Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 3
ARRET DU 04 AVRIL 2011
(n° 11/138, 1 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 09/17301
Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Février 2009 - Tribunal de Grande Instance de PARIS, 19ème Chambre Civile - RG n° 06/18316
APPELANTES
SOCIÉTÉ TMV ONDERLINGE WAARBORGMAATSCH TRANSVEMIJ UA prise en la personne de ses représentants légaux
dont le siège social est [Adresse 9] (PAYS BAS)
LE BUREAU CENTRAL FRANÇAIS agissant poursuites et diligences en la personne de son représentant légal
dont le siège social est [Adresse 1]
représentés par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULAY, avoués à la Cour
assistés de Me Mansour OTHMANI, avocat au Barreau de PARIS
INTIMÉS
Monsieur [H] [C]
demeurant [Adresse 4]
représenté par la SCP BLIN, avoués à la Cour
assisté de Me Serge BEYNET, avocat au barreau de PARIS
SA AXA FRANCE IARD prise en la personne de ses représentants légaux
dont le siège social est [Adresse 3]
représentée par la SCP MIRA-BETTAN, avoués à la Cour
assistée de Me Jean APPIETTO, avocat au barreau de PARIS
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES YVELINES prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 5]
défaillante
CAISSE RÉGIONALE D'ASSURANCE MALADIE D'ILE DE FRANCE (CRAMIF) prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 2]
défaillante
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 28 Février 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Nathalie NEHER-SCHRAUB, Présidente, entendue en son rapport
Madame Régine BERTRAND-ROYER, Conseillère
Madame Claudette NICOLETIS, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mme Nadine ARRIGONI
ARRÊT : RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Nathalie NEHER-SCHRAUB, présidente et par Mme Nadine ARRIGONI, greffière présente lors du prononcé.
° ° °
Le 28 mai 2004, [H] [C] qui pilotait une motocyclette et avait pour passagère [U] [B] a percuté l'ensemble routier conduit par [L] [M] assuré auprès de la société néerlandaise TMV ONDERLINGE WAARBORGMAATSCH TRANSVEMIJ UA laquelle conteste son droit à indemnisation.
[H] [C] a assigné [L] [M], la société TMV ONDERLINGE WAARBORGMAATSCH TRANSVEMIJ UA, le BCF et la société AXA FRANCE IARD, cette dernière prise en sa qualité d'assureur du véhicule Volkswagen Passat conduit par [J] [F], dont il soutient qu'il serait également impliqué dans l'accident, ainsi que la CPAM DES YVELINES et la CRAMIF.
Par jugement du 2 février 2009, le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PARIS a :
- réduit de moitié le droit à l'indemnisation de [H] [C],
- mis hors de cause la société AXA FRANCE IARD,
- ordonné une expertise médicale de [H] [C] confiée au docteur [X],
- condamné la société TMV ONDERLINGE WAARBORGMAATSCH TRANSVEMIJ UA à verser à [H] [C] une provision de 50'000 € à valoir sur la liquidation de son préjudice et une somme de 2000 € sur le fondement de l'article 700
du code de procédure civile,
- condamné la société TMV ONDERLINGE WAARBORGMAATSCH TRANSVEMIJ UA aux dépens.
La société TMV ONDERLINGE WAARBORGMAATSCH TRANSVEMIJ UA et le BCF ont relevé appel du jugement.
Dans leurs dernières conclusions signifiées le 5 janvier 2011, ils demandent à la cour :
- d'infirmer le jugement et de débouter [H] [C] de l'intégralité de ses demandes,
- de condamner [H] [C] à payer à la société TMV ONDERLINGE WAARBORGMAATSCH TRANSVEMIJ UA ainsi qu'au BCF la somme de 1700 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- subsidiairement, de dire que le véhicule de [J] [F], assuré par société AXA FRANCE IARD est impliqué dans l'accident et de condamner la société AXA FRANCE IARD à supporter par moitié les condamnations prononcées par les premiers juges.
[H] [C], dans ses dernières conclusions signifiées le 6 janvier 2011, demande à la cour :
- de dire que la société TMV ONDERLINGE WAARBORGMAATSCH TRANSVEMIJ UA devra réparer intégralement son préjudice,
-subsidiairement de dire que la société TMV ONDERLINGE WAARBORGMAATSCH TRANSVEMIJ UA devra réparer la moitié de son préjudice,
- de condamner la société TMV ONDERLINGE WAARBORGMAATSCH TRANSVEMIJ UA à lui verser une nouvelle somme de 50'000 € à titre de provision à valoir sur la réparation de son préjudice,
- de dire que cette somme sera versée par le BCF,
- encore plus subsidiairement :
* d'infirmer le jugement,
* de dire que la société TMV ONDERLINGE WAARBORGMAATSCH TRANSVEMIJ UA devra réparer intégralement, sinon pour moitié, l'ensemble des préjudices subis par [H] [C],
* de dire que la société TMV ONDERLINGE WAARBORGMAATSCH TRANSVEMIJ UA devra verser une nouvelle somme de 50'000 € à titre de provision à valoir sur la réparation de son préjudice,
- de condamner la société TMV ONDERLINGE WAARBORGMAATSCH TRANSVEMIJ UA, subsidiairement, la société AXA FRANCE IARD, à verser à [H] [C] la somme de 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens.
La société AXA FRANCE IARD, dans ses dernières conclusions signifiées le 8 décembre 2010, demande à la cour :
- de déclarer la société TMV ONDERLINGE WAARBORGMAATSCH TRANSVEMIJ UA et le BCF irrecevables et mal fondés en leur appel en ce qu'il vise la société AXA FRANCE IARD, aucune demande n'étant formée à son encontre,
- de dire [H] [C] irrecevable et mal fondé en ses demandes à l'encontre d'AXA FRANCE IARD mise hors de cause par le jugement dont [H] [C] n'a pas relevé appel ni demandé l'infirmation,
- de confirmer le jugement en ce qu'il a mis la société TMV ONDERLINGE WAARBORGMAATSCH TRANSVEMIJ UA hors de cause,
- de condamner les sociétés appelantes ainsi que tout succombant aux dépens de première instance et d'appel.
La CPAM DES YVELINES et la CRAMIF, assignées à personnes habilitées, n'ont pas constitué avoué.
CELA ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR :
Sur le droit à indemnisation et l'implication du véhicule Volkswagen Passat
Aux termes des dispositions de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985, lorsque plusieurs véhicules terrestres à moteur sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à l'indemnisation des dommages qu'il a subis, sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice et une telle faute qui s'apprécie indépendamment du comportement des autres conducteurs, a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages subis tant par la victime directe que par les victimes par ricochet.
En l'espèce, il résulte du procès-verbal de gendarmerie que l'accident est survenu de jour, sur l'autoroute A 20, hors agglomération, au niveau de la commune de [Localité 8] ; qu'à l'endroit de l'accident, l'autoroute est rectiligne et comporte deux chaussées séparées divisées chacune en deux voies de circulation; que la vitesse est limitée à 130 km heure et que la visibilité est bonne.
Les gendarmes n'ont pu procéder à l'audition de [H] [C] du fait de ses blessures et ont entendu [L] [M] et [J] [F], le premier en qualité de conducteur de l'ensemble routier et le second en qualité de témoin.
[L] [M] a déclaré 'j'étais sur la voie de droite entre [Localité 6] et [Localité 7] lorsque dans une côte, mon camion a été percuté par l'arrière par une moto.... Le choc m'a fait penser à un pneumatique qui éclatait sur la semi-remorque. En regardant dans le rétroviseur, j'ai vu une moto éjectée sur la droite et une personne projetée sur la gauche'.
[J] [F] a indiqué de son côté '... effectivement j'ai été témoin d'un accident de la circulation routière mettant en cause un poids-lourd et une moto.... J'ai remarqué la présence d'une moto qui circulait devant moi à environ 200 à 300 m... alors que nous nous trouvions au milieu d'une côte, j'ai constaté que le pilote ralentissait devant moi. Devant la moto, circulait un poids-lourd genre citerne, à allure plus réduite. Voyant que la moto ralentissait, j'ai pensé que le pilote voulait que je double le camion en premier. J'ai donc mis mon clignotant, me suis déporté sur la voie rapide et j'ai entamé ce dépassement. Lors de ce dépassement, je roulais à 130 km heure. Lorsque j'entame cette manoeuvre, le camion se trouve à environ 200 m de la moto et à 300 m de ma position. Arrivant presque à la hauteur de la moto, je me rends compte que le pilote accélère soudainement, il doit passer de 110 km heure à 140- 150 km heure environ. À ce moment-là je pense qu'il veut dépasser le camion avant moi. Mais je me rends compte que bien qu'accélérant, il reste au milieu de la voie lente, et ne se déporte pas pour dépasser. C'est lorsqu'il arrive à 10 ou 20 m de l'arrière du poids-lourd que je freine rapidement car je voyais qu'il ne pourrait pas effectuer sa manoeuvre de dépassement, il était trop près du camion. À ce moment-là, il m'a semblé voir un mouvement de tête du pilote qui à mon avis, ne s'est rendu compte de la proximité avec le camion qu'à cet instant. La collision était inévitable. Il a percuté l'arrière central du camion.... À mon avis, le pilote de la moto ne s'est pas rendu compte qu'il accélérait, je pense qu'il devait discuter avec sa passagère et qu'il s'est aperçu au dernier moment de sa proximité avec le camion, d'où le mouvement de tête qu'il m'a semblé voir. J'ai vu que juste avant la collision, le pilote a tenté une manoeuvre de ralentissement, mais il était trop tard vu la distance avec le camion et sa vitesse.... Pour moi, l'origine de l'accident est du à une inattention momentanée du pilote....'
Les enquêteurs ont relevé des traces de freinage de la motocyclette de 9,80 m de long sur la voie lente ainsi que divers débris et corps gras sur la chaussée. Ils ont situé le point de choc initial au centre de la barre anti-encastrement arrière de la semi-remorque et à l'avant de la motocyclette.
Le procès-verbal comprend une légende établissant qu'un croquis de l'état des lieux ainsi qu'une planche photographique ont été réalisés mais la cour constate que ces documents ne sont pas versés aux débats par les parties.
Il convient de distinguer dans la déclaration de [J] [F] les constatations objectives de celui-ci concernant le comportement du motard, de ses interprétations et avis subjectifs et au demeurant évolutifs.
Ainsi si dans un premier temps, en voyant que le motard ralentissait [J] [F] a d'abord 'pensé que le pilote voulait que je double le camion en premier' puis en le voyant soudainement accélérer, il a alors 'pensé qu'il veut dépasser le camion avant moi. Mais je me rends compte que bien qu'accélérant, il reste au milieu de la voie lente, et ne se déporte pas pour dépasser' et enfin, 'pensé qu'il devait discuter avec sa passagère et qu'il s'est aperçu au dernier moment de sa proximité avec le camion...', il y a lieu de souligner que [J] [F] n'a pas rapporté avoir vu le motard mettre son clignotant, regarder dans son rétroviseur ou dévier de sa trajectoire..., ce qui aurait confirmé l'intention de ce dernier d' entreprendre le dépassement du semi-remorque.
Cette absence de volonté de dépasser est également corroborée par les constatations objectives des enquêteurs, notamment les traces de freinage et le point de choc au milieu de la barre anti-encastrement de la remorque.
Par ailleurs, [H] [C] qui soutient que l'accident a notamment pour cause le ralentissement du poids-lourd, ne démontre pas la véracité de son affirmation et la seule existence d'une côte sur l'autoroute, est insuffisante pour l'établir.
De même, le moyen des appelants selon lequel l'accident aurait pour cause le fait que la victime était en train de parler à sa passagère, n'est qu'une hypothèse évoquée par [J] [F] et ne ressort d'aucun autre élément du dossier.
Il est ainsi établi par l'ensemble des éléments concordants du procès-verbal que [H] [C] circulait sur la voie de droite derrière le semi-remorque conduit par [L] [M], que dans un premier temps il a ralenti puis a soudainement accéléré pour passer de 110 km heure à 140- 150 km heure environ et, bien qu'accélérant est resté 'au milieu de la voie lente et ne se déporte pas pour dépasser', qu'il n'a freiné qu'alors qu'il se trouvait à une dizaine de mètres de l'ensemble routier qu'il a percuté au centre de la barre anti-encastrement arrière de la semi-remorque.
Dans ces conditions, l'accident a pour cause le défaut de maîtrise de [H] [C] et la gravité de cette faute justifie de réduire des trois quarts son droit à indemnisation .
En outre, il résulte également de l'ensemble des éléments ci-dessus analysés qu'aucun élément objectif ne prouve que la présence du véhicule Volkswagen Passat conduit par [J] [F] -lequel n'a d'ailleurs été entendu qu'en qualité de témoin- a perturbé la victime, ou a eu une quelconque influence sur sa conduite, ou a accru de quelque manière que ce soit l'étendue de son dommage. Dès lors, c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que ce véhicule n'était pas impliqué dans l'accident et, par voie de conséquence, ont mis son assureur hors de cause.
Sur la provision
En l'état des éléments du dossier, il n'y a lieu ni à allocation d'une provision supplémentaire ni à réduction ou suppression de la provision d'ores et déjà accordée.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la victime l'intégralité des frais et honoraires exposés par elle et non compris dans les dépens. La somme fixée de ce chef par le premier juge sera confirmée et il lui sera alloué en cause d'appel, la somme complémentaire de 1500 €.
Les mêmes considérations ne conduisent pas à faire droit à la demande de ce chef de la société TMV ONDERLINGE WAARBORGMAATSCH TRANSVEMIJ UA et du BCF.
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement en ses seules dispositions relatives au droit à indemnisation ;
Et statuant à nouveau, dans cette limite :
Dit que la faute commise par [H] [C] limite des trois quarts son droit à indemnisation ;
Confirme le jugement pour le surplus ;
Condamne la société TMV ONDERLINGE WAARBORGMAATSCH TRANSVEMIJ UA à verser à [H] [C] la somme complémentaire de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 au profit de la société TMV ONDERLINGE WAARBORGMAATSCH TRANSVEMIJ UA et du BCF ;
Condamne la société TMV ONDERLINGE WAARBORGMAATSCH TRANSVEMIJ UA et le BCF aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE