Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 28 JUIN 2011
(no 252, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 11/ 06580
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 22 Mars 2011- Cour d'Appel de PARIS-RG no 10/ 20627
DEMANDEUR AU DÉFÉRÉ
Monsieur Louis-Marc X... ...75008 PARIS représenté par la SCP ARNAUDY ET BAECHLIN, avoués à la Cour assisté de Me Barthélemy LACAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E 0435
DÉFENDEURS AU DÉFÉRÉ
Monsieur Mohamed Z... A... ...75011 PARIS représenté par la SCP NABOUDET-HATET, avoués à la Cour (bénéficie de l'aide juridictionnelle totale no 10/ 53323 accordée le 14 janvier 2011 par le Bureau d'Aide Juridictionnelle de Paris)
Mademoiselle Monique B... ...75011 PARIS représentée par la SCP ALAIN RIBAUT ET VINCENT RIBAUT, avoués à la Cour qui a déposé son dossier
Monsieur Jean-Maurice C... ...75011 PARIS représenté par la SCP HARDOUIN, avoués à la Cour assisté de Me Florence TISSIER, avocat au barreau de PARIS, toque : A 741
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 30 mai 2011, en audience publique, le rapport entendu conformément à l'article 785 du code de procédure civile, devant la Cour composée de :
Madame Brigitte HORBETTE, Conseiller faisant fonction de Président en l'empêchement de Monsieur le Président Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller Mme Marie-Aleth TRAPET, Conseiller venu d'une autre chambre pour compléter la cour en application de l'ordonnance de roulement portant organisation des services de la cour d'appel de Paris à compter du 3 janvier 2011, de l'article R 312-3 du Code de l'organisation judiciaire et en remplacement d'un membre de cette chambre dûment empêché
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mme Noëlle KLEIN
ARRET :
- contradictoire-rendu publiquement par Madame Brigitte HORBETTE conseiller faisant fonction de Président-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.- signé par Madame Brigitte HORBETTE, Président et par Madame Noëlle KLEIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
******************
M. X..., notaire condamné par un jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 22 octobre 2009 à payer diverses sommes à titre de dommages et intérêts à M. E..., d'une part, et d'autre part, ensuite de la nullité de la vente immobilière dont il avait reçu l'acte, à Mme B... et M. Z... A..., in solidum avec M. C..., vendeur, et à garantir celui-ci des condamnations prononcées, a formé appel de ce jugement le 21 octobre 2010 contre M. C..., Mme B... et M. Z... A....
Il a déféré le 6 avril 2011, par voie de conclusions, l'ordonnance rendue le 22 mars 2011 par le magistrat chargé de la mise en état qui a déclaré, en application de l'article 538 du code de procédure civile, son appel " interjeté contre ce jugement rendu au profit de M. Z... A... et de Mme B... " irrecevable comme tardif et l'a condamné à payer à M. C... la somme de 1 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
M. X... conclut au fait : que " la recevabilité de son appel en ce qu'il est dirigé contre M. Z... A... et contre M. C... n'est pas en débat et n'appelle donc aucune décision ", qu'en application des articles 552 et 553 du code de procédure civile il est recevable à intimer M. C... sur son appel du 21 octobre 2010 " du fait de l'indivisibilité entre eux qui résulte de la solidarité des condamnations prononcées " à leur égard, et donc au débouté de M. C... de son incident tendant à l'irrecevabilité et de sa demande d'indemnité de procédure.
Mme B... le 10 mai 2011, comme M. Z... A... le 20 mai 2011 s'en sont rapportés à justice sur les mérites du déféré,
Par conclusions déposées le 27 mai 2011 M. C... sollicite que soit constatée : l'irrecevabilité des conclusions de déféré de M. X..., subsidiairement l'irrecevabilité ou le mal fondé de ses prétentions et la confirmation de l'ordonnance déférée en ce qu'elle a déclaré irrecevable l'appel de M. X... comme tardif, subsidiairement l'irrecevabilité de sa contestation du jugement et de ses conclusions au fond et sa condamnation à lui payer 5 000 € de dommages et intérêts et 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, le tout augmenté des intérêts au taux légal à compter du jour de la demande et capitalisation si les conditions sont réunies.
Par " note en délibéré " déposée le 3 juin 2011 M. X..., arguant de ce qu'il n'a eu connaissance des conclusions de M. C... que le vendredi 27 mai, soit trois jours avant l'audience du lundi 30, le mettant dans l'impossibilité de répondre au moyen d'irrecevabilité de son déféré, indique que la jurisprudence admet le déféré par voie de conclusions et sollicite, si sa note devait être déclarée irrecevable, la réouverture des débats pour permettre aux parties de s'en expliquer contradictoirement,
Par note en délibéré en réponse déposée le 8 juin 2011 M. C... soulève l'irrecevabilité de la note adverse tout en y répondant que la procédure spécifique du déféré ne s'opposait pas à une signification le 27 mai et que le principe du contradictoire a été respecté en indiquant que M. X... a lui-même transgressé ces règles lors de l'introduction de l'incident devant le magistrat de la mise en état,
SUR CE, LA COUR,
Sur la note en délibéré :
Considérant qu'après la clôture des débats les parties ne peuvent déposer aucune note à l'appui de leurs observations, si ce n'est en vue de répondre aux arguments développés par le ministère public ou à la demande du président dans les cas prévus aux articles 442 et 444 du Code de procédure civile ; que tel n'étant pas le cas de la note en délibéré déposée le 3 juin 2011, celle-ci sera écartée des débats ;
Considérant par ailleurs qu'il n'y a pas lieu à réouverture des débats, le délai dans lequel ont été signifiées les conclusions étant, certes, bref, mais suffisant pour répliquer au regard de la procédure, très spécifique, du déféré ;
Sur la recevabilité du déféré :
Considérant que M. C... soutient tout d'abord que les conclusions de déféré seraient irrecevables car leur dispositif est pris au visa de " l'article 916 du décret du 09/ 12/ 2009 " alors que ce décret ne comporte pas d'article 916 et que le nouvel article 916 du code de procédure civile, tel qu'il résulte de ce décret, qui a étendu le domaine du déféré, n'est applicable que depuis le 1er janvier 2011 ; que l'ancien article 914, seul applicable, limitait les possibilités de déféré et imposait qu'il soit introduit par voie de requête et non de conclusions ; que, visant la fin de non recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel ou sa caducité, les conclusions sont irrecevables ;
Considérant cependant que l'article 916 précité, introduit dans le code de procédure civile par le décret du 9 décembre 2009, est bien applicable au présent déféré qui a été soumis à l'examen de la cour le 6 avril 2011, soit à une date à laquelle, comme le souligne avec pertinence M. C..., il était déjà en vigueur ; qu'en outre ce texte, pas plus que ne le faisait l'article 914, n'interdit de déférer une ordonnance de mise en état par voie de conclusions et non de requête, de sorte que l'argumentation de M. C... visant à l'irrecevabilité du déféré est dépourvue de portée ;
Sur le déféré :
Considérant que M. X..., qui rappelle que la recevabilité de son appel à l'égard de Mme B... et de M. Z... A... ne sont pas discutés, soutient que le magistrat de la mise en état a statué ultra petita puisqu'il a déclaré son appel irrecevable à l'endroit de deux personnes qui ne le contestaient pas, le seul ayant soulevé l'irrecevabilité étant M. C... ; que la signification du jugement à lui faite par ce dernier le 25 février 2010, ne l'a pas privé de son droit d'appel, formé le 22 octobre 2010, à l'encontre des deux autres intimés car elle n'a pas eu d'incidence sur le délai courant à leur égard ; que Mme B... n'ayant pas fait signifier le jugement et M. Z... A... l'ayant fait signifier le 22 septembre 2010, son appel est recevable à l'endroit de ces deux personnes ; que nonobstant la signification de M. C... le 25 février, il pouvait encore, du fait de la solidarité entre eux à l'égard de Mme B... et M. Z... A..., l'intimer en application des articles 552 et 553 du code de procédure civile ; que le " corollaire nécessaire de la règle fixée à l'article 552 " est que chaque partie tenue solidairement est recevable à intimer ses co-obligés si elle est recevable en son appel principal, ce qui est conforté par le principe posé par l'article 553 du même code ; que son appel contre M. C... est donc recevable puisqu'il est l'accessoire de son appel principal ; qu'il affirme que, son appel n'étant dirigé que contre les dispositions le condamnant à payement des sommes envers Mme B... et M. Z... A... et non contre celles retenant sa responsabilité et sa garantie de M. C..., auxquelles il acquiesce, la présence de ce dernier en la cause est nécessaire ; qu'il met en avant la difficulté, au fond, qui résulterait de son absence sur l'appréciation du quantum des préjudices par la cour ;
Considérant que, pour s'y opposer, M. C... fait valoir que le magistrat de la mise en état n'a pas statué ultra petita car Mme B... et M. Z... A..., loin d'être passifs lors de l'incident, s'en sont " rapportés à justice " et donc se sont opposés à la demande principale de sorte que reste discuté également l'appel formé par M. X... contre eux, position qu'ils maintiennent en s'en rapportant sur le mérite du déféré ; que le délai d'appel court, selon l'article 528 du code de procédure civile, à compter de la notification du jugement ; que lui-même, comme M. E..., " parties perdantes ", ont signifié le jugement à l'ensemble des autres parties le 25 février 2010 de sorte que le délai d'appel expirait le 25 mars 2010 ; que M. X... n'a de plus pas formé appel incident sur l'appel formé par Mme B... ni ne s'est opposé à son désistement bien qu'il ait constitué avoué ; que l'appel postérieur formé par M. Z... A... n'a pas eu pour effet de faire revivre son droit d'appel ; qu'à la date du 25 mars 2010 M. X... ne disposait plus du droit d'appel contre M. C... quand bien même il le conserverait contre les autres ; que la question de la solidarité, relativement à l'article 552 du code de procédure civile, est étrangère à la recevabilité de l'appel de M. X..., la conservation du droit d'appel prévu par l'alinéa 1er n'ayant pour conséquence que de permettre à une autre partie de former elle-même appel alors qu'ici est envisagée la situation inverse et l'alinéa 2 ne visant que la situation de l'intimé alors que M. X... est appelant ; que l'article 553 du même code n'est pas plus applicable, aucune indivisibilité du litige n'existant entre ce dernier et M. C... puisque la condamnation in solidum a créé une solidarité passive quant à l'obligation à la dette mais que la contribution définitive sera à la charge du seul M. X... ; qu'au surplus, M. X... n'ayant pas intimé M. E... ni ne l'ayant appelé, il n'est plus recevable à contester ni la nullité de la vente ni l'effet des condamnations en découlant et son appel se trouve dépourvu d'objet ; que cet appel est dilatoire et abusif ;
Considérant qu'il est constant que MM. E... et C... ont fait signifier le jugement du 22 octobre 2009 à toutes les parties, dont M. X..., le 25 février 2010, le délai d'appel expirant le 25 mars suivant ; qu'il est également admis par les parties que Mme B..., si elle n'a procédé à aucune signification, a néanmoins formé appel de ce jugement le 17 mars 2010, que M. X... s'est constitué sur cet appel dont Mme B... s'est ensuite désistée sans qu'il s'y oppose, désistement constaté par ordonnance en date du 16 septembre 2010 du magistrat de la mise en état qui a, en conséquence, constaté l'extinction de l'instance et le dessaisissement de la cour ; que si, le 22 septembre 2010, M. Z... A... a, à son tour, signifié la même décision à M. X..., on voit mal comment cette nouvelle signification, postérieure au constat ci-dessus évoqué, serait de nature à faire revivre l'instance en lui permettant de former appel de ladite décision ;
Considérant que Mme B... et M. Z... A..., loin de rester passifs lors de l'incident déféré, ont, tout au contraire, conclu qu'ils s'en rapportaient à justice sur les mérites de cet incident, de sorte que le grief adressé au magistrat de la mise en état selon lequel il aurait statué ultra petita en déclarant irrecevable l'appel de M. X... également à leur encontre manque en fait, le fait de " s'en rapporter " ne valant pas acquiescement, de sorte qu'il ne peut soutenir non plus que la régularité de son appel à leur égard n'est pas discuté ;
Considérant que l'article 552 du code de procédure civile invoqué est ainsi rédigé : " En cas de solidarité ou d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, l'appel formé par l'une conserve le droit d'appel des autres, sauf à ces dernières à se joindre à l'instance. Dans les mêmes cas, l'appel dirigé contre l'une des parties réserve à l'appelant la faculté d'appeler les autres à l'instance. La cour peut ordonner d'office la mise en cause de tous les coïntéressés. " ;
Considérant que M. X... croit pouvoir se prévaloir de ces dispositions alors que, si la condamnation qui le frappe a emporté solidarité avec M. C..., il est appelant unique de celle-ci, de sorte que le premier alinéa n'aurait vocation à s'appliquer, le cas échéant, qu'au bénéfice de M. C... ; que l'application du deuxième alinéa n'est pas plus pertinente dans la mesure où M. X... n'est pas intimé mais appelant ;
Que l'article 553 du même code dispose que : " En cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, l'appel de l'une produit effet à l'égard des autres même si celles-ci ne se sont pas jointes à l'instance ; l'appel formé contre l'une n'est recevable que si toutes sont appelées à l'instance. " ;
Que M. X... ne saurait pas plus y trouver argument alors qu'il n'existe aucune indivisibilité entre lui et M. C... ;
Considérant, dès lors, que, par l'effet de la signification du jugement opérée par MM. E... et C... à M. X... le 25 février 2010, le délai d'appel a couru contre lui à leur égard rendant irrecevable son appel formé contre M. C... le 21 octobre 2010 ;
Que le déféré sera donc rejeté ;
Considérant en outre que la signification du même jugement le 22 septembre 2010, par les soins de M. Z... A..., opérée postérieurement à celle faite à toutes les parties le 25 février 2010, n'a pu avoir pour effet de faire revivre, au profit de M. X..., un droit d'appel dont il ne disposait plus à l'encontre de quiconque, de sorte que c'est justement que l'ordonnance déférée a décidé que l'appel formé par lui, le 22 octobre 2010, tardif, était irrecevable ;
Considérant que M. C... ne démontre pas en quoi le déféré introduit caractériserait un abus de la part de M. X... ; qu'il sera donc débouté de sa demande de dommages et intérêts ;
Considérant que les circonstances légitiment l'octroi, à M. C..., d'indemnités procédurales dans la mesure précisée au dispositif ;
PAR CES MOTIFS,
Déclare irrecevable la note en délibéré,
Rejette le déféré,
Constate en conséquence le caractère définitif de l'ordonnance rendue le 22 mars 2011 par le magistrat de la mise en état,
Condamne M. X... à payer à M. C... la somme de 1 500 € (mille cinq cent euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toute autre demande,
Condamne M. X... aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions sur l'aide juridictionnelle.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT