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03/05/2011 | FRANCE | N°09/11526

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 03 mai 2011, 09/11526


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 03 Mai 2011

(n° 22 , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/11526



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Septembre 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS section commerce RG n° 08/12055









APPELANT

Monsieur [N] [I]

[Adresse 1]

[Localité 5]

comparant en personne, assisté de Me Pierre TON

OUKOUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J133







INTIMÉE

SAS EBIZCUSS.COM

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Sandrine ZARKA EDERY, avocat au barreau de PARIS, toque : E0260



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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 03 Mai 2011

(n° 22 , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/11526

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Septembre 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS section commerce RG n° 08/12055

APPELANT

Monsieur [N] [I]

[Adresse 1]

[Localité 5]

comparant en personne, assisté de Me Pierre TONOUKOUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J133

INTIMÉE

SAS EBIZCUSS.COM

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Sandrine ZARKA EDERY, avocat au barreau de PARIS, toque : E0260

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 15 Mars 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Brigitte BOITAUD, Présidente

Monsieur Philippe LABREGERE, Conseiller

Mme Marie-Aleth TRAPET, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Monsieur Polycarpe GARCIA, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Madame Brigitte BOITAUD, Présidente

- signé par Madame Brigitte BOITAUD, président et par Monsieur Polycarpe GARCIA, greffier présent lors du prononcé.

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [N] [I] est entré au service de la société MOTEK-GIGAPOLE par contrat à durée indéterminée en date du 6 novembre 2000, en qualité de commercial. Son contrat de travail a été repris par la SA EBIZCUSS.COM le 1er janvier 2007.

L'employeur a proposé à [N] [I] un licenciement, suivi d'un protocole transactionnel. Il aurait ainsi été convoqué, par lettre du 12 septembre 2008 à un entretien fixé au 23 septembre suivant, avant d'être licencié pour faute grave par lettre du 26 septembre 2008 qui allait se révéler n'être constituée que par une simple feuille blanche.

Le 30 septembre 2008, un protocole transactionnel est intervenu entre les parties, aux termes duquel la SA EBIZCUSS.COM s'engageait à payer à [N] [I] une somme de 15 000 € nets, à titre d'indemnité forfaitaire transactionnelle.

Par jugement du 22 septembre 2009, le conseil de prud'hommes de Paris a condamné la SA EBIZCUSS.COM à payer à Monsieur [N] [I] :

- 2 416,06 € à titre d'indemnité de préavis,

- 241,06 € au titre des congés payés y afférents,

- 2 834,85 € à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 1 213,78 € à titre de rappel de congés payés 2007-2008,

- 700 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La juridiction prud'homale a débouté [N] [I] du surplus de ses demandes, notamment de sa demande de paiement d'heures supplémentaires et de dommages-intérêts pour travail dissimulé.

Monsieur [I] a, par ailleurs, été condamné Monsieur [I] à rembourser la valeur de la transaction de 15'000 € net, annulée par la juridiction prud'homale à sa demande.

Cette décision a été frappée d'appel par la SA EBIZCUSS.COM qui demande à la cour de débouter [N] [I] de toutes ses demandes, d'ordonner le remboursement par M. [I] des sommes qui lui ont été versées au titre de l'exécution provisoire et de le condamner à lui payer 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

[N] [I] a formé un appel incident. Il sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu que la transaction était nulle, mais demande à la cour de juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et de condamner la société EBIZCUSS.COM à lui payer :

- 43'128,96 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1'178,02 € à titre de complément d'indemnité compensatrice de préavis,

- 117,80 €, au titre des congés payés y afférents,

- 1'236,72 €, au titre du complément de congés payés acquis sur l'année 2008

[N] [I] demande également le paiement des sommes suivantes :

- 6 757,83 € à titre de rappel de salaires pour les heures supplémentaires de 2003 à 2008,

- 675,78 € au titre des congés payés y afférents,

- 570,40 € à titre de rappel de salaires pour heures supplémentaires effectuées pour les inventaires de 2003 à 2008,

- 57,04 € au titre des congés payés y afférents,

-10 782,24 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

- 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Subsidiairement, la SA EBIZCUSS.COM demande paiement des indemnités calculées en fonction d'un salaire de référence de 1 718,69 €, et non plus de 1'602,86 €, ce montant tenant compte des heures supplémentaires réclamées.

Pour les prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux conclusions visées par le greffier et reprises oralement à l'audience du 15 mars 2011.

SUR QUOI, LA COUR

Sur la demande de rappel d'heures supplémentaires

[N] [I] fait valoir qu'à la date de son embauche, la SA EBIZCUSS.COM appliquait la réduction du temps de travail à trente-cinq heures hebdomadaires, mais qu'au regard des horaires d'ouverture et de fermeture - de 10 à 19 heures - des magasins de la société, les salariés effectuaient en réalité trente-neuf heures de travail par semaine, ne bénéficiant que d'une heure par jour de pause déjeuner.

La durée légale de travail de 151,67 heures aurait été indiquée sur les bulletins de paie des salariés, sans que l'employeur ait pris soin d'indiquer la totalité des heures supplémentaires effectuées par les salariés, ne procédant qu'à un règlement partiel des heures supplémentaires effectuées.

[N] [I] invoque les dispositions des articles L. 3171-1 et D. 3171-1 du code du travail, faisant obligation à l'employeur d'afficher les heures auxquelles commence et finit le temps de travail, ainsi que les heures et la durée de repos et, dans l'hypothèse où les salariés d'un service ou d'une équipe ne travaillent pas selon le même horaire collectif de travail affiché, de décompter la durée du travail de chaque salarié concerné selon des modalités déterminées, les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié devant être tenus à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail.

Le salarié observe encore que l'employeur a préféré verser une prime exceptionnelle en règlement des heures supplémentaires dues au titre des mois d'août et septembre 2005. Il souligne la coïncidence troublante existant entre la somme versée à titre de 'prime exceptionnelle' pour les mois d'août et septembre 2005, et la somme qui lui était due au titre des heures supplémentaires effectuées sur ces deux mois, comme la tentative de dissimulation de cette substitution, par le versement d'une prime d'un montant inférieur à la somme due sur un mois et son rattrapage le mois suivant. Il ajoute que l'appellation de primes exceptionnelles a disparu des bulletins de paie dès lors que des heures supplémentaires ont été partiellement réglées à compter d'octobre 2005.

[N] [I] soutient que son employeur s'est contenté de contester les horaires allégués sans justifier des heures réellement effectuées, tout en précisant lors de l'audience de conciliation qu'il n'y avait pas de système informatisé pour le décompte des heures travaillées.

[N] [I] estime enfin que le fait que les quatre salariés qui réclamaient le paiement d'heures supplémentaires aient été licenciés et contraints de réclamer devant la juridiction prud'homale le paiement des heures supplémentaires effectuées ne relève pas du hasard.

La SA EBIZCUSS.COM reproche à [N] [I] de confondre l'amplitude d'ouverture des magasins et les heures qu'il a réellement effectuées. Elle observe que, si l'on devait attacher du crédit aux affirmations du salarié, il effectuerait un horaire hebdomadaire de quarante - et non de trente-neuf heures - et soutient que, même si les magasins sont ouverts de 10 h à 19 h du lundi au vendredi, et - le samedi - de 10 h à 13 h et de 14h à 19h, les salariés ne travaillent que sept heures par jour, effectuant les trente-cinq heures hebdomadaires visées sur les bulletins de paie et dans les contrats de travail des salariés embauchés à compter de 2003. Au surplus, [N] [I] ne tiendrait pas compte, dans son calcul d'heures supplémentaires, de ses congés payés, ni de ses absences.

La SA EBIZCUSS.COM fait encore valoir que le salarié qui a répondu à la sommation interpellative délivrée par [N] [I] a indiqué à l'huissier que des plannings étaient remis 'verbalement' et de manière 'incertaine' aux salariés, ce qui démontrerait que les horaires de travail ne correspondraient pas à l'amplitude d'ouverture du magasin, sans quoi l'existence de plannings n'aurait présenté aucun intérêt.

La SA EBIZCUSS.COM fait valoir quant à elle que les magasins sont fermés au public pendant les inventaires qui ne sont pas effectués en dehors des heures de travail des salariés.

Enfin, l'employeur conteste la valeur probante susceptible d'être accordée à des éléments établis de la main du salarié à sa seule initiative, les décomptes de temps de présence devant avoir été établis par le salarié à la demande de l'employeur.

S'agissant des heures supplémentaires pour inventaires, [N] [I] soutient que ces opérations intervenaient toujours en dehors des heures normales de travail comme en attestent les pièces produites, singulièrement les courriels le convoquant pour réaliser l'inventaire à la fin de sa journée de travail, à partir de 19 heures. Le salarié évalue à une moyenne de trois heures par trimestre ce travail d'inventaire et réclame en conséquence douze heures supplémentaires par an.

Considérant que la SA EBIZCUSS.COM ne rapporte d'aucune manière la preuve que l'horaire collectif de l'entreprise ne correspond pas aux horaires d'ouvertures affichés et constatées ; que, dans ces conditions, les salariés sont considérés comme étant à la disposition de l'employeur pendant les horaires d'ouverture, soit entre 10 h à 19 h, hormis durant l'heure de pause dont il est constant qu'elle leur était accordée pour le repas ;

Considérant que si M. [X], qui a travaillé peu de temps au service de la société, a indiqué, sur interpellation, le 18 juin 2009, que des plannings étaient transmis 'verbalement' et de manière 'incertaine' aux salariés, sa déclaration n'exclut pas que les salariés aient été à la disposition de leur employeur durant la période d'ouverture du magasin auquel ils étaient affectés, ce qu'au contraire il confirme ; qu'il y avait en effet lieu d'organiser le roulement des salariés durant la pause déjeuner et dans la détermination du jour de congé accordé à chacun d'eux durant la semaine ;

Considérant que le salarié verse aux débats des documents qui confirment la réalité de la mise à disposition de l'employeur durant toute la période d'ouverture de l'établissement ; que la SA EBIZCUSS.COM a en effet adressé aux salariés des rappels à l'ordre, confirmant la réalité de l'horaire collectif correspondant aux horaires d'ouverture des magasins, soit de 10 heures à 19 heures ; qu'ainsi, dans un courriel en date du 17 février 2006, l'employeur écrivait': 'Commencer à fumer à 18 h ou 18 h30 est une aberration et n'a rien avoir avec le respect, c'est une règle et, qui plus est, une loi. J'en profite pour vous rappeler que les horaires doivent être respectés, que si vous êtes manager vous devez les FAIRE respecter et que les pauses cafés sont au nombre de deux, une le matin et une l'après-midi. Il n'est plus question de saucissonner sa pause en trois fois cinq minutes le matin et trois fois cinq minutes l'après-midi. Merci de s'en souvenir' ;

Considérant que ces prescriptions figurent encore dans le compte -rendu de la réunion du 24 mars 2006, durant laquelle l'employeur a rappelé ses exigences en matière d'interdiction de fumer pendant le temps de travail, de modalités d'utilisation des pauses, et aussi relativement aux horaires de travail ; que la note est ainsi rédigée :

'HORAIRES : 10 h - 19 h - Venir 5 à 10 mn avant l'ouverture.

Pour la pause du midi, merci d'être ponctuel au retour de déjeuner' ;

Considérant qu'il est encore établi par les pièces communiquées que la SA EBIZCUSS.COM n'a jamais contesté la réalité des heures supplémentaires effectuées par les salariés lorsque ceux-ci intervenaient pour en obtenir le paiement ; que l'employeur répondait qu'il préparait une réponse au message ' très bien rédigé' qui évoquait cette question, encourageant le salarié à conserver sa motivation et le félicitant pour le travail accompli ; qu'en réponse à un autre salarié, M. [J] indiquait : 'Pour information, je tâche à compter de la semaine du 19 janvier 2009 de mettre en place un système de roulement par rapport à vos 151,67 heures réelles travaillées ' Ne croyez pas que je n'ai pas retenu vos multiples demandes ; il me faut juste avoir confirmation de notre direction' ; que la solution n'étant pas intervenue en septembre 2009, l'employeur se contentait de répondre à un autre salarié travaillant dans les mêmes conditions, qui réclamait à son tour le paiement des heures supplémentaires : 'Salut Romain, reste concentré sur le chiffre ! Ne t'inquiète pas, on recrute du monde ! A plus et bon closing'; que ce salarié se trouvait contraint, le 1er février 2010, de solliciter de nouveau le paiement de ses heures supplémentaires, en écrivant - sans être démenti - : 'Si nous pouvions prendre un rendez-vous aussi à propos des horaires car, [D], cela fait trois ans que je réclame mes heures supplémentaires et c'est toujours «'oui, oui, plus tard on verra'» et ça m'embête de travailler cinq heures de plus par semaine' ;

Considérant que les décomptes établis par [N] [I] tiennent exactement compte des quelques heures supplémentaires réglées par la SA EBIZCUSS.COM, lesquelles ont toutes été déduites des sommes réclamées à ce titre, sur la base de 17,33 heures par mois correspondant au différentiel entre les 39 heures hebdomadaires accomplies et les 35 heures mentionnées sur les bulletins de salaire ; que la preuve est également rapportée de ce que les inventaires ont été réalisés en dehors de l'horaire quotidien de travail ;

Considérant qu'il y a lieu, dans ces conditions, de faire droit à l'entière demande présentée au titre des heures supplémentaires et des congés payés y afférents, le jugement étant réformé sur ce point ;

Considérant que la dissimulation d'emploi salarié prévue par le dernier alinéa de l'article L. 324-10 devenu L. 8221-5 du code du travail est caractérisée, dès lors que les éléments du dossier permettent d'établir que l'employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué ; que la SA EBIZCUSS.COM a délibérément occulté le règlement des heures supplémentaires qui se trouvaient de fait mensualisées, comme le soutient [N] [I] ; que cette situation a perduré durant plusieurs années ; qu'au surplus, l'employeur a tenté de régler certaines heures supplémentaires sous forme de primes, les coïncidences et manoeuvres dénoncées par le salarié démontrant le caractère intentionnel de l'omission sur les bulletins de paie, du nombre d'heures de travail réellement effectuées ;

Considérant que, par application de l'article L. 8223-1 du code du travail, le salarié a droit en cas de rupture de la relation de travail à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire, sauf règles légales ou stipulations conventionnelles plus favorables ; qu'il y a lieu de faire droit à la demande présentée par [N] [I] de ce chef, réformant sur ce point le jugement entrepris ;

Sur la nullité de la transaction

[N] [I] soutient que tous les documents remis à l'occasion de la rupture de son contrat de travail ont été signés le même jour et ont été antidatés ou post-datés, ainsi qu'en atteste l'envoi par la SA EBIZCUSS.COM, en guise de lettre de licenciement, fût-ce sous forme de recommandé avec avis de réception, d'une enveloppe contenant une feuille blanche.

[N] [I] rappelle que la transaction ayant pour objet de régler les conséquences du licenciement, doivent être annulées les transactions conclues sans que le salarié n'ait pris connaissance de la lettre de licenciement. Il sollicite, en conséquence, la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a déclaré nulle la transaction signée le 30 septembre 2008, aux termes de laquelle la SA EBIZCUSS.COM s'engageait à payer à Monsieur [I] la somme de 15 000 € net à titre d'indemnité forfaitaire transactionnelle.

La SA EBIZCUSS.COM conclut elle aussi à la nullité de la transaction intervenue entre les parties le 30 septembre 2008, reconnaissant que celle-ci a précédé la notification au salarié de son licenciement. Elle demande en conséquence la condamnation d'[N] [I] à lui rembourser la somme de 15 000 € effectivement réglée.

Considérant qu'il y a lieu de constater l'accord des parties sur la confirmation du jugement en ce qu'il a annulé la transaction du 30 septembre 2008,

Sur la rupture du contrat de travail

[N] [I] fait valoir que la fraude commise par son employeur est établie et qu'elle n'est au demeurant pas contestée, la transaction ayant été signée en l'absence de lettre de licenciement, une feuille blanche ayant été notifiée en guise de lettre de licenciement, celle versée aux débats ayant été antidatée et ne portant pas même la mention 'remise en mains propres contre décharge'.

La SA EBIZCUSS.COM soutient pour sa part que la remise ou l'envoi par courrier simple de la lettre de licenciement, ne le prive pas pour autant de cause réelle et sérieuse, dès lors que les motifs du licenciement sont établis.

Elle rappelle que la lettre de licenciement était ainsi rédigée :

'Par lettre en date du 29 août 2008, remise en main propre, faisant suite aux divers entretiens que nous avons eus, nous vous avons confirmé qu'à compter du 1er octobre 2008, vous exerceriez vos fonctions depuis le site du [Adresse 3].

Ce transfert n'entraînant aucune modification tant de vos fonctions que de votre rémunération, s'inscrit dans le cadre du pouvoir d'organisation et direction de tout employeur.

Vous n'étiez en conséquence pas en droit de vous y opposer et ce d'autant plus que votre contrat de travail comporte une clause de mobilité géographique.

Malgré cela, par lettre du 2 septembre 2008, vous avez manifesté votre refus quant à ce transfert'.

Le refus obstiné pour raisons personnelles d'[N] [I] constituerait la faute grave qui lui est reprochée.

La SA EBIZCUSS.COM ajoute, en tant que de besoin, que le salarié ne justifie d'aucun préjudice pour étayer sa demande allant jusqu'à vingt-quatre mois d'un salaire fixé à 1'771,78 € brut mensuel, alors qu'il serait de 1'602,86 € et qu'[N] [I] s'était d'ailleurs estimé rempli de ses droits par le versement d'une somme de 15 000 €.

La lettre de licenciement privée d'effet. En présence d'une transaction et de man'uvres frauduleuses touchant notamment à la lettre de licenciement, la Cour de cassation retient, non seulement que la transaction doit être annulée, mais encore que la lettre de licenciement est privée d'effet, de sorte que les griefs invoqués dans ce document doivent être écartés des débats ;

Considérant que la falsification d'une lettre de licenciement quant à sa date, à sa remise au salarié à cette date et à la référence à l'entretien préalable constitue une man'uvre frauduleuse de l'employeur pour donner une apparence de régularité à la transaction dans le dessein de se soustraire aux règles d'ordre public régissant le licenciement ; qu'en conséquence, la lettre de licenciement litigieuse est privée d'effet ; que le licenciement de M. [N] [I] est sans cause réelle et sérieuse ; que le jugement mérite réformation en ce qu'il a jugé que le licenciement de M. [I] reposait sur une cause réelle et sérieuse;

Sur les conséquences du défaut de cause réelle et sérieuse au licenciement

[N] [I] sollicite le calcul des indemnités de rupture et de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en fonction d'un salaire de référence de1 718,69 € tenant compte des heures supplémentaires qui lui sont dues. Il demande la fixation de son préjudice à vingt-quatre mois de salaire.

[N] [I] indique qu'il a quitté l'entreprise le 30 septembre 2008 et que l'article 3.6 de la convention collective applicable prévoit que la durée de préavis est de deux mois pour les salariés ayant plus de deux années d'ancienneté, correspondant au minimum légal résultant de l'article L. 1234-1 du code du travail. Il demande à la cour de confirmer sur le principe le jugement entrepris, lequel, rejetant la faute grave, avait condamné l'employeur au paiement de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés y afférents. Il sollicite ainsi le paiement d'une somme 1'178,02 €, et des congés payés y afférents, soit 117,80 €, après déduction de la somme de 2'416,06 € perçue en exécution du jugement.

[N] [I] demande à la cour d'ordonner la compensation entre l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et l'indemnité versée par la société au titre de la transaction.

Le salarié indique que la SA EBIZCUSS.COM restait lui devoir, au titre de l'année 2008, vingt-quatre jours de congés payés, outre six jours acquis, soit un total de trente jours. Dans le cadre de l'exécution du jugement, son employeur lui a versé une somme de 1'213,78 €.

[N] [I] sollicite en conséquence la confirmation du jugement sur le principe de la condamnation au titre des congés payés acquis sur l'année 2008 et la condamnation de la société EBZCUSS.COM à lui payer la somme 2'450,50 € au titre du solde de ses congés payés pour l'année 2008, soit déduction faite des sommes déjà perçues, 1'236,72 €.

La SA EBIZCUSS.COM demande à la cour de constater qu'[N] [I] ne justifie pas du préjudice dont il demande réparation et d'en tirer les conséquences.

Considérant que les indemnités de rupture et les congés payés y afférents doivent être calculés en fonction du salaire intégrant les heures supplémentaires dues à [N] [I]; que la moyenne des trois derniers mois de salaires est portée, en conséquence de la prise en compte des heures supplémentaires accomplies et dues par la SA EBIZCUSS.COM, à une somme de 1 718,69 € ;

Considérant que les indemnités de rupture et les congés payés y afférents doivent être calculés en fonction du salaire intégrant les heures supplémentaires dues à [N] [I]; que l'indemnité de préavis due s'élève à la somme de 3'594,08 € ;

Considérant que, compte tenu de l'effectif du personnel de l'entreprise (plus de onze salariés), d'une ancienneté de huit ans et de l'âge du salarié (vingt-neuf ans au moment du licenciement), ainsi que des conséquences du licenciement à son égard, telles qu'elles résultent des pièces et des débats, [N] [I] étant toujours à la recherche d'un emploi, il lui sera alloué, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, une somme de 20 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Considérant qu'il y a lieu de faire droit à la demande d'[N] [I] tendant à ordonner la compensation judiciaire entre sa créance indemnitaire et la créance de la SA EBIZCUSS.COM au titre du remboursement de la somme versée en exécution de la transaction annulée, soit 15 000 € ;

Considérant qu'[N] [I] est également bien fondé à solliciter un rappel de 1'236,72 €, au titre du complément de congés payés acquis sur l'année 2008 ;

PAR CES MOTIFS

REFORME le jugement entrepris ;

CONDAMNE la SA EBIZCUSS.COM à payer à Monsieur [N] [I] :

- 6 757,83 € à titre de rappel de salaires pour les heures supplémentaires de 2003 à 2008,

- 675,78 € au titre des congés payés y afférents,

- 570,40 € à titre de rappel de salaires pour heures supplémentaires effectuées pour les inventaires de 2003 à 2008,

- 57,04 € au titre des congés payés y afférents,

- 10 312,14 € à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

- 3'594,08 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 359,40 € à titre de congés payés y afférents,

- 1'236,72 €, au titre du complément de congés payés acquis sur l'année 2008,

- 20 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

ORDONNE la compensation judiciaire entre la créance indemnitaire de M. [N] [I] et la créance de la SA EBIZCUSS.COM au titre du remboursement de la somme versée en exécution de la transaction annulée, soit la somme de 15 000 € ;

CONFIRME pour le surplus le jugement entrepris ;

Y AJOUTANT,

CONDAMNE la SA EBIZCUSS.COM à payer à Monsieur [N] [I] une somme de 3 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE la SA EBIZCUSS.COM de ses demandes ;

CONDAMNE la SA EBIZCUSS.COM aux dépens.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 09/11526
Date de la décision : 03/05/2011

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°09/11526 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-05-03;09.11526 ?
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