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21/09/2011 | FRANCE | N°09/15631

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 1, 21 septembre 2011, 09/15631


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 1



ARRÊT DU 21 SEPTEMBRE 2011



(n° , 06 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 09/15631



Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Mai 2009 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 04/21314





APPELANTE



La SOCIÉTÉ DE PERCEPTION ET DE DISTRIBUTION DES DROITS DES ARTISTES INTERPRETES DE LA MUS

IQUE ET DE LA DANSE (SPEDIDAM) Agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 6]



représentée par la SCP FIS...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 1

ARRÊT DU 21 SEPTEMBRE 2011

(n° , 06 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/15631

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Mai 2009 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL - RG n° 04/21314

APPELANTE

La SOCIÉTÉ DE PERCEPTION ET DE DISTRIBUTION DES DROITS DES ARTISTES INTERPRETES DE LA MUSIQUE ET DE LA DANSE (SPEDIDAM) Agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 2]

[Localité 6]

représentée par la SCP FISSELIER CHILOUX BOULAY, avoués à la Cour

assistée de Me Cécile TORDJMAN, avocat au barreau de Paris, toque : R058

plaidant pour Me Isabelle WEKSTEIN, avaocat du cabinet WAN AVOCATS

INTIMÉES

Etablissement Public INSTITUT NATIONAL DE L'AUDIOVISUEL (INA)

Pris en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 4]

[Localité 8]

représentée par la SCP BERNABE-CHARDIN-CHEVILLER, avoués à la Cour

assistée de Me Anne-Lise RIVIERE, avocat au barreau de Paris, toque : P216

substituant Me Yves BAUDELOT, avocat au barreau de Paris

plaidant pour la SCP BAUDELOT COHEN-RICHELET POITVIN

La société DEMD

Prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 3]

[Localité 5]

La société EUROPE IMAGES INTERNATIONAL

Prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 1]

[Localité 7]

représentées par la SCP LAGOURGUE ET OLIVIER, avoués à la Cour

assistées de Me François STEFANAGGI, avocat au barreau de Paris, toque : D1156

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 Juin 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Didier PIMOULLE, Président

Madame Brigitte CHOKRON, Conseillère

Madame Anne-Marie GABER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Melle Aurélie GESLIN

ARRÊT :- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Didier PIMOULLE, président et par Mademoiselle Sandra PEIGNIER, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

***

LA COUR,

Vu l'appel relevé par la société de perception et de distribution des droits des artistes-interprètes de la musique et de la danse (ci après : SPEDIDAM) du jugement du tribunal de grande instance de Créteil (1ère chambre, n° de RG : 04/12314), rendu le 12 mai 2009 ;

Vu les dernières conclusions de l'appelante (24 mai 2011) ;

Vu les dernières conclusions (17 mai 2011) de l' Institut National de l'Audiovisuel (ci-après : l'INA), intimé ;

Vu les dernières conclusions (18 mai 2011) des sociétés DEMD Productions et Europe Images International, intimées et incidemment appelantes ;

Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 7 juin 2011 ;

* *

SUR QUOI,

Considérant que, par acte du 9 février 2004, la SPEDIDAM, ayant constaté que trois vidéogrammes reproduisant des épisodes de la série télévisée « Arsène Lupin » avaient été produits ou coproduits par l'INA sans autorisation préalable des artistes musiciens dont la prestation avait illustré les épisodes à l'origine, a assigné l'Institut devant le tribunal de grande instance de Créteil aux fins d'être indemnisée des préjudices subis par les vingt-trois artistes en cause du fait de la reproduction illicite et de la communication au public de leurs prestations ; que l' INA a assigné les sociétés DEMD et Europe Images International en garantie ;

Que le tribunal, par le jugement dont appel, ayant rejeté la fin de non recevoir tirée par les défendeurs du défaut d'intérêt à agir de la SPEDIDAM, a débouté cette dernière de toutes ses demandes faute d'apporter la preuve de la participation des vingt-trois artistes à l'enregistrement d'une 'uvre utilisée par la suite pour la sonorisation des épisodes figurant sur les trois vidéogrammes litigieux, ni même qu'il ait été fait une quelconque utilisation ultérieure d'un tel enregistrement ; qu'il a, par voie de conséquence, dit les demandes en garantie sans objet ; qu'il a enfin rejeté les demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive présentée par les sociétés DEMD et Europe Images International ;

Sur la procédure :

Considérant, aux termes de l'article 15 du code de procédure civile, que « les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense » ; que l'article 16 du même code dispose que « le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement » ;

Considérant que l'INA a communiqué, selon bordereau du 7 juin 2011, deux pièces n° 21 et 22 ; que cette communication, effectuée le jour de l'ordonnance de clôture alors qu'aucune circonstance ou urgence particulière n'est invoquée pour en justifier le caractère tardif, n'est pas conforme aux prescriptions de l'article 15 ci-dessus reproduite ; qu'il y a lieu en conséquence de faire droit à la demande de la SPEDIDAM tendant à voir écarter des débats ces deux pièces que l'INA n'a pas communiquées en temps utile pour permettre aux parties d'en débattre contradictoirement ;

Sur la recevabilité à agir de la SPEDIDAM :

Considérant qu'il résulte tant du corps des dernières écritures de la SPEDIDAM (« IV. Sur le montant des demandes », pages 68 à 70) comme du dispositif de ses conclusions que l'appelante demande la condamnation des intimés à lui payer, outre des dommages-intérêts pour procédure abusive et une indemnité par application de l'article 700 du code de procédure civile, 34.500 euros en réparation du préjudice personnel subi par les artistes-interprètes du fait de la reproduction illicite de leur prestation et subsidiairement du fait de l'absence de rémunération à ce titre, plus 20.000 euros en réparation de l'atteinte à l'intérêt collectif de la profession ; que les développements des sociétés DEMD et Europe Image International sur l'irrecevabilité des demandes de la SPEDIDAM fondées sur la violation du droit moral des artistes-interprètes, comme nouvelle en appel par application de l'article 564 du code de procédure civile, sont donc sans objet ;

Considérant qu'il ne subsiste plus devant la cour aucune contestation relative à l'intérêt à agir de la SPEDIDAM au nom d'artistes-interprètes dont la preuve ne serait pas rapportée de leur adhésion à ses statuts ; que les intimées admettent en effet que la SPEDIDAM a communiqué la totalité des bulletins d'adhésion des artistes-interprètes concernés ;

Considérant que l'INA verse au débat un document qui lui a été communiqué par la société Audiens, groupe de protection sociale de l'audiovisuel, de la communication, de la presse et du spectacle chargé notamment de payer les pensions de retraite des artistes-interprètes, qui établit que douze des vingt-trois artistes-interprètes au nom desquels prétend agir la SPEDIDAM sont décédés ;

Que la SPEDIDAM discute vainement la fiabilité de ces informations au prétexte de discordances de détail relevées entre les numéros de sécurité sociale indiqués par cet organisme et les numéros correspondant attribués à deux personnes de la liste dans ses propres documents, feuilles de présence et bulletins d'adhésion ; que l'intérêt d'un organisme payeur de pensions de retraite à veiller avec la plus grande exactitude au décès éventuel des ayants droit confère en effet aux renseignements qu'elle donne à ce sujet une meilleure garantie d'exactitude que les documents invoqués en l'espèce par la SPEDIDAM ; que la société Audiens explique que les renseignements ainsi fournis sont fondés sur les actes de décès des intéressés ; que, d'ailleurs, la production par l'INA de documents d'état civil confirmant le décès de sept de ces douze artistes-interprètes achève de confirmer la force probante des informations fournies par la société Audiens ;

Considérant que la SPEDIDAM soutient encore qu'elle serait en toute hypothèse recevable à agir au nom des artistes-interprètes décédés et invoque à cette fin les dispositions de ses statuts selon lesquelles « en cas de décès d'un associé, les rémunérations continueront à être versées à ses ayants droit » (article 14) et celles de son règlement général qui prévoient que « en cas de décès d'un ayant droit, les droits lui revenant seront versés par la SPEDIDAM à ses héritiers identifiés » ;

Mais considérant que la référence à ces différentes dispositions, qui ont pour objet de prévoir que la SPEDIDAM doit payer aux héritiers de ses adhérents décédés les sommes qu'elle continue de percevoir pour leur compte est sans pertinence en l'espèce où il est question, non des conditions de répartition des rémunérations perçues ou dues à des artistes-interprètes, mais d'action en justice en réparation d'un préjudice ;

Considérant en effet que la SPEDIDAM ne poursuit pas dans la présente instance le paiement des rémunérations dues à chacun des membres au nom desquelles elle prétend agir, dont elle donne seulement, à titre indicatif, une valeur moyenne (page 69 de ses dernières écritures), et qu'elle serait bien en peine d'individualiser compte tenu de sa défaillance dans la charge de la preuve qui sera montrée plus loin, mais le paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé à chacun d'eux par la faute de l'INA pour ne pas s'être assuré de leur autorisation avant d'exploiter les vidéogrammes litigieux ;

Considérant en effet que nul n'est admis à agir dans l'intérêt d'autrui s'il n'est légalement qualifié à cette fin ; qu'une telle attribution de qualité ne peut résulter que de la loi et revêt un caractère exceptionnel ; que la SPEDIDAM ne prétend pas qu'elle serait investie par une disposition de la loi pour agir en toutes circonstance en réparation d'un préjudice prétendument subi par tel de ses adhérents décédé pour le compte des héritiers de celui-ci, au demeurant non identifiés en l'espèce et donc, par hypothèse, non avertis de cette action, alors que le droit d'agir en justice est une liberté fondamentale, qui appartient à chacun dans son propre intérêt et n'appartient, en principe, à personne d'autre ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SPEDIDAM sera déclarée irrecevable à agir au nom des héritiers non identifiés de ses adhérents dont le décès est établi par les pièces versées au débat, soit MM. [LB] [S], [DT] [C], [BV] [F], [GE] [V], [DW] [T], [E] [D], [J] [IT], Mme [I] [RE], MM [M] [CI], [N] [YM], [O] [YM] et [Y] [NM] ;

Que sa recevabilité à agir dans l'intérêt individuel des onze autres artistes-interprètes n'est pas contestée, non plus que son intérêt à agir pour la défense des intérêts collectifs de la profession ;

Sur le bien fondé des demandes de la SPEDIDAM :

Considérant qu'il incombe à la SPEDIDAM de rapporter la preuve du préjudice subi par chacun des onze artistes-interprètes au nom desquels elle est recevable à demander réparation ; qu'il lui faut donc démontrer que telle de leur prestation a été utilisée sans autorisation dans les trois vidéogrammes litigieux ;

Qu'elle produit à cette fin un document présenté comme la photocopie d'une feuille de présence à une séance d'enregistrement de trois heures, organisée par la société Éditions Baboo au studio [9], ayant eu lieu le vendredi 3 octobre 1969, de 13 heures 30 à 16 heures 30, et ayant pour thème « Arsène Lupin » sans autre précision ; que figurent sur ce document les noms, entre autres artistes-interprètes, de MM [Z] [C], [WB] [L], [M] [CI], [LB] [K], [TP] [LH], [IP] [A], [TW] [B], [G] [NT], [W] [P], [TP] [WH] et [H] [X] ;

Qu'elle verse en outre le décompte des sommes payées par la société Vogue à M. [H] [X] pour sa participation à cette séance, celui des sommes payées au même artiste-interprète au titre d'une séance d'enregistrement d'une durée non précisée ayant eu lieu le lendemain 4 octobre 1969 ainsi que le décompte de la somme payée à M. [TW] [B] au titre de deux séances du 3 octobre 1969 ;

Considérant que ces documents portent tous la mention « Arsène Lupin » sans autre précision telle qu'un titre de chanson ou toute autre indication permettant d'identifier la consistance, la destination ou la durée la musique enregistrée au cours de ces séances ; que la seule mention « Arsène Lupin » ne permet en tout cas nullement d'affirmer que la musique enregistrée ces jours-là serait celle de l'une ou l'autre des chansons ayant servi à illustrer le générique des deux séries d'épisodes, l'une intitulée « L'Arsène », l'autre « Le Gentlemen cambrioleur » ou celle de fonds sonores destinés à accompagner l'action se déroulant dans un épisode déterminé ;

Considérant que, à défaut d'identification précise de la musique à l'enregistrement de laquelle les onze artistes-interprètes en cause ont pris part les 3 et 4 octobre 1969, il est évidemment impossible de déterminer si la prestation qu'ils ont exécutée pendant ces séances a été utilisée pour la sonorisation, en tout ou partie, de l'un des neuf épisodes, sur les vingt six que compte la série, qui ont été reproduits dans les trois vidéogrammes litigieux ;

Considérant que la photocopie de la pochette du disque « [J] [R] chante l'Arsène », sur laquelle ne figure le nom d'aucun des musiciens en cause, alors, de surcroît, que la face 2 de ce 45 tours mentionne celui de [U] [GH] et son orchestre, musicien dont le nom est étranger au présent litige, n'apporte aucun indice supplémentaire ;

Considérant qu'il en résulte, ainsi que l'a exactement jugé le tribunal, que la SPEDIDAM échoue à rapporter la preuve des circonstances nécessaires au succès de ses prétentions ; que la preuve de l'atteinte aux intérêts individuels des artistes-interprètes au nom desquels elle agit n'étant pas rapportée, celle d'une « violation systématique » de la loi ou « d'un refus acharné » de la respecter allégués par la SPEDIDAM à la charge de l'INA et d'une atteinte consécutive aux intérêts collectifs qu'elle a pour mission de défendre ne l'est pas davantage ;

Considérant, en définitive, que la SPEDIDAM sera déboutée de toutes ses demandes ;

Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive :

Considérant que les sociétés DEMD et Europe Image International ne démontrent pas qu'elles auraient subi, du fait de la procédure engagée par la SPEDIDAM, un préjudice distinct de la nécessité d'exposer des frais pour leur défense, ce qui donnera lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure fixée au dispositif ; que leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive sera en conséquence rejetée ;

* *

PAR CES MOTIFS :

REJETTE des débats les pièces n° 21 et 22 communiquées tardivement par l'INA,

CONFIRME le jugement sauf en ce qu'il a dit la SPEDIDAM recevable à agir au nom des vingt-trois artistes-interprètes visés dans ses conclusions ;

Le RÉFORMANT et STATUANT à nouveau de ce seul chef,

DÉCLARE la SPEDIDAM irrecevable à agir au nom des douze artistes-interprètes suivants : MM. [LB] [S], [DT] [C], [BV] [F], [GE] [V], [DW] [T], [E] [D], [J] [IT], Mme [I] [RE], MM [M] [CI], [N] [YM], [O] [YM] et [Y] [NM],

DIT en conséquence que la SPEDIDAM n'est recevable à agir que pour la défense des droits individuels des onze autres artiste-interprète et des intérêts collectifs de la profession,

DÉBOUTE la SPEDIDAM de toutes ses demandes,

DÉBOUTE les sociétés DEMD et Europe Image International de leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

CONDAMNE la SPEDIDAM aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile et à payer , par application de l'article 700 du code de procédure civile, 10.000 euros à l'INA, 7.500 euros à la société DEMD et 7.500 euros à la société Europe Image International.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 09/15631
Date de la décision : 21/09/2011

Références :

Cour d'appel de Paris I1, arrêt n°09/15631 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-09-21;09.15631 ?
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