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12/05/2011 | FRANCE | N°09/06747

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 12 mai 2011, 09/06747


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRÊT DU 12 Mai 2011

(n° 9 , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/06747



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 08 Avril 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS Section ENCADREMENT RG n° 08/06772



APPELANTE

Madame [D] [R]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

comparant en personne

assistée de Me Emmanuel GAYAT, avocat au barreau de SEINE SAINT

DENIS, toque : PB187



INTIMÉS

S.A IFCL-LOGOS anciennement dénommée IFG LANGUES

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Me [B] [T] - Commissaire à l'exécution du plan de la S.A IFCL-L...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRÊT DU 12 Mai 2011

(n° 9 , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/06747

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 08 Avril 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS Section ENCADREMENT RG n° 08/06772

APPELANTE

Madame [D] [R]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

comparant en personne

assistée de Me Emmanuel GAYAT, avocat au barreau de SEINE SAINT DENIS, toque : PB187

INTIMÉS

S.A IFCL-LOGOS anciennement dénommée IFG LANGUES

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Me [B] [T] - Commissaire à l'exécution du plan de la S.A IFCL-LOGOS anciennement dénommée IFG LANGUES

[Adresse 1]

[Adresse 1]

SELARL MB ASSOCIES en la personne de Me [E] [F] - Mandataire judiciaire de la S.A IFCL-LOGOS anciennement dénommée IFG LANGUES

[Adresse 4]

[Adresse 4]

représentés par Me Patrick LAURENT, avocat au barreau de PARIS, toque : D1589

PARTIE INTERVENANTE :

AGS CGEA IDF OUEST

[Adresse 2]

[Adresse 2], représenté par Me Sabine NIVOIT, avocat au barreau de PARIS, toque : T10

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Mars 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Julien SENEL, Vice-Président placé, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Françoise FROMENT, président

Mme Marthe-Elisabeth OPPELT-REVENEAU, conseiller

M. Julien SENEL, Vice-Président placé sur ordonnance du Premier Président en date du 6 décembre 2010

Greffier : Madame Violaine GAILLOU, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau code de procédure civile.

- signé par Mme Françoise FROMENT, Président et par Mme Violaine GAILLOU, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La société IFG Langues est un organisme de formation en langues étrangère.

[D] [R] a été embauchée par la société IFG Langues à compter du 17 janvier 2005 en contrat de travail à durée indéterminée en qualité de déléguée commerciale, conseiller en formation, cadre niveau F, coefficient 310, moyennant un salaire de 2500€ brut par mois, avec une prime annuelle d'objectifs définis pour l'année 2006 par avenant du 12 juin 2006. Elle était placée sous la responsabilité du directeur général de la société.

Le salaire moyen des 12 derniers mois était de 2630€. La convention collective applicable était celle nationale des organismes de formation. L'entreprise compte plus de 50 salariés, qui sont en grande partie des formateurs.

En août 2007, un nouveau Directeur Général a été désigné à la tête de la société IFG Langues. Le 2 octobre 2007, le comité d'entreprise a été convoqué à une réunion extraordinaire afin d'être consulté sur les mesures de licenciement pour motif économique envisagées en raison de la situation économique de l'entreprise. Ce projet prévoyait le licenciement de 8 salariés, tous cadres. Réunis le 12 octobre 2007, les élus ont, à l'unanimité, rendu un avis défavorable au motif notamment de l'incohérence entre les économies annoncées et les investissements prévus, et de la violation des règles relatives à l'ordre des licenciements.

Elle a adhéré le 31 octobre 2007 à la convention de reclassement personnalisée. Elle a été licenciée le 10 novembre 2007 pour un motif économique, après avoir refusé la proposition de reclassement qui lui avait été faite lors de l'entretien préalable dans un poste de 'standardiste/ suivi commercial'. Elle a demandé par lettre du 19 novembre 2007 l'énonciation des critères d'ordre des licenciements, a fait valoir le bénéfice de la priorité de réembauchage 2008 par lettre du 8 mars 2008, et a demandé copie des lettres que l'employeur a indiqué qu'il adresserait en vue d'un reclassement externe.

Contestant son licenciement, elle a, le 12 juin 2008, saisi le Conseil de Prud'hommes de Paris lequel, par jugement du 8 avril 2009, estimant que le licenciement économique était justifié et que l'obligation de reclassement avait été respectée par l'employeur, a condamné la société IFG Langues à lui verser 1250€ au titre de la prime d'objectifs et 500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'a déboutée du surplus de ses demandes et a condamné la société IFG Langues aux dépens.

[D] [R] a régulièrement relevé appel le 15 juillet 2009 de la totalité de cette décision.

La société IFCL-LOGOS, anciennement dénommée IFG Langues, a été admise au bénéfice du redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 30 juillet 2009.

Un plan de redressement par continuation a été homologué le 1er juin 2010. L'UNEDIC DELEGATION CGEA, est intervenante forcée.

Assistée de son conseil, [D] [R] a, lors de l'audience du 15 mars 2011, développé oralement ses conclusions, visées le jour même par le greffier, aux termes desquelles elle sollicite l'infirmation du jugement en toutes ses dispositions, et la fixation au passif de la société IFCL LOGOS et à son profit des sommes suivantes :

- 30000€ d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et subsidiairement 30000€ pour violation des règles applicables à l'ordre des licenciements,

- 30000€ à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'engagement de rechercher un reclassement externe,

- 6313,92€ à titre de prime d'objectifs 2007, et 631,39€ d'indemnité compensatrice de congés payés afférents,

- 2000€ sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Elle demande de dire que les créances seront garanties par l'AGS dans la limite du plus haut des plafonds prévus par la loi.

Représentés par leur conseil, la société IFCL-LOGOS venant aux droits de la société IFG LANGUES, Me [T] en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement de cette société et la SELARL MB ASSOCIES en la personne de Me [E] [F] en qualité de mandataire judiciaire ont, lors de l'audience du 15 mars 2011, développé oralement des conclusions, visées le jour même par le greffier, aux termes desquelles ils sollicitent l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a condamné la société à payer la somme de 1250 bruts au titre de la prime d'objectif 2007. Ils demandent de débouter [D] [R] de toutes ses demandes et de la condamner à leur payer 1500€ sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile outre les dépens.

Représentée par son conseil, l'UNEDIC délégation AGS CGEA IDF Ouest, intervenante forcée, a, lors de l'audience du 15 mars 2011, développé oralement ses conclusions, visées le jour même par le greffier, aux termes desquelles elle demande à la Cour de débouter [D] [R] de ses demandes. Compte tenu du plan de continuation au bénéfice de l'employeur, elle demande à la Cour de dire que la décision à intervenir ne sera opposable à l'AGS qu'à défaut de fonds disponibles permettant le règlement des créances par l'employeur, de dire que s'il y a lieu à fixation, celle-ci ne pourra intervenir que dans les limites de la garantie légale et qu'en tout état de cause, la garantie prévue aux dispositions de l'article L3253-6 du code travail ne peut concerner que les seules sommes « dues en exécution du contrat de travail » au sens de cet article, les astreintes, dommages et intérêts mettant en 'uvre la responsabilité de droit commun de l'employeur ou article 700 étant ainsi exclus de la garantie.

Elle demande de statuer ce que de droit sur les frais d'instance sans qu'ils puissent être mis à sa charge.

MOTIFS ET DÉCISION DE LA COUR

Considérant à titre liminaire, que si l'adhésion du salarié à la convention de reclassement personnalisé entraîne une rupture qui est réputée intervenir d'un commun accord, elle ne le prive pas de la possibilité d'en contester le motif économique ; qu'[D] [R] est donc recevable à contester le motif économique du licenciement invoqué dans la lettre du 10 novembre 2007 ;

Considérant, sur le motif économique du licenciement, que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige doit énoncer, lorsqu'un motif économique est invoqué, à la fois la raison économique qui fonde la décision et sa conséquence précise sur l'emploi ou le contrat de travail du salarié ; que pour avoir une cause économique, le licenciement doit, ainsi que le dispose l'article L 1233-3 du code du travail, être prononcé pour un motif non inhérent à la personne du salarié et être consécutif soit à des difficultés économiques, soit à des mutations technologiques, soit à une réorganisation de l'entreprise, soit à une cessation d'activités ; que la réorganisation, si elle n'est pas justifiée par des difficultés économiques ou par des mutations technologiques, doit être indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient ;

Considérant que les difficultés économiques invoquées par l'employeur doivent être réelles et constituer le motif véritable du licenciement ; que leur appréciation prend en compte les difficultés commerciales, financières et les résultats comptables au vu des pièces produites, qui doivent être complètes afin de permettre un examen exhaustif de la situation et afin de vérifier si les difficultés rencontrées sont suffisamment importantes et durables pour justifier la suppression du contrat de travail ; que tel ne peut en particulier être le cas lorsqu'une entreprise par ailleurs saine rencontre des difficultés passagères ou lorsqu'elle souhaite réaliser des économies, limiter ses coûts ou privilégier son niveau de rentabilité au détriment de la stabilité de l'emploi ;

Considérant enfin qu'en application de l'article L 1233-4 du même code, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés, et que le reclassement de l'intéressé sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ou, à défaut et sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploi d'une catégorie inférieure, ne peut être réalisé dans le cadre de l'entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient et dont l'activité permet la permutabilité du personnel ; que les offres de reclassement proposées au salarié doivent être personnelles, écrites et précises.

Considérant en l'espèce que la lettre de licenciement du 10 novembre 2007, était rédigée comme suit :

'Au cours de l'entretien que nous avons eu le mardi 30 octobre 2007 à 11h30, nous vous avons présenté les raisons pour lesquelles votre licenciement pour motif économique était envisagé, à savoir : suppression de votre poste dans le cadre d'une réorganisation indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise.

En effet, les résultats courants (hors éléments exceptionnels) ont été constamment déficitaires depuis août 2002 et le ratio Masse salariale sur Chiffre d'affaires n'a fait que croître pour atteindre, sur la période du 1er janvier 2006 au 30 juin 2007,75,1%.

En outre, il apparaît que la part de nos frais de structure (y compris le coût du personnel administratif) est plus importante que chez nos concurrents.

La poursuite de l'exploitation dans la configuration actuelle de l'entreprise amènerait à perdre plus de 700 000 euros sur l'exercice en cours clos au 30 juin 2008, ce qui remettrait directement en cause la pérennité de l'entreprise.

Les mesures d' économies envisagées pour faire face à ces difficultés économiques ont d'abord été recherchées dans la diminution de dépenses hors masse salariale. Les économies attendues à ce titre s'élèvent à 200 000 euros environ. Elles sont indispensables mais ne permettent pas le retour à une situation à l'équilibre sans des mesures complémentaires.

Dans ces conditions, il est indispensable pour la pérennité d'IFG Langues de procéder à une réorganisation en profondeur de ses structures et de mettre en place un plan d'économies drastique sur la niasse salariale.

C'est dans cette optique qu'a été abordée la suppression de votre poste et la reprise par le Responsable Commercial de l'essentiel des responsabilités qui en dépendaient.

Lors de l'entretien du mardi 30 octobre 2007 à 11h30, nous vous avons fait une proposition de reclassement interne (Poste de « Standardiste / Suivi commercial») à laquelle vous deviez répondre avant le 12 novembre 2007. A défaut, vous étiez réputée refuser la dite proposition.

Cependant, vous nous avez remis dès le 31octobre 2007 votre bulletin d'acceptation de la Convention de Reclassement Personnalisé.

Cette acceptation entraîne ipso facto la rupture d'un commun accord de votre contrat de travail à la date d'expiration du délai de 14 jours, soit le 13 novembre 2007 au soir, aucun préavis n'étant dû.

Votre solde de tout compte et les documents de fin de contrat seront disponibles à cette date au Service du Personnel.

Vous avez acquis 73,6 heures non encore utilisées au titre du Droit Individuel à la Formation.

Nous verserons l'allocation de formation correspondant à ces heures à l'Assédic afin de financer les actions d'accompagnement et d'aides au reclassement que vous serez amenée à accomplir dans le cadre de la Convention de Reclassement Personnalisé.

Durant l'année qui suivra la rupture du contrat de travail, vous bénéficierez d'une priorité de réembauchage dans notre entreprise, à condition de nous avoir informés durant cette année de votre désir de faire valoir cette priorité.

Celle-ci concerne les postes compatibles avec votre qualification et également ceux qui correspondraient à une nouvelle qualification acquise après la rupture du contrat (sous réserve cependant que vous nous la fassiez connaître)' ;

Considérant que la suppression de poste s'inscrit dans le cadre d'une réorganisation indispensable selon l'employeur à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise ; que celui-ci démontre au moyen des pièces qu'il produit aux débats, et plus particulièrement la note explicative remise au CE pour la réunion du 12 octobre 2007 et les documents fiscaux annexés, que les résultats courants -hors résultat exceptionnel- entre août 2002 et juin 2007 étaient de plus en plus déficitaires alors que sur cette même période le ration ' masse salariale sur chiffres d'affaires ' avait augmenté de façon significative, passant de 49,9% à 75,1% ; que cette situation atteste d'une forte dégradation de la compétitivité économique de l'entreprise et d'un risque réel et immédiat pour sa pérennité, justifiant la réorganisation de celle-ci; qu'en outre l'inspecteur du travail a reconnu la validité du motif invoqué en autorisant le licenciement économique de deux représentants du personnel, Madame [P] et Madame [U] SA BOOTH et la société a été placée en redressement judiciaire le 30 juillet 2009 ;

Considérant qu'à la date de signature du contrat de Madame [R], en décembre 2004, la situation de la société n'était pas définitivement compromise par ses résultats et le recrutement nullement condamné par avance à l'échec, de sorte qu'aucune légèreté blâmable ne peut être reprochée à l'employeur ;

Considérant que dès lors, l'existence d'une cause économique légitime est établie ;

Considérant qu'il y a bien suppression de poste lorsque les tâches du salarié licencié ne sont pas supprimées mais qu'elles sont affectées à d'autres salariés de l'entreprise ou réaffectées à un supérieur hiérarchique ; que, si les tâches de ' déléguée commercial/conseiller en formation ' relatives au poste de Madame [R] ont été transférées au responsable ' Pôle Commercial ', Monsieur [C], recruté par contrat du 4 mai 2007, soit plusieurs mois avant le départ de Madame [R] de l'entreprise, celle-ci ne peut soutenir que la suppression de son emploi n'était pas effective dès lors que ce recrutement et la conservation du poste afférent relevait du pouvoir de gestion et de direction de l'employeur, dont il est seul juge, en l'absence de fraude, sous réserve du respect de des obligations en matière de licenciement économique; que dès lors, la suppression de poste a bien été effective ;

Considérant qu'il ne peut être reproché à l'employeur de n'avoir pas respecté son obligation de formation et d'adaptation en n'ayant pas délivré de formation complémentaire afin d'occuper le poste de responsable commercial créé en juin 2007, 4 mois avant son licenciement, s'agissant d'un poste de cadre dirigeant donc de catégorie supérieure en termes de responsabilités, de compétences et d'expériences exigées ;

Considérant en revanche, qu'[D] [R], qui occupait le poste de déléguée commerciale, conseiller en formation, n'a reçu qu'une seule proposition de reclassement, consistant en un poste de ' standardiste/suivi commercial ', impliquant un déclassement et une importante baisse de salaire ;

Considérant que, si le registre du personnel, reconstitué selon l'employeur car le livre initial aurait disparu après le déménagement de l'entreprise, atteste de l'absence de départ, hors licenciements économiques et d'embauche durant la période du 5 juin 2007 au 30 janvier 2008, l'employeur ne démontre pas l'impossibilité pour l'entreprise de rechercher et de proposer d'autres postes de catégories égales ou inférieures que l'unique poste proposé au surplus le même jour que la proposition de convention de reclassement personnalisé et moyennant un délai de réflexion quasi-identique; qu'au demeurant, il n'est pas démontré que ce poste de standardiste était disponible, ce dernier n'apparaissant pas dans le registre unique du personnel produit aux débats; qu'en outre, présentée concomitamment à deux salariées, cette proposition n'était pas sérieuse; que l'employeur n'a ainsi pas loyalement satisfait à l'obligation qui lui était imposée en la matière ;

Considérant que le licenciement est donc sans cause réelle et sérieuse, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les moyens relatifs aux critères d'ordre des licenciements ; que cette situation ouvre droit au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, laquelle, compte tenu de l'ancienneté supérieure à 2 ans de la salariée, de sa rémunération au moment de la rupture, de son âge, des conséquences financières générées par la perte de son emploi, de l'indemnisation perçue du fait de la CRP, du fait qu'elle justifie de ses allocations Assedic uniquement jusqu'au 3 juin 2008 et ne justifie pas de sa situation professionnelle actuelle, sera fixée à la somme de 16000€ en application de l'article L 1235-3 du code du travail ;

Considérant qu'[D] [R] demande en outre l'indemnisation du préjudice subi du fait du non respect de l'engagement pris par son employeur de rechercher un reclassement externe à hauteur de 30000€ en application de l'article 1147 du code civil ; que l'employeur, en l'absence de preuve des démarches qu'il affirme avoir effectuées auprès de la Fédération de la Formation Professionnelle, dont il est membre, à destination de ses adhérents d'Ile de France, affirme pour sa part que ce manquement se caractérise par une diminution du nombre d'entreprises informées de la recherche d'emploi d'[D] [R], donc par une perte de chance, qui ne serait être réparée au delà de l'euro symbolique ;

Considérant qu'il est constant que l'employeur avait pris l'engagement, tant devant le Comité d'Entreprise, consulté sur le projet de licenciements économiques qu'au cours de l'entretien préalable du 30 octobre 2007, d'adresser des courriers à d'autres entreprises en vue d'un reclassement externe des salariés licenciés ; que Madame [R] a demandé une copie de ces courriers par lettre du 8 mars 2008 sans jamais recevoir de réponse de la part de la Société IFG LANGUES qui ne démontre pas les démarches qu'elle aurait effectuées en ce sens ; que celle-ci a donc manqué à l'engagement qu'elle avait pris de rechercher un reclassement externe, causant un préjudice du fait de la perte de chance de trouver un emploi, que la Cour évalue à 5000€ ;

Considérant, sur la prime d'objectifs 2007, que lorsque le contrat de travail prévoit le versement variable en fonction de la réalisation d'objectifs fixés chaque année d'un commun accord des parties, et qu'aucun objectif n'est déterminé pour un exercice donné, il appartient au juge de fixer la rémunération variable du salarié pour l'exercice en cause, en fonction des critères visés au contrat de travail et des accords conclus les années précédentes ;

Considérant qu'en l'espèce le contrat de travail d'[D] [R] prévoyait outre le montant de sa rémunération annuelle fixe le versement au titre de chaque exercice d'une prime annuelle en fonction de la réalisation de ses objectifs ; qu'il est constant que les parties n'ont pas convenu en 2007 des objectifs à atteindre ni a fortiori du montant de cette prime ; qu'au titre de l'année 2006, [D] [R] a perçu une prime d'objectifs de 1500€ sur sa paie d'avril 2007 soit 5% de sa rémunération fixe pour 60% de réalisation d'objectifs ; que celle-ci affirmait par courrier du 3 mai 2008 avoir rempli 100% de ces mêmes objectifs en 2007 et a demandé en conséquence de percevoir une prime correspondant à 20% de sa rémunération brute fixe annuelle ; que cette demande étant restée sans réponse, alors qu'il appartenait à l'employeur d'engager les négociations sur les paliers de progression en terme d'objectifs et sur les objectifs pour l'année 2007, celui-ci ne peut soutenir qu'aucune prime n'est due au titre de l'année 2007, ou qu'elle ne serait due qu'au prorata de 10/12ème de la prime perçue en 2006 soit à hauteur de 1250€ brut, somme retenue par le Conseil de Prud'hommes ;

Considérant en conséquence, qu'il convient de faire droit à la demande à hauteur de 6313,92€ outre les congés payés afférents à hauteur de 631,39€ ;

Considérant, sur la demande de garantie par l'AGS, que la société IFCL LOGOS étant réputée in bonis au regard de l'homologation du plan de redressement par voie de continuation de la société, les créances antérieures à l'ouverture du redressement judiciaire étant couvertes par l'AGS, la présente décision lui sera opposable et sa garantie ne jouera qu'en cas d'insuffisance de fonds de la société IFCL LOGOS et dans la limite de sa garantie en application des articles L3253-6 et suivants du code du travail ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ; que les dépens resteront à la charge de la société IFCL LOGOS ;

PAR CES MOTIFS

Constate que Me [T] intervient en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement par voie de continuation de la société IFCL LOGOS et que la SELARL MB ASSOCIES en la personne de Me [E] [F] intervient en qualité de mandataire judiciaire de cette société, pour la régularité de la procédure ;

Infirme la décision attaquée, sauf en ce qu'elle a condamné la société IFG LANGUES à verser à [D] [R] la somme de 500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, et statuant de nouveau :

Fixe au passif de la société IFCL LOGOS venant aux droits de la société IFG LANGUES et au profit d'[D] [R] les sommes suivantes :

- 16000€ à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 5000€ à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'engagement de rechercher un reclassement externe,

- 6313,92€ au titre de la prime d'objectif 2007 et 631,39€ au titre des congés payés afférents ;

Dit que les sommes de nature salariale produiront intérêts au taux légal à compter de la réception par la société IFG LANGUES de la convocation devant le bureau de jugement jusqu'au 30 juillet 2009, date de l'ouverture de la procédure collective ;

Dit que la présente décision est opposable à l'UNEDIC délégation AGS CGEA IDF Ouest, dans les limites et plafonds de sa garantie, laquelle, subsidiaire, ne sera mise en oeuvre qu'en cas d'insuffisance de fonds de la société IFCL LOGOS ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Laisse les dépens de première instance et d'appel à la charge de la société IFCL LOGOS.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 09/06747
Date de la décision : 12/05/2011

Références :

Cour d'appel de Paris K5, arrêt n°09/06747 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-05-12;09.06747 ?
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