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07/06/2011 | FRANCE | N°09/08226

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 07 juin 2011, 09/08226


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 07 Juin 2011

(n° 4 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/08226



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Juin 2009 par le conseil de prud'hommes de BOBIGNY section industrie RG n° 09/00204





APPELANTE

SAS SOVITRAT 08 (ENSEIGNE SOVITRAT)

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Jacques LAROUSSE, avocat au barre

au de PARIS, toque : D 1017 substitué par Me Romina BOUCAR, avocat au barreau de PARIS, toque : T10







INTIMÉS

Monsieur [F] [H]

[Adresse 2]

[Localité 6]

comparant en person...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 07 Juin 2011

(n° 4 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/08226

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Juin 2009 par le conseil de prud'hommes de BOBIGNY section industrie RG n° 09/00204

APPELANTE

SAS SOVITRAT 08 (ENSEIGNE SOVITRAT)

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Jacques LAROUSSE, avocat au barreau de PARIS, toque : D 1017 substitué par Me Romina BOUCAR, avocat au barreau de PARIS, toque : T10

INTIMÉS

Monsieur [F] [H]

[Adresse 2]

[Localité 6]

comparant en personne

ETABLISSEMENTS SETHA, SA

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Brigitte MARSIGNY, avocat au barreau de SEINE SAINT DENIS, toque : PB179 substitué par Me Linda SADI, avocat au barreau de SEINE SAINT DENIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Avril 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Marie-Aleth TRAPET, conseiller, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Brigitte BOITAUD, président

Monsieur Philippe LABREGERE, conseiller

Madame Marie-Aleth TRAPET, conseiller

Greffier : Monsieur Polycarpe GARCIA, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Madame Brigitte BOITAUD, président

- signé par Madame Brigitte BOITAUD, président et par Monsieur Polycarpe GARCIA, greffier présent lors du prononcé.

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [F] [H] a été engagé par l'agence de travail d'intérim SOVITRAT 08 en qualité de plombier canalisateur à compter du 13 juin 2006, pour le compte de la société SETHA.

Cinq contrats de mission temporaire lui ont été transmis, qui prévoyaient sa mise à disposition des établissements SETHA.

Les cinq missions se sont déroulées sans interruption du 13 juin 2006 au 24 novembre 2006.

[F] [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny d'une demande tendant à la requalification des contrats de mission temporaire en contrat de travail à durée indéterminée, en invoquant l'absence de signature de l'une des deux parties sur les contrat litigieux.

Par jugement du 16 juin 2009, la section Industrie du conseil de prud'hommes de Bobigny, présidée par le juge départiteur, a prononcé la requalification des contrats de travail temporaire en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 13 juin 2006, a condamné la société SETHA - dont la demande de mise hors de cause a été rejetée - à payer à [F] [H] une somme de 1 613,93 € au titre de l'indemnité de requalification du contrat. La société SOVITRAT 08 a, par ailleurs, été condamnée à payer à [F] [H] 1 613,93 € au titre de l'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement et 3 226 € à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, outre 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. [F] [H] et les deux sociétés en cause ont été déboutées du surplus de leurs demandes.

Cette décision a été frappée d'appel par la société SOVITRAT 08 qui demande à la cour, à titre principal, d'infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions lui faisant grief, et à titre subsidiaire, de ramener à de plus justes proportions le montant des sommes qui seraient dues à [F] [H], mais dans tous les cas de le condamner à lui payer 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société SETHA sollicite, pour sa part, sa mise hors de cause du chef de demandes qui, à ses yeux, ne pourraient être valablement formulées qu'à l'encontre de la société d'intérim et le débouté des demandes formées par [F] [H]. Elle rappelle qu'aucun lien contractuel n'attache le travailleur temporaire à l'entreprise à la disposition de laquelle il est placé.

A titre subsidiaire, l'entreprise utilisatrice conclut à la confirmation du jugement, notamment en ce qu'il a mis exclusivement à la charge de la société SOVITRAT 08 les sommes susceptibles d'être dues à [F] [H] par l'employeur. La société des établissements SETHA demande la condamnation de la société SOVITRAT 08 à lui payer une somme de 5 000 € au titre des frais irrépétibles engagés devant le cour.

[F] [H] forme un appel incident, sollicitant la fixation à trois mois de salaire, soit la somme de 4 839 €, des dommages-intérêts pour rupture abusive qu'il réclame, et la condamnation de la société SOVITRAT 08 à lui rembourser deux heures de travail indûment déduits de son salaire pour le temps passé à une visite médicale.

Pour les prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux conclusions visées par le greffier et reprises oralement à l'audience du 27 avril 2011.

SUR QUOI, LA COUR

Sur la demande de requalification des contrats de mission temporaire en contrat de travail à durée indéterminée

[F] [H] soutient qu'il a été embauché le 13 juin 2006 par l'agence de location de main d'oeuvre temporaire pour la fonction de canalisateur à la suite d'un entretien avec le chef d'agence mais que le motif du recours au travail temporaire est inexistant dès lors qu'aucun contrat de travail écrit n'aurait jamais été établi avec la société SOVITRAT 08. Il fait valoir qu'il a travaillé de bonne grâce, sous la pression sociale liée au besoin d'argent, sans rien réclamer alors.

Un litige serait né avec son employeur à la suite de la retenue sur son salaire de deux heures passées à la visite médicale, alors qu'au surplus, [F] [H] s'inquiétait pour sa santé en exerçant un métier dangereux en égouts et sollicitait l'organisation d'une visite médicale par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 17 septembre 2006 à laquelle il était répondu par un courrier du 21 septembre 2006 que, si le salarié intérimaire ne se rendait pas à la médecine du travail à laquelle il avait déjà été convoqué deux fois sans s'y rendre, il serait mis immédiatement fin à sa mission.

Faisant valoir le caractère oral du contrat le liant à la société SOVITRAT 08, en contravention avec les règles d'ordre public des articles L. 1251-1 et suivants du code du travail, [F] [H] sollicite la requalification de son contrat en contrat de travail à durée indéterminée, une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, des dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail.

La société SOVITRAT 08 et la société SETHA rappellent l'adage Fraus omnia corrumpit selon lequel la fraude corrompt tout et invoquent le principe interdisant à chacun de se prévaloir de sa propre turpitude.

Considérant qu'aux termes des articles L.1251-16 et L. 1251-17 du code du travail, le contrat de travail liant l'entreprise de travail temporaire à chacun des salariés mis à la disposition provisoire d'un utilisateur doit être établi par écrit et adressé au salarié au plus tard dans les deux jours ouvrables suivant sa mise à disposition ;

Considérant que la signature d'un contrat écrit, imposée par la loi dans les rapports entre l'entreprise de travail temporaire et le salarié, est destinée à garantir qu'ont été observées les diverses conditions à défaut desquelles toute opération de prêt de main-d'oeuvre est interdite ; que cette prescription étant d'ordre public, son omission entraîne à la demande du salarié la requalification en contrat de droit commun à durée indéterminée ;

Considérant qu'il résulte de l'article L. 1251-17 du code du travail que le contrat de mission est transmis au salarié au plus tard dans les deux jours ouvrables suivant sa mise à disposition ; que le législateur n'a pas imposé cette transmission sous forme de lettre recommandée avec demande d'avis de réception, la lourdeur d'un tel formalisme apparaissant peu compatible avec la fréquente brièveté des missions et l'exigence d'une souplesse favorable à la régularisation de tels contrats ;

Considérant que la preuve de l'établissement de contrats de mission temporaire le jour du commencement de chaque mission résulte à suffire de la reproduction, sur les bulletins de salaire produits aux débats par [F] [H] lui-même, des numéros de missions mentionnés sur les contrats, et de la mention sur les bulletins de paie de l'indemnité de précarité qui était effectivement versée au travailleur intérimaire à la fin de chacune de ses cinq missions ; que le statut d'intérimaire figurait également sur lesdits bulletins de paie ;

Considérant en outre que l'envoi régulier de ces contrats de mission est valablement attesté par les déclarations des assistantes de la société SOVITRAT 08 qui précisent, s'agissant de Mme [S] [P], avoir envoyé les contrats ainsi que ses bulletins de paie au domicile de M. [H], à sa demande, et pour ce qui concerne Mme [D], avoir posté les contrats de mission de M. [F] [H] dans les 48 heures suivant la date de début de mission, à son domicile à sa demande à l'inscription dans notre agence ;

Considérant qu'il y a lieu de considérer que les contrats de mission ont été régulièrement transmis au salarié au plus tard dans les deux jours ouvrables suivant sa mise à disposition, de sorte que [F] [H] ne peut se prévaloir, valablement et de bonne foi, de l'absence de signature des contrats de mission qu'il a acceptés en les exécutant et en percevant les salaires et indemnités de précarité sans jamais s'inquiéter de réclamer les contrats qu'il prétend n'avoir pas reçus ;

Considérant que le caractère d'ordre public de la prescription de l'article L.1251-16 du code du travail trouve sa limite lorsque le salarié se trouve être l'auteur du manquement à ladite prescription ; que la requalification en contrat à durée indéterminée n'a pas lieu d'être lorsque le salarié à omis, de mauvaise foi, de signer les contrats de mission qui lui étaient transmis ;

Considérant que le jugement est réformé, [F] [H] devant être débouté de l'intégralité des demandes liées à sa demande de requalification de ses contrats de mission;

Sur la demande de remboursement de la retenue sur salaire de deux heures au titre de la visite médicale

[F] [H] demande à la cour, réformant sur ce point le jugement entrepris, de condamner la société SOVITRAT 08 à lui rembourser la somme de 16,54 € injustement retenue sur son salaire, alors qu'il s'était rendu à une visite médicale obligatoire.

La société SOVITRAT 08 n'a pas conclu sur ce point.

Le conseil de prud'hommes de Bobigny a rejeté cette demande au motif que la preuve n'était pas rapportée que la charge de ces frais soit imputable aux deux sociétés ;

Mais considérant qu'en application de l'article L. 1251-22 du code du travail, les obligations relatives à la médecine du travail sont à la charge de l'entreprise de travail temporaire ;

Considérant qu'une retenue a été illégitimement opérée sur le salaire de [F] [H] ; que la société SOVITRAT 08 est condamnée à rembourser à [F] [H] la somme de 16,54 €, le jugement étant encore réformé sur ce point ;

PAR CES MOTIFS

REFORME en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

CONDAMNE la société SOVITRAT 08 à payer à Monsieur [F] [H] une somme de 16,54 € ;

DÉBOUTE Monsieur [F] [H] de toutes ses autres demandes ;

DÉBOUTE la société SOVITRAT 08 et la société SETHA de leur demande fondée sur l'article sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur [F] [H] aux dépens.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 09/08226
Date de la décision : 07/06/2011

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°09/08226 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-06-07;09.08226 ?
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