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09/06/2011 | FRANCE | N°09/03596

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 09 juin 2011, 09/03596


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 5



ARRET DU 09 JUIN 2011



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 09/03596



Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Janvier 2009 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2007060182





APPELANTE



SA DEVANLAY

ayant son siège : [Adresse 3]



représentée par la SCP FANET SERRA, avo

ués à la Cour

assistée de Me Cyril BOURAYNE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0369, plaidant pour la SCP DIZIER & BOURAYNE,





INTIMEE



Association Loi de 1901 DES PARALYSES DE FRANCE

ayant s...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRET DU 09 JUIN 2011

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/03596

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Janvier 2009 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2007060182

APPELANTE

SA DEVANLAY

ayant son siège : [Adresse 3]

représentée par la SCP FANET SERRA, avoués à la Cour

assistée de Me Cyril BOURAYNE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0369, plaidant pour la SCP DIZIER & BOURAYNE,

INTIMEE

Association Loi de 1901 DES PARALYSES DE FRANCE

ayant son siège : [Adresse 1]

pris en son établissement AFP PRODUCTION

ayant son siège social : [Adresse 2]

représentée par la SCP LAGOURGUE - OLIVIER, avoués à la Cour

assistée de Me Hélène VAN HOYLANDT-PERRIN, avocat au barreau de CHALONS EN CHAMPAGNE, plaidant pour la SELARL AVOCATS SOCIETE JURIDIQUE ET FISCALE DE CHAMPAGNE,

COMPOSITION DE LA COUR :

Après le rapport oral de Madame Patricia POMONTI, Conseillère et conformément aux dispositions de l'article 785 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Avril 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Colette PERRIN, Présidente

Madame Janick TOUZERY-CHAMPION, Conseillère

Madame Patricia POMONTI, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mademoiselle Anne BOISNARD

ARRET :

- contradictoire

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Colette PERRIN, présidente et par Mademoiselle Anne BOISNARD, greffier des services judiciaires auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS CONSTANTS ET PROCEDURE

La SA Devanlay a pour objet la création, la fabrication et la distribution de vêtements de marque Lacoste.

L'Association des Paralysés de France (APF) a quant à elle pour mission le soutien, la défense et l'insertion des personnes atteintes de déficience motrice.

Le 1er septembre 2004, la société Devanlay et l'établissement de l'APF de [Localité 4], dénommé APF Production, ont souscrit une convention de prestation de services, la société Devanlay ayant décidé de sous-traiter la saisie informatique de sa comptabilité fournisseurs à des travailleurs handicapés.

Ledit contrat a été conclu pour une durée d'une année renouvelable par tacite reconduction pour une même durée à chaque date anniversaire du 31 décembre. Le contrat a ainsi été renouvelé tacitement les 1er janvier 2006 et 2007 pour de nouvelles périodes d'un an, la dernière ayant donc en principe pour terme le 31 décembre 2007.

Quatre des cinq salariés affectés à ce service ont remis leur démission le 30 avril 2007, leur départ étant prévu pour le 31 mai 2007.

L'APF Production a alors indiqué à la société Devanlay avoir initié une phase de recrutement afin de remplacer ces quatre salariés dans les meilleurs délais.

Par courrier recommandé en date du 11 mai 2007, la société Devanlay a signifié à l'APF Production sa décision de mettre fin à leur partenariat à compter du 31 mai 2007.

Par lettre recommandé AR reçue par la société Devanlay le 1er juin 2007, l'APF Production a mis en demeure la société Devanlay de lui adresser dans un délai de 8 jours le règlement de la somme de 87.500 euros correspondant aux sept mensualités de 12.500 euros HT dont elle estimait la société Devanlay redevable pour avoir résilié le contrat avant le terme du 31 décembre 2007.

La société Devanlay ayant refusé de procéder à ce règlement, l'APF Production a assigné cette dernière, par acte en date du 2 août 2007, afin d'obtenir sa condamnation au paiement de la somme de 87.500 euros avec intérêts au taux légal à compter du 30 mai 2007.

Par jugement du 28 janvier 2009, non assorti de l'exécution provisoire, le tribunal de commerce de Paris, estimant qu'en mettant un terme à la relation contractuelle dès le 31 mai 2007, la société Devanlay avait commis une faute qui a causé à l'APF Production un préjudice direct puisque cette dernière attendait de l'exécution de ce contrat une contrepartie financière, a :

- condamné la société Devanlay à payer à l'APF prise en son établissement APF Production la somme de 87.500 euros à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter du 30 mai 2007,

- condamné la société Devanlay à payer à l'APF prise en son établissement APF Production la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LA COUR

Vu l'appel interjeté par la SA Devanlay en date du 18 février 2009.

Vu les dernières conclusions signifiées le 17 janvier 2011 par lesquelles la SA Devanlay demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris,

statuant à nouveau,

- débouter l'APF de toutes ses demandes,

- condamner l'APF à payer à la société Devanlay la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La SA Devanlay soutient que l'article 5 alinéa 2 du contrat, qui n'est contraire à aucune disposition d'ordre public et qui manifeste la volonté claire et non équivoque des parties de permettre la résiliation anticipée du contrat à tout moment et sans indemnité financière, doit recevoir entière application, conformément à l'article 1134 du code civil.

Elle estime, dès lors, qu'il ne peut lui être reproché d'avoir résilié de façon anticipée le contrat la liant à l'APF Production.

La société Devanlay ajoute que si elle n'a pu respecter qu'un délai de prévenance d'un peu moins d'un mois, c'est en raison du fait même de son cocontractant qui n'était pas en mesure, à compter du 1er juin 2007, d'assurer les prestations contractuellement prévues dans des conditions satisfaisantes.

La société Devanlay soutient à ce titre que l'urgence dans laquelle était réalisé le remplacement de quatre des cinq personnes de l'équipe mettait nécessairement en péril l'exécution des prestations sous-traitées par elle et par conséquent une partie de sa gestion et de son activité commerciale, et fait valoir que l'APF Production doit être considérée comme étant seule à l'origine de la rupture du contrat du 1er septembre 2004.

La SA Devanlay fait valoir, en tout état de cause, que l'APF Production ne rapporte pas la preuve qui lui incombe d'avoir subi un quelconque préjudice.

Vu les dernières conclusions signifiées le 2 février 2011 par lesquelles l'APF demande à la cour de :

- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 28 janvier 2009 en toutes ses dispositions et notamment en ce qu'il a condamné la société Devanlay à verser à l'APF la somme de 87.500 euros à titre de dommages et intérêts, assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 mai 2007, date de la mise en demeure,

- condamner au surplus la société Devanlay à lui verser la somme de 6.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'APF Production soutient qu'en application du contrat, la volonté de résiliation exprimée par la société Devanlay par lettre du 11 mai 2007 ne pouvait prendre effet que le 31 décembre suivant et qu'à défaut, une partie qui entend mettre un terme à la relation contractuelle, sans en respecter les formes et termes, commet une faute contractuelle source de responsabilité.

L'APF Production fait valoir en outre que la société Devanlay n'avait subi et n'allait subir aucun désagrément ni difficulté dans la réalisation de la mission confiée à l'APF et qu'en l'absence de grief, la société Devanlay ne peut invoquer une rupture aux torts de l'association.

Elle ajoute qu'il y a nécessairement une relation de causalité directe entre la faute consciente et volontaire de la société Devanlay et le préjudice subi constitué pour l'APF par la perte de la contrepartie financière jusqu'au terme du contrat, du 1er juin au 31 décembre 2007.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions initiales des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Le contrat signé entre les parties le 1er septembre 2004 dispose en son article 5 que la 'convention est conclue pour une durée d'une année et a pris effet le 01/09/2004 pour se terminer le 31/12/2005. Elle sera renouvelable tacitement pour des périodes successives d'un an'.

Il est prévu qu'elle 'pourra être résiliée à tout moment par Devanlay ou APF Production moyennant un préavis d'au moins trois mois notifié par écrit, sans indemnité de part et d'autre'.

Le contrat, qui fait la loi entre les parties comporte donc une clause de tacite reconduction qui donne naissance chaque année à un nouveau contrat à durée déterminée.

Contrairement à l'analyse que voudrait en faire la SA Devanlay, la clause de résiliation doit être lue en tenant compte de l'ensemble des dispositions de l'article 5 et de l'économie générale du contrat et ne permet pas à l'une ou l'autre des parties de mettre fin au contrat, de façon unilatérale et discrétionnaire avant l'arrivée du terme prévu.

C'est à juste titre que les premiers juges ont relevé qu'il résultait de la nature même du contrat que le délai prévu à l'article 5 alinéa 2 ne pouvait s'analyser que comme un délai de prévenance imposé avant toute reconduction.

C'est à dire que chacune des parties disposait de la faculté de mettre fin à tout moment au contrat en cours, mais seulement pour son terme défini, et sous réserve d'en informer préalablement son cocontractant avec un préavis d'au moins trois mois.

Dès lors, la résiliation annoncée par la SA Devanlay le 11 mai 2007 ne pouvait prendre effet qu'à compter du 31 décembre suivant , seul un motif grave pouvant justifier une résiliation avant le terme prévu.

Or, le départ anticipé de quatre des cinq salariés mis à la disposition de la SA Devanlay par l'APF Production ne pouvait en soi constituer une faute contractuelle.

La réalisation de la prestation de service de saisie de données comptables, objet du contrat, n'impliquait aucun 'intuitu personae', la convention ne faisant référence à aucune obligation de mise à disposition de salariés nominativement désignés et l'APF Production disposant d'une liberté totale d'organisation pour assurer sa prestation.

L'association pouvait donc prendre toutes mesures utiles afin de remédier au départ des salariés mis à la disposition de la SA Devanlay, notamment l'embauche de nouveaux salariés.

Comme le souligne l'APF Production, trois personnes demeuraient immédiatement disponibles pour assurer la transition, la chef de groupe formée à la polyvalence sur les différents postes de cette prestation, une salariée formée pour les cas de suppléance et un des salariés démissionnaire soumis à un préavis d'un mois, outre le recours possible aux heures supplémentaires.

En outre, l'APF Production justifie de la mise en oeuvre immédiate d'une procédure de recrutement ce dont elle a tout de suite informé la SA Devanlay en lui transmettant dès le 10 mai 2007 les curriculum vitae de 4 personnes sélectionnées pour remplacer les salariés démissionnaires.

Les premiers juges ont justement souligné que la SA Devanlay ne peut se contenter d'affirmer, sans pour autant en rapporter la preuve, que le transfert d'activité n'était pas réalisable dans le délai imparti et ne permettait pas d'assurer la continuité et la qualité de la prestation.

Surabondamment, l'APF Production démontre que la SA Devanlay a participé à l'institution d'une entité concurrente, susceptible d'assurer les mêmes prestations que celle prévue au contrat signé entre les parties le 1er septembre 2004.

La SA Devanlay le reconnaît d'ailleurs implicitement en indiquant que 'constatant le 11 mai 2007 que la poursuite de sa relation contractuelle avec l'AFP Production s'avérait impossible, Monsieur [P] de la société Devanlay a accepté le 27 mai 2007 de devenir membre du conseil d'administration de cette association dont il devenait désormais un potentiel usager'.

Elle admet aussi s'être rapprochée de la société ACAPH Industrie car les salariés avec qui elle travaillait jusqu'ici (les démissionnaires de l'APF Production) avaient choisi de rejoindre cette structure.

Quoiqu'il en soit, la procédure de concurrence déloyale initiée par l'Association des Paralysés de France contre l'ACAPH Industrie, ayant abouti au jugement du tribunal de commerce de Reims du 10 novembre 2009, frappé d'appel, qui a débouté l'Association des Paralysés de France de ses demandes, est sans incidence sur la présente procédure qui ne concerne que les relations contractuelles entre l'Association des Paralysés de France et la SA Devanlay.

Or, dès lors que la SA Devanlay, qui est à l'origine de la rupture d'une convention à durée déterminée, ne peut justifier d'une faute de sa cocontractante, elle doit assumer l'entière responsabilité des conséquences de cette rupture.

L'Association des Paralysés de France soutient que son préjudice est constitué par la perte de la contrepartie financière jusqu'au terme du contrat, du 1er juin au 31 décembre 2007 sur une base mensuelle de 12.500 €, soit 87.500 € alors que la SA Devanlay estime qu'il n'y aurait aucun préjudice, le manque à gagner de l'AFP Production ne se confondant pas avec le prix du contrat.

Cependant, l'Association des Paralysés de France peut avoir une vocation commerciale et donc générer des bénéfices.

Or, son préjudice est bien constitué par la perte, sur la période restant à courir du contrat, des revenus qu'elle devait percevoir et qu'elle n'a pas perçu, ce qui n'a pu avoir que des conséquences préjudiciables sur la trésorerie de l'association.

C'est donc à juste titre que le jugement dont appel a alloué à l'Association des Paralysés de France la somme de 87.500 € à titre de dommages et intérêts et il doit donc être confirmé en toutes ses dispositions.

L'équité commande d'allouer à l'Association des Paralysés de France une indemnité de 4.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

CONDAMNE la SA Devanlay à payer à l'Association des Paralysés de France une indemnité de 4.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SA Devanlay aux dépens d'appel,

AUTORISE la SCP Lagourgue & Olivier, avoués, à recouvrer directement les dépens d'appel conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier

A. BOISNARD

La Présidente

C. PERRIN


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 09/03596
Date de la décision : 09/06/2011

Références :

Cour d'appel de Paris I5, arrêt n°09/03596 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-06-09;09.03596 ?
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