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25/05/2011 | FRANCE | N°08/01822

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 25 mai 2011, 08/01822


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 25 Mai 2011

(n° 1 , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/01822-BVR



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 31 Janvier 2008 par le conseil de prud'hommes de CRETEIL section Encadrement RG n° 06/00518







APPELANT

Monsieur [H] [L]

[Adresse 2]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de Me Samuel GAILLAR

D, avocat au barreau de PARIS, toque : E0318







INTIMÉE

SAS RESIPOLY CHRYSOR

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Annick PEROL avocat au barreau de PARIS toque P ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 25 Mai 2011

(n° 1 , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/01822-BVR

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 31 Janvier 2008 par le conseil de prud'hommes de CRETEIL section Encadrement RG n° 06/00518

APPELANT

Monsieur [H] [L]

[Adresse 2]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de Me Samuel GAILLARD, avocat au barreau de PARIS, toque : E0318

INTIMÉE

SAS RESIPOLY CHRYSOR

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Annick PEROL avocat au barreau de PARIS toque P 312 substituée par Me Emmanuelle LEROY, avocat au barreau de PARIS,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 29 Mars 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Patrice MORTUREUX DE FAUDOAS, Président,

Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Conseillère

Madame Claudine ROYER, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Evelyne MUDRY, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Bernadette VAN RUYMBEKE, Conseillère, suite à l'empêchement du Président et par Evelyne MUDRY, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits et procédure

Par arrêt en date du 16 décembre 2009 auquel il convient de se référer pour l'exposé des faits, de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, la présente cour, avant dire droit sur les demandes de monsieur [L] des chefs de discrimination syndicale et salariale, a ordonné une expertise confiée à monsieur [M].

L'expert a rendu son rapport le 28 février 2011 et l'affaire fixée à la présente audience.

Vu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile et les conclusions des parties régulièrement communiquées, oralement soutenues et visées par le greffe à l'audience du 29 mars 2011, conclusions auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé de leurs demandes, moyens et arguments.

******

Il convient de rappeler les faits constants :

Monsieur [L] a été engagé par la société Eurosyntec en qualité de cadre commercial, (statut cadre, position B 1-1, coefficient 90) au terme d'un contrat à durée indéterminée à compter du 25 mars 1991, puis a été muté au sein de la société Screg Routes avec reprise de son ancienneté, qu'enfin son contrat de travail a été transféré en 1995 à la société Resipoly, spécialisée dans la conception, la fabrication et la vente de résines et de masses souples pour revêtement de sols, étanchéité, joints, colles et produits de réparation de bétons.

Qu'il a été promu cadre B1-2 coefficient 100 en octobre 1994 statut cadre position B1-2 coefficient 103 le 1er janvier 1999 et à compter du 1er mars 2003 cadre niveau B position 3 moyennant aujourd'hui un salaire mensuel brut de 4.720 euros outre une prime de treizième mois et une gratification exceptionnelle.

Son salaire moyen mensuel brut s'est élevé en dernier lieu à 5.500 euros .

Monsieur [L] a été élu délégué du personnel en 1995, réélu en cette qualité jusqu'au 6 mars 2000, et désigné délégué syndical en juillet 1998 siégeant à ce titre à partir de janvier 2003 au comité d'entreprise; enfin le 5 mars 2007, il a été élu au comité d'entreprise en qualité de membre suppléant.

Il exerce à ce jour des fonctions de conseiller prud'homal au conseil de prud'hommes de Villeneuve Saint Georges.

S'estimant victime d'une discrimination syndicale et d'une violation du principe à travail égal, salaire égal, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Créteil le 10 mars 2006 qui, par jugement en date du 31 janvier 2008 l'a débouté de toutes ses demandes de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur et de rappels de salaire.

SUR CE

Considérant qu'en cas de litige relatif à l'application de l'article L.1132-1 du Code du Travail, dès lors que le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'une discrimination notamment en matière de rémunération il incombe à la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un telle discrimination et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, le juge devant former sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ;

Considérant que bien qu'aucune obligation légale ou réglementaire n'impose à l'employeur un relèvement de salaire et que rien ne lui interdit non plus de différencier les rémunérations de ses salariés en fonction des résultats obtenus, encore est il nécessaire que cette différenciation soit justifiée par des éléments objectifs et que ces éléments soient communiqués et vérifiables;

Considérant que Monsieur [L] est élu depuis 1995 ; que ses premiers reproches de discrimination sont postérieurs à sa première désignation ;

Qu'il fait valoir en effet que s'il avait la même classification et le même coefficient que Monsieur [X], également commercial au sein de l'entreprise, celui ci a été promu à compter de 1999 alors qu'il ne l'a pas été, sans doute en raison de ses attributions syndicales; qu'à compter de 2001, son secteur géographique a été modifié et qu'à partir de cette date la violation du principe 'à salaire égal, travail égal' s'est manifestée ; qu'en 2003, il a assisté à une réduction de ses responsabilités qui renforcée par d'autres incidents l'ont fortement démotivé au point d'aboutir en 2004 à une rétrogradation au sein de l'organigramme de la société qui s'est poursuivie les années suivantes;

Considérant que monsieur [L] compare principalement sa situation avec celle de monsieur [X] dont il réclame la classification (B4) et le rappel de salaire afférent; qu'il estime également que son salaire a moins évolué que celui de deux autres salariés Messieurs [Y] et [S];

Considérant que l'employeur refute pour sa part cette argumentation en objectant pour l'essentiel que les différences salariales s'expliquent autant par l'absence d'identité des emplois comparés que les circonstances imposées lors de l'embauche tenant pour certains salariés à la reprise de contrats de travail, l'expérience et l'étendue de leurs responsabilités ;

Considérant qu'il convient d'analyser les faits articulés par monsieur [L] pour sous tendre l'existence d'une discrimination ainsi que les éléments produits par l'employeur;

- sur l'égalité salariale

Considérant qu'il résulte de l'examen précis des pièces du dossier et notamment de l'expertise que le salaire de monsieur [L] a évolué de manière moins rapide (37,7%) que celui de monsieur [X] auquel il a été comparé (46,37%) conformément aux demandes présentées;

Mais considérant que cette différence s'explique par des éléments objectifs tenant:

- à l'expérience professionnelle

Considérant en effet si les deux salariés ont été engagés en qualité de commercial et ont une formation universitaire équivalente quoique plus spécialisée pour monsieur [X] (DUT génie civil et brevet professionnel de métreur vérificateur) que pour monsieur [L]( diplômé d'une école d'administration et direction des affaires ), monsieur [X] justifiait d'une expérience et d'un parcours professionnel plus riche que son collègue dont notamment 14 années dans l'exercice de responsabilités au sein de sociétés de travaux sur les centrales nucléaires ou de sociétés spécialisées dans le bâtiment ou en résine synthétique ; que monsieur [L] ne justifiait au moment de son embauche d'aucune expérience professionnelle si ce n'est une fonction de responsable publicité dans un journal qu'il prétend avoir occupée ;

Que cette expérience importante de monsieur [X], débauché d'une société concurrente, a entraîné une différence de salaire de base de 20% à l'embauche en faveur de ce dernier ;

- aux responsabilités

Considérant que les responsabilités de monsieur [X] au sein de l'entreprise étaient plus importantes précisément compte tenu de son expérience et de sa connaissance des produits ; que ses responsabilités et ses excellents résultats l'ont conduit à être nommé en 2006, coordinateur de secteur, à ce titre doté d'un pouvoir hiérarchique sur les commerciaux et d'un classement supérieur (cadre B4)à celui de monsieur [L](cadre B3);

Que ce dernier n'a jamais exercé de telles fonctions de responsabilités ;

- aux résultats

Considérant que l'expert souligne que le chiffre d'affaire réalisé par monsieur [L] a chuté de 70% entre 2001 et 2009 alors que celui de monsieur [X] est resté identique, que la part du chiffre d'affaire que monsieur [L] a réalisé comparé au chiffre d'affaire total de la société est passé de 10% en 2001 à 3,73% en 2009,alors que celle de monsieur [X] a augmenté de 11,51% à 14,08% , qu'enfin la pente de la courbe de l'évolution de son chiffre d'affaire est de (-168) alors que celle de son collègue est de (-23) soit un rapport de 1 à 7 ;

Que monsieur [X], comme l'indique d'ailleurs l'expert , a atteint ses objectifs de manière plus importante que la moyenne; que dès lors les primes qui lui ont été attribuées, plus élevées que celles versées à monsieur [L] sont le reflet de son activité réelle ;

Considérant en conséquence que la preuve d'une discrimination salariale de monsieur [L] vis à vis de monsieur [X] n'est pas établie au regard de ces éléments objectifs sur leurs situations respectives non comparables ;

Qu'elle n'est pas davantage rapportée à l'égard de ses deux autres collègues, monsieur [S] et monsieur [Y], qui commerciaux comme lui et bénéficiaires de la même classification, venaient de sociétés absorbées au sein desquels ils bénéficiaient de rémunérations plus importantes et qui comme le souligne l'expert , ont réalisé des chiffres d'affaires plus élevés que monsieur [L], ce que celui ci ne conteste pas et qui en conséquence justifient d'une progression de salaire plus importante que la moyenne ;

Que les écarts constatés, au demeurant faibles, reposent donc également sur des critères objectifs étranger à toute discrimination;

- sur la discrimination syndicale

Considérant que c'est encore en vain que monsieur [L] fait état de plusieurs faits selon lui symptomatiques d'une discrimination syndicale et à l'origine de l'inégalité salariale reprochée ;

Qu'en effet sur la réduction en 2001 de son secteur de prospection, la société démontre que la modification de secteur a concerné tous les salariés, qu'elle a été rendue nécessaire par la nouvelle organisation mise en place après l'absorption des sociétés Chrysor et SRS et de l'intégration des commerciaux travaillant au sein de ces sociétés, enfin que le secteur du salarié qui couvrait, tout le secteur sols sportif du Nord de la France, représentant 25 % de l'activité de la société, n'a pas été réduit ;

Que sur la prétendue rétrogradation dont il aurait fait l'objet en 2004, elle n'est pas démontrée, monsieur [L] cadre B3 comme ses collègues à l'exception de monsieur [X] classé B4 en 2003, était et est resté cadre commercial; que les fonctions d'animation dont il a été chargé de 2001 à 2003 comme d'autres salariés n'étaient qu'honorifiques comme l'indiquent notamment sa collègue, Mme [K] et l'expert, sans fonction d'encadrement ou de responsabilité afférente; que la disparition de ces attributions d'animation puis la création d'une fonction hiérarchique de coordinateur , n'ouvrait pas droit au profit de monsieur [L] un droit acquis à occuper cette dernière ; qu'enfin, aucun élément n'établit qu'il a exercé son activité comme il le soutient sous les ordres de monsieur [S] ;

Que monsieur [L] ne peut encore faire grief encore à son employeur de ne pas l'avoir aidé à obtenir une aide du fonds spécial appartenant au groupe Colas suite à un problème d'ordre personnel qu'il avait rencontré ; que la société RESIPOLY établit en effet que son intervention a permis au salarié de recevoir de ce chef une somme de 1.500 euros; que la vaine polémique que monsieur [L] a alimentée et entretenue à ce sujet, est à cet égard, particulièrement déplacée ;

Que s'agissant par ailleurs de la pseudo sanction relative à son forfait kilométrique que la société établit encore que comme pour d'autres salariés, elle lui avait proposé en 2003 une actualisation de son forfait kilométrique fixé à 50.000 km, rendue nécessaire par l'accomplissement d'un kilométrage très inférieur de sa part (17.461km) , son refus de disposer d'un véhicule de fonction et enfin des exigences de l'URSSAF ;

Que la révision légitime de son forfait, qui ne se rapportait qu'à ses fonctions salariées , ne peut être considérée comme une sanction liée à l'exercice de ses mandats syndicaux ;

Considérant ensuite que le traitement discriminatoire par l'employeur qui l'aurait écarté de sa participation du salon de [Localité 5] et entravé ses démarches professionnelles vis à vis de certains clients dont notamment, les sociétés Fieldsturf Targette et Cofise, n'est pas davantage établi puisque dans le premier cas, l'employeur a sollicité la participation à cette manifestation du salarié chargé de l'export et dans le second cas, les deux clients visés n'étaient pas commercialement fiables ;

Que s'agissant encore de la fixation de ses objectifs pour 2006 et 2007, la société Resipoly Chrysor établit que les objectifs de 2006 ont été acceptés par monsieur [L] ; que ceux fixés pour l'année 2007 l'ont été en cohérence avec ceux des autres salariés, monsieur [L] n'ayant proposé, pour cette année, qu'une augmentation de 1,65% de son chiffre d'affaires ;

Considérant que la société Resipoly Chrysor démontre que monsieur [L] n'a pas subi de traitement discriminatoire dans le cadre de la formation au management, proposée aux seuls commerciaux exerçant des fonctions d'encadrement ce qui n'était pas son cas ;

Considérant enfin que s'agissant de l'attribution de places de Roland Garros , qu'il est attesté que contrairement à ce que monsieur [L] prétend de manière hardie, des places ont bien été mises à sa disposition, l'employeur démontrant que pour le tournoi de la coupe du monde de rugby, il n'a pu disposer d'un nombre suffisant de billets pour en faire bénéficier les commerciaux ;

Considérant en conséquence qu'aucun des griefs argués par monsieur [L] pour fonder une discrimination syndicale n'est caractérisé ;

Considérant que l'inspecteur du travail, saisi à 10 reprises par monsieur [L] entre 2006 et 2010 a organisé une réunion tripartite de médiation à l'issue de laquelle la société Resiploy a fait des propositions à monsieur [L]; que celui ci maintenant ses demandes initiales les a refusées ;

sur le harcèlement moral

Considérant que monsieur [L] fait valoir que les discriminations dont il a été victime sont constitutives d'un harcèlement moral qui a engendré des arrêts de travail et un état dépressif;

Mais considérant d'une part que la preuve qu'il ait subi un traitement discriminatoire n'est pas rapportée ;

Que d'autre part, il ne verse aux débats aucun élément de nature à étayer l'existence d'une situation de harcèlement moral;

Qu'il sera donc débouté de sa demande de dommages et intérêts ;

Considérant que le jugement doit en conséquence être confirmé ;

Que monsieur [L] qui succombe sera condamné aux dépens ainsi qu'aux frais d'expertise ;

Qu'il versera en outre une indemnité de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile à la société Resipoly Chrysor ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne M. [R] [L] à verser à la société Resipoly Chrysor une indemnité de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Le condamne aux dépens et met à sa charge les frais de l'expertise.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 08/01822
Date de la décision : 25/05/2011

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°08/01822 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-05-25;08.01822 ?
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