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22/09/2011 | FRANCE | N°08/15760

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 22 septembre 2011, 08/15760


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5



ARRET DU 22 SEPTEMBRE 2011



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 08/15760



Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Juin 2008 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 06/157





APPELANTE



SA AEREL

ayant son siège : [Adresse 4]



représentée par la SCP PETIT LESENECHAL, avo

ués à la Cour

assistée de Me Catherine LECLERCQ HUET de la SELARL ARMAND Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0153,





INTIMEE



CAISSE CENTRALE DE LA MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE

ay...

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRET DU 22 SEPTEMBRE 2011

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 08/15760

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Juin 2008 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 06/157

APPELANTE

SA AEREL

ayant son siège : [Adresse 4]

représentée par la SCP PETIT LESENECHAL, avoués à la Cour

assistée de Me Catherine LECLERCQ HUET de la SELARL ARMAND Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0153,

INTIMEE

CAISSE CENTRALE DE LA MUTUALITE SOCIALE AGRICOLE

ayant son siège : [Adresse 1]

représentée par la SCP FISSELIER CHILOUX BOULAY, avoués à la Cour

assistée de Me Eric GAFTARNIK de la SELARL GAFTARNIK & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L0118,

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 785, 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Juin 2011, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Colette PERRIN, Présidente et Madame Janick TOUZERY-CHAMPION, Conseillère chargée d'instruire l'affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Colette PERRIN, présidente

Madame Janick TOUZERY-CHAMPION, conseillère

Madame Patricia POMONTI, conseillère

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Anne BOISNARD

ARRET :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Colette PERRIN, présidente et par Mademoiselle Anne BOISNARD, greffier des services judiciaires auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

La SA Aerel fabrique et commercialise des produits de climatisation et de filtration de l'air destinés à équiper des cabines de tracteurs et d'engins agricoles.

La MSA (Mutualité Sociale Agricole), organisme mutualiste de droit privé chargé d'une mission de service public, gère le régime obligatoire de protection sociale de l'ensemble des professions agricoles, salariés ou non, versant à ce titre des prestations de santé, famille, vieillesse, accidents du travail et maladies professionnelles. Elle repose sur une structure décentralisée, avec au niveau national la Caisse Centrale (CCMSA) et au niveau départemental trente-cinq caisses de MSA (CMSA) disposant chacune de la personnalité morale.

Dans l'exercice de sa mission consistant à promouvoir la prévention et l'action sociale et sanitaire, la CCMSA s'est intéressée aux appareils de climatisation et de filtration d'air pour cabines de tracteurs et d'engins agricoles, destinés à protéger le conducteur des pollutions ainsi que des méfaits des produits de traitement.

En 1988, la Caisse MSA de [Localité 3] a réalisé une étude comparative portant sur l'efficacité thermique d'un certain nombre d'appareils commercialisés à l'époque, dont les appareils fabriqués et commercialisés par la société Aerel.

En juillet 1991, à la suite d'essais réalisés en vergers par la CCMSA et le Centre d'Etude du [Localité 2], laboratoire dépendant du Ministère de la Défense Nationale, la Caisse MSA de [Localité 5] a communiqué à chaque concurrent, et notamment à la société Aerel, un rapport évoquant les essais réalisés sur son propre matériel.

La CCMSA a poursuivi l'étude des systèmes de protection contre les traitements phytosanitaires en établissant un cahier des charges avec l'aide des services techniques du Centre d'Etude du [Localité 2].

Parallèlement, les services publics ont fait appel à la société Buisard pour étudier la faisabilité technique et économique d'une cabine de protection efficace.

En octobre 1997, la CCMSA a remis un exemplaire du cahier des charges à l'ensemble des acteurs du marché, dont la société Aerel.

A partir d'octobre 1997, des travaux à l'initiative de la CCMSA ont été réalisés dans le cadre de l'AFNOR, visant à l'élaboration d'une norme définissant les critères d'efficacité de l'épuration de l'air dans les cabines d'engins agricoles, afin notamment de mettre en 'uvre la Directive Machines 89/392/CEE.

Reprochant à la CCMSA d'avoir utilisé les moyens de sa mission de service public pour critiquer et marginaliser, sans justification, ses produits et sa technologie, exercé des activités étrangères à ses missions statutaires génératrices d'une situation de concurrence déloyale à son détriment et par suite, commis une faute lui causant un préjudice commercial et moral, la société Aerel a fait assigner cette dernière par acte en date du 27 décembre 2005 devant le tribunal de grande instance de Bobigny, lequel par jugement du 3 juin 2008,

- a débouté la société Aerel de l'ensemble de ses demandes,

- l'a condamnée à verser à la CCMSA la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions récapitulatives du 25 mai 2011, la société Aerel, appelante, demande de :

- infirmer le jugement entrepris,

- constater que la CCMSA a utilisé les moyens de sa mission de service public de promotion sanitaire et sociale et de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles, pour critiquer et marginaliser, sans justification, ses produits et sa technologie ,

- juger que la CCMSA a diffusé dans le public, et à son insu , des informations inexactes et mensongères visant à discréditer sa technologie et à dénigrer ses produits,

- juger que ce faisant, la CCMSA a faussé les règles de la libre concurrence à son détriment,

- juger que la CCMSA a commis une faute en effectuant des tests et en faisant effectuer des tests sur son système en parfaite violation de ses prescriptions techniques,

- juger que la CCMSA ne lui a sciemment pas communiqué les résultats des tests effectués en 1991, puis en a tronqué le texte finalement remis,

- juger que la CCMSA a refusé pendant 6 ans de communiquer le cahier des charges établi en 1991 alors qu'elle l'a communiqué à cette date à la société Buisard, son concurrent direct,

- juger que la société CCMSA reconnaît, dans la pièce référencée 22 versée aux débats, le caractère primordial et nécessaire de la conformité des cabines à son cahier des charges aux fins d'être distribuées et de bénéficier d'une aide financière par son réseau de MSA départementales,

- juger qu'en agissant ainsi la CCMSA a exercé des activités étrangères à ses missions statutaires, génératrices d'une situation de concurrence faussée à son détriment,

- juger que les comportements de la CCSA sont constitutifs de fautes, qui lui ont causé un préjudice commercial et moral qui doit être réparé,

- condamner la CCMSA à lui payer la somme de 191.428.428 euros HT en réparation du préjudice commercial et moral causé par les actes fautifs que la CCMSA met en 'uvre à son égard depuis plus de dix ans, à parfaire à la date de consolidation,

outre la somme de 30.000 euros pour préjudice moral et la somme de 100.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouter la CCMSA de l'intégralité de ses demandes,

- ordonner la publication intégrale du jugement à intervenir aux frais de la CCMSA dans la presse spécialisée nationale et régionale.

A l'appui de ses prétentions, la société Aerel reproche à la CCMSA et à la MSA d'avoir effectué, en 1998 et 1999, des tests sur son système, en parfaite violation de ses prescriptions techniques , des obligations imposées par la règlementation, et du principe du contradictoire.

Elle fait également valoir que la CCMSA a favorisé, en toute connaissance de cause et de manière répréhensible, la société Buisard, son concurrent et a eu un rôle déterminant quant à l'orientation des travaux de l'AFNOR dans un sens favorable à la seule société Buisard,

Elle invoque encore le fait que la CCMSA ne lui a pas communiqué le cahier des charges établi en 1991 alors qu'elle ne conteste pas l'avoir communiqué à la société Buisard. Par ailleurs, elle soutient que la CCMSA ne lui avait dans un premier temps pas communiqué les résultats des tests effectués en 1991 puis qu'elle en a tronqué le texte qu'elle lui a finalement remis.

Elle estime que les fautes de la CCMSA ont engendré un très important préjudice commercial directement lié à son éviction du marché des appareils qu'elle fabrique.

Par conclusions récapitulatives du 17 mars 2011, la CCMSA, intimée formant appel incident, sollicite :

- la confirmation du jugement entrepris

en ce qu'il a débouté purement et simplement la société Aerel de l'ensemble de ses demandes,

- le rejet pour le surplus,

- la condamnation de

la société Aerel à cesser l'utilisation commerciale abusive du nom de la MSA sous astreinte de 200 euros par infraction,

- le prononcé de la publication intégrale du présent arrêt aux frais de la société Aerel, dans cinq des principaux supports de la presse professionnelle agricole nationale et régionale,

- la condamnation de la société Aerel à lui verser la somme de 100.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La CCMSA excipe de son absence de responsabilité au regard des études réalisées par les Caisses départementales et fait valoir que c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré qu'elle a, dans le cadre de sa mission d'assistance des Caisses départementales et pluridépartementales, légitimement informé son réseau de conseillers de prévention, de l'absence de preuves scientifiques et objectives corroborant les affirmations commerciales de la société Aerel. Elle conteste, sur la collaboration technique avec la société Buisard, être à l'origine de cette coopération et dément les allégations de la société Aerel qui l'accuse d'avoir fourni à la société Buisard un cahier des charges lui permettant d'adapter ses produits aux préconisations dudit cahier des charges. Elle prétend avoir remis un exemplaire du cahier des charges finalisé à l'ensemble des acteurs du comité AFNOR, dont la société Aerel, qui ne peut sérieusement prétendre qu'elle aurait refusé de lui communiquer le cahier des charges. Elle conteste en outre tout comportement fautif à l'occasion des travaux de normalisation dirigés par l'AFNOR; elle estime que selon les règles en vigueur à l'AFNOR, les mesures sont issues d'un consensus entre les différents partenaires aux intérêts parfois divergents, son avis n'étant nullement prépondérant. Enfin elle considère que le refus opposé par l'AFNOR de communiquer à la société Aerel les documents de travail de la commission n'est que la contrepartie du refus de cette dernière de contribuer au financement des travaux

La Cour renvoie pour un plus ample exposé des faits et prétentions initiales des parties à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Sur les demandes de la société Aerel

Considérant que la société Aerel reproche à la CCMSA d'avoir évincé sa technologie, marginalisé ses produits au profit du système de la société Buisard, qui a bénéficié d'avantages injustifiés, faussant ainsi les règles de la concurrence et étant à l'origine de ses difficultés financières; que la société Aerel a donc engagé la présente action délictuelle à l' encontre de la Caisse visant à obtenir réparation du dommage que lui aurait occasionné les pratiques discriminatoires de celle-ci ;

Qu'en préalable, il convient de rappeler que la technologie mise en oeuvre par la société Aerel est fondée sur un rafraîchissement et une purification obtenus par injection évaporative d'eau finement pulvérisée dans une veine d'air à l'intérieur d'un nébuliseur inclus dans l'appareil ;

Considérant qu'elle soutient, en premier lieu, que les tests effectués par les caisses MSA de [Localité 3] et de [Localité 5] et la CCMSA en 1988 et 1999 l'ont été en violation de ses prescriptions techniques, du principe du contradictoire et de la réglementation qui impose la prise en compte du travail réel ; que la Caisse aurait ensuite refusé de porter à sa connaissance les résultats desdits tests dans des délais lui permettant d'assurer sa défense, tout en donnant une large diffusion à ces essais faussés ;

Mais considérant qu'il convient d'observer, d'une part, que ces tests et études ont été réalisés sous l'égide des caisses départementales, qui ont la personnalité juridique et non de la Caisse centrale, dont rien ne permet de démontrer qu'elle a repris à son compte ces études, d'autre part que la large diffusion imputée à cette dernière sur ces tests litigieux n'est étayée par aucun élément, enfin, à supposer même que les essais auraient du être réalisés, portes des tracteurs ouvertes et non fermées comme elle le prétend, les conditions étaient les mêmes pour tous ceux qui y participaient, de sorte qu'aucun d'eux n'était dans une position privilégiée ; que la seule lettre, qui fonde sa critique de la méthodologie utilisée, lui a été adressée le 25 juin 1999 par la caisse de MSA des [Localité 3] qui a seulement fait qu'observer que la réserve d'eau n'est pas reliée au système et qui s'est interrogée sur l'efficacité du matériel; que cette seule correspondance est totalement insuffisante à apporter la preuve des faits que la société Aerel dénonce, les deux viticulteurs dont il est question dans ce courrier ayant pu ne pas réaliser un montage correct de l'appareil; que ce premier grief est donc inopérant ;

Considérant, en second lieu, que l'appelante reproche à l'intimée d'avoir exercé des activités étrangères à sa mission de service public en dénigrant ses produits, ce qui a, selon elle, permis de favoriser en connaissance de cause son concurrent et en veut pour preuve les tests et essais effectués par des agences et instituts de recherche indépendants qui ont conclu de façon concordante à l'efficacité de son système; qu'ainsi elle verse aux débats un rapport réalisé en 1994 par le laboratoire CETIAT (Centre technique des Industries aerauliques et thermiques) en situation réelle et un second réalisé en 1995 portant sur des mesures réalisées au banc dans son laboratoire, l'avis motivé et circonstancié de L'INRA, organisme de recherche officiel, le rapport du bureau VERITAS , qui reconnaîtraient tous les performances très positives de son système ;

Qu'il convient de rappeler que la mission de la CCMSA, organisme mutualiste de droit privé chargée d'une mission de service public, est de promouvoir et de développer la prévention de l'action sociale et sanitaire notamment en matières d'accidents du travail et de maladie professionnelle, conformément à l'article L 723-11. 6 du code rural ; qu'elle agit donc pour préserver la santé des salariés et non-salariés agricoles, en créant des actions spécifiques aux risques de la profession, dont celle en litige qui consiste à chercher à protéger les conducteurs contre les effets des produits phytosanitaires qu'ils pulvérisent sur leurs cultures ;

Qu'il importe de relever que la CCMSA reconnaît le caractère innovant de la technologie développée par la société Aerel en matière de rafraîchissement d'air (température de la cabine), mais s'interroge sur l'efficacité du système en matière d'épuration d'air contre les risques de pollution chimique ;

Que les premiers juges ont justement procédé à l'examen des divers rapports susmentionnés (à l'exception de celui du bureau Veritas produit en cause d'appel) ;

Qu'il suffit d'ajouter qu'aux termes du rapport du CETIAT de 1994, l'appareil conçu par la société Aerel appelé 'Climatop 2" réalise le traitement de l'air d'une cabine d'engin sans utiliser de CFC et substituts (fluides frigorigènes), contrairement aux systèmes de climatisation classique à compression de vapeur; qu'il présente une solution alternative innovante face à l'emploi de substances qui appauvrissent la couche d'ozone ou participent à l'effet de serre; que les tests réalisés sur deux moissonneuses batteuses en août 1994 ont démontré de très bonnes performances de l'appareil pour le confort en ce qui concerne la température et l'hygrométrie, pour l'efficacité énergétique bien supérieure à la climatisation de type frigorifique , pour la qualité de l'air en diminuant les poussières; qu'aux termes du second rapport du CETIAT en 1995 qui a réalisé des tests en laboratoire, ces performances ont été confirmées ; que le dernier rapport du CETIAT versé en cause d'appel par l'appelante date de 1974 et ne vise que des mesures thermiques et électriques, aérauliques , d'empoussièrement, d'encrassement de l'appareil 'Climatop 2" qui instaure un système de rafraîchissement d'air par évaporation pour cabines d'engins; qu'il n'apporte donc aucun élément nouveau par rapport à celui de 1994 sur le risque de contamination par pollution chimique ;

Qu'il est ainsi démontré que l'efficacité du système commercialisé par la société Aerel n'a pas été testé par le CETIAT à propos des risques de pollution chimique mais seulement pour ses performances aérauliques, thermiques et de filtration (seulement vis à vis de la poussière) ;

Que le rapport du Bureau Veritas établi le 26 novembre 2008, qui se fonde sur les rapports du CETIAT du 5 octobre 1995 et octobre 1994 et sur l'examen physique des produits Aerel, ne peut donc apporter plus d'éléments sur les risques encourus par le monde agricole lors de l'application des produits phytosanitaires à l'égard d'une contamination par ces substances chimiques ;

Qu'il en est de même des avis de l'Actim (agence pour la coopération technique , industrielle et économique), de l'Inrs (Institut National de recherche et de sécurité), de l'Adme (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie) , de l'Inra (Institut national de la recherche agronomique), qui se disent convaincus de l'intérêt du produit et louent ses avantages par rapport à une climatisation classique (température, empoussiérage, efficacité energétique, faible coût de mise en oeuvre et d'entretien ou absence d'odeurs) et annoncent pour certains un marché potentiel en faveur de la société Aerel ;

Que par conséquent, c'est à juste titre que la CCMSA dans le cadre de sa mission d'assistance aux caisses départementales a informé son réseau de conseillers en prévention de l'absence de preuves scientifiques et objectives en matière d'épuration de l'air lors de l'emploi de produits phytosanitaires; qu'elle n'a nullement exercé une activité étrangère à sa mission; qu'elle n'a pas privilégié la société Buisard dans son étude 'Traitements phytosanitaires et protection du conducteur de tracteur' puisqu'elle a conclu, en page 9, que les dispositifs de filtration de l'air apportent une protection insuffisante, que le dispositif A (Buisard) 'était très peu performant et donc pratiquement inefficace' et que les dispositifs B et C (Aerel) 'sont plus performants mais encore très perfectibles'; que la démonstration de la faute alléguée n'est donc pas rapportée ;

Considérant en troisième lieu, que la société Aerel soutient que les premiers juges n'ont pas statué sur les agissements de la CCMSA qu'elle dénonçait en ce que celle-ci aurait refusé de lui communiquer les résultats de tests effectués en 1991 puis en aurait tronqué le texte ;

Mais considérant qu'aucun retard dans l'information ne saurait être imputé à la CCMSA alors que l'étude invoquée a été réalisée en 1991 sous l'égide de la caisse MSA de la [Localité 5] à une date non précisée et qu'elle a été communiquée à la société Aerel dès le 23 juillet 1991, selon ses propres allégations; que la caisse était en droit de ne pas remettre à cette dernière les annexes de ce rapport qui contenaient des informations confidentielles sur ses concurrents, de sorte qu'aucun manquement ne saurait être retenu à son encontre ;

Considérant en quatrième lieu la société Aerel reproche à la CCMSA d'avoir refusé expressément de lui communiquer le cahier des charges élaboré en 1991, alors qu'elle l'a communiqué à la société Buisard en juillet 1991, de sorte que cette dernière a bénéficié, selon elle, d'un avantage concurrentiel discriminant lui permettant de mettre au point et de commercialiser un système de filtration répondant aux spécifications de la CCMSA ; que la société Buisard a également obtenu une subvention de l'ANACT 'pour concevoir un matériel conforme au cahier des charges établi par la CCMSA', alors qu'il n'a été donné satisfaction à sa réclamation que six années plus tard en octobre 1997 ;

Mais considérant que la collaboration technique de la société Buisard a été réalisée dans le cadre d'un projet financé par le fonds d'amélioration des Conditions de travail (FACT) à l'initiative de l'Agence Nationale pour l'amélioration des conditions de travail (ANACT) et avec le soutien des pouvoirs publics (Direction Régionale du Travail, de l'Emploi et de la Formation professionnelle de Loire Atlantique) et de celui de la communauté européenne dans le cadre du projet Agrisens; que la pièce n° 25 de l'intimée démontre qu'il s'est agi d'une initiative des pouvoirs publics et notamment du Ministère du Travail, de l'Emploi et de la formation professionnelle et non de celle de la CCMSA; que ce grief n'est donc pas pertinent ;

Que le projet de rédaction d'un cahier des charges pour déterminer les critères d'un système de climatisation et d'épuration d'air performant a débuté en 1989 ; que ce document a nécessairement évolué au gré de l'enrichissement des connaissances et il a fallu des projets successifs pour que le travail puisse aboutir en octobre 1997, date à laquelle la version définitive a été communiquée à tous les fabricants, dont la société Aerel ;

Que la CCMSA objecte que si elle a remis en juillet 1991 le premier projet de cahier des charges à la société Buisard c'était pour permettre à celle-ci d'alimenter la bibliographie de l'étude et de réaliser les tests requis par les pouvoirs publics ; qu'elle a ensuite attendu que les expériences soient réalisées pour compléter son cahier des charges; qu'il n'était destiné qu'à déterminer un premier référentiel de prescriptions en vue de la rédaction d'une norme ; qu'il ne peut donc lui être fait grief d'avoir donné cette information qui permettait aux services publics d'avancer dans l'étude de la faisabilité d'une cabine de protection efficace contre le risque de pollution chimique, ce qui est conforme à sa mission de service public ;

Qu'en toute hypothèse, la CCMSA n'a pas opposé un refus catégorique à la société Aerel puisqu'elle s'est déclarée disposée à répondre à l'offre de collaboration de cette dernière pour améliorer la protection des conducteurs de tracteurs réalisant des traitements phytosanitaires et qu'elle l'a sollicitée par lettre du 30 mai 1997 pour participer à un groupe de travail 'prévention' ;

Qu'il s'ensuit que l'appelante ne démontre nullement que la CCMSA ait procuré un avantage à la société Buisard dans le but de fausser la concurrence ;

Considérant, en cinquième lieu que la société Aerel excipe de la faute commise par la CCMSA en ce qu'elle aurait orienté les travaux de l' AFNOR (association française de normalisation) dans le but de mettre en place une norme adaptée à la seule technologie de la société Buisard ;

Mais considérant que la société Aerel ne fait que reprendre en cause d'appel les moyens développés devant les premiers juges, auxquels ceux-ci ont pertinemment répondu par des motifs que la Cour adopte, sans qu'il soit utile de les rappeler ;

Qu'il suffit d'ajouter qu'aux termes de sa lettre du 8 décembre 1998, la société Aerel a refusé de participer aux travaux du groupe U 01 F au siège de l'Afnor 'tant qu'ils n'auront pas été clairement réorientés' ; qu'elle a contesté pour l'essentiel que le champ des travaux soit restreint au risque 'produits chimiques' alors qu'existe le risque 'poussières' ; qu'elle en a déduit que l'élaboration d'une norme va conduire à créer de nouvelles situations de risques puisque les agriculteurs se reposeront sur des solutions conformes et validées officiellement pour supprimer leurs précautions antérieures ;

Que néanmoins la mise en application progressive depuis le 1er janvier 1993 de la directive dite machines 89/392/CEE et particulièrement du point 1.5.13 de l'annexe 1 sur 'les risques dûs aux émissions de poussière, gaz ' se devait d'être accompagnée de la mise en place de normes de sécurité pour la fabrication des équipements de travail et notamment pour les machines agricoles ;

Que par conséquent cette absence de participation de la société Aerel à l'élaboration d'une norme lui est seule imputable ; qu'elle s'est ainsi privée de la possibilité d'y concourir ;

Que la société Aerel ne peut contester que la double approche de cette commission (dispositif de filtration d'une part et cabine dans son ensemble d'autre part), cause de son départ du groupe de travail, a été adoptée par 'l'international Standard Organisation' (ISO) dans le cadre des travaux normatifs internationaux engagés sur le sujet, alors qu'il ne peut être reproché à la CCMSA d'avoir user de son influence ; que ce grief n'est donc pas non plus établi ;

Que l'appelante sera en conséquence déboutée de l'ensemble de ses prétentions ; que le jugement mérite une totale confirmation de ce chef.

Sur les demandes de la CCMSA

Considérant que la CCMSA sollicite qu'il soit ordonné à la société Aerel de cesser l'utilisation commerciale abusive de son nom, sous astreinte de 200 € par infraction ;

Mais considérant que cette demande ne saurait prospérer s'agissant de deux documents datés de 2006 et 2007, faisant certes mention de la CCMSA, mais de façon non abusive ;

Considérant que la CCMSA demande également la publication intégrale du présent arrêt aux frais de la société Aerel dans cinq des principaux supports de la presse professionnelle agricole nationale et régionale ;

Mais considérant qu'il n'y a pas lieu d'accueillir cette prétention non justifiée ;

Considérant en revanche que l'équité commande en vertu de l'article 700 du code de procédure civile d'allouer à la CCMSA une indemnité de 3.000 €, en plus de cclle accordée par les premiers juges.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

Ajoutant ,

Condamne la société Aerel à payer à la CCMSA , en plus de celle allouée à ce titre par les premiers juges, une indemnité de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne la société Aerel aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier

A. BOISNARD

La Présidente

C. PERRIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 08/15760
Date de la décision : 22/09/2011

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°08/15760 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-09-22;08.15760 ?
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