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26/04/2011 | FRANCE | N°09/01994

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 26 avril 2011, 09/01994


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 26 Avril 2011

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/01994



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 19 Novembre 2008 par le conseil de prud'hommes de PARIS section encadrement RG n° 07/13028





APPELANT



Monsieur [S] [O]

[Adresse 1]

[Localité 5]

comparant en personne, assisté de Me Jean-michel CATALA, avocat

au barreau de PARIS, toque : R183 substitué par Me Aude LASTES, avocat au barreau de PARIS, toque : R183







INTIMEE



CHAMBRE SYNDICALE TYPOGRAPHIQUE PARISIENNE (CSTP)

[Adresse 6...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 26 Avril 2011

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/01994

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 19 Novembre 2008 par le conseil de prud'hommes de PARIS section encadrement RG n° 07/13028

APPELANT

Monsieur [S] [O]

[Adresse 1]

[Localité 5]

comparant en personne, assisté de Me Jean-michel CATALA, avocat au barreau de PARIS, toque : R183 substitué par Me Aude LASTES, avocat au barreau de PARIS, toque : R183

INTIMEE

CHAMBRE SYNDICALE TYPOGRAPHIQUE PARISIENNE (CSTP)

[Adresse 6]

[Localité 4]

représentée par le Cabinet WEIZMANN - BORZAKIAN, société d'avocats au barreau de Paris, toque : G242, substitué par Me Yohanna WEIZMANN

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Mars 2011, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Anne-Marie DEKINDER, Conseillère, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente

Madame Anne-Marie DEKINDER, Conseillère

Madame Denise JAFFUEL, Conseillère

Greffier : Mademoiselle Sandrine CAYRE, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente

- signé par Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente et par Mademoiselle Sandrine CAYRE, greffier présent lors du prononcé.

La Cour est saisie de l'appel interjeté par Monsieur [S] [O] du jugement du Conseil des Prud'hommes de PARIS , section Encadrement - chambre 4 - rendu le 19 novembre 2008 qui l' a débouté de l'ensemble de ses demandes .

FAITS ET DEMANDES DES PARTIES

Monsieur [S] [O] né en Novembre 1948 a été engagé par la Chambre syndicale typographique parisienne suivant contrat à durée indéterminée le 27 Janvier 1975 en qualité de comptable ; dans le dernier état de ses fonctions, il était directeur financier ;

La convention collective applicable est celle des cadres administratifs de la presse parisienne ; l' entreprise emploie moins de 10 salariés.

Monsieur [S] [O] a été convoqué à un entretien préalable en vue d' une mesure de licenciement pour faute grave le 24 Octobre 2007 pour le 12 novembre 2007 avec mise à pied conservatoire ;

Le 16 Novembre 2007, il a été licencié pour faute grave dans les termes suivants :

« (...) Mademoiselle [B] engagée en qualité de secrétaire comptable à compter du 20 Août dernier , s'est plainte le 11 Octobre dernier auprès de sa responsable hiérarchique, Madame [G] [V], de votre attitude déplacée à son égard, indiquant avoir peur de se trouver seule avec vous.

Elle réitérait ses craintes le 15 Octobre 2007 évoquant des gestes et propos équivoques.

Madame [V] qui a pu constater à plusieurs reprises que vous vous permettiez de vous tenir très près de Melle [B] en lui murmurant des mots dans les oreilles, vous a alors demandé de vous tenir à distance de celle-ci. Vous vous êtes alors mis en colère, ce qui a contraint madame [V] à venir m'exposer la situation. De plus, vous avez à ce moment adopté à l'égard de Melle [B] des propos exprimés de façon menaçante - c'est toi qui a raconté tout cela à [G] '- ce qui a accentué un profond sentiment de malaise chez l'intéressée.

Je me suis ensuite entretenu avec vous afin de prendre connaissance de vos explications et vous demandais de ne plus vous rendre dans le bureau de mademoiselle [B] en dehors de la présence de Madame [V].

Immédiatement après notre entrevue, vous vous êtes permis de vous plaindre auprès de collègues du premier étage, prétendant être victime d'une cabale et que mademoiselle [B] avait été manipulée ce qui est absolument faux.

Le lendemain, alors qu'elle était venue chercher le courrier au premier étage, mademoiselle [B] a été prise à partie par « ces » collègues qui l'ont accusée de se faire manipuler.

J'ai reçu mademoiselle [B] ce matin du 17 Octobre, celle-ci souhaitant me faire part de vos agissements. Il est apparu que vous vous êtes permis d'avoir à son égard des gestes inappropriés, notamment en la tenant par la taille et essayant de la serrer contre vous, en lui caressant la main. Vous lui avez également tenu des propos déplacés tels que - viens t ' asseoir sur mes genoux plutôt que de rester sur le radiateur, çà me fera plus d'effet -

Mademoiselle [B] me confirmait alors qu'elle était fragilisée par cette situation, ses propos par courrier remis le même jour, courrier dont je vous ai donné lecture lors de l'entretien préalable qui s'est tenu le 12 Novembre dernier. L'ensemble de ces agissements a entraîné l'hospitalisation d' urgence de mademoiselle [B] le 18 Octobre puis la prescription de plusieurs arrêts de travail . L' ensmble de ces faits est constitutif d'une faute grave et rendent impossible la poursuite de notre relation contractuelle et votre maintien dans l'entreprise pendant la durée du préavis (...) » .

Monsieur [S] [O] a nié les faits par LRAR en date du 13 novembre 2007 adressée à la Chambre syndicale typographique parisienne ;

Il est constant que Mademoiselle [B] est née le [Date naissance 2] 1984 et qu'elle a été embauchée en contrat à durée déterminée par la Chambre syndicale typographique parisienne le 20 Août 2007, transformé en contrat à durée indéterminée le 19 Octobre 2007.

Monsieur [S] [N] a fait part à Monsieur [S] [O] par courrier du 25 Juillet 2007 de la réorganisation des locaux de la Chambre syndicale typographique parisienne à compter du 6 Août 2007 et de ce qu'il lui était dédié le local nommé « jusqu' à présent bureau de placement » qui devenait le bureau exclusif du directeur financier de la Chambre syndicale typographique parisienne ;

Monsieur [S] [O] demande à la Cour d'infirmer le jugement, de fixer son salaire moyen à la somme de 4744.18 €, de dire qu'il n'existe aucune preuve matérielle justifiant son licenciement pour faute grave et par conséquent que son licenciement est abusif ;

en conséquence, de condamner la Chambre syndicale typographique parisienne à lui payer les sommes de :

4744.18 € à titre de rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied conservatoire du 18 Octobre 2007 au 17 Novembre 2007 y compris le prorata de 13ème mois y afférent

14232.54 € à titre de préavis y compris le prorata de 13ème mois

2737 € à titre d'indemnité compensatrice de congés payés

128092.86 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement

100000 € à titre de dommages intérêts au titre des préjudice matériel et moraux qu'il a subis

5000 € en application de l'article 700 du Code de procédure Civile

La Chambre syndicale typographique parisienne demande à la Cour la confirmation du jugement sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande pour frais irrépétibles, de dire en conséquence que le licenciement de Monsieur [S] [O] est justifié par une faute grave de rejeter ses demandes et de le condamner à lui payer la somme de 2500 € en application de l'article 700 du Code de procédure Civile.

SUR CE

Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience et soutenues oralement à la barre.

Aux termes de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, le licenciement de Monsieur [S] [O] est la conséquence de son comportement à l'égard de Mademoiselle [B] ;

Monsieur [S] [O] reconnaît avoir eu en charge l'encadrement de Mademoiselle [B] à compter du 20 Août 2007 et indique avoir toujours entretenu des relations cordiales avec elle ; il reconnaît également que le 15 Octobre 2007 Madame [V] dont la Cour observe qu'il ressort du compte rendu d ' entretien préalable au licenciement qu' elle était la supérieure hiérarchique de Mademoiselle [B], l'avait interpellé sur son comportement à l'égard de cette dernière et lui avait demandé dorénavant de se tenir de l'autre côté du bureau de celle-ci et non à ses cotés lors de la formation sur les logiciels ;

Il est en résumé reproché à Monsieur [S] [O] une attitude déplacée à l'égard de la salariée, des gestes et des propos équivoques ;

En dehors de nier les faits qui lui sont reprochés, de mettre en avant l' existence de discussions informelles engagées au début de l'été 2007 avec la direction de la CSTP afin d'envisager son départ négocié et le souhait de la Chambre syndicale typographique parisienne d' éviter un licenciement coûteux en raison de la « baisse d'activité provoquant une diminution des cotisations », de produire une attestation conforme aux dispositions de l'article 202 du Code de Procédure civile de Madame [F] [C] née le [Date naissance 3] 1967, inspectrice des impôts se disant compagne de Monsieur [S] [O] qui affirme n'avoir jamais fait de demande de mutation en province mais avoir postulé en Septembre 2007 pour un poste de rédacteur à la Présidence de République au service de la correspondance présidentielle et avoir été retenue depuis le 1er décembre 2007 dans le cadre d'une mise à disposition de trois ans et plusieurs attestations de salariés qui le connaissaient mais ne travaillaient plus directement avec lui et n'étaient pas au même étage que lui mais dans un service où Mademoiselle [B] allait porter le courrier, attestant que Monsieur [S] [O] n'avait jamais eu d'attitude déplacée ou ambigüe à leur égard ( [E] [X], [Z] [H], [K] [M]), Monsieur [S] [O] ne fait que soutenir que la preuve des faits qui lui sont reprochés n'est pas rapportée et que son employeur a monté un dossier contre lui en « mettant sous pression » Mademoiselle [B] lui accordant un CDI en récompense le 19 Octobre 2007 alors qu'elle avait été engagée en CDD lequel se terminait le 20 Octobre 2007 et en produisant des témoignages de complaisance.

Aux termes des articles L 1152-1 et L 1152-3 du code du travail, aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits, à sa dignité, d'altérer sa santé physique (...) ou des agissements de harcèlement de toute personne dans le but d' obtenir des faveurs de nature sexuelle à son profit ;

En l'espèce, il est établi par l'attestation de Madame [G] [V], supérieure hiérarchique de Mademoiselle [B] qu'elle a personnellement été témoin de ce que Monsieur [S] [O] se tenait penchée par- dessus l'épaule de cette dernière alors que rien ne l'y obligeait et l'avoir entendu maintes fois ( à plusieurs reprises au mois de Septembre) murmurer à l'oreille de Mademoiselle [B] , ce qui l'avait interpellée et de ce que le 11 Octobre 2007, cette dernière lui a fait part de ses craintes de se trouver dans les locaux avec Monsieur [S] [O] l'après-midi lorsqu'elle était seule avec lui ;

Ce témoin précise encore en avoir fait la remarque à Monsieur [S] [O] qui n'envisageant pas de s'expliquer, elle en avait référé à Monsieur [S] [N], son supérieur hiérarchique ;

Madame [V] atteste encore avoir vu l'état croissant de fébrilité de Mademoiselle [B] qui craignait de voir se dégrader ses relations de travail avec Monsieur [O] en faisant part des faits qu'elle subissait ;

Monsieur [J] [D] témoigne de son côté avoir constaté à plusieurs reprises, en s'interrogeant sur cette attitude, que Monsieur [S] [O] se trouvait systématiquement « collé » derrière le siège de Mademoiselle [B] alors que la nature du travail ne le nécessitait pas ajoutant que Mademoiselle [B] lui avait indiqué en pleurs qu'après avoir dénoncé l' attitude qu'elle subissait de sa part, Monsieur [S] [O] l'avait agressée verbalement lui indiquant qu'il continuerait à venir la voir et que peu de temps après son embauche Mademoiselle [B] avait à plusieurs reprises réitéré son désir d'avoir quelqu'un d'autre présent dans le bureau ;

Madame [R] [A], amie de Mademoiselle [B] , atteste que dès Septembre 2007 cette dernière lui avait fait part de ce que son supérieur Monsieur [O] avait parfois des gestes et paroles déplacées à son égard et qu'elle lui avait conseillé de démissionner lui disant que sa santé était plus importante que tout mais que [T] lui disait qu'elle allait tenir car Monsieur [O] devait partir en retraite ;

Enfin sont versées aux débats, la déclaration circonstanciée de Mademoiselle [B] et la main courante qu' elle a déposée le 27 novembre 2007 après le licenciement de Monsieur [S] [O] dans laquelle elle déclare que plusieurs fois il l'a coincée dans la réserve en voulant aller plus loin , que depuis elle ne va pas bien du tout et a peur qu'il vienne au travail pour se venger;

La Chambre syndicale typographique parisienne ( CSTP en abrégé) verse notamment aux débats un certificat médical du [Adresse 7] à [Localité 9] en date du 27 Octobre 2007 attestant de l'état de stress et d'angoisse dans lequel se trouvait Mademoiselle [B] qu'elle indique lié à un conflit professionnel avec l'un de ses supérieurs suivi d'un arrêt de travail suivi d'un autre certificat médical en accident de travail en date du 30 novembre 2007 mentionnant un état de stress post traumatique et un état dépressif majeur suite à une situation de harcèlement au travail, le médecin de l'hôpital [8] ayant mentionné « troubles compatibles avec ses déclarations » ;

Il résulte de l'ensemble de ces faits que les griefs retenus dans la lettre de licenciement sont suffisamment caractérisés pour considérer que c'est à bon droit que la Chambre syndicale typographique parisienne a procédé au licenciement de Monsieur [S] [O] dans le cadre de son obligation de sécurité à mettre en 'uvre pour veiller à empêcher la dégradation des conditions de travail de sa salariée, cependant la Cour considère que le licenciement doit être requalifié en licenciement pour cause réelle et sérieuse, à charge pour l'employeur de prendre des dispositions pour assurer la séparation des deux salariés de sorte que la demande de dommages intérêts pour licenciement abusif préjudice matériels et moraux n'est pas fondée et sera rejetée ;

Eu égard au montant du salaire à retenir fixé à la somme de 4744.18 € la Chambre syndicale typographique parisienne sera condamnée à payer à Monsieur [S] [O] la somme de 4744.18 € à titre de rappel de salaire pour la durée de sa mise à pied (prorata 13ème mois inclus), celle de 474.41 € pour congés payés afférents, celle de 14232.54 € y compris le prorata 13ème mois à titre d' indemnité compensatrice de préavis soit 3 mois en application de l'article 26 de la convention collective plus 1423.25 € pour congés payés afférents ;

En application de l'article 28 de la convention collective, l'indemnité de licenciement, eu égard à l'ancienneté de 33 ans de Monsieur [S] [O] dans l'entreprise et compte tenu du salaire de référence, doit être fixée à la somme de 128092.89 € ;

Chaque partie conservera à sa charge les frais irrépétibles qu'elle a exposés pour sa défense.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement et statuant à nouveau :

Dit que le licenciement de Monsieur [S] [O] est fondé sur une cause réelle et sérieuse

Condamne la Chambre syndicale typographique parisienne à payer à Monsieur [S] [O] les sommes de :

4744.18 € à titre de rappel de salaire sur la mise à pied plus 474.41 € pour congés payés afférents

14323.54 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis plus 1432.35 € pour congés payés afférents

128092.86 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement

Chaque partie conservera à sa charge ses frais irrépétibles.

Rejette toutes autres demandes des parties.

Condamne la Chambre syndicale typographique parisienne aux entiers dépens .

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 09/01994
Date de la décision : 26/04/2011

Références :

Cour d'appel de Paris K4, arrêt n°09/01994 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-04-26;09.01994 ?
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