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21/09/2011 | FRANCE | N°09/10187

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 4, 21 septembre 2011, 09/10187


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 4



ARRET DU 21 SEPTEMBRE 2011



(n° 196 , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 09/10187



Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Janvier 2009

Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2006033411





APPELANTS



Mme [U] [R]

[Adresse 2]

[Localité 5] (Turquie)



représentée par l

a SCP NARRAT PEYTAVI, avoués à la Cour

assistée de Me BONA Isabelle, avocat au barreau de PARIS - toque P411

plaidant pour la SCP SIMON et associés



Société de droit turque ULUSLARARASI MODA YAYINCILIK A...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4

ARRET DU 21 SEPTEMBRE 2011

(n° 196 , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/10187

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Janvier 2009

Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2006033411

APPELANTS

Mme [U] [R]

[Adresse 2]

[Localité 5] (Turquie)

représentée par la SCP NARRAT PEYTAVI, avoués à la Cour

assistée de Me BONA Isabelle, avocat au barreau de PARIS - toque P411

plaidant pour la SCP SIMON et associés

Société de droit turque ULUSLARARASI MODA YAYINCILIK AS

agissant poursuites et diligences de son représentant légal

[Adresse 4]

[Localité 5] (Turquie)

représentée par la SCP NARRAT PEYTAVI, avoués à la Cour

assistée de Me BONA Isabelle, avocat au barreau de PARIS - toque P411

plaidant pour la SCP SIMON et associés

INTIMEE

S.A. MARIE CLAIRE ALBUM

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me OLIVIER Dominique, avoué à la Cour

assistée de Me BUFFET DELMAS d'AUTANE Xavier, avocat au barreau de PARIS toque J068 - plaidant pour la LLP MOGAN LOVELLS, avocats

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 22 juin 2011 en audience publique, après qu'il ait été fait rapport par M.ROCHE, président de chambre, conformément aux dispositions de l'article 785 du Code de procédure civile, devant la Cour composée de :

- M.LE FEVRE, président de chambre, président

- M.ROCHE, président de chambre

- M.VERT, conseiller

Greffier lors des débats : Mme CHOLLET

ARRET

- contradictoire

- prononcé publiquement par M. ROCHE, président

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. ROCHE, président et Mlle BOISNARD, greffier.

LA COUR,

Vu le jugement du 29 janvier 2009 par le Tribunal de Commerce de PARIS qui a, notamment :

- déclaré Mme [R] [U] irrecevable en son action,

- débouté la société ULUSLARARASI MODA YAYINCILIK de l'intégralité de ses demandes,

- débouté la société MARIE CLAIRE ALBUM du surplus de ses prétentions,

- condamné in solidum la société ULUSLARARASI MODA YAYINCILIK et Mme [R] [U] à payer à la société MARIE CLAIRE ALBUM la somme de 100 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Vu l'appel interjeté par la société ULUSLARARASI MODA YAYINCILIK et par Mme [U] et leurs conclusions du 29 juillet 2009 ;

Vu les conclusions de la société MARIE CLAIRE ALBUM du 16 février 2010 ;

SUR CE,

Considérant qu'il résulte de l'instruction les faits suivants :

La société MARIE CLAIRE ALBUM est spécialisée dans le secteur de la presse féminine, et édite notamment les magazines 'MARIE CLAIRE ALBUM' et 'MARIE CLAIRE ALBUM MAISON', en France et à l'étranger.

Son développement international s'effectue soit à travers de 'joint ventures', soit à travers d'accords de licence de marque.

La société de droit turque ULUSLARARASI MODA YAYINCILIK a été en charge de la publication, de l'édition et de la diffusion du magazine 'MARIE CLAIRE' en turc, tout d'abord dans le cadre d'un joint venture avec la société MARIE CLAIRE ALBUM à partir de 1989, puis à travers un accord de licence en date du 16 décembre 1993. Elle a également été chargée de la publication, de l'édition et de la diffusion en turc du magazine 'MARIE CLAIRE MAISON ' à travers un accord de licence de marque en date du 22 décembre 1997.

La société MARIE CLAIRE ALBUM a mis fin, avec effet au 31 décembre 2003, aux accords de licence de marque ci-dessus par deux lettres du 26 juin 2003, en motivant ces résiliations par son souhait de renégocier les termes des accords considérés.

A la suite de discussions entre les deux groupes, les relations se sont poursuivies au-delà de la date du 31 décembre 2003.

Toutefois les désaccords entre les parties ne purent être résolus et, par deux lettres du 28 juin 2004, la société MARIE CLAIRE ALBUM a notifié à la société ULUSLARARASI MODA YAYINCILIK la résiliation des deux accords de licence susmentionnés à effet du 31 décembre 2004. Par la suite, la société MARIE CLAIRE ALBUM a signé de nouveaux accords de licence avec la société GD GAZETTE DERGI du groupe turc MERKEZ, étranger à la cause.

Parallèlement à un contentieux engagé devant les juridictions turques, la société ULUSLARARASI MODA YAYINCILIK et Mme [R] [U], celle-ci étant l'épouse du dirigeant social et actionnaire de cette dernière, ont, par acte du 25 avril 2009, assigné la société MARIE CLAIRE ALBUM devant le Tribunal de Commerce de PARIS aux fins de condamnation pour résiliation fautive de contrats de licence.

C'est dans ces conditions de fait et de droit qu'est intervenu le jugement susvisé présentement déféré.

Sur la demande formée par les appelantes aux fins de rejet des débats des pièces communiquées par l'intimée et numérotées 26-1 à 26-76 et 27-2

Considérant que les pièces considérées et constituées d'articles de presse, dès lors qu'elles n'ont pas fait l'objet d'une traduction en langue française en leur intégralité, ne peuvent qu'être écartées des débats ;

Sur la recevabilité de l'action engagée par Mme [R] [U]

Considérant qu'aux termes de l'article 31 du Code de procédure civile : 'l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prévention...'; que ledit intérêt peut être pécuniaire ou moral dès lors qu'il est né et actuel, légitime et personnel ; que l'existence du droit invoqué par le demandeur n'est pas une condition de recevabilité de son action mais de son succès ;

Considérant, en l'espèce, que Mme [R] [U] ne sollicite pas l'indemnisation d'un préjudice économique généré par la perte de revenus consécutive à la résiliation des licences dont elle aurait été personnellement titulaire mais la seule réparation du préjudice moral subi du fait de la résiliation estimée 'intempestive et fautive' des contrats de licence MARIE CLAIRE et MARIE CLAIRE MAISON par la société intimée ; qu'en effet bénévolement et totalement investie, selon ses dires, dans l'élaboration des deux magazines correspondants en Turquie, la résiliation des contrats de licence permettant leur commercialisation l'aurait personnellement affectée et ce, indépendamment de l'absence, non contestée en tant que telle, de toute titularité sur lesdites licences ; que, dans ces conditions, l'intéressée sera déclarée recevable en son action, le tiers à un contrat pouvant en effet agir sur le terrain quasi-délictuel tout en se fondant sur le préjudice que lui aurait occasionné le manquement allégué de l'une des parties à ses obligations contractuelles et en recherchant la responsabilité de celle-ci au titre de l'article 1382 du code civil ;

Au fond

Sur les demandes des appelantes

en ce qui concerne la résiliation de la licence MARIE CLAIRE

Considérant que, par lettre susmentionnée du 26 juin 2003, la société MARIE CLAIRE ALBUM notifiait à la société ULUSLARARASI MODA YAYINCILIK ' la résiliation, avec effet au 31 décembre 2003 du contrat de licence conclue le 16 décembre 1993 pour la publication en Turquie d'une édition en langue turque de MARIE CLAIRE ' et ce ' afin de permettre une renégociation du contrat de la manière la plus franche et la plus flexible pour les deux parties ' ; que le même courrier précisait que l'intimée était 'désireuse de poursuivre ses relations contractuelles avec la société ULUSLARARASI MODA YAYINCILIK sous réserve qu'un accord acceptable puisse être négocié et accepté par les parties ' ;

Considérant que si les négociations entre les parties se sont alors engagées, celles-ci n'avaient pas abouti à la date d'échéance de l'engagement initial ainsi que le révèle un courriel du 30 janvier 2004 intitulé 'nos propositions pour le contrat de MC' et par lequel la société appelante contestait notamment l'introduction dans le projet de contrat d'un article 14 afférent aux objectifs de revenus annuels qui lui seraient impartis ; qu'aucun élément du dossier ne permet de considérer qu'une quelconque acceptation de la contre proposition envoyée en avril 2004 par la société ULUSLARARASI MODA YAYINCILIK eût fait l'objet d'une acceptation de la part de l'intimée ; que, de même, à la date du 1er janvier 2004 à laquelle il échet de se situer à l'effet d'apprécier l'effectivité de la rencontre des volontés des parties sur le projet de contrat litigieux, la société MARIE CLAIRE ALBUM n'avait pas eu connaissance de l'acceptation par la société MULTIKANAL de son rôle de garant (la délibération du conseil d'administration de l'intéressée autorisant cette garantie ne lui ayant été communiquée que le 22 avril 2004); que l'absence d'accord tant sur le plan des objectifs de vente que sur la garantie à apporter doit être regardé, dans les circonstances en l'espèce et compte tenu de l'importance donnée par les parties à ces deux questions au travers de leurs échanges, comme exclusif de la conclusion d'un nouvel engagement ; que si les appelantes soutiennent, néanmoins, que l'application à compter du 1er janvier 2004 d'un nouveau taux de redevances démontrerait la formation d'un nouveau contrat, il convient, cependant, de relever que l'article 6-2 du contrat initial prévoyait expressément la possibilité pour les parties de réévaluer chaque année et d'un commun accord le montant minimum des redevances à convenir sans pour autant que soit modifié le cadre contractuel lui-même ; que, par suite, et au regard des divergences sus rappelées sur des points jugés essentiels par les parties elles-mêmes, la seule acceptation par la société ULUSLARARASI MODA YAYINCILIK de régler en 2004 des redevances sur des bases réévaluées conformément aux stipulations de l'article 6-2 du contrat ne saurait aucunement valoir accord des sociétés intéressées pour s'inscrire dans un nouvel engagement conventionnel ; que, dès lors, le contrat initial du 1er janvier 1994 doit être regardé comme s'étant prolongé en 2004, et ce pour une année, sa prochaine échéance étant en conséquence fixée au 31 décembre 2004 ; que, dans ces conditions, la résiliation critiquée correspond à la simple mise en oeuvre des stipulations des articles 13 et 14-3 du contrat en vigueur, lesquelles prévoyaient le non-renouvellement de l'engagement sous réserve, dans le cas présent, d'un préavis de six mois et sans qu'il soit besoin de justifier la décision ainsi prise; qu'au surplus il sera observé que la prise de contrôle non contestée de la société ULUSLARARASI MODA YAYINCILIK par la société TMSF au printemps 2004, qui s'est traduit par la prise en main par cet organisme de la direction et de l'administration de la société ULUSLARARASI MODA YAYINCILIK, était, en tout état de cause, de nature à permettre à la société MARIE CLAIRE ALBUM de résilier sans préavis le contrat sur la

base de son article 14-1 c ; qu'ainsi aucune faute ne peut être retenue à l'encontre de l'intimée et les demandes indemnitaires formées par les appelantes à ce titre seront rejetées en leur intégralité ;

en ce qui concerne la résiliation de la licence MARIE CLAIRE ALBUM

Considérant que pour les mêmes raisons que celles ci-dessus énoncées l'accord intervenu entre les parties pour réévaluer le montant des redevances minimum mensuelles afférentes à la licence sus visée ne saurait être révélateur et constitutif de la conclusion d'un nouveau contrat se substituant à celui initialement passé le 22 décembre 1997 et reconduit le 1er janvier 2004 pour une nouvelle période de trois ans expirant le 31 décembre 2006 ; que, par ailleurs, en application de l'article 15-1 du contrat dont s'agit, la cessation du contrat de licence MARIE CLAIRE ouvrait un droit à résiliation sans préavis à la société MARIE CLAIRE ALBUM ; que, par suite, cette dernière était conventionnellement fondée à mettre fin, sur ce fondement expressément visé par la lettre du 28 juin 2004, au contrat relatif à la licence MARIE CLAIRE MAISON ; qu'en accordant pour ce faire un délai de préavis de six mois alors qu'elle était en droit de prononcer une résiliation à effet immédiat l'intimée est même allée au-delà de ses strictes obligations contractuelles ; que la société ULUSLARARASI MODA YAYINCILIK ni Mme [R] [U] ne sauraient ainsi prétendre que ladite résiliation serait abusive et ouvrirait droit à leur profit à octroi de dommages-intérêts ;

sur la rupture des relations commerciales entre les parties et l'application de l'article L 442-6- I 5° du Code de commerce

Considérant qu'en résiliant les deux licences considérées moyennant un préavis de six mois, la société intimée a respecté, outre les stipulations contractuelles sus rappelées, une durée suffisante au regard de l'ancienneté des relations unissant les parties et du temps nécessaire dont devait disposer la société ULUSLARARASI MODA YAYINCILIK pour réorienter son activité et trouver éventuellement de nouveaux partenaires ; que dès lors, les appelantes ne sont pas fondées à exciper de l'article susvisé et d'une quelconque rupture brutale d'une relations commerciale établie qui serait imputable à l'intimée ; qu'il s'ensuit qu'une indemnité ne saurait être allouée à ce titre aux appelantes ;

sur la demande indemnitaire pour 'procédure abusive'

Considérant que les appelantes se sont bornées aux travers de la présente instance à faire valoir leur droit d'ester en justice et le caractère non fondé des moyens avancés par les intéressées n'est pas démonstratif, en tant que tel, d'un abus dans l'exercice du droit considéré ; qu'il convient donc de débouter l'intimée de sa demande susvisée ;

sur la demande aux fins de publication sur la décision dans la presse turque et française

Considérant que ni la nature du contentieux opposant les parties ni les circonstances de l'espèce ne justifie qu'il soit fait droit à la demande de publication ainsi réclamée ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède qu'il y a lieu de confirmer le jugement sauf en ce qu'il a dit Mme [R] [U] irrecevable en son action, de l'infirmer de ce seul chef, de dire cette dernière recevable en son action et de débouter les parties du surplus de leurs prétentions respectives, étant observé que la Cour n'a, en tout état de cause, pas à 'réserver' les droits de quiconque à engager une action en justice ;

PAR CES MOTIFS

Ecarte des débats les pièces communiquées par l'intimée et numérotées 26-1 à 26-76 et

27-2.

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a dit Mme [R] [U] irrecevable en son action.

L'infirme de ce seul chef et statuant à nouveau,

Dit Mme [R] [U] recevable en son action.

Y ajoutant,

Déboute les parties du surplus de leurs prétentions respectives.

Condamne in solidum les appelantes aux dépens d'appel avec recouvrement dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Les condamne sous la même solidarité à verser à l'intimée la somme de 30 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 09/10187
Date de la décision : 21/09/2011

Références :

Cour d'appel de Paris I4, arrêt n°09/10187 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-09-21;09.10187 ?
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