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07/04/2011 | FRANCE | N°10/19596

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9, 07 avril 2011, 10/19596


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 9



ARRET DU 07 AVRIL 2011



(n° , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 10/19596



Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Juillet 2010 -Tribunal paritaire des baux ruraux d'AUXERRE - RG n° 51-09-12





APPELANT



Monsieur [W] [S] [Y] [P]

[Adresse 3]

[Localité 5]

assisté de Me Rég

ine PASCAL VERRIER, avocat au barreau d'AUXERRE

Société d'avocats [Adresse 1]



INTIME



Monsieur [F] [K]

[Adresse 4]

[Localité 5]

assisté de Me Olivier MURN, avocat plaidant pour Me Danièle OLIV...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9

ARRET DU 07 AVRIL 2011

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/19596

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Juillet 2010 -Tribunal paritaire des baux ruraux d'AUXERRE - RG n° 51-09-12

APPELANT

Monsieur [W] [S] [Y] [P]

[Adresse 3]

[Localité 5]

assisté de Me Régine PASCAL VERRIER, avocat au barreau d'AUXERRE

Société d'avocats [Adresse 1]

INTIME

Monsieur [F] [K]

[Adresse 4]

[Localité 5]

assisté de Me Olivier MURN, avocat plaidant pour Me Danièle OLIVIER, avocat au barreau d'Auxerre [Adresse 2]

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire, instruite par Monsieur Alain SADOT, a été débattue le 02 mars 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Alain SADOT, président

Madame Catherine BONNAN-GARÇON, Conseillère

Madame Pénélope POSTEL-VINAY, Vice Président placée désignée par ordonnance du Premier Président en date du 06 décembre 2010

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Nicaise BONVARD

ARRET : CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Alain SADOT, président et par Mme Nicaise BONVARD, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

Par jugement du 15 juillet 2010, le tribunal paritaire des baux ruraux d'Auxerre a affirmé l'existence d'un bail rural consenti par M. [W] [P] à M. [F] [K] depuis le 1er janvier 1999 sur les parties plantées en vignes de deux parcelles, pour une contenance globale de de 20 ares et 15 centiares, sises à [Localité 5], et a condamné M. [P] au paiement de la somme de 12 818,79 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la perte d'exploitation durant l'année 2009.

Par déclaration reçue au greffe le 15 septembre 2010, Monsieur [P] a formé appel de cette décision. Dans ses conclusions déposées à l'audience, il expose que la parcelle litigieuse constitue une dépendance d'un ensemble plus vaste, dans lequel, en 1975, il a fait construire sa maison d'habitation, entourée d'un parc entièrement clos. Il soutient que, après avoir assuré lui-même, ou par son fils, l'entretien et l'exploitation de ses vignes pendant de nombreuses années, il en a confié l'entretien à Monsieur [K], qui conservait la récolte sans payer le prix d'une location. Il prétend en effet que ce dernier n'a jamais payé aucune redevance, la somme de 4000 F encaissée en 2000 devant compenser les travaux préparatoires réalisés par le fils de Monsieur [P] pour la première récolte de Monsieur [K], et conteste aussi formellement avoir reçu un fermage sous forme de bouteilles de vin. Il fait valoir surtout que la convention conclue avec M. [K] se trouve établie dans un écrit réalisé sur le formulaire de déclaration d'exploitation de cette parcelle, déposée en original à l'administration des douanes par M. [K].

Dans ses conclusions également déposées à l'audience, Monsieur [K] soutient qu'il a toujours payé le fermage convenu, totalement en espèces la première année, et partiellement la deuxième, puis par la remise de 200 bouteilles de vin de [Localité 5] les années suivantes. Il conteste l'authenticité et la sincérité du document produit en affirmant qu'il ne l'a jamais lui-même déposé aux douanes, et en soutenant que toutes les ratures et mentions manuscrites évoquant une convention de mise à disposition ont été portées par M. [P] sans son accord et hors sa présence. Il fait valoir également que la parcelle litigieuse, d'une surface de 2800 m², qui produit 13 hl de vin en moyenne à l'année ne peut être considérée comme une dépendance de la maison d'habitation voisine, et en a d'ailleurs été séparée lors de la vente récente de cette maison. Il sollicite, outre la confirmation du jugement, la condamnation de M. [P] à lui payer les sommes de 12 818,79 € au titre de la perte d'exploitation de 2010 et 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour les troubles et voies de fait subis dans l'exécution du bail.

*

* *

Attendu qu'il est constant que la parcelle litigieuse, d'une superficie d'un peu moins de 21 ares se trouve plantée en vignes, et a donc pour usage la production de raisin destiné à la vinification ; qu'il s'agit là d'une activité agricole au sens de l'article L. 311-1 du code rural ; qu'en conséquence, en application de l'article L. 411-1 du même code, toute mise à disposition à titre onéreux d'un tel immeuble se trouve en principe soumise au régime des beaux ruraux ; que cependant, le propriétaire et le bénéficiaire d'une telle mise à disposition peuvent passer une convention dérogatoire en application de l'article L. 411-2 du même code dès lors que le terrain concerné se trouve situé à proximité d'un immeuble à usage d'habitation et en constitue une dépendance ;

Attendu que Monsieur [P] produit un extrait du plan communal, faisant apparaître que sa maison d'habitation se trouve située à proximité immédiate de la parcelle litigieuse, et qu'il n'existe qu'un seul accès à la voie publique pour desservir l'ensemble immobilier ; qu'il produit aussi de nombreuses photographies illustrant cette proximité et un procès-verbal de constat établi le 25 janvier 2011 dont il ressort que « depuis la route il n'y a aucun accès direct à cette parcelle plantée en vigne » et que entre celle-ci et le reste de la propriété constituée des bâtiments d'habitation, de pelouses et de bois, «il n'y a aucune clôture, aucune séparation. L'ensemble forme un tout. » ; que ces éléments établissent suffisamment que la parcelle, qui n'a pas d'accès indépendant à la voie publique, et ne se trouve pas physiquement séparée des autres éléments de cet ensemble, doit être considérée comme une dépendance de la maison d'habitation, au même titre que les bois situés à l'ouest ;

Attendu que cette situation n'a pas été modifiée lors de la cession à Monsieur [L] le 27 mars 2010 ; qu'en effet, si une division parcellaire a été préalablement effectuée pour isoler cette parcelle, il ressort de l'acte notarié de cession concernant le reste de la propriété et d'un acte de vente sous seing privé entre les mêmes parties du 19 février 2010, qui ne concerne que la parcelle litigieuse, que cette division a été réalisée afin de permettre la facilitation de l'exercice restreint du droit de préemption du preneur dans l'hypothèse d'une reconnaissance judiciaire du bail rural dont se prévaut Monsieur [K] ;

Attendu que Monsieur [P] produit surtout la copie d'un formulaire intitulé « demande d'immatriculation au casier viticole informatisé, portant le cachet du destinataire, le service de la viticulture de l'administration des douanes et droits indirects d'Auxerre ; que ce document, destiné à permettre l'enregistrement d'une exploitation viticole, comporte en page 2 les renseignements concernant Monsieur [K], les coordonnées de son exploitation et sa signature sous la mention «j'atteste l'exactitude des renseignements inscrits sur ce document... », et en page 4, dans deux cadres distincts, divers renseignements concernant le régime des terres pour lesquelles l'inscription est sollicitée ;

Attendu que dans le premier de ces cadres, figure un engagement de M. [K] d'exploiter les parcelles de vignes avec la précision, rédigée de façon manuscrite, que ces parcelles sont mises « à disposition d'entretien » ; que la signature de M. [K] figure sur cet engagement ; que le second cadre contient une attestation du propriétaire, M. [P], dont les mentions manuscrites portent que les parcelles visées ont été « mis à disposition gratuitement pour entretien de la vigne » ; qu'enfin, après la mention imprimée que « les parcelles seront exploitées par ce dernier » (M. [K]), figure une dernière mention manuscrite énonçant que « ceci n'a aucune valeur d'engagement de bail » ; que dans ce cadre, sous toutes ses mentions, figure la signature de Monsieur [K] à côté de celle de Monsieur [P] ;

Attendu que dans ses conclusions, M. [K] évoque ses doutes sur la validité de ces signatures, mais n'a cependant pas provoqué un incident de vérification d'écriture, ni devant le premier juge, ni en cause appel ; qu'en outre, il convient d'observer que sa signature est complexe, probablement difficile à reproduire, et que les trois exemplaires figurant sur ce document apparaissent tracés de façon spontanée et comportent les mêmes éléments graphiques ; qu'il s'ensuit qu'elles doivent être tenues pour authentiques ;

Attendu que Monsieur [K] soutient que les mentions manuscrites et modifications de l'imprimé, notamment la surcharge à l'encre noire de toutes les mentions concernant l'existence d'un bail, ont été portées par Monsieur [P], en dehors de sa présence et sans aucune approbation de sa part ; que cependant, ce document constituant une déclaration et une demande d'immatriculation, est bien censé avoir été déposé ou envoyé au service destinataire par le déclarant lui-même, c'est-à-dire Monsieur [K] ; que celui-ci ne rapporte pas la preuve, dont il avait la charge, que c'est au contraire Monsieur [P] qui a détenu ce document le dernier, avant sa mise en possession du service administratif ;

Attendu que toutes les mentions précitées font la preuve de la volonté commune des parties de ne pas soumettre leur accord au statut des baux ruraux ; que cette intention n'est pas contraire à cette législation impérative, en ce que les terres concernées répondaient à la définition susvisée de l'article L. 411-2 du code rural ;

Attendu qu'il s'ensuit que Monsieur [K] ne peut pas prétendre exercer les droits du fermier sur cette parcelle ; qu'en conséquence, le propriétaire pouvait opérer la résiliation de la convention unissant les parties, le délai de préavis n'étant nullement critiqué ;

Attendu qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement déféré, et de débouter M. [K] de toutes ses prétentions ; qu'il n'y a pas lieu d'ordonner la restitution de la somme de 12 818,79 € payée en exécution de cette décision, puisque la présente décision entraîne nécessairement cette obligation du bénéficiaire de ce paiement ;

Attendu que Monsieur [P] n'a pas suffisamment prouvé que Monsieur [K] aurait fait dégénérer en abus son droit d'ester en justice ; qu'il n'y a donc pas lieu de faire droit à sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ; que toutefois, il ne doit pas conserver à sa charge les frais irrépétibles qu'il a été contraint d'exposer à l'occasion de la présente instance ;

PAR CES MOTIFS,

Infirme le jugement rendu le 15 juillet 2010 par le tribunal paritaire des baux ruraux d'Auxerre,

Déboute Monsieur [K] de toutes ses demandes,

Déboute Monsieur [P] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Condamne Monsieur [K] à payer à Monsieur [P] une somme de 2000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

La condamne aux dépens.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 10/19596
Date de la décision : 07/04/2011

Références :

Cour d'appel de Paris G9, arrêt n°10/19596 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-04-07;10.19596 ?
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