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15/09/2011 | FRANCE | N°09/09969

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 15 septembre 2011, 09/09969


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRÊT DU 15 Septembre 2011



(n° 6 , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/09969 IB



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Octobre 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS RG n° 08/06766





APPELANTE

Mademoiselle [M] [G]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Alain VALENSI, avocat au barreau de PARIS, toque

: P0345 substitué par Me Abderahmen MAYCHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0345







INTIMÉE

SA [O]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Philippe AXELROUDE, avocat a...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRÊT DU 15 Septembre 2011

(n° 6 , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/09969 IB

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Octobre 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS RG n° 08/06766

APPELANTE

Mademoiselle [M] [G]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Alain VALENSI, avocat au barreau de PARIS, toque : P0345 substitué par Me Abderahmen MAYCHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0345

INTIMÉE

SA [O]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Philippe AXELROUDE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0285

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Juin 2011, en audience publique, les parties représentées ne s'y étant pas opposées, devant Madame Isabelle BROGLY, Conseillère, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président

Madame Evelyne GIL, Conseillère

Madame Isabelle BROGLY, Conseillère

GREFFIER : Mademoiselle Séverine GUICHERD, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président et par Polycarpe GARCIA, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA COUR,

Vu l'appel régulièrement interjeté par Mademoiselle [M] [G] à l'encontre du jugement prononcé le 26 octobre 2009 par le Conseil de Prud'hommes de PARIS, section Commerce, statuant en formation de départage sur le litige l'opposant à la SA [O].

Vu le jugement déféré aux termes duquel le Conseil de Prud'hommes :

- a débouté Mademoiselle [M] [G] comme mal fondée en ses demandes.

- a débouté la SA [O] de sa demande reconventionnelle.

- a laissé les dépens à la charge des parties qui les ont engagés.

Vu les conclusions visées par le Greffier et développées oralement à l'audience, aux termes desquelles :

Mademoiselle [M] [G], appelante, poursuit l'infirmation du jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes en toutes ses demandes et demande en conséquence à la Cour :

- de constater :

* que les comptes de la SA [O] pour l'année 2005 laissent apparaître un résultat net supérieur à celui de l'année 2004.

* que la SA [O] n'a effectué aucune recherche et ne lui a fait aucune proposition de reclassement.

* que la SA [O] a refusé de lui indiquer les critères d'ordre de licenciement retenus malgré sa demande.

- de condamner en conséquence la SA [O] à lui verser les sommes suivantes :

principalement :

* 49 746,00 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

subsidiairement :

* 2 072,75 € à titre d'indemnité pour inobservation de la procédure de licenciement.

en tout état de cause :

* 24 873 € pour inobservation de l'ordre des licenciement.

- de dire que ces sommes seront assorties de l'intérêt au taux légal à compter de l'introduction de la demande devant le Conseil de Prud'hommes le 13 septembre 2006.

- d'ordonner la capitalisation desdits intérêts par application des dispositions de l'article 1153 du Code Civil.

- de condamner la SA [O] aux dépens, ainsi qu'à lui verser la somme de 6 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

LA SA [O] poursuit la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions et demande à la Cour :

- de dire et juger bien fondé le licenciement pour motif économique notifié à Mademoiselle [M] [G].

- de dire et juger qu'elle a satisfait à son obligation de reclassement.

- de dire et juger qu'elle a respecté les règles relatives à l'ordre des licenciements.

- de débouter en conséquence Mademoiselle [M] [G] de l'ensemble de ses demandes.

- de condamner Mademoiselle [M] [G] aux dépens, ainsi qu'à lui verser la somme de 4 000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

CELA ETANT EXPOSÉ

Suivant contrat de travail à durée indéterminée, Mademoiselle [M] [G] a été engagée le 2 décembre 1996 par la SA [O], agence de voyage spécialisée dans les voyages vers la Turquie et l'Egypte, sous l'enseigne PACHA TOURS, EDEN et REV VACANCES.

Le 6 janvier 1997, Mademoiselle [M] [G] a pris ses fonctions d'agent de réservation, emploi 111, niveau 1 de la convention collective nationale des agences de voyage et de tourisme applicable.

La durée mensuelle de travail était de 169 heures pour une rémunération brute mensuelle de 976,71 € (6 406,79 €).

Mademoiselle [M] [G], qui exerçait tout d'abord ses fonctions au siège de la SA [O] à [Localité 5], a demandé, pour des raisons personnelles, à être mutée dans la région de [Localité 7].

Par avenant du 1er octobre 2005, la SA [O] a muté Mademoiselle [M] [G] dans la région toulousaine au poste de démarcheur, niveau 3, son salaire brut mensuel étant de 2 072,75 €.

Mademoiselle [M] [G] était chargée de promouvoir les marques PACHA TOURS et REV VACANCES auprès des agences de voyages des départements de la région.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 10 mai 2006, la SA [O] a convoqué Mademoiselle [M] [G] à un entretien préalable en vue de son éventuel licenciement pour motif économique fixé au 17 mai 2006.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 1er juin 2006, Mademoiselle [M] [G] a été licenciée pour motif économique.

SUR CE

Sur la qualification du licenciement

La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est ainsi libellée :

' Au mois d'août 2005, alors que les prévisions semblaient bonnes, les multiples accidents d'avions sur des compagnies charters ont entraîné une psychose se traduisant par une chute continue des réservations individuelles.

Par comparaison à l'année 2004, le nombre de nos réservations a ainsi chuté de 39,16%. Cette situation difficile a été encore aggravée par le choix de nos principales destinations : Turquie et Egypte. A titre d'exemple, la seule destination égyptienne a connu une diminution de 50% de nos réservations en août et septembre 2005, par comparaison à l'année 2004. Pour la marque REV VACANCES, la chute des réservations individuelles a continué durant les quatre premiers mois de l'année en affichant un recul de 35,64% par rapport à 2005.

Cependant, la maîtrise de nos charges fixes et des décisions rapides de gestion nous ont permis de passer, difficilement, le cap de l'année 2005.

Malheureusement, la grippe aviaire qui a touché la Turquie, notre destination principale, (plus de 50% de notre chiffre d'affaires) nous contraint aujourd'hui à prendre des mesures indispensables de réorganisation pour la sauvegarde de notre compétitivité pour éviter une détérioration plus conséquente de notre situation financière (baisse du chiffre d'affaires et des réservations) et lutter contre les difficultés économiques que nous subissons. Nos chaînes de charters avec la compagnie turque ont débuté à la fin avril 2006 au lieu de fin mars 2006 et nous volons avec un ou deux appareils par semaine au lieu de quatre ou cinq par rapport à 2005.

A ce jour, il y a une baisse drastique du portefeuille de réservations individuelles sur la marque PACHA TOURS (Turquie) pour les quatre premiers mois de l'année de 64,12% par rapport à 2005.

Dans ces conditions, nous sommes dans l'obligation de réorganiser au mieux nos services. Cette réorganisation se traduit par une compression d'effectifs qui touche les emplois spécifiques du tourisme et tout particulièrement le service commercial où la charge de travail s'est trouvée réduite du fait des événements précédemment évoqués : la baisse du chiffre d'affaires et des réservations.

Nous nous voyons contraints de supprimer votre poste de démarcheuse.

Conformément à ses obligations, la SA [O] a, avant toute démarche, recherché tant en interne qu'en externe, l'existence des possibilités de reclassement.

Malheureusement, il n'existe aucun poste disponible à ce jour au sein de notre société, ni au sein des sociétés du groupe, confrontées aux mêmes difficultés que les nôtres'.

Sur l'existence du motif économique

Mademoiselle [M] [G] conteste la réalité des difficultés économiques rencontrées par la SA [O]. Elle prétend que ces difficultés ne sont pas sérieuses au motif que la comparaison des comptes sociaux 2004 / 2005 du groupe [O] montre qu'en 2005, le chiffre d'affaires était supérieur à celui de 2004 et que le résultat net était également supérieur en 2005 à celui de 2004. Elle rappelle également que c'est à la date de notification du licenciement que doivent être constatées les difficultés invoquées par l'employeur.

Aux termes de l'article L 1233-3 du Code du Travail, 'constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification refusée par le salarié, d'un élément essentiel de son contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou des mutations technologiques'.

La SA [O] justifie de la réalité des difficultés économiques auxquelles elle prétend avoir été confrontée par les pièces versées aux débats.

C'est ainsi qu'elle justifie que le second semestre 2005 a été très difficile pour l'industrie du tourisme et plus spécifiquement pour elle puisque ses deux principales destinations (Egypte et Turquie) ont été délaissées par deux événements majeurs, à savoir plusieurs crashs d'avions au mois d'août 2005 (les 2, 14, 16 et 23 août) puis durant les mois de septembre, octobre et décembre 2005, ayant créé une véritable psychose et entraînant de fait une chute immédiate et très importante du nombre de ses réservations.

La SA [O] indique d'ailleurs dans la lettre de licenciement, qu'en 2005, le nombre de réservations a chuté de 39,16% par rapport à 2004.

Le 2 janvier 2006, l'expert comptable de la SA [O], Monsieur [F] a écrit à Monsieur [O] afin de l'alerter sur la situation de la société en ces termes : 'en ce début d'année 2006, nous nous permettons de vous rappeler nos différentes conversations durant l'année 2005 et surtout celles du second semestre 2005 au cours duquel nous avons constaté que le tableau des prises de commandes comparativement à 2004 chutent fortement (...). Les décisions, pour réduire vos charges d'exploitation à tous les niveaux et la recherche d'autres destinations, vont à notre avis, dans le bon sens. Toutefois, si le chiffre d'affaires 2005 est supérieur à celui de 2004 ; les effets de la chute significative des commandes du 2ème semestre 2005 s'impacteront obligatoirement sur l'exercice 2006 par une diminution du chiffre d'affaires par rapport à 2005. (...) Sans nous immiscer dans votre gestion, nous avons le sentiment que vous devez aller plus loin dans vos décisions : Nous savons que depuis des mois, vous voulez éviter de licencier mais.....'.

Le tableau des prises de commandes entre le 1er janvier 2004 et le 31 décembre 2005, annexé par Monsieur [F] au courrier précité, montre qu'entre la 28ème semaine (du 2 au 9 juillet) et la 52ème semaine de l'année 2005, la SA [O] a enregistré chaque semaine une baisse importante du nombre de prises de commandes oscillant entre - 21,05% et - 43,24%.

LA SA [O] justifie avoir mis en oeuvre une politique de réduction drastique de ses coûts et de ses frais de fonctionnement notamment:

- en dénonçant le bail dont elle était titulaire à [Localité 6], pour partager les locaux de la société MELIA.

- en gelant les embauches à compter du 3ème semestre 2005, à l'exception de celle d'un employé de saisie recruté en contrat de travail à durée déterminée qui n'a pas été renouvelé.

Cependant au début de l'année 2006, la situation financière de la SA [O] est restée précaire, la situation du tourisme s'étant encore aggravée et notamment les destinations vers la Turquie à la suite d'une série d'attentats meurtriers (13 février et 16 avril 2006) et de la grippe aviaire qui a continué à sévir dans ce pays.

Aux termes d'une attestation versée aux débats, Monsieur [P] [W], Directeur Commercial de la SA [O] témoigne en ces termes : 'la société [O], propriétaire des marques PACHA TOURS et REV VACANCES a dû diviser par deux ses engagements aériens sur vols spéciaux au départ de la France à destination de la Turquie en 2006 par rapport à 2005 en raison de la désaffection de la clientèle causée par les problèmes géopolitiques et sanitaires rencontrées depuis début 2006".

La société [O] justifie qu'elle n'a pas pu compter sur le développement du tourisme en Egypte pour pallier les mauvais résultats de la Turquie en raison d'une série d'attentats survenus en avril 2006.

Dans un courrier du 28 février 2007, Monsieur [F], Expert comptable écrit en ces termes à Monsieur [O] : 'les comptes provisoires arrêtés au 31.12.2006 font apparaître comparativement entre l'exercice 2005 et celui de 2006 une diminution du chiffre d'affaires de 49 338 214 € en 2005 à 27 158 556 € en 2006n soit 44% de baisse...la conséquence à prévoir est un résultat négatif supérieur à 1 400 000 €'.

De fait, selon l'expert comptable et d'après les pièces produites, l'exercice 2006 accuse une baisse de 44% du chiffre d'affaires quoique les charges aient diminué, dont la masse salariale de 24%, la perte étant de 1 619 973 €.

La détérioration des résultats et la réduction importante du chiffre d'affaires permettent à l'évidence d'établir des difficultés économiques.

La perte du chiffre d'affaires constatée au moment du licenciement de Mademoiselle [M] [G] a été confirmée par les résultats en fin d'année.

La sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise au regard des pertes prévisibles, reposant sur des éléments concrets à la date du licenciement, dues au décalage entre la forte chute des commandes effectives depuis août 2005 et se poursuivant durablement en 2006 d'une part, et à l'impact sur le résultat en cours d'autre part, constitue à l'évidence un motif économique de licenciement.

Sur l'obligation de reclassement

Mademoiselle [M] [G] reproche à la SA [O] de ne lui avoir formulé aucune proposition de reclassement.

Il y a lieu de rappeler que l'obligation de reclassement qui pèse sur l'employeur n'est pas une obligation de résultat mais de moyens. Si le reclassement est impossible, l'employeur est réputé avoir satisfait à son obligation de reclassement et par suite, le licenciement pour motif économique est nécessairement fondé.

En l'espèce, la SA [O] justifie qu'aucun poste ne pouvait être proposé à Mademoiselle [M] [G] au sein de la structure : de l'examen du livre d'entrée et de sortie du personnel, il ressort non seulement qu'aucun salarié n'a été embauché par la SA [O] au moment du licenciement de Mademoiselle [M] [G], mais encore que plusieurs salariés ont, comme elle, été licenciés pour motif économique.

Le reclassement de Mademoiselle [M] [G] au sein de la société était donc impossible, ce qu'elle admet implicitement puisqu'elle ne cite aucun poste susceptible de lui avoir été proposé.

Mademoiselle [M] [G] reproche à la SA [O] de ne pas lui avoir proposé le poste correspondant à celui visé dans l'annonce du 14 mai 2006 et de ne pas avoir spécifié dans cette annonce qu'il était impératif de parler la langue turque.

Or, la lecture de cette annonce permet de faire ressortir qu'il s'agit d'une offre publiée par la société MELIA et non par la SA [O]. Au surplus, l'examen du livre d'entrée et de sortie du personnel de la société MELIA révèle que cette société n'a pas poursuivi son processus de recrutement, aucun agent de voyage n'ayant été engagé en mai 2006, époque à laquelle Mademoiselle [M] [G] a été licenciée.

Les recherches effectuées par la SA [O] au sein de deux sociétés cousines, PACHA TOURS INTERNATIONAL et BEYTOURS, se sont avérées infructueuses : l'expert comptable de la première société atteste qu'elle n'emploie plus de salariés depuis 2005. La société BEYTOURS qui est spécialisée dans l'organisation de vols charters vers la Turquie a une clientèle exclusivement composée de travailleurs turcs, de sorte que l'intégralité de ses salariés parle le turc : elle ne pouvait accepter d'engager Mademoiselle [M] [G] qui ne parle pas cette langue.

Aucun poste n'étant disponible, Mademoiselle [M] [G] ne saurait sérieusement reprocher à la SA [O] de ne pas lui avoir adressé d'offres écrites et précises dès lors qu'elles étaient inexistantes.

Enfin, il est acquis aux débats que Mademoiselle [M] [G] n'a pas fait valoir sa priorité de ré-embauchage, étant observé qu'il est établi que les personnes embauchées par la SA [O] après le licenciement de Mademoiselle [M] [G] l'ont été dans le cadre de remplacement de poste à poste.

Par suite, le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a dit fondé le licenciement pour motif économique notifié à Mademoiselle [M] [G].

Sur la régularité de la procédure de licenciement

Sur le non-respect prétendu du délai de cinq jours entre la lettre de convocation et l'entretien préalable

Mademoiselle [M] [G] invoque pour la première fois en cause d'appel et alors que la procédure est pendante depuis plus de cinq ans, l'irrégularité de la procédure de licenciement.

Elle fait valoir que la lettre de convocation à l'entretien préalable qui lui a été adressée le 10 mai ne peut lui avoir été présentée que le 11 ou 12 mai suivant et compte tenu du week-end des 13 et 14 mai 2006, le délai de cinq jours prescrits à l'article L 1233-11 alinéa 3 n'a pu être respecté en l'espèce.

Aux termes de l'article précité, l'entretien préalable ne peut effectivement avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou la remise en main propre de la lettre de convocation.

Peu importe que la SA [O] ne soit plus en possession de l'accusé de réception : en effet, en retenant même la thèse qui lui est la plus favorable, à savoir que Mademoiselle [M] [G] ait été rendue destinataire de la lettre au plus tôt le 11 mai 2006, le délai de cinq jours ouvrables n'a pas pu être respecté, compte tenu du week-end des 13 et 14 mai.

L'inobservation de ce délai est sanctionnée par à l'article L 1235-2 du Code du Travail en ces termes : si le licenciement d'un salarié survient sans que la procédure requise ait été observée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge peut accorder au salarié, à la charge de l'employeur, une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire.

En l'espèce, Mademoiselle [M] [G] ne démontre pas le moindre préjudice résultant de cette irrégularité qu'elle n'a soulevée pour la première fois qu'en cause d'appel.

Elle doit donc être déboutée de sa demande de dommages-intérêts.

Sur le respect de l'ordre des licenciements

Mademoiselle [M] [G] invoque pour la première fois en cause d'appel, après cinq années de procédure, l'existence d'un préjudice certain subi du fait de l'inobservation de toutes les règles relatives à l'ordre des licenciements.

Les critères retenus par l'employeur pour déterminer l'ordre des licenciements doivent prendre en compte les éléments fixés par l'article L 1233-5 du Code du Travail, à savoir les charges de famille, l'ancienneté, la situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile comme le handicap, les qualités professionnelles appréciées par catégories.

L'énumération de l'article L 1233-5 du Code du Travail n'est pas limitative et l'employeur peut la compléter à condition d'avoir pris en compte chacun des critères légaux.

Les critères fixant l'ordre des licenciements doivent être appliqués à l'ensemble du personnel de l'entreprise dans la catégorie professionnelle à laquelle appartient le salarié dont l'emploi est supprimé.

Il est par ailleurs constant que si les critères retenus par l'employeur pour fixer l'ordre des licenciements doivent être communiqués aux salariés concernés, encore faut-il que ces derniers en fassent la demande : en effet, aux termes des dispositions des articles L 1233-17 et R 1233-1 du Code du Travail, le salarié doit présenter sa demande par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge dans les 10 jours suivants la date à laquelle il quitte définitivement son emploi.

L'employeur est tenu d'y répondre, faute de quoi le salarié peut solliciter des dommages-intérêts afin de réparer le préjudice effectivement subi de ce fait.

En l'espèce, contrairement à ce qu'elle soutient, Mademoiselle [M] [G] ne justifie pas avoir demandé à son employeur les critères ayant présidé à la détermination de l'ordre des licenciements. Dans la lettre qu'elle lui a adressée le 7 août 2006, Mademoiselle [M] [G] mentionne seulement que les motifs de son licenciement ne sont pas crédibles, que la société n'a fait aucune démarche pour lui proposer un reclassement et que les critères de licenciement ne sont pas conformes au Code du Travail. Elle conclut qu'elle va saisir le Conseil de Prud'hommes à défaut d'un accord transactionnel à hauteur de 15 mois de salaire.

Il y a lieu de constater qu'à aucun moment, Mademoiselle [M] [G] ne demande à son employeur de lui communiquer la liste des critères d'ordre des licenciements ou de lui transmettre la grille appliquée.

La SA [O] justifie avoir pris en compte l'ensemble des critères légaux pour déterminer quels salariés seraient licenciés dans le cadre de ce licenciement collectif de 8 personnes. De l'examen de la grille qu'elle a élaborée qui est versée aux débats, il ressort :

- qu'elle a réparti le personnel par niveaux en tenant compte des différentes classifications des emplois dans le tourisme.

- qu'elle a ensuite retenu plusieurs critères en appliquant un coefficient à chacun d'eux.

La société démontre ainsi que cette grille a été établie de manière objective à l'ensemble du personnel et que l'application des critères et des coefficients l'a conduite à désigner Mademoiselle [M] [G] pour être licenciée dans la mesure où cette dernière avait obtenu le plus faible nombre de points.

Dans ces conditions, Mademoiselle [M] [G] ne saurait valablement reprocher à la SA [O] d'avoir manqué à ses obligations pour n'avoir pas respecté l'ensemble des règles relatives à l'établissement de l'ordre des licenciements.

Mademoiselle [M] [G] ne peut donc qu'être déboutée comme mal fondée en sa demande de dommages-intérêts pour non-respect des critères d'ordre des licenciements.

Sur les dépens et l'application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile

Succombant en son recours, Mademoiselle [M] [G] sera condamnée aux dépens d'appel et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés, les dispositions prises sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance étant confirmées.

Il y a lieu en équité de laisser à la SA [O], la charge de ses frais non compris dans les dépens par elle exposés devant la Cour.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Déboute la SA [O] de sa demande formée sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Condamne Mademoiselle [M] [G] aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 09/09969
Date de la décision : 15/09/2011

Références :

Cour d'appel de Paris L2, arrêt n°09/09969 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-09-15;09.09969 ?
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