avocat au barreau de PARIS, toque : P 275
- BUREAU D'ETUDES NEGRU
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège [Adresse 4]
[Localité 13]
représenté par la SCP OUDINOT-FLAURAUD, avoués à la Cour
assisté de Me Anne-Sophie PUYBARET, plaidant pour la SELAS LARRIEU et Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : J 073
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 21 Juin 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Michel ZAVARO, Président
Madame Marie-José THEVENOT, Conseillère, entendue en son rapport
Madame Dominique BEAUSSIER, Conseillère
qui en ont délibéré
rapport oral fait par Madame THEVENOT conformément aux dispositions de l'article 785 du code de procédure civile
Greffier, lors des débats : Mme Béatrice PIERRE GABRIEL
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Michel ZAVARO, président et par Mme BERLAND, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La SEMIDEP en qualité de maître d'ouvrage a fait réaliser la démolition et reconstruction d'un immeuble à usage de logements et parkings à [Localité 18].
Préalablement elle a fait réaliser une campagne d'étude de sols par la société GEO SIGMA.
Sont intervenus à l'opération de construction les sociétés :
- DPM PATRASCO ARCHITECTES assurée auprès de la MAF, et CET INGENIERIE, sociétés groupées solidairement en qualité de maître d'oeuvre,
- TGM assurée auprès de la SMABTP, en qualité d'entreprise générale,
- FRANKI FONDATION assurée auprès de la SMABTP en qualité de sous-traitante de TGM pour le lot fondations spéciales,
- BET NEGRU en qualité de sous-traitante de TGM, pour les plans structure y compris de fondations,
- CETEN APAVE INTERNATIONAL en qualité de bureau de contrôle technique.
La société TGM a abandonné le chantier. La SEMIDEP a résilié son contrat puis obtenu une expertise judiciaire aux fins de dresser le relevé des travaux exécutés et décrire les malfaçons affectant ces travaux.
Sur la base du rapport de l'expert la SEMIDEP a assigné les intervenants à la construction et leurs assureurs en réparation des préjudices par elle subis.
La société LE CONTINENT aux droits de qui vient la société GENERALI a été appelée en cause en qualité d'assureur de CET INGENIERIE.
Par jugement du 30 juin 2009 le tribunal de grande instance de Paris a, sur le fondement des articles 1147 et 1382 du code civil, condamné in solidum les sociétés DPM PATRASCO, CET INGENIERIE, CETEN APAVE INTERNATIONAL, BET NEGRU, FRANKI FONDATION, et les assureurs MAF, SMABTP, GENERALI, à payer à la SEMIDEP les sommes principales de 164.485 € TTC correspondant aux surcoûts des fondations, 21950 € TTC correspondant aux pertes de loyers et 5328,86 € TTC correspondant aux honoraires complémentaires de maîtrise d'oeuvre, a réparti les charges finales de ces condamnations à proportion des responsabilités fixées à 8% pour CET INGENIERIE, 2% pour DPM PATRASCO, 30% pour le CETEN APAVE, 15% pour TGM, 35% pour le BET NEGRU, 10% pour FRANKI FONDATION, a limité les garanties des assureurs au regard des franchises et plafonds prévus par les polices, a débouté la SEMIDEP de sa demande relative à la prise en charge d'une indemnisation au titre d'un préjudice subi par la société BACOTRA qui a succédé à la société TGM, a débouté DPM PATRASCO de sa demande en paiement d'honoraires.
La société SEMIDEP a fait appel.
Dans ses conclusions du 15 février 2011 elle demande à la cour de confirmer le jugement en ce qui concerne les responsabilités et les condamnations des intervenants à la construction et leurs assureurs, l'infirmer sur le montant du préjudice sauf en ce qui concerne le somme de 5328,86 €, de fixer le point de départ des intérêts de cette somme au 2 décembre 2002 date de son règlement, de porter à 232.675,70 € TTC avec intérêts à compter du 31 août 2001 date de son règlement le montant des travaux réparatoires, à 35.142,67 € avec intérêts à compter de l'assignation celui des pertes de loyers, de condamner en outre les intimés à lui payer la somme de 385.255,89 €, ventilée en quatre parties avec intérêts aux points de départ différents, au titre du préjudice subi par la société BACOTRA, d'ordonner la capitalisation des intérêts, subsidiairement de fixer son préjudice au montant de 474.520,50 € en retenant une somme de 201.373,50 € TTC au titre du préjudice subi par BACOTRA avec ventilation du point de départ des intérêts et capitalisation.
Elle sollicite la confirmation du jugement en ce qui concerne le rejet de la demande d'honoraires de DPM PATRASCO et réclame une somme de 20.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans leurs conclusions du 7 décembre 2009 les sociétés DPM PATRASCO et MAF demandent à la cour d'infirmer le jugement, de débouter la SEMIDEP de ses demandes, ou de ne prononcer que des condamnations HT, de condamner la SEMIDEP à payer à DPM PATRASCO la somme de 6135,03 € HT au titre du solde d'honoraires, en tout état de cause de condamner les autres intervenants, chacun solidairement avec son assureur, à les garantir, de rejeter tout appel en garantie formé contre elles, et elles réclament aux succombants une somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses conclusions du 16 février 2010 la société CET INGENIERIE demande à la cour d'infirmer le jugement et de débouter la SEMIDEP de ses demandes et les autres parties de leurs appels en garantie, subsidiairement de rejeter toute solidarité, de fixer à un maximum de 164.485 € le coût des réparations, de rejeter la demande au titre du préjudice immatériel, de limiter à 3.355,49 € sa condamnation au prorata des honoraires perçus, de condamner les autres intervenants et leurs assureurs à la relever indemne, et en tout état de cause de condamner son assureur la société GENERALI à la garantir. Elle réclame à la SEMIDEP une somme de 10000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses conclusions du 7 avril 2010 la société GENERALI demande à la cour de débouter toutes parties de leurs demandes contre elle, subsidiairement de faire application de la franchise contractuelle, de confirmer le jugement en ce qui concerne les montants alloués et de condamner les autres intervenants et leurs assureurs à la garantir, et elle réclame à toutes les parties une somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses conclusions du 18 mai 2010 la société TGM demande à la cour de débouter la SEMIDEP de ses demandes, ou de réduire celles-ci, de ne prononcer de condamnations que hors taxes, de confirmer le jugement en ce qui concerne le rejet de la demande relative au préjudice de BACOTRA, de condamner solidairement les autres intervenants à la construction et leurs assureurs à la relever indemne, de les débouter de leurs demandes à son encontre, de condamner la SEMIDEP à lui restituer les sommes versées en exécution du jugement, de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SMABTP à la garantir, dans les limites contractuelles de franchise et plafond.
Dans ses conclusions du 10 février 2010 la société CETEN APAVE INTERNATIONAL demande à la cour d'infirmer le jugement en ses dispositions lui faisant grief, de prononcer sa mise hors de cause, subsidiairement d'écarter toute condamnation solidaire, ou de condamner les autres intervenants et leurs assureurs à la garantir, de lui accorder le remboursement des sommes versées en exécution du jugement avec intérêts à compter de leur versement, de condamner tout succombant à lui verser la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses conclusions du 19 avril 2010 la société BET NEGRU demande à la cour d'infirmer le jugement, de la mettre hors de cause, ou de confirmer le jugement en ce qui concerne les montants alloués, et de condamner les autres intervenants et la SMABTP tenue avec TGM à la garantir, en déboutant toute partie de toute demande en garantie formée contre elle.
Elle réclame à tout succombant la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses conclusions du 17 mai 2011 la société FRANKI FONDATION demande à la cour d'infirmer le jugement sur les responsabilités et de débouter la SEMIDEP de ses demandes, subsidiairement de confirmer le jugement sauf en ce qui concerne la TVA, de prononcer des condamnations hors TVA, de condamner les intervenants et la MAF à la garantir, en tout état de cause de condamner la SMABTP à la garantir.
Dans ses conclusions du 28 juin 2010 la SMABTP demande à la cour de réformer le jugement et de prononcer sa mise hors de cause, subsidiairement de limiter sa condamnation au paiement des préjudices matériels, et en tenant compte des limites contractuelles, de condamner en tant que de besoin les sociétés TGM et FRANKI FONDATION au paiement des franchises dues, de condamner les autres intervenants à la construction et leurs assureurs à la garantir, et elle réclame à la SEMIDEP une somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Dans son rapport du 23 avril 2002 l'expert expose qu'en cours de chantier les travaux ont été arrêtés en raison du départ de la société TGM, sans relation avec le litige actuel, que l'entreprise BACOTRA a repris les travaux de fondations à la place de TGM, et a relevé des erreurs affectant les pieux mis en place par TGM.
Les investigations de l'expert ont révélé que 3 pieux n'étaient pas correctement implantés, que 4 autres ne pouvaient supporter les charges prévues, que les fondations étaient dans l'ensemble insuffisantes et que 17 pieux complémentaires étaient à réaliser pour assurer la bonne tenue des ouvrages.
L'expert a indiqué que l'origine du dernier défaut provenait de la suppression d'injections dans le sol de fondation, qui étaient prévues au marché à la suite d'une reconnaissance du sol par la société GEO SIGMA effectuée en 1996 et qui avaient été supprimées à la suite d'une nouvelle note de cette société en 1997. Il a précisé que cette suppression provenait d'une erreur d'interprétation de la note complémentaire de 1997, que cette dernière note, donnée à la demande du maître de l'ouvrage sollicitant un avis pour réaliser des économies, mentionnait que des injections pouvaient ne pas être faites, mais se rapportait aux injections profondes et nullement aux injections qui étaient prévues dans la note précédente sur toute la hauteur des pieux.
Il a expliqué que la mise en évidence de ce défaut avait retardé le chantier de six mois et demi, délai nécessaire pour la recherche des désordres et le renfort des fondations, avait entraîné des surcoûts liés à cette exécution de travaux supplémentaires, à l'immobilisation de la société BACOTRA et un retard du chantier. Dans son rapport de 2002 il a examiné le coût de ces préjudices.
Dans un projet de rapport du 26 décembre 2001 diffusé aux parties préalablement à la réunion de clôture du rapport définitif et joint à celui-ci, l'expert avait également examiné le problème des responsabilités des différents intervenants à la construction.
Le CETEN APAVE et le BET NEGRU, qui étaient présents lors de l'expertise, soutiennent qu'il ne peut être fait référence à ce rapport de 2001 dans la mesure où la question des responsabilités abordée dans ce rapport n'entrait pas dans le cadre de la mission de l'expert.
Toutefois si le juge chargé du contrôle des expertises a pu constater que l'examen des responsabilités n'entrait pas dans la mission de l'expert, il n'est pas établi que le rapport du 26 décembre 2001 a été annulé même partiellement. En tout état de cause la nullité découlant de ce vice est subordonnée à la démonstration d'un préjudice qui n'est pas établi.
En cause d'appel sont discutés à la fois les responsabilités dans la réalisation des préjudices subis par la SEMIDEP et les montants de ceux-ci.
Sur les responsabilités :
Les préjudices dont la SEMIDEP réclame réparation sont consécutifs aux malfaçons affectant les fondations spéciales, qui sont apparues lorsque la société BACOTRA a repris le chantier après le départ de TGM et a réclamé la vérification des pieux implantés préalablement à toute intervention de sa part sur le chantier.
L'expertise a mis immédiatement en évidence que trois des pieux étaient mal implantés, que quatre autres ne pouvaient supporter les charges prévues par suite de calculs erronés du bureau d'études, puis surtout que l'ensemble des pieux présentaient des insuffisances de portance ce qui a entraîné la nécessité d'arrêter le chantier pour renforcer les fondations.
L'insuffisance générale provenait de la suppression du marché de TGM des injections des terrains de fondation préconisées par la société GEO SIGMA en 1996 et cette suppression avait été décidée pour des raisons d'économie, à la suite d'une note complémentaire déposée par la société GEO SIGMA en 1997.
Or la lecture de cette note complémentaire révèle qu'elle porte, au regard de la réglementation et du classement du terrain en zone à risques sur ce point précis, sur les seules couches de 'marnes et caillasses' à, forte profondeur, les sondages effectués ayant d'ailleurs été réalisés à 55 mètres, et qu'elle ne concerne nullement les couches superficielles et moins profondes détaillées dans la note de 1996 qui préconisait clairement en cas de fondation par pieux un traitement préalable des terrains par injection à hauteur des pieux. Les conclusions de la société GEO SIGMA sur l'absence de risques des couches profondes n'étaient donc pas de nature à remettre en cause les conclusions de son étude précédente sur les autres couches et les injections déjà préconisées.
Le CCTP du lot fondations spéciales mentionne comme hypothèse de sol uniquement le rapport de GEO SIGMA de 1996. Il appartenait donc à tous les intervenants à la construction concernés par les fondations, quelle que soit la date de signature de leur acte d'engagement, de se référer à ce rapport et d'adapter leur travail au regard de ses préconisations.
Il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu comme seul fondement de l'appréciation des responsabilités, en l'absence de réception des ouvrages au moment de la révélation des désordres, l'application des dispositions des articles 1147 et 1382 du code civil. Dans ce cadre les responsabilités des différents intervenants sont les suivantes :
- il est soutenu une faute du maître d'ouvrage qui a supprimé par souci d'économie le lot injection du marché de TGM portant sur les fondations. Ce souci ne peut cependant lui être reproché et personne ne démontre avoir averti la SEMIDEP, dont la compétence notoire en matière de travaux de bâtiment et de fondations n'est pas établie, des conséquences de la suppression des injections. Aucune faute n'est donc à retenir à son encontre.
- TGM entreprise générale et chargée des fondations spéciales a retiré le 16 novembre 1998 de son devis initial le poste 'injection', sans justifier d'études nouvelles sérieuses lui permettant cette suppression, ni d'un avertissement éclairé à quiconque. Débitrice d'une obligation de résultat envers la SEMIDEP elle engage sa responsabilité contractuelle dans la réalisation des vices des fondations et elle a commis une faute personnelle qui conduit à lui laisser une part de responsabilité bien que conception et réalisation aient été sous-traitées.
- le BET NEGRU sous-traitant de l'entreprise générale était chargé des plans d'exécution de la structure et des fondations. Il a commis une faute engageant sa responsabilité délictuelle envers la SEMIDEP en acceptant la suppression des injections alors que le rapport de GEO SIGMA de 1996 annexé au CCTP les préconisait, et il a effectué des erreurs de calcul sur les descentes de charge de quatre pieux.
- la société FRANKI FONDATION sous-traitante de la TGM pour l'exécution des fondations spéciales et la réalisation des pieux soutient qu'elle n'avait pas compétence pour la réalisation des injections. Cependant elle devait se renseigner sur la nature du sol dans lequel elle implantait ses pieux et ne devait réaliser que des pieux de portance adaptée à l'environnement et à la construction. Elle a donc commis une faute en acceptant de réaliser les pieux malgré la note de GEO SIGMA préconisant les injections préalables.
- les maîtres d'oeuvre DPM PATRASCO et CET INGENIERIE, formaient un groupement solidaire à l'égard du maître d'ouvrage. Le CCAP du 3 avril 1997 de leur marché mentionne 'le contenu de chaque élément de mission est celui qui figure aux annexes 1 de l'arrêté de 21 décembre 1993 hors études de fondations'. Si leur mission excluait donc les études de fondations, il n'en demeure pas moins qu'ils avaient reçu, à égalité de répartition dans leurs rapports entre eux selon le CCAP, les missions ACT et VISA les obligeant à vérifier la conformité des marchés aux pièces et plans des entreprises. Or ils ont l'un et l'autre bien exécuté cette partie de mission en examinant les fondations : dans une note du 11 décembre 1998 DPM PATRASCO mentionne sur le document de mise au point des marchés de travaux que la suppression des injections est une variante et demande l'avis du CET INGENIERIE. Le CET INGENIERIE a répondu le 4 janvier 1999 en se référant à la note de GEO SIGMA du 26 avril 1997 et a également confirmé dans une lettre adressée à celui-ci qu'il n'était pas prévu d'injection.
Ayant activement participé à cette assistance aux marchés relatifs aux fondations, ils devaient s'interroger sur la suppression dans le marché de TGM des injections préconisées dans le premier rapport de GEO SIGMA. Ils ont donc manqué à leurs obligations de vérification des marchés et de conseil au maître de l'ouvrage.
Le CETEN APAVE avait une mission de contrôle technique H + Av portant notamment sur la solidité des ouvrages et l'obligeant selon les conditions générales et spéciales de son contrat à contrôler la conformité des devis, plans et marchés aux textes législatifs et réglementaires, normes homologuées, DTU ou avis techniques. Il a émis un avis favorable sur le document du BET NEGRU relatif aux descentes de charges de pieux qui comportait des calculs erronés et n'a émis aucune réserve sur l'absence de respect, dans le marché de TGM, des avis de la société GEO SIGMA alors que d'évidence ces éléments constituaient des infractions grossières aux normes et DTU applicables. Il a donc commis une faute contractuelle envers la SEMIDEP.
Les fautes des différents intervenants ont concouru ensemble à la réalisation de l'entier dommage. Une condamnation in solidum sera prononcée à leur égard.
Dans leurs rapports entre eux, au regard de leurs missions respectives et de l'importance de leurs fautes les responsabilités seront réparties comme suit :
- TGM : 15%
- BET NEGRU : 40%
- FRANKI FONDATION : 30%.
- DPM ARCHITECTURE : 5%
- CET INGENIERIE : 5%
- CETEN APAVE : 5%
Il sera fait droit à ces hauteurs aux différents appels en garantie formés entre eux par les intervenants.
Sur les préjudices :
Le coût de renforcement des fondations a été chiffré par l'expert à 199.728,79 € HT. Il n'existe aucune raison de modifier cette appréciation technique, aucune des parties qui la conteste n'apportant d'élément en ce sens.
Les premiers juges en ont soustrait une somme de 62.199,19 € correspondant au coût des injections supprimées, au motif qu'il aurait dû être supporté par la SEMIDEP.
Cependant les locateurs d'ouvrage devaient prévoir l'intégralité des ouvrages nécessaires à la solidité des fondations et l'absence d'ouvrage est directement à l'origine des autres préjudices. La SEMIDEP est en droit d'être indemnisée de toutes les conséquences de ces fautes. La somme de 199.544,90 € HT sera donc allouée à la SEMIDEP.
Le coût des honoraires complémentaires de maîtrise d'oeuvre, non intégré au poste précédent, ainsi que le révèle la lecture du rapport d'expertise corroboré par la réclamation de la SEMIDEP détaillée dans un dire annexé au projet de rapport de 2001 et par les devis produits, s'est élevé à 4455,57 € HT et sera ajouté à cette somme.
La SEMIDEP a subi un préjudice complémentaire du fait qu'elle a subi une perte de loyers des logements et parkings pendant six mois et demi, durée de l'arrêt du chantier, alors qu'elle était de plus dans l'obligation de rembourser ses emprunts et d'avancer les frais nécessaires à la poursuite de l'opération. Ce préjudice financier sera réparé par une somme de 30.000 €.
La SEMIDEP a versé à la société BACOTRA une somme de 385.255,89 € TTC à la suite de diverses décisions de justice intervenues entre ces deux sociétés.
Elle forme tout d'abord une demande tendant à être relevée indemne et garantie de cette somme par les intimés.
Les dispositions de l'article 331 du code de procédure civile sur lesquelles elle se fonde pour former cet appel en garantie excluent qu'il puisse y être fait droit puisqu'elles concernent une intervention forcée des tiers dans l'instance devant aboutir à l'indemnisation de la partie réclamante, et la cour n'est pas saisie de cette instance.
La SEMIDEP forme ensuite une demande directe en paiement de cette somme par les intimés en exposant qu'il s'agit d'un élément de son préjudice.
Il est certain que la SEMIDEP a réglé à la société BACOTRA diverses sommes du montant total précité. Ces sommes ont été versées conformément à diverses décisions de justice confirmées par la présente cour le 17 septembre 2008, qui a retenu que la SEMIDEP avait commis une faute en n'informant pas la société BACOTRA de la suppression de toutes les injections de sol et était ainsi responsable de l'arrêt du chantier pendant plus de six mois, délai mis par la société BACOTRA pour connaître les motifs des insuffisances de portance des pieux.
Cependant si la SEMIDEP a commis une faute envers la société BACOTRA, c'est en raison de l'insuffisance d'information dont elle disposait, la cour ayant aussi retenu qu'elle n'avait pas mesuré les conséquences dommageables que cette suppression de prestation pouvait laisser prévoir et n'avait pas saisi les différences entre les injections profondes qui ne s'imposaient pas et celles moins profondes qui s'imposaient.
Or cette insuffisance d'information provient des fautes conjuguées des différents intervenants ci-dessus examinées. Par conséquent la SEMIDEP est fondée à obtenir de ces intervenants la réparation du préjudice qu'elle a subi en étant dans l'obligation d'indemniser la société BACOTRA.
À l'exception du préjudice immatériel de 30.000 €, les sommes allouées à la SEMIDEP correspondent à des sommes effectivement déboursées par elle au titre des réparations. Pour assurer l'exacte réparation du dommage les intérêts doivent en courir à compter de leur paiement.
La SEMIDEP a versé des sommes TTC pour effectuer les réfections et indemniser la société BACOTRA. Si elle n'est pas assujettie à la TVA en ce qui concerne les loyers qu'elle perçoit comme propriétaire bailleur, ces dispositions fiscales ne sont pas applicables aux sommes allouées qui constituent des indemnisations de préjudices. La SEMIDEP est une société anonyme qui relève d'un régime fiscal lui permettant de déduire tout ou partie de la TVA. Elle ne démontre par aucune pièce qu'elle est dans l'impossibilité de le faire pour les sommes déboursées. Ces sommes lui seront donc allouées HT.
Sur les garanties des assureurs :
- la MAF assureur de la société DPM PATRASCO oppose les limites et conditions de sa police. La responsabilité de son assurée n'étant pas retenue sur le fondement de l'assurance obligatoire des constructeurs, cette demande est justifiée.
- la société GENERALI assureur de la société CET INGENIERIE oppose l'exclusion de garantie prévue par l'article 23 du titre II de la police qui porte sur les travaux et ouvrages exécutés par l'assuré. La responsabilité de celui-ci est bien engagée à raison des erreurs accomplies dans l'exécution de ses missions, et cette exclusion est applicable.
L'article 26-5-1 des conditions particulières de la police retenu par les premiers juges prévoit une extension de garantie aux dommages immatériels résultant d'erreurs sans désordres dans la mesure où les erreurs de l'assuré ne rendent pas l'ouvrage ou une partie de l'ouvrage impropre à sa destination.
Mais en l'espèce il a bien été constaté par l'expert que les erreurs ou fautes ont pour conséquence de rendre les fondations, partie de l'ouvrage, impropres à leur destination.
La garantie de GENERALI ne sera donc pas retenue.
- la SMABTP dénie sa garantie aux sociétés FRANKI FONDATION et TGM recherchée sur le fondement de l'article 20 des conditions générales des polices relatif aux dommages matériels résultant, avant réception, 'd'un effondrement ou de la menace grave et imminente d'effondrement de la construction dont l'ouvrage garanti fait partie', au motif qu'aucune menace grave et imminente d'effondrement n'a été démontrée, la construction n'étant d'ailleurs pas effectuée.
Considérant qu'effectivement la construction n'étant pas réalisée n'est pas susceptible de s'effondrer, et qu'il n'est pas démontré que les pieux eux-mêmes soient susceptibles de s'effondrer, que l'article 20-1 ne peut recevoir application ;
Les articles 7-1 et 7-2 de la police concernant l'assurance de responsabilité envers les tiers en cas de dommages extérieurs à l'ouvrage ont été retenus par les premiers juges pour fonder la condamnation de la SMABTP à garantir la société FRANKI FONDATION et les dommages immatériels, au motif que la responsabilité de FRANKI FONDATION était engagée sur son manquement à son devoir de conseil et non au vu de malfaçons de son ouvrage.
Cependant la société FRANKI FONDATION chargée de l'exécution du lot 'fondations spéciales'se devait de réaliser des travaux corrects. Si l'origine des malfaçons est une erreur de conception des fondations, elle a commis une faute en acceptant de réaliser des ouvrages inadaptés alors qu'une simple lecture des pièces contractuelles et notamment du CCTP de son lot lui permettait d'en voir les vices. Elle a engagé sa responsabilité en tant que réalisateur d'ouvrage et non en tant que constructeur tenu à un devoir de conseil. Les dispositions de la police relatives aux dommages extérieurs à son ouvrage ne lui sont pas applicables.
La SMABTP sera donc mise hors de cause .
Sur la demande reconventionnelle de DPM PATRASCO :
Ce maître d'oeuvre réclame paiement d'une somme de 6135,03 € HT outre TVA, à titre de solde d'honoraires.
Les premiers juges ont rejeté cette demande au motif qu'il ne justifiait pas de ses diligences correspondant à ses facturations.
En cause d'appel et alors que la SEMIDEP soutient que le maître d'oeuvre n'a pas assuré la levée des réserves et ne peut prétendre aux honoraires afférents, la société DPM PATRASCO produit trois notes d'honoraires dont seule la dernière en date de septembre 2003 mentionne des sommes impayées au titre de la levée des réserves, les deux précédentes faisant état de sommes dues au titre des stades antérieurs d'avancement des travaux. Ces stades n'étant pas formellement contestés, il sera admis que les sommes correspondantes de 3318,28 € TTC + 1015,52 € TTC sont dues, mais la demande sera rejetée pour le surplus à défaut de preuve d'une exécution contractuelle.
Les intérêts courront à compter des conclusions de réclamation valant mise en demeure.
Sur les autres demandes :
La capitalisation des intérêts est de droit lorsqu'elle est demandée.
Il y a lieu pour des motifs d'équité de condamner in solidum les intimés aux dépens et au paiement d'une somme de 20000 € à la SEMIDEP au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en cause d'appel. Ces sommes se répartiront entre eux comme les autres condamnations. L'équité commande le rejet des autres demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.
Par ces motifs, la cour,
Infirme le jugement et statuant à nouveau,
Condamne in solidum les sociétés DPM PATRASCO, MAF, CET INGENIERIE, GIE CETEN APAVE INTERNATIONAL, BET NEGRU, TGM, FRANKI FONDATION, à payer à la société SEMIDEP les sommes de :
- 194.544,90 € HT avec intérêts au taux légal à compter du 31 août 2001,
- 4455,57 € HT avec intérêts au taux légal à compter du 2 décembre 2002,
- 304.225,74 € HT avec intérêts au taux légal à compter du 22 mai 2001 sur le montant de 167.694 €, à compter du 12 juin 2002 sur le montant de 33.679,50 €, à compter du 23 février 2006 sur le solde.
Condamne in solidum les mêmes à l'exception de la SMABTP à payer à la SEMIDEP une somme de 30.000 € avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision.
Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil.
Dit que dans leurs rapports entre eux les condamnations se répartiront à raison de :
- 15% à la charge de la société TGM,
- 40% à la charge de la société BET NEGRU,
- 30% à la charge de la société FRANKI FONDATION,
- 5% à la charge du GIE CETEN APAVE INTERNATIONAL,
- 5% à la charge de la société DPM PATRASCO,
- 5% à la charge de la société CET INGENIERIE,
et fait droit aux appels en garantie dans ces proportions.
Dit que la MAF ne sera tenue que dans les limites des plafonds et franchises contractuelles.
Condamne la SEMIDEP à payer à la société DPM PATRASCO la somme de 4333,80 € TTC avec intérêts au taux légal à compter du 15 mai 2007.
Met hors de cause la société GENERALI et la SMABTP.
Condamne in solidum l'ensemble des intimés à l'exception de la société GENERALI et de la SMABTP aux dépens et au paiement à la SEMIDEP d'une somme de 20000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel et dit que ces sommes se répartiront entre les intervenants à la construction comme les responsabilités, la MAF étant tenue solidairement avec son assuré.
Déboute les autres parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.
Autorise le recouvrement des dépens par les avoués de la cause dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier,Le Président,