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26/04/2011 | FRANCE | N°09/03937

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 26 avril 2011, 09/03937


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 26 Avril 2011

(n° 2 , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/03937



Décision déférée à la cour : jugement rendu le 19 Mars 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS section industrie RG n° 07/10170





APPELANT

Monsieur [W] [K]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par Me Ronald VARDAGUER, avocat au barreau de PARIS, toque : E

1222 substitué par Me Monique BRANQUART-CHASTANIER, avocat au barreau de PARIS, toque : C0271







INTIMÉE

SA COUVERTURE - PLOMBERIE - CHAUFFAGE (CPC)

[Adresse 2]

[Localité 3]...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 26 Avril 2011

(n° 2 , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/03937

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 19 Mars 2009 par le conseil de prud'hommes de PARIS section industrie RG n° 07/10170

APPELANT

Monsieur [W] [K]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par Me Ronald VARDAGUER, avocat au barreau de PARIS, toque : E1222 substitué par Me Monique BRANQUART-CHASTANIER, avocat au barreau de PARIS, toque : C0271

INTIMÉE

SA COUVERTURE - PLOMBERIE - CHAUFFAGE (CPC)

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Nathalie LEROY, avocat au barreau de PARIS, toque : D 458

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Février 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Marie-Aleth TRAPET, conseiller, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Brigitte BOITAUD, président

Monsieur Philippe LABREGERE, conseiller

Madame Marie-Aleth TRAPET, conseiller

Greffier : Monsieur Polycarpe GARCIA, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Madame Brigitte BOITAUD, président

- signé par Madame Brigitte BOITAUD, président et par Monsieur Polycarpe GARCIA, greffier présent lors du prononcé.

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [W] [K] est entré au service de la SA COUVERTURE PLOMBERIE CHAUFFAGE - dite CPC - le 20 mars 1993, en qualité de plombier, ouvrier professionnel.

Le 31 août 2007, [W] [K] a adressé à son employeur une lettre ainsi rédigée:

'Je viens par la présente confirmer ma démission de l'emploi de plombier que j'occupe dans votre société depuis mars 1993.

Après expiration du délai de préavis de quinze jours conforme aux usages, je serai donc libre de tout engagement à compter du 14 septembre 2007.

Je vous saurais gré de bien vouloir préparer pour cette date le solde de tout compte, les indemnités de congés payés restant dues ainsi que mon certificat de travail.'

Son solde de tout compte lui a été remis le 18 septembre 2007'par la société CPC. Le 24 septembre 2007, [W] [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris d'une demande tendant notamment à la requalification de sa démission en un licenciement sans cause réelle et sérieuse compte tenu des manquements de son employeur qui avait cessé tout paiement de ses cotisations auprès de la caisse des congés payés du bâtiment depuis le 31 mars 2005.

Par jugement du 19 mars 2009, la section Industrie du conseil de prud'hommes de Paris, présidée par le juge départiteur, a condamné la société CPC à payer à M. [K] la somme de 2 303,71 € à titre de dommages-intérêts en compensation du préjudice subi du fait du défaut de cotisations de son employeur à la caisse des congés payés et débouté les parties du surplus de leurs demandes.

Cette décision a été frappée d'appel par [W] [K] qui demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société CPC à lui payer des dommages-intérêts en compensation du préjudice subi, mais de le réformer en ce qu'il a rejeté la demande de requalification de sa démission en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et, en conséquence, de condamner la société CPC à lui verser :

- 40 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 4 719,04 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, et les congés payés y afférents,

- 4 954,99 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 1 500 € au titre des frais irrépétibles

d'ordonner la remise de l'attestation POLE EMPLOI et des bulletins de salaires modifiés et conformes à la décision à intervenir, sous astreinte de 50 € par jour de retard et par document et de condamner la société CPC aux dépens.

La SA COUVERTURE PLOMBERIE CHAUFFAGE conclut à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et de débouté des demandes présentées par [W] [K].

Pour les prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux conclusions visées par le greffier et reprises oralement le 16 février 2011, la médiation envisagée par les parties sur proposition de la cour n'ayant pas abouti.

SUR QUOI, LA COUR

Sur la demande d'indemnité pour non-paiement des congés payés

[W] [K] indique qu'il aurait dû percevoir une indemnité de congés payés à hauteur de 5 898 € au titre des exercices 2006, 2007 et 2008.

Il reconnaît avoir perçu des avances à hauteur de 3 594,29 €, de sorte qu'il évalue son préjudice à la somme de 2 303,71 € qui lui a été allouée par les premiers juges.

Tout en estimant que seule la caisse de congés payées serait en mesure de chiffrer avec exactitude la somme restant due au salarié, la SA COUVERTURE PLOMBERIE CHAUFFAGE accepte de reconnaître et de payer cette somme, sollicitant la confirmation sur ce point du jugement entrepris.

Considérant qu'à la demande des deux parties, il y a lieu de confirmer sur ce point la décision du juge départiteur en allouant à [W] [K] une somme de 2 303,71 € à titre de dommages-intérêts, l'employeur étant tenu de réparer le préjudice subi de ce fait par le salarié du fait de son manquement à remplir ses obligations à l'égard de la caisse de congés payés, en lui payant une somme équivalente à celle dont il avait été privé au titre des congés payés ;

Sur la rupture du contrat de travail

La SA COUVERTURE PLOMBERIE CHAUFFAGE soutient que [W] [K] a démissionné en toute liberté parce qu'il avait trouvé un emploi dans une autre structure créée par un ancien salarié de la société. Elle fait valoir que la démission, donnée sans réserve et alors qu'il n'existait aucun différend entre le salarié et son employeur, constituait bien un acte unilatéral par lequel il avait manifesté de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin à son contrat de travail.

Mais considérant que, bien qu'ayant été donnée sans réserve, la démission de [W] [K] était équivoque et devait s'analyser en une prise d'acte dès lors qu'elle était contemporaine d'un nouveau manquement de son employeur relatif aux congés payés annuels ; qu'en effet, il est établi que le 1er août 2007, la caisse des congés payés a confirmé à [W] [K] qu'elle ne pouvait pas - cette année encore - lui assurer le paiement de ses congés ; que le salarié a écrit sa lettre de démission le 31 août 2007, alors qu'il venait de percevoir son salaire du mois d'août - pour une somme de 276,80 € - après amputation d'une somme de 1 910,57 € correspondant au montant de ses congés ;

Considérant qu'[W] [K] a saisi la juridiction prud'homale six jours après avoir reçu son solde de tout compte ;

Considérant qu'[W] [K] fait valoir avec pertinence que si sa lettre de démission ne comportait aucune motivation, c'est à raison de son défaut de maîtrise de l'écrit ; que, plombier de formation, étranger de surcroît - étant de nationalité portugaise -, il ne maîtrisait pas les arcanes ni les subtilités de la langue française et du droit ;

Considérant que le fait qu'[W] [K] ait attendu d'avoir trouvé un nouveau travail pour donner sa démission, alors qu'il était depuis plus de deux ans régulièrement victime des manquements de son employeur, ne saurait le priver du droit d'invoquer ces manquements ; qu'il était en effet marié et père de deux enfants, de sorte qu'il ne pouvait envisager de rester sans salaire, ni allocation chômage pendant toute la durée de la procédure, dont il indique qu'il l'a initiée en septembre 2007, soit quarante mois avant la décision de la cour d'appel ;

Considérant que la caisse de congés payés du bâtiment a refusé chaque année, depuis 2005, à [W] [K] le paiement de ses congés, tous les ans depuis 2005 et ce, par des courriers des 21 juillet 2005, 4 mai, 25 juillet et 21 décembre 2006, 1er août 2007, 20 février et16 avril 2008 ; qu'[W] [K] n'a pu bénéficier de congés payés à compter d'avril 2005, sauf à prendre un congé sans solde ;

Considérant qu'au surplus, la SA COUVERTURE PLOMBERIE CHAUFFAGE ne prouve pas des difficultés économiques qu'elle allègue pour justifier ses manquements ; que le salarié fait au contraire état - sans être contredit - des bénéfices réalisés par l'entreprise pour les années 2004, 2005, 2006 et 2007 ; qu'en toute hypothèse, il appartient à l'employeur qui ne peut, en raison de difficultés économiques, assurer la pérennité du travail et le règlement des salaires, soit de licencier le salarié pour ce motif économique, soit de se déclarer en état de cessation des paiements ;

Considérant que les manquements de l'employeur en matière de rémunération sont suffisamment graves pour qu'il soit considéré que la décision du salarié de mettre fin à la relation contractuelle ne procédait pas d'une volonté claire et non équivoque de démissionner ; qu'il y a lieu de requalifier la démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Sur les effets de l'imputation à l'employeur de la rupture du contrat de travail

Considérant qu'[W] [K] peut prétendre, du fait de la rupture de son contrat de travail, au versement d'une indemnité compensatrice de préavis et aux congés payés afférents, à une indemnité conventionnelle de licenciement, ainsi qu'à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Considérant que les indemnités de rupture ont été justement calculées par [W] [K] ; que sa demande est accueillie ;

Considérant qu'il convient d'ordonner à la SA COUVERTURE PLOMBERIE CHAUFFAGE de remettre à [W] [K] une attestation Pôle Emploi rectifiée et un bulletin de paie conformes au présent arrêt, sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette condamnation d'une astreinte ;

Considérant qu'[W] [K] sollicite une indemnité représentant dix-sept mois de salaire, en application de l'article L.1235-3 du code du travail ;

Considérant que M. [K] était âgé de quarante-quatre ans lors de la rupture des relations contractuelles, alors qu'il bénéficiait de quatorze années d'ancienneté dans une entreprise employant plus de onze salariés ; qu'il a travaillé au service d'un nouvel employeur dès le mois suivant la rupture de son contrat de travail ; qu'au regard de ces éléments et d'un salaire de référence de 2 359,52 €, il y a lieu de lui allouer une somme de 15 000 € ;

PAR CES MOTIFS

INFIRME le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a condamné la SA COUVERTURE PLOMBERIE CHAUFFAGE à payer à Monsieur [W] [K] une somme de 2 303,71 € ;

CONDAMNE la SA COUVERTURE PLOMBERIE CHAUFFAGE à payer à [W] [K] :

- 4 719,04 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 471,90 € au titre des congés payés y afférents,

- 4 954,99 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 15 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

ORDONNE la remise à [W] [K] d'une attestation POLE EMPLOI rectifiée et d'un bulletin de salaire modifié et conforme au présent arrêt ;

Y AJOUTANT,

CONDAMNE la SA COUVERTURE PLOMBERIE CHAUFFAGE à payer à [W] [K] une somme de 1 500 € au titre des frais irrépétibles ;

CONDAMNE la SA COUVERTURE PLOMBERIE CHAUFFAGE aux dépens.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 09/03937
Date de la décision : 26/04/2011

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°09/03937 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-04-26;09.03937 ?
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