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28/09/2011 | FRANCE | N°09/06065

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 28 septembre 2011, 09/06065


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3



ARRET DU 28 SEPTEMBRE 2011



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 09/06065



Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Février 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 08/16733





APPELANTES



Madame [F] [D] épouse [X] propiétaire indivis venant aux droits de Mlle [E] [S] décédée le [Date

décès 7] 2003 dont elle est héritière

[Adresse 2]

[Localité 4]



Madame [M] [N] [D] propriétaire indivis venant aux droits de Mlle [E] [S] décédée le [Date décès 7] 2003 dont el...

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRET DU 28 SEPTEMBRE 2011

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/06065

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Février 2009 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 08/16733

APPELANTES

Madame [F] [D] épouse [X] propiétaire indivis venant aux droits de Mlle [E] [S] décédée le [Date décès 7] 2003 dont elle est héritière

[Adresse 2]

[Localité 4]

Madame [M] [N] [D] propriétaire indivis venant aux droits de Mlle [E] [S] décédée le [Date décès 7] 2003 dont elle est héritière

[Adresse 6]

[Localité 3]

Madame [I] [D] épouse [T] propriétaire indivis venant aux droits de Mlle [E] [S] décédée le [Date décès 7] 2003 dont elle est héritière

Via Panispema 207

[Localité 1] (ITALIE)

représentées par la SCP SCP MONIN D AURIAC DE BRONS, avoués à la Cour

assistée de Me Gérard DELAGRANGE substituant Me Gilles de MAILLARD, avocat au barreau de PARIS, toque : C 188

INTIMEE

SARL L'ATELIER prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 5]

représentée par la SCP BOMMART-FORSTER - FROMANTIN, avoués à la Cour

assistée de Me Marc FORIN, avocat au barreau de PARIS, toque : E 773

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 4 mai 2011, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame BLUM, conseiller chargée du rapport et Madame DEGRELLE-CROISSANT, conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame BARTHOLIN, Présidente

Madame BLUM, Conseiller

Madame DEGRELLE-CROISSANT, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame BASTIN.

ARRÊT :

- contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Madame BARTHOLIN, Présidente, et par Madame BASTIN, greffier, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

*************

Par acte du 14 mai 2001, la société L'Atelier a acquis un fonds de commerce à usage d'atelier exploité dans des locaux situés [Adresse 8].

Ces locaux avaient été donnés à bail en renouvellement, pour neuf ans à compter du 1er avril 1996, en vertu d'un acte du 16 septembre 1998 fixant à 110.000 francs (16.769,39 €) le loyer annuel en principal.

Par acte extrajudiciaire du 30 novembre 2007, la société L'Atelier a demandé le renouvellement du bail.

Le 25 février 2008, les consorts [D] venant aux droits de Mlle [E] [S], bailleresse, ont délivré à la société L'Atelier un commandement visant la clause résolutoire lui faisant sommation de remédier à diverses infractions au contrat de bail.

Par acte extrajudiciaire du 28 février 2008, les consorts [D] ont accepté le renouvellement "sous les plus expresses réserves d'exploitation dans les conditions conformes au bail - activité - exploitant - entretien réparation - et sous réserve d'action résolutoire" moyennant un loyer de 121.660 €.

Les consorts [D] ont assigné la société L'Atelier, le 23 avril 2008, devant le juge des référés qui a rejeté leur demande puis, le 2 décembre 2008, au fond, à jour fixe, pour voir déclarer la clause résolutoire acquise ou subsidiairement, voir prononcer la résiliation du bail.

Par jugement rendu le 17 février 2009, le tribunal de grande instance de Paris a :

- débouté Mmes [D] de leur demande,

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- mis les dépens à la charge de Mmes [D].

Mmes [F] [D] épouse [X], [M] [N] [D] et [I] [D] épouse [T] (consorts [D]) ont relevé appel de cette décision et, par leurs dernières conclusions signifiées et déposées le 8 mars 2011, demandent à la cour, au visa des articles L 145-31 du code de commerce, 1184 et 1134 du code civil, d'infirmer le jugement et de :

- débouter la société L'Atelier de toutes ses demandes,

- dire que Mme [H] a entrepris de contourner l'interdiction qui lui avait été opposée d'étendre son commerce de vente de meubles et de tissus en provenance de l'Inde du [Adresse 8] et le refus du bailleur de lui consentir un bail de ce bâtiment, qu'elle ne pouvait justifier sa présence dans les lieux comme elle l'a fait en 2008 lors des constats d'huissier en revendiquant sa qualité d'associée, que la cession de parts de la s.a.r.l. L'Atelier non publiée dans le délai d'un mois de la sommation du 28 février 2008, non enregistrée dans le mois de sa date, non notifiée est inopposable au bailleur,

- dire que la société L'Atelier a enfreint la clause de destination contractuelle de l'article II du bail repris dans l'acte de cession du fonds entre Euroconfection et L'Atelier,

- dire acquise la clause résolutoire, la société L'Atelier n'ayant pas déféré au commandement du 25 février 2008,

- subsidiairement, dire que les faits dénoncés constituent des violations graves et réitérées aux obligations du bail, que celles-ci sont aggravées par le comportement et les manoeuvres du locataire exclusifs d'une exécution de bonne foi du contrat, l'ensemble justifiant la résiliation aux torts et griefs de la société L'Atelier,

- dire qu'il résulte de la comparaison entre les constats de 2004 et 2008 que pour l'intérieur des lieux, la vitre cassée, les traces d'humidité, la chute du faux-plafond au rez-de-chaussée n'ont pas été réparés malgré la sommation de faire du 25 février 2008,

- dire en conséquence que les lieux ont cessé d'être entretenus en conformité aux obligations du bail depuis le constat de 2004 de Me [U] attestant du bon état des lieux,

- dire que rien ne justifie le refus de communication par le preneur de la police intégrale conditions générales et particulières réclamée à moult reprises par le bailleur, comme prévu au bail,

- dire que ne figure pas dans la police produite qui n'est d'ailleurs pas le contrat concernant la période concernée par la sommation du 25 février 2008, l'existence d'une clause permettant au bailleur d'être subrogé directement par la société dans la perception des indemnités de réparation en cas de sinistre, que la police n'est pas non plus conforme en ce qu'elle devrait prévoir le risque d'explosions de toute nature et la responsabilité à l'égard des voisins au sens large,

- dire que la société L'Atelier n'a pas déféré aux sommes réclamées dans le délai des commandements délivrés, qu'elle reste débitrice, à ce jour, de la somme de 9.081,31 € après actualisation selon relevé produit, la condamner à payer, en deniers ou quittances, la somme de 9.081,31 € avec intérêts de droit à compter des échéances et ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par les articles 1154 et suivant du code civil,

- dire également acquise de ces derniers chefs la clause résolutoire, étant précisé qu'aucune suspension de délai n'a été accordée,

- subsidiairement, ordonner la résiliation du bail aux torts de la société L'Atelier pour les causes susvisées avec effet à compter de l'arrêt,

- ordonner l'expulsion de la société L'Atelier et de tout occupant de son chef et dire que les meubles, matériels et marchandises se trouvant dans les lieux seront transportés dans un garde-meubles au choix du bailleur et aux frais de la société L'Atelier,

- condamner la société L'Atelier à leur payer une indemnité d'occupation d'un montant supérieur de 30 % à celui du dernier loyer trimestriel jusqu'au départ effectif des lieux, soit 7 107,33 €,

- subsidiairement, ordonner une mesure d'expertise à frais partagés par moitié pour déterminer les conditions exactes d'exploitation du fonds de la société L'Atelier, l'origine de la clientèle et la relation avec la société [A] [H]-Le Bateau de Safran,

- condamner la société L'Atelier à leur payer une somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens y compris les frais de commandement, de constats et d'assignation, tant de première instance que devant la cour.

La s.a.r.l. L'Atelier, par ses dernières conclusions signifiées et déposées le 9 mars 2011, demande à la cour de :

- dire Mmes [D] mal fondées en leur appel, les en débouter,

- confirmer le jugement,

- dire irrecevables en vertu de l'article 564 du code de procédure civile, les demandes en paiement des consorts [D] sur le fondement des commandements de payer des 16 septembre 2008 et 14 octobre 2010,

- subsidiairement, les dire mal fondées,

- constater que le commandement de payer du 12 décembre 2008 dont il est fait état pour la première fois le 8 mars 2011 n'est pas versé aux débats,

- en tout état de cause, suspendre, en application de l'article L 145-41 du code de commerce, les effets de la clause résolutoire insérée dans lesdits commandements compte tenu de la bonne foi de la société L'Atelier et du comportement de ses bailleresses,

- lui accorder, dans ce cas, un délai de 12 mois pour s'acquitter des sommes qui pourraient être dues,

- condamner Mmes [D] au paiement d'une indemnité de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.

Par ordonnance du 16 mars 2011, le conseiller de la mise en état a débouté les consorts [D] de leur demande de communication de pièces sous astreinte et les a condamnées aux dépens de l'incident.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 6 avril 2011.

SUR CE,

sur la procédure

Considérant que les consorts [D] ont signifié et déposé le 28 avril 2011 des conclusions au fond en demandant à la cour, à titre liminaire, de rejeter comme tardives les conclusions déposées par la société L'Atelier "le jour de l'ordonnance de clôture, le 9 mars 2011 alors qu'elle avait déjà conclu le 8 mars", à défaut dire qu'il y a lieu de révoquer l'ordonnance de clôture et de la reporter à la date des plaidoiries ;

Mais considérant que la clôture de l'instruction de l'affaire n'a pas été prononcée le 9 mars 2011 comme prétendu mais près d'un mois plus tard, le 6 avril 2011 de sorte que les conclusions signifiées et déposées le 9 mars 2011 n'étaient pas "tardives" et que les consorts [D] ont été mises en mesure d'y répliquer ; que la demande des consorts [D] tendant au rejet des conclusions adverses ou à la révocation de l'ordonnance de clôture n'est pas fondée ; que les conclusions au fond signifiées et déposées le 28 avril 2011 par les consorts [D] sont irrecevables en application de l'article 783 du code de procédure civile ;

Considérant par ailleurs, qu'aucune note en délibéré n'a été demandée aux parties ; que les notes et la pièce produites en délibéré par les consorts [D] et la note en réplique de la société L'Atelier sont irrecevables ;

sur la clause résolutoire

Considérant qu'aux termes de l'article II du contrat de bail du 16 septembre 1998, les locaux en cause, "se composant d'un atelier portant le [Adresse 8] d'une superficie de 179.85 m² pour le rez-de-chaussée et de 167.75 m² (escalier déduit) pour le 1er étage", sont destinés "à l'exploitation personnelle du preneur pour l'activité de : Confection-Sérigraphie, Impression sur tissus, Tricotage et Filature", étant ajouté que "le preneur sera tenu de conserver aux locaux loués la présente destination contractuelle, à l'exclusion de toute autre utilisation de quelque nature, importance et durée, sous peine de résiliation immédiate du présent bail, si bon semble au bailleur" ;

Que l'article VII vient préciser que toute modification ne pourra résulter que d'un document écrit, "une telle modification ne pourra en aucun cas être déduite soit de tolérances, soit de la passivité du bailleur, celui-ci étant libre d'exiger à tout moment et sans préavis le respect et la complète application de toutes les clauses et conditions du présent bail" ;

Considérant, par ailleurs, que l'acte de cession de fonds de commerce conclu le 14 mai 2001 entre la société Euro Confection et la société L'Atelier dispose à l'article 3, au titre d'une "Déclaration spéciale à l'égard du bailleur" que :

"La société L'Atelier, cessionnaire, reconnaît avoir une parfaite connaissance du chapitre "descriptions et autorisations" du bail précité qu'il s'oblige à respecter scrupuleusement et déclare que les locaux qu'il vient d'acquérir aux droits à l'exploitation soient destinés à l'activité de confection, sérigraphie, impression sur tissus, tricotage et filature. À cet égard, le cessionnaire s'engage à ne jamais rechercher la responsabilité du cédant dans ce domaine. La société Euroconfection ayant parfaitement informé la société L'Atelier de l'obligation de n'effectuer qu'une activité de confection, sérigraphie, impression sur tissus, tricotage et filature dans ses locaux" ;

Considérant que le 12 février 2008, les consorts [D] ont obtenu sur requête la désignation de Me [K], huissier de justice, avec mission de se rendre au [Adresse 8] et de constater notamment les conditions d'activité et d'occupation des locaux ;

Que dans son procès verbal de constat dressé le 21 février 2008, l'huissier de justice expose que :

"Après avoir vainement frappé à la porte du [Adresse 8], je me suis rendu dans le voisinage notamment à la porte du 9 où après avoir frappé, j'ai décliné mes nom, prénom et qualité à la personne rencontrée. Celle-ci me déclare avoir les clés du local du 13 et m'y donne accès. Cette personne est Monsieur [L] [Z] lequel me déclare être le gérant de la société L'Atelier. Ce dernier me déclare en outre : ce local sert d'entrepôt au rez-de-chaussée et, au nouveau du 1er étage d'exposition d'objets en provenance d'Inde et de textiles de même provenance" ;

Que l'huissier de justice poursuit en indiquant en substance que le premier étage est occupé sur tout l'espace par une suite de "mises en scène" en vue de vendre à des visiteurs les objets présentés, que le rez-de-chaussée sert d'entrepôt exclusivement à du mobilier et des tissus tels que ceux mentionnés dans les "mises en scène" du premier étage, que ni les WC, ni l'évier du coin cuisine ne sont alimentés en eau, que l'unique machine à laver est complètement sèche et recouverte de poussière, qu'il ne se trouve pas dans les lieux de laboratoire ou atelier de tissage, filage, peinture, que des boites de teinture sont cependant posées sur une étagère ; qu'il relève également qu'au cours de ses opérations, Mme [A] [H], qui a déclaré être associée de la société L'Atelier, est venue remplacer M. [L] ;

Considérant qu'à la suite de ce constat, les consorts [D] ont délivré, le 25 février 2008, à la société L'Atelier un commandement visant la clause résolutoire du contrat de bail, en lui faisant sommation :

- d'exploiter par elle-même le fonds de commerce de confection-sérigraphies, impression sur tissus, tricotage et filature et de conserver au bail sa stricte destination contractuelle,

- de cesser son exploitation des lieux en commerce de mobiliers et de tissus exotiques, de cesser toute sous-location

- de garnir les lieux loués en quantité suffisante conformément à l'article 4 du bail renouvelé pour répondre au paiement des loyers et à l'exécution des charges de la convention et non des biens du titulaire d'un autre bail et d'autres locaux,

- d'exécuter l'engagement de réparation, de repeinture des lieux et de remédier aux dégradations et manquements précisé plus haut,

- de produire sa police d'assurance actuelle,

- de produire une police d'assurance conforme aux clauses du bail et incluant : la clause de renonciation à recours, les garanties aux engagements d'entretiens et de travaux de l'article 606 du code civil, les risques aggravants susvisés,

- de remettre les lieux dans leur état originel et conformes à la destination du bail,

- de décliner l'identité de l'exploitant réel de lieux et de produire les comptes de la société, les factures fournisseurs et les factures clients ;

Considérant, s'agissant du premier grief allégué, que le 28 mars 2008, les consorts [D] ont fait constater par Me [K], à nouveau commis sur requête, que les lieux étaient dans un état identique à celui précédemment décrit ;

Considérant que la société L'Atelier ne conteste pas le fait que contrairement aux dispositions contractuelles, les locaux qu'elle loue sont désormais à usage d'entrepôt d'éléments d'ameublement, meubles meublants, tissus et objets décoratifs, pour le rez-de-chaussée et d'exposition d'articles du même genre pour le 1er étage ; qu'elle n'est pas fondée à soutenir que l'activité ainsi développée dans les locaux n'est que la diversification de l'activité visée dans le bail, celle-ci étant celle de confection-sérigraphie, impression sur tissus, tricotage et filature, à l'exclusion de toute autre ; qu'il ne s'agit pas non plus d'une activité incluse ; que la destination des locaux loués a bien été modifiée ;

Considérant que la société L'Atelier soutient vainement que les activités de filature ont déserté depuis longtemps le territoire national, cette activité n'étant pas la seule visée par la clause de destination, et qu'elle devait faire face à des contraintes économiques ; qu'elle ne justifie pas de ce que son prédécesseur n'exerçait déjà plus les activités prévues au bail dès lors même qu'elle admet que la liste du matériel figurant en annexe à la cession mentionne la présence d'une machine à coudre à plat, d'une table de coupe, de deux machines à coudre et d'un ciseau de coupe et que l'extrait K Bis de la société Euro Confection révèle que celle-ci avait pour activité, outre l'achat, vente, import-export de textiles, la fabrication en sous-traitance ;

Qu'il sera à ce stade relevé que la société L'Atelier s'est constituée quelques mois avant d'acquérir le fonds de commerce de la société Euro Confection, sous cette dénomination "L'Atelier, avec pour objet social, outre le négoce et fabrication de tous tissus pour l'habillement, l'ameublement etc., "la confection-sérigraphie, l'impression sur tissus, le tricotage et la filature" ;

Considérant que la société L'Atelier n'établit pas la connaissance de la modification de la destination des locaux qu'aurait pu avoir sa bailleresse initiale, Mlle [E] [S], avant son décès en 2003 ni la connaissance qu'auraient pu en avoir ses nièces et héritières, les dames [D], avant le constat d'huissier de justice dressé fin juin/début juillet 2004 ; que bien plus, M. [L], gérant de la société L'Atelier, a alors déclaré à l'huissier de justice constatant avoir bien une activité de "confection, sérigraphies, impression sur tissus" ; que par ailleurs, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, la description des lieux dans le procès verbal de constat de 2004 et celle faite dans le procès verbal de constat du 21 février 2008 diffèrent sur le point remarquable qu'il existait toujours en 2004, un petit local à usage d'atelier de teinture de tissus, distinct du dégagement affecté aux sanitaires, qui avait disparu en 2008 ;

Considérant qu'en tout état de cause, la tolérance des bailleurs établie après juillet 2005, par l'attestation même du notaire des consorts [D] qui décrit l'immeuble du n° [Adresse 8] comme un "bâtiment élevé sur rez-de-chaussée surélevé d'un étage, le tout à usage actuel de salle d'exposition commerciale et entrepôt", n'est pas créatrice de droits ; que contrairement à ce que soutient la société L'Atelier, l'acceptation par les consorts [D] du renouvellement, expressément faite, avant l'expiration du délai de 3 mois prévu par l'article L 145-10 du code de commerce de façon à parer à toute éventualité, "sous les plus expresses réserves d'exploitation dans les conditions conformes au bail - activité - exploitant - entretien réparation - et sous réserve d'action résolutoire", ne caractérise pas l'acceptation tacite d'une despécialisation, qui n'a jamais été demandée par la société L'Atelier et n'a jamais fait l'objet du document écrit prévu au bail, ni la renonciation des consorts [D] à se prévaloir de la clause destination du contrat de bail faisant la loi des parties ;

Considérant que l'infraction aux dispositions contractuelles est établie ; que la mauvaise foi prétendue des consorts [D] n'est pas démontrée ; qu'elle ne saurait, en l'espèce, être tirée du seul fait que les consorts [D], qui se sont vu attribuer le 4 juillet 2005 les locaux donnés à bail aux termes d'un partage, ont, dans le contexte de la reprise des affaires de leur tante décédée, pu tolérer la modification de la destination du bail puis ont délivré le commandement visant la clause résolutoire après la demande de renouvellement qui avait été présentée par la locataire avant que le bail n'atteigne la durée de 12 ans ;

Considérant que la société L'Atelier n'a pas remédié à l'infraction reprochée dans le mois du commandement délivré le 25 février 2008 ; qu'elle ne prétend pas s'être, par la suite et dans le délai de 12 mois dont elle demande à présent à bénéficier, conformée aux stipulations contractuelles relatives à la destination des lieux ; que la demande de délai ne peut qu'être rejetée ; que sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres infractions reprochées, la clause résolutoire est acquise et le bail se trouve résilié de plein droit à compter du 25 mars 2008 ;

Considérant que l'expulsion de la société L'Atelier et de tout occupant de son chef sera ordonnée en cas de non restitution volontaire des lieux dans les termes du dispositif ; que le sort des meubles trouvés dans les lieux sera régi en cas d'expulsion conformément aux dispositions des articles 65 et 66 de la loi du 9 juillet 1991 ; que l'indemnité d'occupation due par la société L'Atelier depuis l'acquisition de la clause résolutoire et jusqu'à la libération effective des lieux par la remise des clés, sera fixée, au vu des dispositions contractuelles stipulant qu'en cas d'acquisition de la clause résolutoire, "une indemnité d'occupation mensuelle et indivisible égale à la valeur d'un huitième d'une annuité de loyer alors en vigueur sera due au bailleur", à la somme de 2.096 € par mois soit 6.288 € par trimestre ; que les consorts [D] seront déboutées du surplus de leur demande ;

sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Considérant que la société L'Atelier qui succombe sera condamnée aux dépens de première instance qui comprendront le coût du commandement du 25 février 2008 mais non les frais de constats ainsi qu'aux dépens d'appel ; que vu l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 4.000 € sera allouée aux appelantes pour leurs frais irrépétibles, la demande de la société L'Atelier à ce titre étant rejetée ;

PAR CES MOTIFS

Rejette la demande des consorts [D] tendant à voir déclarer tardives les conclusions signifiées et déposées par la société L'Atelier le 9 mars 2011 ;

Rejette la demande de révocation de l'ordonnance de clôture du 6 avril 2011 ;

Déclare irrecevables les conclusions signifiées et déposées par les consorts [D], sur le fond, le 28 avril 2011 ainsi que les notes et la pièces produites en délibéré ;

Infirme le jugement ;

Statuant à nouveau,

Constate l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 25 mars 2008 ;

Ordonne, à défaut de restitution volontaire des lieux dans les trois mois de la signification du présent arrêt, l'expulsion de la société L'Atelier et de tout occupant de son chef des lieux situés [Adresse 8], avec le concours, si besoin est, de la force publique et d'un serrurier ;

Dit qu'en cas d'expulsion, les meubles se trouvant sur les lieux suivront le sort prévu aux articles 65 et 66 de la loi du 9 juillet 1991et 203 à 206 du décret du 31 juillet 1992 ;

Fixe à 6.288 € l'indemnité d'occupation trimestrielle due par la société L'Atelier, à compter de la résiliation du bail et jusqu'à la libération effective des lieux par la remise des clés ;

Condamne la société L'Atelier à payer au consorts [D] la somme de 4.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la société L'Atelier de sa demande à ce titre ;

Rejette toute autre demande ;

Condamne la société L'Atelier aux dépens de première instance qui comprendront le coût du commandement du 25 février 2001 ainsi qu'aux dépens d'appel, ces derniers pouvant être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 09/06065
Date de la décision : 28/09/2011

Références :

Cour d'appel de Paris I3, arrêt n°09/06065 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-09-28;09.06065 ?
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