Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 1
ARRÊT DU 05 MAI 2011
(n° 183, 12 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/23984
Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Septembre 2009 - Tribunal de Grande Instance d'EVRY - RG n° 06/067760
APPELANT
Monsieur [G] [O]
né le [Date naissance 10] 1951 à [Localité 13] (77)
de nationalité française
profession : médecin
demeurant [Adresse 1]
agissant en sa qualité de tuteur de Madame [J] [V] [M] veuve [C] née le [Date naissance 5] 1925 à [Localité 12] (91), retraitée, résidant à l'Hôpital de [Localité 14] - - [Localité 14]
représenté par la SCP CALARN-DELAUNAY, avoués à la Cour
assisté de Maître Martine TALEC-LORRAIN, avocat au barreau de l'ARIÈGE
INTIMÉS
S.A.R.L. DAMIETTE
prise en la personne de son gérante
ayant son siège [Adresse 11]
[Localité 12]
représentée par Maître Pascale BETTINGER, avoué à la Cour
assistée de la SCP MOURIER DRUAIS PEYRONEL (Maître Thierry PEYRONEL) avocats au barreau de l'ESONNE
Maître [S] [P] [F] épouse [E]
née le [Date naissance 7] 1947,à [Localité 15] (Norvège)
de nationalité française
profession : notaire
demeurant [Adresse 9]
représenté par la SCP ARNAUDY ET BAECHLIN, avoués à la Cour
assisté de la SCP KUHN (Maître Christophe LAVERNE), avocats au barreau de PARIS,
toque : P 90
SCP JUSOT GIRAY LUZY TROKINER & DUPARC
SCP titulaire d'un office notarial
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège [Adresse 2]
représentée par la SCP ARNAUDY ET BAECHLIN, avoués à la Cour
assistée de la SCP PETIT RONZEAU & ASSOCIES (Maître Christiane ROBERTO), avocats au barreau de PARIS, toque : P 499
COMPOSITION DE LA COUR :
Après rapport oral et en application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 mars 2011, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Christine BARBEROT, conseillère.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Lysiane LIAUZUN, présidente
Madame Christine BARBEROT, conseillère
Madame Anne-Marie LEMARINIER, conseillère
Greffier :
lors des débats et du prononcé de l'arrêt : Madame Christiane BOUDET
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
- signé par Madame Lysiane LIAUZUN, présidente, et par Madame Christiane BOUDET, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Par acte authentique du 14 octobre 2004 reçu par Mme [S] [E], notaire, [U] [C] et Mme [J] [M], épouse [C] (les époux [C]), se sont engagés à vendre à la société La Merantaise, qui s'est réservé la faculté d'acquérir avec faculté de substitution, une parcelle de terrain à bâtir d'une contenance de 9 947 mètres carrés, cadastrée section BD n° [Cadastre 3], lieudit "[Adresse 8] (91), au prix de 447 615 €.
Par acte authentique du 1er décembre 2005, reçu par M. [R], notaire associé de la SCP Jusot Giray Luzy Trokiner et Duparc, avec la participation de Mme [E], les époux [C], représentés par Mme [Y] [N], clerc de notaire, en vertu d'une procuration sous seing privé du 2 novembre 2005, ont vendu à la société Damiette substituée dans le bénéfice de la promesse précitée, la parcelle précitée au prix prévu dans la promesse.
Sur la demande de M. [G] [O], cousin de Mme [C] et médecin, et sur le rapport du 22 novembre 2005 de M. [A], psychiatre, par ordonnance du 28 novembre 2005, le juge des tutelles du tribunal d'instance de Palaiseau a placé [U] [C] sous sauvegarde de justice pour toute la durée de l'instance aux fins d'une mesure de protection. Par ordonnance du 9 décembre 2005, le juge des tutelles a désigné M. [O] en qualité de mandataire spécial.
Sur la demande de M. [O] et sur le rapport du 1er décembre 2005 de M. [A], par ordonnance du 9 décembre 2005, le juge des tutelles du tribunal d'instance de Palaiseau a placé Mme [C] sous sauvegarde de justice pour toute la durée de l'instance aux fins d'une mesure de protection. Par ordonnance du même jour, le juge des tutelles a désigné M. [O] en qualité de mandataire spécial.
Par jugement du 23 février 2006, le juge des tutelles a prononcé la mise sous tutelle de [U] [C] et désigné M. [O] en qualité d'administrateur légal sous contrôle judiciaire.
Par jugement du même jour, le juge des tutelles a prononcé la mise sous tutelle de Mme [C] avec le même administrateur légal sous contrôle judiciaire.
Par actes des 3 et 7 juillet 2006, faisant valoir que les facultés mentales des époux [C] étaient altérées lors de la signature de l'acte du 1er décembre 2005, M. [O], agissant en qualité d'administrateur légal sous contrôle judiciaire de [U] [C] et de Mme [C], a fait assigner la société Damiette, ainsi que la SCP Jusot Giray Luzy Trokiner et Duparc et Mme [E], en annulation de la vente litigieuse et en condamnation des notaires au paiement de dommages-intérêts
[U] [C] est décédé le [Date décès 6] 2008.
C'est dans ces conditions que, par jugement du 18 septembre 2009, le Tribunal de grande instance d'Evry a :
- déclaré recevables mais non fondées les demandes de M. [O],
- débouté M. [O], ès qualités, de l'ensemble de ses demandes tant à l'encontre de la société Damiette que des notaires, la SCP Jusot Giray Luzy Trokiner et Duparc et Mme [E],
- condamné M. [O], ès qualités, à payer la somme de 5 000 € à la société Damiette et celle de 2 500 € à chacun des notaires au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- laissé l'intégralité des dépens à la charge du demandeur, ès qualités,
- rejeté toutes autres demandes.
Par dernières conclusions du 8 mars 2011, M. [O], ès qualités, appelant, demande à la Cour de :
- vu les articles 489 ancien, devenu 414-1, 503 ancien, 1591 et 1582 et suivants,1108, 1109, 1112 et suivants, 1116 et suivants, 491-2 et 1304, subsidiairement 1382 du Code civil, 565, 566 et suivants du Code de procédure civile,
- infirmer le jugement entrepris,
- débouter la société Damiette et les notaires de toutes leurs demandes,
- au principal et en vertu de l'article 489 ancien devenu 414-1 du Code civil, et 503 ancien du même Code :
- dire que les facultés mentales et les facultés de discernement des époux [C] étaient gravement altérées concomitamment à la promesses de vente du 14/10/2004 et à l'acte de vente du 01/12/2005, ainsi qu'antérieurement et postérieurement,
- prononcer la caducité de la promesse de vente du 14/10/2004,
- en conséquence, annuler purement et simplement la promesse, la procuration du 02/11/2005 et la vente avec toutes conséquences de droit,
- à titre subsidiaire, faire application des articles 1591 et suivants et 1582 et suivants du Code civil et dire que la vente a été consentie à prix vil et dérisoire,
- en conséquence,
- annuler, avec toutes conséquences de droit, la promesse, la procuration et la vente,
- subsidiairement, en vertu des articles 1591 et suivants et 1582 et suivants du Code civil, et si la Cour l'estimait opportun, ordonner une mesure d'expertise judiciaire, l'expert désigné ayant notamment pour mission d'évaluer les biens, au jour de tous les actes litigieux (promesse de vente et acte de vente) avec et sans application des nouvelles règles d'urbanisme et du nouveau PLU,
- très subsidiairement, et en vertu des articles 1108, 1109 et suivants et 1112 du Code civil,
- prononcer la nullité de la promesse de vente, de la procuration et de la vente avec toutes conséquences de droit,
- à titre infiniment subsidiaire, sur le fondement des articles 491-2 devenu 435 du Code civil,
- dire que la vente sera rescindée pour lésion avec les mêmes conséquences de droit,
- en tout état de cause,
- dire que les notaires ont engagé leur responsabilité in solidum avec la société Damiette sur le fondement des articles 1147 et 1382 du Code civil,
- dire que les époux [C] restitueront à la société Damiette le prix payé en cas de nullité ou de rescision pour lésion,
- condamner in solidum la société Damiette et les notaires à lui payer la somme de 80 000 € à titre de dommages-intérêts, en remboursement de son préjudice, indépendamment de la nullité,
- subsidiairement,
- les condamner sous la même solidarité en paiement d'une somme de 250 000 € à titre de dommages-intérêts en remboursement de leurs préjudices (pertes financières) au cas où la nullité ne serait pas ordonnée,
- en tout état de cause,
- ordonner la compensation entre les sommes à restituer pour le compte des époux [C] et les dommages-intérêts qui leur seront alloués,
- dire que l'arrêt à intervenir sera publié à la conservation des hypothèques,
- condamner in solidum la société Damiette et les notaires au paiement de la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.
Par dernières conclusions du 10 mars 2011, la société Damiette prie la Cour de :
- vu les articles 489 ancien, 491-2 ancien, 1147, 1153, 1304, 1315, 1378, 1382, 1383, et 1674 et suivants du Code civil, ainsi que les articles 117 et suivants et 564 du Code de procédure civile,
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré la demande de M. [O], ès qualités recevable au regard des articles 28 et 30 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 et statuant de nouveau sur ce fondement, dire que les demandes d'annulation de la promesse, de la procuration et de la vente sont irrecevables sur ce fondement,
- dire que sont irrecevables :
. la demande d'annulation des procurations du 2 novembre 2005,
. la demande de caducité de la promesse,
. la demande de rescision pour lésion de la vente,
- à titre principal et si les demandes de M. [O], ès qualités, sont jugées recevables,
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- débouter M. [O], ès qualités, de l'ensemble de ses demandes,
- au fond, à titre subsidiaire et dans l'hypothèse où, par impossible, la Cour infirmerait le jugement et ferait droit à la demande d'annulation, et éventuellement à la demande de dommages-intérêts formée par M. [O],
- ordonner la restitution du prix de vente,
- condamner in solidum Mme [E] et Mme [C], représentée par son tuteur M. [O], à lui payer la somme de 78 489,08 € arrêtée au 31 janvier 2011 (et sauf à parfaire au jour de l'arrêt à intervenir),
- subsidiairement, les condamner in solidum à lui payer les intérêts au taux légal à compter du 1er décembre 2005 sur la somme de 447 615 €,
- les condamner in solidum à lui payer la somme de 27 958 € à titre de dommages-intérêts au titre des frais notariés,
- condamner Mme [E] à la relever et garantir de l'ensemble des condamnations pouvant être mises à sa charge, à quelque titre que ce soit, au profit de Mme [C],
- en tout état de cause, condamner Mme [C], représentée par son tuteur M. [O] (ou subsidiairement, en cas d'annulation des actes et/ou de condamnation au paiement de sommes, Mme [E]), d'une part, à leur payer la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, d'autre part, aux entiers dépens.
Par dernières conclusions du 14 février 2011, Mme [E] prie la Cour de :
- vu les articles 564 et 565 du Code de procédure civile,
- déclarer irrecevables les demandes nouvelles formées par M. [O], ès qualités, sur le fondement nouveau des articles 1108 et suivants et 1591 et suivants du Code civil,
- subsidiairement,
- déclarer mal fondé l'appel de M. [O], ès qualités, l'en débouter,
- confirmer le jugement, en conséquence,
- constater l'absence de trouble mental des époux [C] lors de la signature de l'acte authentique du 01/12/2005,
- débouter M. [O], ès qualités, de ses demandes d'annulation et de rescision de la vente,
- vu l'article 1382 du Code civil,
- constater l'absence de faute de sa part,
- débouter M. [O] ès qualité de son action en responsabilité civile et professionnelle dirigée contre elle et de toutes ses demandes,
- débouter la société Damiette de ses demandes dirigées contre elle,
- condamner M. [O], ès qualités, à lui payer la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.
Par dernières conclusions du 14 février 2011, la SCP Jusot Giray Luzy Trokiner et Duparc demande à la Cour de :
- vu les articles 564 et 565 du Code de procédure civile,
- déclarer irrecevables les demandes nouvelles formées par M. [O], ès qualités, sur le fondement des articles 1108 et suivants et 1591 et suivants du Code civil,
- subsidiairement,
- déclarer mal fondé l'appel de M. [O], ès qualités,
- l'en débouter,
- confirmer le jugement entrepris, en conséquence,
- constater l'absence de trouble mental des époux [C] lors de la signature de l'acte authentique du 1er décembre 2005,
- débouter M. [O], ès qualités, de ses demandes d'annulation et de rescision de la vente,
- vu l'article 1382 du Code civil,
- constater qu'elle n'a commis aucun manquement à ses obligations civiles professionnelles de nature à engager sa responsabilité professionnelle envers les époux [C], représentés par leur tuteur,
- en conséquence,
- débouter M. [O] de l'intégralité de ses demandes formulées contre elle
- le condamner à lui payer une somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.
SUR CE, LA COUR
Considérant, sur la publication de l'assignation et la recevabilité des demandes de M. [O], ès qualités, que l'assignation du 3 juillet 2011 en nullité de la vente, délivrée à la société Damiette et à Mme [E] a été publiée à la conservation des hypothèques de [Localité 16] le 15 novembre 2006 et a été enregistrée sous les références : 2006 D n° 8445 volume : 2006 P n° 5131 ;
Considérant que l'assignation du 7 juillet 2006, délivrée à la SCP Jusot Giray Luzy Trokiner et Duparc aux fins de condamnation au paiement de dommages-intérêts, n'avait pas à être publiée sous peine d'irrecevabilité, de sorte qu'est sans incidence le rejet de la publication de cet acte par décision du 22 décembre 2006 du conservateur des hypothèques de Palaiseau ;
Considérant qu'en conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a déclaré recevable, au regard des articles 28 et 30 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955, la demande en nullité de la vente du 1er décembre 2005 ;
Considérant que les demandes de caducité et de nullité de la promesse de vente du 14 octobre 2004 et de nullité la procuration du 2 novembre 2005 donnée pour cette vente, ainsi que celles d'annulation de la vente et de la promesse pour défaut de prix sérieux et vices du consentement, ne sont pas nouvelles en cause d'appel dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, à savoir l'annulation de la vente du 1er décembre 2005 réalisée en suite de la promesse du 14 octobre 2004 et portant sur le même bien ; que ces demandes sont donc recevables ;
Considérant que les copies des actes authentiques de la promesse et de la vente, ainsi que de l'acte sous seing privé de procuration ont été versées aux débats, de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de M. [O], ès qualités, de communication des documents contractuels ;
Considérant que l'acte authentique fait pleine foi de la convention qu'il renferme, notamment s'agissant des faits accomplis par le notaire lui-même ou s'étant passés en sa présence ;
Qu'en l'espèce, le notaire a constaté la signature de la promesse du 14 octobre 2004 par les époux [C], qu'il a annexé à l'acte de vente du 1er décembre 2005 l'acte sous seing privé de procuration du 2 novembre 2005 donnée par les époux [C] au clerc de notaire pour les représenter à l'acte, et constaté la signature de cet acte par la société Damiette ; que, dès lors, la fausseté ou l'inexistence des signatures ou paraphes apposés sur l'acte de promesse de vente et sur l'acte de vente ne peut être invoquée que dans le cadre d'une instance en faux ;
Considérant que M. [O], ès qualités, n'établit pas que la procuration du 2 novembre 2005 versée aux débats présente des irrégularités quant aux paraphes et signatures qui y sont apposées ;
Considérant qu'en conséquence, la demande d'annulation de ces actes pour ces causes doit être rejetée ;
Considérant que les époux [C], qui ont unilatéralement promis par acte authentique du 14 octobre 2004 de vendre à la société La Merantaise la parcelle litigieuse, ont, ainsi, définitivement consenti à vendre ;
Qu'en outre, par lettre du 12 juillet 2005 adressée et reçue par Mme [E], dans le délai prévu par la promesse soit avant le 18 juillet 2005, la société La Merantaise a levé l'option en indiquant, conformément à la faculté contractuelle, qu'elle se substituait la société Damiette et versant une somme de 2 676 € ;
Considérant qu'ainsi, la promesse n'est pas caduque et la vente est parfaite ; qu'en conséquence, pour la validité de la vente, la question de l'existence d'une altération des facultés mentales des vendeurs ne se pose qu'à la date de leur consentement à la promesse du 14 octobre 2004, celle de la lucidité des vendeurs à la date de la procuration du 2 novembre 2005 n'ayant d'intérêt que pour décider s'il y a lieu ou non d'ordonner à l'administrateur légal sous contrôle judiciaire de Mme [C] de réaliser la vente par acte authentique, cette signature devant être ordonnée dans l'hypothèse où la promesse est valide, sans qu'il y ait lieu d'obtenir l'autorisation du juge des tutelles ;
Considérant que les moyens développés par M. [O], ès qualités, au soutien de son appel, relatifs à la nullité de la promesse du 14 octobre 2004 pour insanité d'esprit des promettants, ne font que réitérer sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs exacts que la Cour adopte, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation ;
Considérant qu'il sera ajouté que, concernant Mme [C], née le [Date naissance 5] 1925, il ne résulte pas de l'expertise médicale réalisée par le docteur [A], psychiatre, médecin inscrit sur la liste du procureur de la République au sens de l'article 493-1 ancien du Code civil, alors applicable, que l'altération des facultés mentales qu'il a constatée le 24 novembre 2005 affectait déjà l'intéressée le 14 octobre 2004 ;
Considérant que si, lors de l'hospitalisation de Mme [C] en mai 1999 en raison d'une instabilité à la marche avec désorientation temporo-spatiale, le bilan paraclinique a mis en évidence une atrophie cérébrale modérée, il ne peut en être déduit une insanité d'esprit de l'intéressée constante dès cette période ;
Qu'il n'est pas établi que le double pontage coronarien en 2002 et l'hospitalisation pour anémie en 2003 aient eu une incidence sur les facultés mentales de Mme [C] ; que le 23 septembre 2003, le docteur [B] a revu l'intéressée pour des troubles de la marche et de l'équilibre, sans noter d'altération des facultés mentales ;
Considérant que le docteur [G] [W], médecin traitant des époux [C], a certifié le 9 septembre 2003, que l'état de santé de ces derniers n'était pas compatible avec un contrat ; qu'à la demande de M. [O], il a précisé le 8 novembre 2005, qu'il avait établi ce certificat "afin d'annuler une vente abusive" ;
Que l'avis du 9 septembre 2003 établi sans que le médecin traitant ait jugé bon de signaler la situation au juge des tutelles, n'est pas un diagnostic ; qu'il est imprécis et ne permet pas de prouver l'existence d'une insanité d'esprit de chacun des époux [C] à cette date qui, de surcroît, aurait existé le 14 novembre 2004 ;
Qu'en effet, postérieurement à la mise sous tutelle, le docteur [W], par certificat du 3 février 2007, a constaté que Mme [C] était apte à exprimer clairement ses volontés testamentaires, ce qui a conduit le juge des tutelles à permettre à celle-ci de modifier son testament ; qu'il s'en déduit que l'altération des facultés mentales de Mme [C], qui n'a été diagnostiquée que le 1er décembre 2005, soit à une date postérieure et éloignée du 14 novembre 2003, n'est pas ni stable ni constante ;
Considérant que le certificat du 27 février 2006, établi a posteriori par le docteur [W] à la demande de M. [O] qui allait engager la présente procédure, aux termes duquel les premières constatations de ce médecin de l'altération des fonctions supérieures de Mme [C] dateraient de mars 2003, est dénué de force probante ;
Considérant qu'en conséquence, le Tribunal a décidé à bon droit que M. [O], ès qualités, n'établissait pas l'existence d'un trouble mental de Mme [C] le 14 novembre 2004 ;
Considérant que, concernant [U] [C], né le [Date naissance 4] 1919, il ne résulte pas de l'expertise médicale réalisée par le docteur [A], psychiatre, médecin inscrit sur la liste du procureur de la République au sens de l'article 493-1 ancien du Code civil, alors applicable, que l'altération des facultés mentales qu'il a constatée le 17 novembre 2005 affectait déjà l'intéressé le 14 novembre 2004 ;
Considérant que le compte rendu d'hospitalisation de [U] [C] dressé par le docteur [T] le 18 décembre 2002 révèle l'existence d'un trouble du rythme cardiaque sans qu'une altération des fonctions supérieures soit relevée ;
Que le compte rendu d'hospitalisation de [U] [C] dressé par le docteur [T] le 10 avril 2003 se borne à attester de l'existence d'une décompensation cardiaque dont l'évolution était favorable ;
Qu'il est renvoyé aux motifs ci-dessus concernant la valeur probante du certificat du docteur [W] du 9 septembre 2003 ;
Considérant que le certificat du 27 février 2006, établi a posteriori par le docteur [W] à la demande de M. [O] qui allait engager la présente procédure, aux termes duquel les premières constatations de ce médecin de l'altération des fonctions supérieures de [U] [C] dateraient de décembre 2002, est dénué de force probante ;
Considérant qu'en conséquence, le Tribunal a décidé à bon droit que M. [O], ès qualités, n'établissait pas l'existence d'un trouble mental de [U] [C] le 14 novembre 2004 ;
Considérant que ni la lettre des époux [C] du 9 novembre 2005 adressée au notaire l'informant de leur incapacité de vendre un autre bien, ni leur testament du 22 septembre 2005 renfermant leur souhait que leur maison revienne à [H] [Z] alors qu'ils la lui avaient vendue, ne prouvent l'incapacité des intéressés au 14 novembre 2004 ;
Considérant qu'il sera ajouté que la lettre de M. [O] du 28 octobre 2003, qui aurait été adressée au procureur de la République du tribunal de grande instance d'Evry, n'évoque pas le trouble mental des époux [C], mais leur fragilité due à leurs affections physiques, M. [O] n'ayant d'ailleurs saisi le juge des tutelles qu'en novembre 2005 ;
Considérant que, dès lors, la vente de la parcelle litigieuse à la société Damiette est parfaite après la levée d'option de cette dernière, de sorte que la demande d'annulation de cette vente pour insanité d'esprit sur le fondement de l'article 489 ancien du Code civil doit être rejetée ;
Considérant qu'il ne résulte pas des rapports du docteur [A] ni d'aucune autre pièce médicale du dossier que l'altération des facultés mentales, que le médecin spécialiste a constatée chez chacun des époux [C] les 17 et 24 novembre 2005 et qui a déterminé l'ouverture de la tutelle, existait lorsqu'ils se sont engagés à vendre la parcelle à la société La Merantaise, à laquelle s'est substituée la société Damiette ; qu'en conséquence, cette vente ne peut davantage être annulée sur le fondement de l'article 503 ancien du Code civil ;
Considérant que la parcelle de terrain à bâtir d'une contenance de 9 947 m², cadastrée section BD n° [Cadastre 3], lieudit "[Adresse 8] (91) a été promise à la vente le 14 novembre 2004 au prix de 447 615 € ;
Considérant que le sérieux du prix ne peut être apprécié au regard du plan local d'urbanisme (PLU) qui aurait rendu constructibles les parcelles des époux [C], le PLU n'ayant été adopté par la commune que le 14 mai 2007 après élaboration le 6 juin 2006 ; qu'en conséquence, l'estimation de la parcelle litigieuse en prenant en compte les règles d'urbanisme inscrites au PLU ne doit pas être retenue ;
Considérant que l'évaluation de cette parcelle par M. [D] [L] le 10 février 2006 au prix de 758 160,34 € n'est pas probante, car elle ne permet pas d'estimer le bien au 14 novembre 2004 ;
Que l'estimation réalisée en mai 2010 par M. [X] [K], expert agréé près cette Cour, fondée sur une description précise du bien et de sa situation, ainsi que sur les prix de vente de biens comparables à la même période, peut être retenue comme élément de preuve ;
Que l'homme de l'art retient une valeur vénale en 2004 de 45 € le mètre carré, estimant donc que le prix de 447 615 € est normal ;
Qu'en conséquence, la demande de nullité de la vente fondée sur le vil prix doit être rejetée ;
Considérant, sur l'existence d'un vice du consentement, qu'il vient d'être dit que l'altération des facultés mentales des époux [C] le 14 novembre 2004 n'est pas établie et que les actes ne recèlent pas des erreurs révélant l'existence d'un vice ; que ni la violence ni l'erreur ni les manoeuvres dolosives de l'acquéreur et du notaire ne résultent de la fragilité physique ou du grand âge des contractants ;
Qu'il ne peut être fait grief au notaire d'avoir réalisé la vente du 1er décembre 2005 sur le fondement de la procuration établie par les époux [C] le 2 novembre 2001, soit avant l'hospitalisation de Mme [C] du 16 novembre au 6 décembre 2005 ;
Considérant qu'il ressort des pièces versées aux débats qu'en 2002, 2003 et 2004, les époux [C], propriétaires fonciers, ont mobilisé leur patrimoine, tout en conservant l'usage de leur habitation, en effectuant des ventes au profit de personnes différentes, par l'intermédiaire de trois notaires, qui ne peuvent être indistinctement présumés s'être concertés pour spolier les vendeurs ;
Considérant que le placement par les époux [C] le 5 novembre 2004 du prix de la vente du 27 octobre 2004 dans une assurance-vie atteste tant leur bon sens que de leur volonté de disposer de liquidités pour faire face à leurs besoins liés à leur état physique qui ne pouvait attendre l'adoption du PLU ;
Considérant que les vices du consentement allégués n'étant pas établis, la demande d'annulation de la ventes de ce chef doit être rejetée ;
Considérant que la demande de rescision pour lésion, fondée sur l'article 491-2 ancien du Code civil, qui n'est pas nouvelle, est recevable ;
Considérant que les époux [C] n'étant pas placés sous sauvegarde de justice à la date à laquelle ils se sont définitivement engagés, soit au 14 novembre 2004, le texte précité n'est pas applicable, de sorte que la demande doit être rejetée ;
Considérant qu'à supposer que la lésion puisse être examinée en considération de la mise sous sauvegarde de justice de [U] [C] le 28 novembre 2005, soit antérieurement à la réalisation de la vente par acte du 1er décembre 2005, la demande n'est pas fondée dès lors qu'il vient d'être dit que la parcelle litigieuse a été vendue à son juste prix ;
Considérant, sur l'annulation de l'acte authentique du 1er décembre 2005 et la nécessité d'ordonner sa réitération par M. [O], ès qualités, eu égard à l'engagement définitif le 14 novembre 2004 des époux [C] dont la validité vient d'être constatée, que, comme le Tribunal l'a relevé, l'existence d'un trouble mental des époux [C] au 2 novembre 2005 n'est pas établie ;
Qu'il a été dit que le certificat médical du docteur [W] du 8 novembre 2005 n'avait pas de valeur probante ;
Que le 9 novembre 2005, M. [O] a fait signer aux époux [C] une lettre écrite de sa main, adressée à Mme [E], énonçant : "en raison de notre état de santé actuel nous sommes l'un et l'autre dans l'impossibilité de signer le moindre acte notarié et de jusqu'à nouvel ordre" ; qu'outre que le sens de cette lettre est ambigu en ce qu'elle tend à confirmer la procuration du 2 novembre dans la mesure où l'état de santé des intéressés ne leur permettait pas de se déplacer pour signer l'acte du 2 décembre, le fait que M. [O] l'ait soumise à la signature des époux [C] laisse présumer qu'ils étaient en état d'en comprendre la portée et qu'ils ne souffraient donc pas d'une altération de leurs facultés mentales ;
Considérant que, dans ces conditions, il n'y a pas lieu d'annuler l'acte authentique du 1er décembre 2005 ;
Considérant que les actes litigieux n'étant pas annulés, les demandes contre les notaires doivent être rejetées ;
Considérant que Mme [C] n'ayant subi aucun préjudice, la demande en paiement de la somme de 250 000 € de dommages-intérêts doit être rejetée ;
Considérant que la solution donnée au litige emporte le rejet de la demande sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile de M. [O], ès qualités ;
Considérant que l'équité commande qu'il soit fait droit à la demande de la société Damiette et des notaire, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel, comme il est dit dans le dispositif du présent arrêt ;
PAR CES MOTIFS
Déclare recevables les demandes de M. [G] [O], agissant en qualité d'administrateur légal sous contrôle judiciaire de Mme [J] [M], veuve [C], de caducité et de nullité de la promesse de vente du 14 octobre 2004 et de nullité la procuration du 2 novembre 2005, ainsi qu'en annulation de la vente du 1er décembre 2005 pour défaut de prix sérieux et vice du consentement et en rescision pour lésion ;
Déboute M. [G] [O], agissant en qualité d'administrateur légal sous contrôle judiciaire de Mme [J] [M], veuve [C], de sa demande de communication des documents contractuels ;
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Déboute M. [G] [O], agissant en qualité d'administrateur légal sous contrôle judiciaire de Mme [J] [M], veuve [C], de ses demandes de caducité de la promesse, de nullité des actes des 14 octobre 2004, 2 novembre 2005 et 1er décembre 2005, ainsi que de celles d'annulation de la vente du 1er décembre 2005 au profit de la société Damiette, fondées sur l'article 503 ancien du Code civil, le défaut de prix sérieux et les vices du consentement, ainsi que de sa demande de dommages-intérêts ;
Condamne M. [G] [O], agissant en qualité d'administrateur légal sous contrôle judiciaire de Mme [J] [M], veuve [C], sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel, à payer à :
- la société Damiette la somme de 3 000 €,
- Mme [S] [E] celle de 1 500 €,
- la SCP Jusot Giray Luzy Trokiner et Duparc celle de 1 500 € ;
Rejette les demandes pour le surplus ;
Condamne M. [G] [O], agissant en qualité d'administrateur légal sous contrôle judiciaire de Mme [J] [M], veuve [C], aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile.
La Greffière,La Présidente,