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26/05/2011 | FRANCE | N°09/04320

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 26 mai 2011, 09/04320


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRÊT DU 26 MAI 2011

(n° 8 , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/04320 EG



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 Mars 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS section encadrement RG n° 04/06704





APPELANT

Monsieur [I] [J]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Pierre CORNUT-GENTILLE, avocat au barreau de PARIS, t

oque : P0071





INTIMÉE

SA ALTRAN TECHNOLOGIES

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me DAVICO-HOARAU Catherine, avocat au barreau de PARIS, toque PC 53 substituée par Me...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRÊT DU 26 MAI 2011

(n° 8 , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/04320 EG

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 Mars 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS section encadrement RG n° 04/06704

APPELANT

Monsieur [I] [J]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Pierre CORNUT-GENTILLE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0071

INTIMÉE

SA ALTRAN TECHNOLOGIES

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me DAVICO-HOARAU Catherine, avocat au barreau de PARIS, toque PC 53 substituée par Me Christine LECOMTE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0837

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Décembre 2010, en audience publique, les parties représentées ne s'y étant pas opposées, devant Madame Evelyne GIL, Conseillère, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président

Madame Evelyne GIL, Conseillère

Madame Isabelle BROGLY, Conseillère

Greffier : Mademoiselle Séverine GUICHERD, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, président et par Séverine GUICHERD, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Vu l'appel régulièrement formé par [I] [J] contre un jugement du conseil de prud'hommes de PARIS en date du 4 mars 2009 ayant statué sur le litige qui l'oppose à son ancien employeur, la société ALTRAN TECHNOLOGIES SA.

Vu le jugement déféré ayant :

- débouté [I] [J] de sa demande de reprise d'instance,

- réservé les dépens.

Vu les conclusions visées par le greffier et développées oralement à l'audience aux termes desquelles :

[I] [J], appelant, poursuit :

- l'infirmation du jugement entrepris,

- la condamnation de la société ALTRAN TECHNOLOGIES à lui payer les sommes de :

447'313 € au titre des congés payés et RTT afférents à la contrepartie financière de l'obligation de non-concurrence, avec intérêts légaux à compter du 8 janvier 2008, date de la mise en demeure,

3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

La société ALTRAN TECHNOLOGIES, intimée, conclut :

- au débouté de [I] [J] de sa demande de reprise d'instance

et, subsidiairement, de l'intégralité de ses demandes,

- à sa condamnation à lui verser la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile en sus des dépens de première instance et d'appel.

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant contrat de travail à durée indéterminée signé le 28 juillet 1988 et régi par la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs conseils et sociétés de conseil SYNTEC, la société ALTRAN TECHNOLOGIES a engagé [I] [J], à compter du 3 octobre 1988, en qualité d'ingénieur technico-commercial.

Le salarié a été promu directeur du développement en 1992, il a exercé les fonctions de directeur général adjoint en 1995 et a été nommé administrateur à compter du 26 juin 1996 puis directeur général à compter du 4 février 1997.

La sincérité des comptes arrêtés au 31 décembre 2001 et la situation arrêtée au 30 juin 2002 ont été contestées et une information pour présentation de comptes inexacts et d'informations mensongères a été ouverte sur réquisitions du procureur de la république près du tribunal de grande instance de PARIS, le 30 janvier 2003.

Le 18 avril 2003, [I] [J] a présenté sa démission dans les termes suivants :

' Je fais suite à un notre entretien de ce jour.

Je vous confirme démissionner de tous mes contrats de travail et mandats sociaux de toute nature, au sein du groupe ALTRAN ..., et ce à effet immédiat.'

Le 11 mai 2004, il a saisi le conseil de prud'hommes de PARIS aux fins de voir juger que sa démission, établie sous la contrainte, n'était pas valable et qu'en conséquence, la rupture de son contrat de travail s'analysait comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement du 6 décembre 2005, le conseil de prud'hommes s'est déclaré compétent et, ayant constaté que [I] [J] avait été mis en examen pour son action au sein de la société ALTRAN, d'une part, et ayant rappelé que le pénal tenait le civil en l'état, d'autre part, a sursis à statuer.

Aux termes d'un engagement de discrétion, de non-concurrence et de non débauchage conclu le 17 juillet 2003 entre [I] [J] et la société ALTRAN TECHNOLOGIES, l'ancien salarié et mandataire s'est engagé, pour une durée limitée à 4 ans à compter de la fin de son préavis :

- à observer la plus stricte discrétion sur les informations se rapportant aux activités de la société ALTRAN et de ses filiales,

- à ne pas divulguer les informations confidentielles qu'il détenait sur la société, ses filiales et leurs clients,

- à ne pas solliciter le départ et /ou débaucher, individuellement ou collectivement des salariés de la société et de ses filiales,

- pendant la durée de l'interdiction, à informer le président de la société préalablement à toute activité de conseil qu'il envisagerait exercer dans la zone géographique d'interdiction, c'est-à-dire la France entière DOM-TOM inclus et les pays de l'union européenne y compris ceux inclus dans la procédure d'élargissement, la Suisse, la Norvège, la principauté de Monaco, Saint-Marin, Andorre et le Liechtenstein,

- à céder à la société ou à tout autre personne morale ou physique désignée par elle, au nominal, les parts et / ou actions détenues dans les sociétés du groupe, à l'exception d'ALTRAN NV aux Pays-Bas.

En contrepartie des engagements pris, la société ALTRAN s'engageait à lui verser, à terme échu, la somme mensuelle brute de :

70'000 € la première année

56'000 € la deuxième année

49'000 € la troisième année

42'000 € la quatrième et dernière année,

ces sommes étant soumises au prélèvement des cotisations de sécurité sociale et devant faire l'objet de l'établissement d'un bulletin de paie mensuel.

Ses obligations de non-concurrence ayant été respectées, [I] [J] a reçu, du 1er août 2003 au 31 juillet 2007, les sommes prévues par l'engagement et les bulletins de paie correspondants.

Par courrier du 14 juin 2006, il a sollicité le règlement des congés payés afférents aux salaires perçus.

La société ALTRAN TECHNOLOGIES ayant refusé le paiement, il a déposé au conseil de prud'hommes, le 21 mai 2008, des conclusions de reprise d'instance tendant à sa condamnation au versement des congés payés afférents à la contrepartie financière de l'obligation de non-concurrence.

C'est dans ces circonstances que le conseil de prud'hommes a rejeté sa demande de reprise d'instance au motif qu'elle dérivait du même contrat de travail et qu'il appartiendrait au salarié de formuler sa demande complémentaire lors de la reprise d'instance après le prononcé de la décision pénale.

[I] [J] fait valoir :

- que le sursis à statuer sur la demande tendant à l'octroi de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse n'empêchait pas le conseil de prud'hommes de statuer avant l'issue de la procédure pénale sur la demande au titre des congés afférents à l'indemnité compensatrice de l'obligation de non-concurrence,

- que de nouvelles demandes peuvent être présentées devant une juridiction ayant sursis à statuer sur de précédentes demandes,

- que le juge a la faculté d'ordonner le sursis à statuer sur les seules demandes dont l'issue est susceptible d'être influencée par les événements déterminés et de statuer sur celles dont l'événement est insusceptible d'exercer une quelconque influence,

- que la contrepartie financière de l'obligation de non-concurrence a la nature d'une indemnité compensatrice de salaire et, à ce titre, ouvre droit à congés payés,

- qu'il aurait donc dû bénéficier chaque année de 25 jours de congés payés et de 12 jours de RTT, de sorte qu'il lui est dû :

142'324 € pour la première année, du 1er août 2003 au 31 juillet 2004, soit

98'131 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés et

47'103 € au titre de l'indemnité compensatrice de RTT,

116'186 € pour la deuxième année, du 1er août 2004 au 31 juillet 2005, soit

78'064 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés et

37'682 € au titre de l'indemnité compensatrice de RTT,

101'663 € pour la troisième année, du 1er août 2005 aux 31 juillet 2006, soit

68'691 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés et

32'972 € au titre de l'indemnité compensatrice de RTT,

87'140 € pour la quatrième année, du 1er août 2006 au 31 juillet 2007, soit

58'878 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés et

28'262 € au titre de l'indemnité compensatrice de RTT,

au total, 447 313 €.

La société ALTRAN TECHNOLOGIES SA soutient :

- que la décision de sursis suspend le cours de l'instance,

- que dès lors, [I] ALTRAN ne peut solliciter la reprise de l'instance, peu important que la décision à intervenir sur l'action publique soit ou non susceptible d'influer sur sa nouvelle demande,

- que si l'indemnité compensatrice de non-concurrence a bien un caractère salarial, elle ne correspond pas à un travail effectif et, en conséquence, ne doit pas être soumise à congés payés,

- qu'en tout état de cause, l'indemnité compensatrice de congés payés ne pourrait représenter qu'1/10ème des sommes versées au titre de la contrepartie pécuniaire de la clause de non-concurrence, soit 260 400 € bruts, somme qu'il réclamait devant le conseil de prud'hommes,

- que [I] ALTRAN qui n'a pas travaillé pour la société pendant les 4 années au cours desquelles il a perçu l'indemnité de non-concurrence ne saurait se voir appliquer le calcul du salaire théorique,

- qu'avant sa démission, il était cadre dirigeant exclu du bénéfice des RTT,

- que n'ayant pas bénéficié d'une réduction de son temps de travail au cours de la période de versement de l'indemnité de non-concurrence puisqu'il n'a pas travaillé pour la société pendant cette période, il ne peut prétendre à une indemnité compensatrice de RTT.

SUR CE

- Sur la demande de reprise d'instance

La demande nouvelle formée par [I] [J] tendant au paiement des congés payés afférents à la contrepartie financière de son obligation de non-concurrence dérive de son contrat de travail.

Le conseil de prud'hommes précédemment saisi d'une demande du même salarié tendant à la requalification de sa démission en licenciement sans cause réelle ni sérieuse a sursis à statuer dans l'attente de l'issue de l'action publique engagée à l'encontre de ce salarié.

Ce sursis n'a pas dessaisi le conseil qui devait recevoir la demande nouvelle et non renvoyer le salarié à la reformuler lors de la 'reprise de l'instance', étant observé que la reprise d'instance n'est prévue qu'au chapitre II du titre XIème du Code de procédure civile traitant de l'interruption de l'instance et non au chapitre III du même titre traitant de la suspension de l'instance qui ne prévoit en son article 379 que la possibilité pour le juge de révoquer le sursis ou d'en abréger le délai.

Il résulte des articles 378 et 379 du Code de procédure civile que l'instance est suspendue par l'effet du sursis à statuer.

Dès lors que la demande nouvelle en paiement des congés payés correspondants à l'indemnité de non-concurrence se rattache à l'instance suspendue, elle se trouve soumise au sursis à statuer suspendant le cours de l'instance jusqu'à la décision pénale devant intervenir à la suite de la mise en examen de [I] [J].

Il convient en conséquence de constater que la règle d'unicité de l'instance conduit à soumettre la demande nouvelle au sursis à statuer ordonné par le conseil de prud'hommes.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Réforme le jugement du 4 mars 2009 en ce qu'il a débouté [I] [J] de sa demande de reprise d'instance ;

Statuant à nouveau,

Dit recevable la demande nouvelle formée par le salarié le 21 mai 2008 ;

Constate que cette demande se rattache à l'instance qu'il a engagée le 11 mai 2004 et qui a donné lieu au jugement du conseil de prud'hommes de PARIS prononcé le 6 décembre 2005 ayant sursis à statuer jusqu'à l'issue de l'action publique mise en oeuvre à son encontre ;

Dit que par l'effet de l'unicité de l'instance, la demande nouvelle est soumise à la suspension de l'instance résultant du sursis à statuer ;

En conséquence, renvoie l'affaire et les parties devant le conseil de prud'hommes de PARIS, toujours saisi de l'instance, afin qu'il statue au fond à l'issue de la procédure pénale ;

Réserve les dépens.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 09/04320
Date de la décision : 26/05/2011

Références :

Cour d'appel de Paris L2, arrêt n°09/04320 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-05-26;09.04320 ?
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