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05/04/2011 | FRANCE | N°10/00680

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 05 avril 2011, 10/00680


COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 5 AVRIL 2011
(no 142, 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 00680
Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Décembre 2009- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 09/ 02319

APPELANTS

Monsieur Renaud X...... 75008 PARIS représenté par la SCP BOMMART-FORSTER-FROMANTIN, avoués à la Cour assisté de Me Jean-pierre CHIFFAUT MOLIARD, avocat au barreau de PARIS, toque : C1600

SA COVEA RISKS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux 19-21, allée de

l'Europe 92110 CLICHY représentée par la SCP BOMMART-FORSTER-FROMANTIN, avoués à la Cour assistée ...

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 5 AVRIL 2011
(no 142, 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 00680
Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Décembre 2009- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 09/ 02319

APPELANTS

Monsieur Renaud X...... 75008 PARIS représenté par la SCP BOMMART-FORSTER-FROMANTIN, avoués à la Cour assisté de Me Jean-pierre CHIFFAUT MOLIARD, avocat au barreau de PARIS, toque : C1600

SA COVEA RISKS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux 19-21, allée de l'Europe 92110 CLICHY représentée par la SCP BOMMART-FORSTER-FROMANTIN, avoués à la Cour assistée de Me Jean-pierre CHIFFAUT MOLIARD, avocat au barreau de PARIS, toque : C1600

INTIMES
Monsieur André A...... ... 77184 EMERAINVILLE représenté par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULAY, avoués à la Cour assisté de Maître Loren MAQUIN, avocat au barreau de VAL DE MARNE substituant Me Francis RAIMON de la SCP A. K. P. R., avocat au barreau de VAL DE MARNE, toque : PC 112

Madame Martine D... épouse A...... ... 77184 EMERAINVILLE représentée par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULAY, avoués à la Cour assistée de Maître Loren MAQUIN, avocat au barreau de VAL DE MARNE substituant Me Francis RAIMON de la SCP A. K. P. R., avocat au barreau de VAL DE MARNE, toque : PC 112

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 9 février 2011, en audience publique, le rapport entendu conformément à l'article 785 du code de procédure civile, devant la Cour composée de :

Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre Mme Brigitte HORBETTE, Conseiller Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Noëlle KLEIN

ARRET :

- contradictoire-rendu publiquement par Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.- signé par Monsieur François GRANDPIERRE, Président et par Madame Noëlle KLEIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

M. et Mme A..., qui se sont vus opposer la prescription décennale à l'action qu'ils ont engagée en indemnisation des désordres de leur pavillon alors que l'expert avait rendu un rapport qui leur était favorable et avait chiffré leur préjudice, font reproche à M. X..., avocat qui avait introduit un référé contre le constructeur (la SNC UFIMMO) et son assureur (la société des mutuelles du Mans assurances) et obtenu ainsi la désignation d'un expert en 1998, de n'avoir pas poursuivi la procédure, de sorte que, à la suite d'une nouvelle saisine en référé en 2007, le tribunal saisi au fond a constaté, par jugement du 10 avril 2008, que l'action était prescrite.

Ils réclament en conséquence à M. X... et à son assureur, la société COVEA RISKS, la somme arrêtée par l'expert en réparation des désordres outre une indemnité pour le préjudice de jouissance qu'ils ont subi en étant contraints de vivre dans un pavillon dégradé pendant plusieurs années.
Par jugement du 2 décembre 2009, le tribunal de grande instance de Paris a condamné in solidum M. X... et la société COVEA RISKS à payer à M. et Mme A... les sommes de : 64 735, 57 € actualisée en fonction de l'évolution de l'indice BT01, l'indice de base étant celui du mois du dépôt du rapport, pour les réfections, 762, 24 € actualisée en fonction de l'évolution de l'indice du coût de la consommation des ménages, l'indice de base étant celui du mois du dépôt du rapport, pour l'obligation de quitter les lieux pendant les travaux, 30 000 € pour leur préjudice immatériel résultant du trouble de jouissance depuis 1997, année de la déclaration de sinistre, 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

CECI ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR,
Vu l'appel de ce jugement par M. X... et la société COVEA RISKS en date du 12 janvier 2010,
Vu leurs dernières conclusions déposées le 13 décembre 2010 selon lesquelles, poursuivant la réformation du jugement, ils demandent de débouter M. et Mme A... de leurs demandes, au constat de l'absence de faute commise au regard de la nature et de l'étendue de la mission de l'avocat, subsidiairement faute par eux de rapporter la preuve d'un préjudice indemnisable en lien de causalité avec les manquements imputés, infiniment subsidiairement au motif que le préjudice s'analyse en une perte de chance et ne peut donc être de la totalité des dommages subis,
Vu les dernières conclusions déposées le 27 décembre 2010 par lesquelles M. et Mme A... demandent la confirmation du jugement et la condamnation solidaire de M. X... et de la société COVEA RISKS à leur payer la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
SUR CE,
Considérant qu'à l'appui de leur appel M. X... et la société COVEA RISKS font valoir que le jugement s'est mépris sur les termes et l'étendue de la mission de M. X... qui n'a jamais reçu un mandat général, d'autant que la conduite du dossier était assurée par la MATMUT, assureur de protection juridique de M. et Mme A... ; qu'aucune preuve n'est rapportée ni de l'existence d'écrits entre eux antérieurs au 19 octobre 2001, date de la transmission du rapport de l'expert, ni de notes d'honoraires, auxquelles leurs demandes d'informations à l'avocat ne peuvent suppléer, de sorte que sa mission se limitait aux premiers actes accomplis par lui et qu'il lui fallait une nouvelle mission pour entamer une nouvelle instance, M. et Mme A... n'ayant pas répondu à sa lettre sur ce point ;
Qu'à rebours M. et Mme A... soutiennent que le mandat confié à un avocat est nécessairement général et qu'il appartenait à M. X... de prendre toutes les initiatives utiles à l'instance en diligentant au moment opportun les procédures pour la défense de ses clients ; que la preuve de l'étendue de son mandat résulte de ses diligences et du contenu de ses correspondances ; que leur assureur de protection juridique s'est limité à assurer le financement des prestations de l'avocat mais n'a jamais assumé la conduite de la procédure ;
Considérant en effet que, contrairement à ce que soutient M. X..., et comme l'a exactement énoncé le jugement, il ne résulte d'aucune pièce que la MATMUT, assureur, notamment, de la protection juridique de M. et Mme A..., ait assumé la conduite du procès, les correspondances échangées au sujet de l'évolution du litige l'étant toutes entre ceux-ci et la compagnie d'assurances, M. X... étant défaillant à en produire, ne serait-ce qu'une seule, entre lui et cet assureur ; que de plus, le tribunal de grande instance de Meaux a, dans son jugement du 10 avril 2008 qui statuait sur la prescription de l'action de M. et Mme A..., indiqué, pour l'approuver explicitement, la position de la MATMUT selon laquelle elle avait " pris en charge les frais de procès... mais n'a en aucun cas pris la direction de la défense des époux A..., ceux-ci ayant fait le choix d'un avocat personnel. ", ce qui est conforme à leur contrat ; qu'il en a déduit que " le conseil des époux A... a été en mesure d'assurer leur défense en toute indépendance sans que le devoir de loyauté de la MATMUT ne puisse être mis en cause. " ; qu'enfin l'intégralité des lettres que M. X... a adressées à M. et Mme A... manifeste qu'il se considérait comme leur conseil et non celui de leur assureur ;
Considérant que M. X... et la société COVEA RISKS prétendent également que le manquement éventuel de la part de l'avocat n'est pas à l'origine du préjudice car, la désignation de l'expert en référé ayant interrompu la prescription, un nouveau délai de deux ans courait auquel M. et Mme A... devaient veiller et non l'avocat qui n'a fait que transmettre le rapport d'expertise à une époque où la prescription était déjà acquise et à laquelle sa mission avait pris fin ;
Que M. et Mme A... leur opposent qu'il devait notamment, en transmettant le rapport de l'expert, non seulement le résumer comme il l'a fait mais leur fournir conseil sur les suites à y donner et que sa lettre du 27 août 2002 leur a laissé clairement croire qu'il allait saisir le juge au fond ;
Considérant que s'il est admis que la mission confiée à un avocat en vue d'une procédure ne s'étend pas nécessairement à une autre ou à sa suite procédurale, encore faut-il qu'il expose clairement à ses clients la situation afin qu'ils soient en mesure de prendre position, ce qui n'a pas été le cas, ainsi qu'il ressort des lettres adressées par M. et Mme A... à M. X... qui dénotent au contraire une incompréhension de leur part de ce qui est attendu d'eux par leur conseil ;
Que de plus, en l'espèce, il relevait d'évidence de sa mission, alors qu'il avait introduit un référé pour obtenir la désignation d'un expert, de s'assurer, pour le cas où le rapport ne serait pas déposé dans le délai de deux ans de la désignation, que la prescription de l'action ne serait pas encourue ; que dès lors, comme l'a décidé le tribunal, il incombait à M. X... de faire toutes diligences de nature à l'interrompre de nouveau, comme il l'avait fait en assignant en référé, par une assignation au fond ou, à tout le moins, s'il estimait que cela ne relevait pas de sa mission, d'avertir ses clients du risque encouru et de les inviter à le désigner derechef ou l'un de ses confrères ; que si, en conséquence, l'action au fond était déjà prescrite lors du dépôt du rapport qu'il a transmis à M. et Mme A..., c'est du fait de son inaction préjudiciable, qu'il n'a même pas perçue alors, se limitant à transmettre le rapport et à en résumer le contenu sans même dire que la prescription était déjà atteinte et sans prodiguer le moindre conseil ;
Considérant que M. et Mme A... exposent que la chance perdue par eux d'obtenir indemnisation, du fait de ces manquements, était très réelle car il n'y avait aucun risque d'échec ;
Que M. X... et la société COVEA RISKS leur opposent néanmoins justement que le manquement invoqué ne peut avoir eu comme conséquence pour eux qu'une perte de chance d'obtenir du tribunal, s'il avait été saisi dans les délais, l'indemnisation des désordres constatés par l'expert et de leur préjudice de jouissance pendant la période durant laquelle le pavillon était délabré et non leur indemnisation intégrale telle que l'a évaluée le jugement querellé, surtout en l'affectant de coefficient de réévaluation par référence à l'indice de la construction ou de la consommation ;
Que cependant, au vu du rapport d'expertise, particulièrement détaillé et précis et dont les conclusions ne sont pas remises en cause par les appelants, les assureurs ne les ayant pas discutées puisqu'ils n'ont conclu chacun qu'à leur non garantie au profit de l'autre, la chance d'être indemnisés, perdue par M. et Mme A... du fait de la carence de M. X..., était très sérieuse ; que les conclusions de l'expert, chiffrant à 64 735, 57 € (424 637, 50 frs) les réparations et à 762, 24 € (5 000 francs pour 8 à 10 jours d'évacuation durant la reprise), jointes aux autres éléments fournis relatifs à la situation matérielle actuelle du pavillon, qui penche, que les premiers juges ont évaluée à 30 000 €, permettent de fixer le préjudice de M. et Mme A... à 90 000 €, toutes causes confondues, sans y affecter de coefficient d'évolution, inapproprié à une perte de chance et sans qu'il soit nécessaire de recourir à une expertise ;
Considérant que les circonstances légitiment l'octroi, à M. et Mme A..., d'indemnités procédurales dans la mesure précisée au dispositif ;
PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement sauf sur le montant des indemnités allouées et statuant à nouveau de ce seul chef,
Condamne M. X..., in solidum avec la société COVEA RISKS, à payer à M. et Mme A... la somme de 90 000 € (quatre vingt dix mille euros),
Les condamne, sous les mêmes conditions, à payer à M. et Mme A... la somme de 5 000 € (cinq mille euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 10/00680
Date de la décision : 05/04/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2011-04-05;10.00680 ?
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