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30/03/2011 | FRANCE | N°10/18825

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 30 mars 2011, 10/18825


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRÊT DU 30 MARS 2011





(n° 204 , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : 10/18825



Décision déférée à la Cour



Ordonnance du juge de la mise en état rendue le 09 Septembre 2010 par le Tribunal de Grande Instance de Paris sous le RG n° 09/12742





APPELANTE



Société d

e droit de la république de [Adresse 6], représentée par ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par la SCP ANNE LAURE GERIGNY FRENEAUX, avoués à la Cour

assistée de Me D...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRÊT DU 30 MARS 2011

(n° 204 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 10/18825

Décision déférée à la Cour

Ordonnance du juge de la mise en état rendue le 09 Septembre 2010 par le Tribunal de Grande Instance de Paris sous le RG n° 09/12742

APPELANTE

Société de droit de la république de [Adresse 6], représentée par ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par la SCP ANNE LAURE GERIGNY FRENEAUX, avoués à la Cour

assistée de Me Daphné BES DE BERC, avocat au barreau de Paris, toque : C 2573

INTIMÉS

PROCUREMENT BUREAU OF THE REPUBLIC OF CHINA MINISTRY OF NATIONAL DEFENCE

[Adresse 8]

REPUBLIQUE DE CHINE [Localité 2]

représentée par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULAY, avoués à la Cour

assistée de Me Sébastien FLEURY, avocat au barreau de Paris, toque : R 090

MINISTÈRE PUBLIC PRÈS LA COUR D'APPEL DE PARIS, pris en la personne du Procureur Général près la Cour d'Appel de PARIS

PALAIS DE JUSTICE

[Adresse 3]

[Localité 5]

Non représenté à l'audience

MINISTÈRE PUBLIC : L'affaire a été communiquée au ministère public, qui a fait connaître son avis.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Mars 2011, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Monsieur Marcel FOULON, Président, chargé d'instruire l'affaire et Madame Michèle GRAFF-DAUDRET, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Marcel FOULON, Président

Monsieur Renaud BLANQUART, Conseiller

Madame Michèle GRAFF-DAUDRET, Conseillère

Greffier, lors des débats : Madame Lydie GIRIER-DUFOURNIER

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Marcel FOULON, président et par Madame Lydie GIRIER-DUFOURNIER, greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

FAITS CONSTANTS

En 1998, le PROCUREMENT BUREAU OF THE REPUBLIC OF CHINA - MINISTRY OF NATIONAL DEFENCE - [Localité 9] signait avec la société de droit singapourien STRATEGIC TECHNOLOGIES - ST - un contrat concernant la fourniture d'un système militaire d'essai souterrain.

Un article 25 prévoyait que les litiges seraient réglés par voie arbitrale;

Depuis 1964, la République Française considère que la République populaire de Chine est l'unique gouvernement légal de la Chine et que [Localité 9] lui appartient.

Pa r jugement du 10 décembre 2002, rendu par défaut, la Haute Cour de la République de [Localité 4], ordonnait que le PROCUREMENT BUREAU OF THE REPUBLIC OF CHINA - MINISTRY OF NATIONAL DEFENCE - [Localité 9] paie à la société ST la somme de 10 693 dollars de [Localité 4], avec intérêts, la somme de 1 573 510,40 dollars américain, avec intérêts, la somme de 7 000 dollars de dépens.

Par acte du 27 juillet 2009, ST assignait le PROCUREMENT BUREAU OF THE REPUBLIC OF CHINA - MINISTRY OF NATIONAL DEFENCE - [Localité 9] devant le tribunal de grande instance de Paris pour faire déclarer exécutoire en France cette décision.

Pour ce faire, cet acte a suivi la voie diplomatique jusqu'à l'Institut français de [Localité 7], qui est la représentation diplomatique française permanente.

Il a été ensuite adressé par l'Institut par lettre recommandée avec avis de réception au Ministère de la défense de la République de Chine.

Par ordonnance contradictoire entreprise du 9 septembre 2010, le juge de la mise en état du tribunal susvisé prononçait la nullité de cette assignation, comme étant contraire aux exigences de souveraineté et de courtoisie internationale.

ST interjetait appel le 20 septembre 2010.

L'ordonnance de clôture était rendue le 1er mars 2011.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DE ST

Par dernières conclusions en date du 27 décembre 2010, auxquelles il convient de se reporter, ST expose :

- qu'aucune convention n'existe entre la République de Chine - [Localité 9] et la France, et que dans ces conditions, la transmission des actes à destination de cet état se fait par voie diplomatique ;

- que c'est ce qui s'est passé dans le cas d'espèce ;

- que la République de Chine n'existant par juridiquement, la représentation consulaire française - Institut française de [Localité 7] - n'ont pas remis l'acte au Ministère des affaires étrangères (inexistant) mais adressé une simple lettre recommandée au Ministère de la Défense taïwanais ;

- que cet acte a donc été régulièrement délivré ;

- à titre subsidiaire, que ce n'est pas la République de Chine qui a été assignée mais le Bureau de l'équipement du Ministre de la Défense, qui, organe administratif dispose d'une capacité juridique propre, et ne démontre pas bénéficier d'une quelconque immunité de juridiction, alors que l'acceptation d'une clause d'arbitrage vaut renonciation de l'Etat à se prévaloir de l'immunité ;

- à titre encore plus subsidiaire, que l'assignation introductive d'instance ne pouvait être déclaré nulle puisque aucun grief n'est allégué.

ST demande :

- l'infirmation de l'ordonnance ;

- de renvoyer les parties devant le tribunal de grande instance de Paris ;

- 8 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Cette partie entend bénéficier des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DE LA RÉPUBLIQUE DE CHINE AGISSANT POUR LE PROCUREMENT BUREAU OF THE REPUBLIC OF CHINA - MINISTRY OF NATIONAL DEFENCE - [Localité 9]

Par dernières conclusions en date du 16 février 2011, auxquelles il convient de se reporter, la République de Chine soutient :

- que l'article 684 du Code de procédure civile n'a pas été respecté et que l'assignation est donc nulle alors que la circulaire de la chancellerie précise que pour l'Etat de [Localité 9] la notification par voie postale n'est pas autorisée ;

- que l'acte aurait dû être envoyé par l'Institut Français au Ministère des Affaires Etrangères de la République de Chine ;

- que cette façon de faire lui porte grief ;

- à titre subsidiaire, que cette violation de l'article 684 constitue une fin de non-recevoir ;

- que la qualité d'Etat au sens de l'article 684 du Code de procédure civile susvisé ne dépend en aucune manière de la reconnaissance de l'Etat qui s'en prévaut par l'Etat français ;

- que le Ministère de la Défense Taïwanais est une émanation de la République de Chine ;

- que la présente action n'a pas pour but la reconnaissance d'une décision arbitrale mais d'une décision rendue par une juridiction étatique et que dans ces conditions la renonciation de l'Etat taïwanais à son immunité de juridiction ne peut jouer dans le cas d'espèce.

Elle demande :

- la confirmation de l'ordonnance ;

- à titre subsidiaire, de se déclarer incompétent et renvoyer l'affaire devant le tribunal de grande instance ;

- dans tous les cas, 8 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Cette partie entend bénéficier des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Avis du Ministère Public

Par dernières conclusions du 2 février 2011, auxquelles il convient de se reporter, le Ministère Public constate que 'bien que l'immunité diplomatique ne soit pas le droit en France pour la République de Chine, les prescriptions de l'article 684 du Code de procédure civile ont été respectées comme le recommande le Ministère de la justice' et qu'il y a donc lieu d'infirmer l'ordonnance entreprise.

SUR QUOI, LA COUR

Considérant que selon l'article 684 du Code de procédure civile : ' l'acte destiné à être notifié à un Etat étranger ... ou à tout autre bénéficiaire de l'immunité de juridiction est remis au parquet et transmis par l'intermédiaire du Ministère de la justice aux fins de signification par voie diplomatique ...' ;

Considérant qu'il n'est pas contestable que l'assignation introductive d'instance n'a pas été, dans le cas d'espèce, délivrée suivant les règles de la signification par voie diplomatique puisque en premier lieu faite, au Ministère de la défense et non pas au Ministère des Affaires Etrangères et puisque en second lieu réalisée directement par voie postale ;

Considérant que la signature par un Etat d'une clause d'arbitrage, vaut renonciation à son immunité de juridiction lorsque ledit Etat veut s'opposer au déroulement de l'arbitrage et /ou aux conséquences de celui-ci ; que tel n'est manifestement pas le cas ici puisque la République de Chine a toujours revendiqué le recours à l'arbitrage contractuellement prévu et refusé la saisine des juridictions étatiques ;

Considérant que le seul contenu du contrat litigieux, qui est un 'acte d'autorité' puisque destiné à la défense nationale d'un Etat, démontre par le le PROCUREMENT BUREAU OF THE REPUBLIC OF CHINA - MINISTRY OF NATIONAL DEFENCE - [Localité 9] n'est pas un organe interne au Ministère de la défense de la République de Chine (à qui d'ailleurs a été envoyée la lettre recommandée), lui-même émanation de ladite République ; que non reconnue de jure par la France cet état invoque à juste titre une reconnaissance de fait, qu'il serait illogique de lui refuser alors qu'il est jugé apte à se défendre devant un juge ;

Considérant que la République de Chine, non reconnue par la République Française, constitue en fait un Etat souverain et indépendant auquel la courtoisie internationale impose qu'il ne soit pas porté atteinte ;

Qu'une telle violation entraîne la nullité de l'assignation ; que cette façon de faire attentatoire à la souveraineté de l'Etat qui en est la victime lui cause par là même un grief au sens de l'article 114 du Code de procédure civile ; qu'il convient dans ces conditions de confirmer l'ordonnance entreprise ;

PAR CES MOTIFS

- Confirme l'ordonnance entreprise,

Y ajoutant :

- Condamne la société de droit de la République de [Adresse 6] à payer à la REPUBLIC OF CHINA - [Localité 9] - agissant par le PROCUREMENT BUREAU OF MINISTRY OF NATIONAL DEFENSE OF THE REPUBLIC OF CHINA 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamne la société de droit de la République de [Adresse 6] à payer à la REPUBLIC OF CHINA - [Localité 9] - aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés selon les dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 10/18825
Date de la décision : 30/03/2011

Références :

Cour d'appel de Paris A2, arrêt n°10/18825 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-03-30;10.18825 ?
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