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09/06/2011 | FRANCE | N°10/09707

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 3, 09 juin 2011, 10/09707


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 3



ARRÊT DU 09 JUIN 2011



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 10/09707



Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Mars 2010 - Tribunal d'Instance de PARIS 15ème arrondissement - RG n° 11-09-000146





APPELANTS :



- Monsieur [R] [Z]



- Madame [L] [Z]



demeurant tous deux [Ad

resse 1]



représentés par la SCP FANET SERRA, avoués à la Cour

assistés de Me Florence BRASSEUR, avocat au barreau de PARIS, toque : C 2322







INTIMÉE :



- SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE KERDILES...

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 3

ARRÊT DU 09 JUIN 2011

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/09707

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Mars 2010 - Tribunal d'Instance de PARIS 15ème arrondissement - RG n° 11-09-000146

APPELANTS :

- Monsieur [R] [Z]

- Madame [L] [Z]

demeurant tous deux [Adresse 1]

représentés par la SCP FANET SERRA, avoués à la Cour

assistés de Me Florence BRASSEUR, avocat au barreau de PARIS, toque : C 2322

INTIMÉE :

- SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE KERDILES prise en la personne de ses représentants légaux

ayant son siège social [Adresse 1]

représentée par la SCP VERDUN - SEVENO, avoués à la Cour

assistée de Me Leslie SMIETANA, avocat au barreau de PARIS, toque : C 950

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Avril 2011, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle REGHI, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Isabelle REGHI, faisant fonction de présidente en remplacement de Madame Nicole PAPAZIAN, en application de l'ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Paris du 1er avril 2011

Madame Michèle TIMBERT, conseillère

Madame Claude JOLY, conseillère, en remplacement de Madame [D] [E] en application de l'ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'appel de Paris du 1er avril 2011

qui en ont délibéré

Greffière

lors des débats et du prononcé : Mademoiselle Béatrice PIERRE-GABRIEL

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle REGHI, faisant fonction de présidente et par Mademoiselle Béatrice PIERRE-GABRIEL, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

************************

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par acte sous-seing privé du 21 janvier 1989, la société Kerdiles a donné en location à Mme [Z] et M. [Z] un appartement situé [Adresse 1].

M. [Z] a été salarié de la société Kerdiles en qualité d'employé d'immeuble de 1978 à 2004 et Mme [Z] a été salariée en la même qualité de décembre 2004 jusqu'au 18 octobre 2008, date de son licenciement.

Par acte du 5 juillet 2006, la société Kerdiles a donné congé à Mme [Z] et M. [Z] au motif qu'elle entendait exécuter des travaux de rénovation, de restructuration et d'amélioration du bâtiment nécessitant la libération des lieux loués.

Par acte sous-seing privé du 13 février 2007, à effet du 1er mars 2007 et pour une durée stipulée de 18 mois, la société Kerdiles a donné en location à Mme [Z] et M. [Z] le même appartement du [Adresse 1].

Par acte du 26 juin 2008, la société Kerdiles a donné congé à Mme [Z] et M. [Z] au motif de la survenance de l'évènement prévu.

Par acte du 8 janvier 2009, la société Kerdiles a fait assigner Mme [Z] et M. [Z] en expulsion et en paiement de loyers devant le tribunal d'instance du 15ème arrondissement de Paris qui, par jugement du 24 mars 2010, assorti de l'exécution provisoire, a :

- validé le congé délivré le 31 janvier 2007 pour le bail signé le 21 janvier 1989,

- dit que le bail signé le 13 février 2007 a été conclu pour une durée de 3 ans, à effet au 1er mars 2007,

- validé le congé délivré le 26 juin 2008 avec effet au 28 février 2010 pour le bail signé le 13 février 2007,

- ordonné l'expulsion de Mme [Z] et M. [Z],

- fixé le montant de l'indemnité d'occupation mensuelle due solidairement par Mme [Z] et M. [Z] au montant du loyer et des charges,

- sursis à statuer sur les demandes des parties relatives à la dette locative jusqu'à la date de mise à disposition du jugement du Conseil d es prud'hommes statuant sur le litige opposant les mêmes parties,

- rejeté les autres demandes,

- réservé les dépens.

Par déclaration du 30 avril 2010, Mme [Z] et M. [Z] ont fait appel du jugement.

Dans leurs dernières conclusions, signifiées le 17 mars 2011, Mme [Z] et M. [Z] demandent :

- le prononcé du sursis à statuer dans l'attente des arrêts de la chambre sociale de la Cour d'appel sur l'appel formé contre le jugement du conseil de prud'hommes

subsidiairement :

- de constater que le bail du 21 janvier 1989 a été tacitement reconduit,

- de constater l'illicéité du contrat de renouvellement du 13 février 2007 et de la notification du 26 juin 2008,

- la condamnation de la société Kerdiles au paiement de la somme de 30 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral et matériel,

- sa condamnation au paiement de la somme de 2 990 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions, signifiées le 3 janvier 2011, la société Kerdiles demande :

- l'infirmation partielle du jugement,

- la condamnation de Mme [Z] et M. [Z] au paiement à compter du 1er janvier 2009 d'une indemnité d'occupation mensuelle de 720 € outre les charges,

- leur condamnation au paiement de la somme de 26 736,76 € au titre des loyers et des charges dus au 17 décembre 2008,

- leur condamnation au paiement de la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, qui pourront être recouvrés par la SCP Verdun Seveno, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 7 avril 2011.

Par conclusions signifiées le 21 avril 2011, Mme [Z] et M. [Z] demandent la révocation de l'ordonnance de clôture.

CELA EXPOSE, LA COUR

Considérant que, le 7 avril 2011, la société Kerdiles a produit deux nouvelles pièces ; que Mme [Z] et M. [Z], qui entendent produire deux pièces en réplique, sont donc fondés à demander la révocation de l'ordonnance de clôture, qui sera reprise au 29 avril 2011 ;

Considérant que la demande de sursis à statuer formée par Mme [Z] et M. [Z] dans l'attente de la décision de la Cour d'appel saisie du jugement du Conseil de prud'hommes est motivée par leur demande de voir qualifier le logement occupé par eux d'accessoire du contrat de travail ;

Considérant toutefois que le bail conclu entre les parties le 21 janvier 1989 n'est en aucune de ses stipulations qualifié d'accessoire d'un contrat de travail ; que la circonstance invoquée par Mme [Z] et M. [Z] selon laquelle la dette locative alléguée par la société Kerdiles pourrait se trouver compensée, partiellement ou totalement, par la créance salariale dont ils disposeraient ne suffit pas à justifier le sursis à statuer, la compensation pouvant toujours s'opérer dès l'instant où les deux dettes se trouvent exister à la fois ; que la demande de sursis doit donc être rejetée ;

Considérant que, malgré le départ des lieux des locataires, chacune des parties a intérêt à voir statuer sur la validité des congés délivrés ;

Considérant que, le 5 juillet 2006, la société Kerdiles a délivré un congé à Mme [Z] et M. [Z] au motif qu'elle entendait exécuter des travaux de rénovation, de restructuration et d'amélioration du bâtiment nécessitant la libération des lieux loués ;

Considérant que le bailleur peut délivrer, pour ce motif, un congé à ses locataires, à condition de prouver son intention réelle d'exécuter les travaux invoqués, par des documents précis permettant d' en apprécier l'ampleur et la portée ; que la réalité du motif doit s'apprécier au moment de la délivrance du congé, même si des éléments postérieurs peuvent venir la confirmer ; qu'en l'espèce, les seules pièces produites par la société Kerdiles sont une étude de faisabilité et des permis de démolir datés des 18 septembre 2008 et 31 août 2009 ; que la société Kerdiles ne produit aucun élément permettant d'établir qu'à la date de délivrance du congé, elle avait engagé un quelconque début d'étude de projet ou matérialisé par tout autre document son intention de réaliser les travaux alléguée ; que le congé étant nul, le contrat du 21 janvier 1989 s'est trouvé tacitement reconduit pour une période de 3 ans à compter du 31 janvier 2007 ;

Considérant que, nonobstant ce renouvellement tacite du bail à compter du 31 janvier 2007, les parties ont conclu, le 13 février 2007, un acte fixant une durée du contrat à 18 mois au motif d'exécution de travaux, de restructuration et de rénovation du bâtiment ; que la société Kerdiles soutient qu'il était motivé par une raison professionnelle au sens de l'article 11 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, l'exécution de travaux ayant la double finalité de valoriser le patrimoine immobilier de la société et d'augmenter en conséquence les revenus locatifs perçus par les associés ;

Considérant toutefois que c'est par des motifs pertinents que le premier juge a relevé que les deux conditions cumulatives prévues à l'article 11 de la loi susvisée permettant de réduire la durée du bail n'étaient pas remplies en l'espèce ; qu'en effet, la mention de l'exécution de travaux ne constitue pas l'événement précis légalement requis, aucun permis de démolir n'ayant été encore octroyé à la date de conclusion du contrat et cette exécution ne correspond pas à une raison professionnelle, celle-ci ne pouvant exister que dans la personne d'un des membres de la société, conformément aux dispositions de l'article 13 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 qui précise que les dispositions de l'article 11 peuvent être invoquées par la société seulement au profit de l'un des associés ; qu'ainsi, l'acte conclu le 13 février 2007 qui avait, en violation des dispositions d'ordre public de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, pour but de réduire la durée du contrat, doit être annulé, ainsi que le congé délivré sur son fondement le 26 juin 2008 ; qu'en conséquence, le bail du 21 janvier 1989 est réputé avoir conservé la durée légale prévue à l'article 10 de la loi susvisée et s'être donc renouvelé à compter du 31 janvier 2007 pour une période de 3 ans;

Considérant que Mme [Z] et M. [Z] justifient de l'existence du préjudice que leur ont causé la délivrance des deux congés, l'expulsion dont ils ont été l'objet après une longue occupation des lieux et les frais de déménagement auquel ils ont été contraints, outre le préjudice moral né de l'impossibilité, du fait de leur départ des lieux loués, de rester à proximité de leur fils et belle-fille et de les assister lors de la naissance de leurs enfants ; qu'il sera fait une exacte appréciation du préjudice ainsi subi en condamnant la société Kerdiles au paiement de la somme de 15 000 € à titre de dommages et intérêts ;

Considérant qu'en ce qui concerne la dette locative, la société Kerdiles fournit un décompte remontant à 1978 alors que le bail, objet du présent litige, date de 1989 ; qu'il y a lieu d'ordonner la réouverture des débats pour enjoindre à la société Kerdiles de produire un décompte faisant apparaître les sommes dues et les sommes versées au titre des loyers à compter du bail initial ; qu'il doit être, en conséquence, sursis à statuer sur la demande en paiement des loyers et charges, sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens.

PAR CES MOTIFS

Ordonne la révocation de l'ordonnance du 7 avril 2011 et prononce la clôture au 29 avril 2011 ;

Infirme le jugement,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Annule le congé délivré le 5 juillet 2006, le contrat conclu le 13 février 2007 et le congé délivré le 26 juin 2008 ;

Dit que le bail du 21 janvier 1989 a été reconduit tacitement par périodes de trois ans ;

Condamne la société Kerdiles au paiement à Mme [Z] et M. [Z] de la somme de 15 000 € à titre de dommages et intérêts,

Sursoit à statuer sur la demande en paiement au titre des loyers et des charges, sur la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et sur les dépens,

Révoque l'ordonnance de clôture du 29 avril 2011 et ordonne la réouverture des débats,

Renvoie à cette fin l'affaire à la mise en état et fait injonction à la société Kerdiles de produire un décompte des loyers et charges dus correspondant au bail du 21 janvier 1989,

Fixe la nouvelle ordonnance de clôture au 22 septembre 2011 et l'audience des plaidoiries au 6 octobre 2011 à 14 h.

LA GREFFIÈRE LA CONSEILLÈRE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 10/09707
Date de la décision : 09/06/2011

Références :

Cour d'appel de Paris G3, arrêt n°10/09707 : Décision tranchant pour partie le principal


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-06-09;10.09707 ?
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