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22/06/2011 | FRANCE | N°09/08616

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 22 juin 2011, 09/08616


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 22 Juin 2011

(n° 2 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/08616-BVR



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Juin 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS section Commerce RG n° 08/02147





APPELANT

Monsieur [H] [R] [N]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

comparant en personne, assisté de Me Serge LEWISCH,

avocat au barreau de PARIS, toque D1474







INTIMÉE

SAS EADS FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Pierre LUBET, avocat au barreau de PARIS, (de la SELARL ALTANA a...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 22 Juin 2011

(n° 2 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/08616-BVR

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Juin 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS section Commerce RG n° 08/02147

APPELANT

Monsieur [H] [R] [N]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

comparant en personne, assisté de Me Serge LEWISCH, avocat au barreau de PARIS, toque D1474

INTIMÉE

SAS EADS FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Pierre LUBET, avocat au barreau de PARIS, (de la SELARL ALTANA avocats au barreau de PARIS) toque : R021

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Mai 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Conseillère, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Patrice MORTUREUX DE FAUDOAS, Président

Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Conseillère

Madame Claudine ROYER, Conseillère

Greffier : Mme Evelyne MUDRY, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Conseillère, suite à l'empêchement du Président et par Evelyne MUDRY, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

Par jugement en date du 24 juin 2009, auquel la cour se réfère pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes de Paris a débouté Monsieur [H] [R] [N] de sa demande de dommages et intérêts au titre de la rupture de son contrat de travail et pour le surplus de ses réclamations, relatives à des primes sur affaires, ordonné une mesure d'instruction confiée à deux conseillers rapporteurs .

Monsieur [N] a régulièrement relevé appel de ce jugement.

Vu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile et les conclusions des parties régulièrement communiquées, oralement soutenues et visées par le greffe à l'audience du 9 mai 2011conclusions auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé de leurs demandes, moyens et arguments.

******

Il résulte des pièces et des écritures des parties les faits constants suivants.

Monsieur [H] [R] [N], général de l'armée de l'air, a été embauché par la société aérospatiale matra Technologies, absorbée par la SAS EADS en juillet 2000, suivant un contrat à durée indéterminée du 13 juin 2000 en qualité de vice président Defence Affairs du GIE AMLI , position hors cadre.

En contrepartie de son contrat de travail régi par la convention collective nationale de la métallurgie des ingénieurs et cadres, il percevait une rémunération moyenne mensuelle brute de 14.537 euros ,composée d'un fixe et d'une partie variable, qu'il cumulait avec sa pension de général d'un montant mensuel moyen de 6.000 euros..

En avril 2007, la société EADS a mis en place un plan de sauvegarde de l'emploi se traduisant par un projet de suppression de 22 postes et proposé au salarié un départ volontaire dans le cadre de ce plan.

Monsieur [N] a refusé cette proposition.

Le 17 décembre 2007, il a été convoqué à un entretien préalable à une mise à la retraite et le 19 décembre a fait l'objet d'une mise à la retraite d'office sur le fondement des dispositions de l'article 32-1-2 de la convention collective nationale, avec un préavis de 6 mois à compter du 1er janvier 2008.

Le 15 janvier 2008, monsieur [N] a manifesté le souhait d'être dispensé de l'exécution de son préavis à compter du 1er février 2008, souhait auquel la société a accédé suivant courrier du 7 janvier 2008.

Considérant que sa mise à la retraite d'office devait s'analyser en un licenciement abusif, monsieur [N] a saisi le conseil de prud'hommes le 20 février 2008 et demandé le paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail.

MOTIFS

Sur la mise à la retraite

Considérant que monsieur [N] soutient que le plan de sauvegarde de l'emploi ne répondait pas à de réelles justifications économiques et que l'entreprise a utilisé illégalement la procédure de la retraite d'office pour le contraindre à un départ qu'il ne souhaitait pas en contournant les dispositions de la convention collective nationale ;

Considérant tout d'abord que la mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi n'interdit pas la mise à la retraite d'un salarié dès lors qu'il remplit les conditions légales et conventionnelles ;

Qu'en effet si en application de l'article L. 1233-3 du code du travail, l'employeur qui envisage de mettre des salariés à la retraite à l'occasion de difficultés économiques doit observer les dispositions relatives aux licenciements économiques en ce qu'elles impliquent la consultation des représentants du personnel et la mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi lorsque les conditions légales en sont remplies, la décision de mise à la retraite prise par l'employeur ne constitue pas un licenciement ;

Considérant en l'espèce que monsieur [N] a expressément refusé d'adhérer au plan de sauvegarde qui lui a été proposé ainsi qu'aux mesures d'accompagnement prévues en cas de départ volontaire; que sa mise à la retraite d'office et la mise en place du plan social obéissant à deux dispositifs différents, indépendants l'un de l'autre, il n'est pas fondé à critiquer un plan de sauvegarde duquel il s'est volontairement extrait et qui a au demeurant a été régulièrement soumis et discuté avec les représentants du personnel ;

Considérant ensuite que l'article 31-2-1 de la convention collective nationale de la métallurgie des ingénieurs et cadres prévoit la possibilité pour l'employeur de mettre à la retraite un ingénieur ou un cadre qui, ayant atteint au moins l'âge fixé au 1er alinéa de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale, peut bénéficier d'une pension de vieillesse à taux plein au sens du code de la sécurité sociale et qui peut faire liquider sans abattement les retraites complémentaires AGIRC et ARRCO auxquelles l'employeur cotise avec lui sur les tranches A et B des rémunérations ;

Qu'une telle mise à la retraite ne constitue pas un licenciement lorsqu'elle s'accompagne de l'une des 6 dispositions listées dont notamment

la conclusion par l'employeur d'un contrat de travail à durée indéterminée ;

Que le même texte prévoit qu''à la demande écrite de l'ingénieur ou cadre mis à la retraite, l'employeur doit justifier .....du contrat à durée indéterminée...en communiquant à l'intéressé soit le nom du titulaire du contrat conclu ou maintenu, si celui-ci ne s'y oppose pas, soit son identification codée.

Et considérant que la société a respecté les dispositions conventionnelles puisqu'il est acquis d'une part que monsieur [N] était, âgé au moment de la rupture de son contrat de travail, de 64 ans et qu'il bénéficiait d'une retraite à taux plein qu'il percevait déjà ;

Que d'autre part, la société EADS a effectivement procédé à compter du 1er février 2008 à l'embauche par un contrat à durée indéterminée d'un salarié, monsieur [K], en qualité de cadre position III indice 135, au siège d'EADS où travaillait monsieur [N] ; que le lien entre ce contrat de travail et la mise à la retraite de monsieur [N] était clairement mentionné dans le corps du contrat sous cette forme : cette embauche accompagne la mise à la retraite d'un salarié de l'établissement (matricule 5094262) ;

Que le fait que le salarié ait été antérieurement salarié de la société Airbus, filiale de la société EADS, elle même en difficulté financière, ne déroge pas aux dispositions conventionnelles dès lors que monsieur [K] a occupé des fonctions réelles au sein de sa nouvelle entreprise ;

Considérant en conséquence, la mise à la retraite de monsieur [N] ayant été mise en oeuvre conformément aux dispositions légales et conventionnelles, c'est à bon droit par une motivation pertinente, que le conseil de prud'hommes a débouté le salarié de sa demande de requalification de sa mise à la retraite en licenciement ;

sur les primes sur affaires

Considérant qu'au titre de son contrat de travail, la rémunération de monsieur [N] était composé d'un fixe annuel de 138.000 euros et d'un complément variable en fonction des objectifs individuels et collectifs comprise entre 0 et 30% du forfait annuel auquel s'ajouteront des primes sur affaires calculées selon les modalités en vigueur au sein du GIE AMLI ;

Considérant qu'au titre de sa part variable, monsieur [N] a perçu 69.215 euros en 2006, 32.568 euros en 2007 et 51.257 euros en 2008 ;

Considérant qu'il estime être créancier d'une somme globale de 200.000 euros au titre de primes sur affaires qui auraient dû lui être payées en contrepartie du rôle déterminant dans 4 affaires importantes qu'il indique avoir menées dans l'intérêt de EADS;

Considérant tout d'abord que ces primes sur affaires, qui se distinguent de la part variable sur objectifs versée à monsieur [N] n'avaient, au termes de leur libellé, aucun caractère d'automaticité et étaient versés au cas par cas au salarié pour une contribution déterminante et directe au gain des affaires ;

Considérant ensuite que le salarié ne produit pas une seule pièce démontrant qu'il ait apporté les affaires qu'il revendique par une intervention directe et décisive dans la conclusion des contrats , soit en les ayant générés lui même, comme il le soutient, par ses contacts avec les autorités militaires dans le monde entier soit qu'il ait accompagné leur émergence en positionnant EADS dès l'origine de l'expression du besoin par les utilisateurs ;

Considérant que s'agissant de la vente de 8 avions de transport militaire à l'Afrique du sud l'employeur indique sans être contredit que la commande avec ce pays a été annulée ;

Que sur la vente de 5 avions ravitailleurs à l'Australie, la preuve d'une contribution individuelle de monsieur [N] n'est pas rapportée, ce dernier reconnaissant d'ailleurs lui même que ce sont les qualités de l'avion A330 qui ont emporté la conviction notamment des militaires australiens à l'issue d'une démonstration de vol à [Localité 5];

Que sur la vente de 3 avions ravitailleurs aux Emirats Arabes, le fait que monsieur [N] se soit rendu très souvent aux Emirats, de tels contacts ressortissant de ses missions, n'est pas de nature à établir, comme il le soutient, qu'il a eu une action déterminante dans la conclusion de ces contrats à haute sensibilité politique notamment par le biais d'études opérationnelles qu'il aurait rédigées ;

Qu'enfin relativement à la vente de 18 hélicoptères à la Bulgarie, il reste vain dans la démonstration de la preuve qu'une visite organisée par ses soins à l'attention des hautes militaires bulgares et notamment du général Georgiev aurait seule convaincu les autorités de ce pays d'acquérir des hélicoptères Cougar et Panther ;

Considérant en définitive, que si monsieur [N] a conformément à ses fonctions apporté sa contribution en support des actions politiques commerciales et stratégiques qui ont conduit à la conclusion des ces différents contrats, et pour lesquelles il a perçu des bonus contractuels récompensant ses participations, aucun élément n'établit que ses contributions justifient en sus le paiement de primes sur affaires revendiquées;

Qu'il sera donc débouté de sa demande de ce chef ;

sur le rappel de salaire

Considérant que la part variable de la rémunération de monsieur [N] était fonction des objectifs individuels et collectifs comprise entre 0 et 30% du forfait annuel ;

Considérant que monsieur [N] sollicite le versement d'une somme de 6.087 euros au titre d'un complément de part variable liés à ses résultats individuels pour 2007 ( 2.435 euros) et 2008 (3.652 euros);

Qu'il prétend que les bonus versés en 2007 (21.915 euros ) et 2008 (20.698 euros)au titre de cette part variable étaient inférieurs à ceux versés en 2006 (24.350 euros);

Mais considérant que la part variable étant précisément réglée non de manière fixe mais en fonction des objectifs qu'il n'a atteint qu'à concurrence de 90% et 85 % pour ces deux années, monsieur [N] n'est pas fondé à réclamer le versement de la part variable qu'il aurait perçu à 100% d'objectifs atteints comme l'année précédente ; qu'il sera donc débouté de sa demande ;

sur l'indemnité de mise à la retraite

Considérant qu'il résulte de l'article L1237-7 du code du travail que la mise à la retraite d'un salarié lui ouvre droit à une indemnité de mise à la retraite au moins égale à l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9 du code du travail ;

Qu'aux termes de l'article L.1234-9,

les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail;

Considérant comme l'indique le certificat de travail remis par l'employeur que la rupture du contrat de travail de monsieur [N] est intervenue le 30 juin 2008 et non le 1er février 2008;

Que l'année de référence sur le fondement de laquelle devait être calculée son indemnité de retraite conventionnelle ne pouvait qu'être celle comprise entre le 1er juin 2007 et le 30 juin 2008 et devait intégrer la part variable, versée en avril 2008;

Que monsieur [N] est donc fondé à obtenir le rappel qu'il réclame, à hauteur de 4.998 euros ;

Considérant que le salarié qui succombe pour l'essentiel, sera condamné aux dépens et versera une indemnité de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à la SAS EADS France ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a débouté monsieur [N] de sa demande au titre de rappel d'indemnité de départ à la retraite,

Statuant à nouveau de ce seul chef

Condamne la SAS EADS France à verser au salarié une somme de 4.998 euros à titre de rappel d'indemnité de retraite,

Déboute le salarié de toutes autres demandes,

Alloue à la SAS EADS France une indemnité de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne monsieur [N] aux dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 09/08616
Date de la décision : 22/06/2011

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°09/08616 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-06-22;09.08616 ?
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