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29/03/2011 | FRANCE | N°10/02352

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 2 - chambre 1, 29 mars 2011, 10/02352


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 29 MARS 2011
(no 131, 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 02352
Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 novembre 2009- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 08/ 12566

APPELANTE
Madame Yasmina X......... DAKAR-SENEGAL représentée par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULAY, avoués à la Cour assistée de Maître Doudou NDOYE, avocat au barreau de DAKAR (SÉNÉGAL)

INTIMEE
SELAR

L DOMINIQUE ET LAURENT PARGADE 24 rue Lafayette 75009 PARIS représentée par la SCP ARNAUDY ET BAECHLIN, av...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2- Chambre 1
ARRET DU 29 MARS 2011
(no 131, 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/ 02352
Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 novembre 2009- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 08/ 12566

APPELANTE
Madame Yasmina X......... DAKAR-SENEGAL représentée par la SCP FISSELIER-CHILOUX-BOULAY, avoués à la Cour assistée de Maître Doudou NDOYE, avocat au barreau de DAKAR (SÉNÉGAL)

INTIMEE
SELARL DOMINIQUE ET LAURENT PARGADE 24 rue Lafayette 75009 PARIS représentée par la SCP ARNAUDY ET BAECHLIN, avoués à la Cour assistée de Me Barthélemy LACAN, avocat au barreau de PARIS, toque : E0435 toque : E0435

COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 14 février 2011, en audience publique, le rapport entendu conformément à l'article 785 du code de procédure civile, devant la Cour composée de :
Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre Mme Brigitte HORBETTE, Conseiller Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller
qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Noëlle KLEIN

ARRET :
- contradictoire-rendu publiquement par Monsieur François GRANDPIERRE, Président de chambre-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.- signé par Monsieur François GRANDPIERRE, Président et par Madame Noëlle KLEIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
******************
La Selarl notariale Dominique et Laurent Pargade a reçu le 29 mars 2007 l'acte de vente d'un bien immobilier, composé d'un appartement avec cave sis à Courbevoie (Hauts de Seine) appartenant depuis le 11 décembre 1996 aux époux X..., mariés sous le régime de la communauté légale, qui l'avaient acquis ensemble, lesquels étaient tous deux représentés à l'acte par un clerc de l'étude, Mme Annyck Y..., selon procuration lui donnant pouvoir de vendre le bien au prix de 182 000 €, dont il s'est avéré que ladite procuration sous seing privé, transmise par le notaire aux époux X... demeurant au Sénégal, signée par eux le 23 mars 2007 avec la mention " Bon pour pouvoir " et revêtue du cachet de la perception de Dakar Centre, avait été falsifiée par M. X..., imitant la signature de son épouse Mme X....
Le divorce des époux X... a été prononcé aux torts du mari par jugement du 29 janvier 2008 du Tribunal départemental hors classe de Dakar, confirmé en appel par décision du 28 août 2008 du Tribunal régional de Dakar, M. Z..., notaire, étant désigné pour procéder à la liquidation de la communauté, sous la supervision de Mme A..., en qualité de juge commissaire.
Estimant qu'une faute de négligence commise par le notaire a permis cette opération frauduleuse avec la vente du bien à son insu et à un prix de 182 000 €, très inférieur à la valeur réelle du bien par elle chiffrée à 325 000 €, Mme X... a recherché devant le tribunal de grande instance de Paris la responsabilité civile professionnelle de la Selarl Dominique et Laurent Pargade et a demandé la condamnation de cette dernière à lui payer, à titre de dommages et intérêts la somme de 182 500 € correspondant à la moitié de la valeur du bien, la somme de 1800 € par mois à compter du 29 mars 2007 jusqu'au paiement intégral de la somme susvisée, lesdites sommes avec intérêt au taux légal à compter de l'assignation, la somme de 10 000 € en réparation du préjudice par elle subi en raison des tracas, recherches et démarches liés à cette procédure ainsi qu'une indemnité de procédure de 3000 €.
Par jugement en date du 18 novembre 2009, le tribunal a condamné la Selarl Dominique et Laurent Pargade à payer à Mme Yasmina X... la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts, a rejeté toute autre demande, condamné la Selarl Dominique et Laurent Pargade aux dépens et à payer à Mme Yasmina X... la somme de 3000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.
CELA ETANT EXPOSE, la COUR :
Vu l'appel interjeté le 8 février 2010 par Mme Yasmina X...,
Vu les conclusions déposées le 4 août 2010 par l'appelante qui demande l'infirmation du jugement en certaines de ses dispositions relatives à la réparation de son préjudice matériel, statuant à nouveau de ce chef, la condamnation de la Selarl intimée à lui payer, compte tenu de la valeur réelle du bien, la somme de 95 060 € au titre de son préjudice matériel, la somme de 1800 € par mois à titre de perte de loyers à compter du 29 mars 2007, le tout assorti de l'intérêt au taux légal à compter de l'assignation du 1er Août 2008, la confirmation du jugement en ce qu'il lui a accordé la somme de 10 000 € au titre de son préjudice moral et la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, y ajoutant, la condamnation de la Selarl intimée à lui payer la somme de 5000 € au titre en appel de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à payer les dépens d'appel,
Vu les conclusions déposées le 14 décembre 2010 par la Selarl Laurent et Dominique Pargade qui demande la confirmation du jugement entrepris, le débouté de Mme X... du surplus de ses demandes en réparation d'un préjudice matériel et la condamnation de Mme X... à lui payer la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à payer les dépens d'appel.
SUR CE :
Considérant que le notaire intimé ne contestant plus devant la cour la faute de négligence qu'il a commise, le litige n'oppose les parties que sur le préjudice indemnisable en lien de causalité directe avec ladite faute dont Mme X... est susceptible de se prévaloir, l'appelante faisant valoir que le jugement déféré ne l'a pas justement indemnisée ; qu'elle rappelle que dès lors que les conclusions en première instance de la Selarl Pargade ne contestaient pas la valeur réelle du bien estimée à 325 500 €, rien ne permet au notaire de justifier l'avoir vendu au prix seulement de 182 500 € ; qu'elle-même affirme que l'appartement et la cave valaient au moins 325 000 € au jour de la vente, qu'en réponse au jugement déféré qui lui faisait grief de n'avoir pas produit une évaluation de ce bien, elle entend se référer à l'indice-notaire INSEE fourni par la Chambre des Notaires de Paris Ile de France, établissant la valeur au mètre carré à 4540 € soit pour l'appartement concerné une valeur de 4540 € x 70, 54 m2 = 320 251 €, outre le prix de la cave ;
Considérant qu'elle fait encore valoir que, pour un bien commun, s'il est obligatoire pour le notaire de payer par priorité le crédit hypothécaire et les charges, l'évocation de ces postes débiteurs d'un total de 134 880, 44 € n'a d'intérêt que par rapport à la valeur réelle de 325 000 €, qu'ainsi, pour sa part, c'est la moitié de la différence entre ces sommes soit 325 000 €-134 880 € = 190 120 € soit 95 060 € qui constitue son premier préjudice matériel, sans qu'il ne soit possible de lui opposer comme l'a fait le jugement déféré qu'elle doit, du fait du divorce intervenu entre les époux, attendre la liquidation définitive au Sénégal de la communauté de biens, M. X... ayant depuis disparu, et le juge commissaire ayant clôturé lesdites opérations de liquidation par une ordonnance du 12 avril 2010 en constatant qu'il n'existait plus rien à partager ;
Considérant qu'elle soutient encore que le jugement déféré n'a pas pris en compte son grief selon lequel le notaire n'aurait pas dû remettre l'intégralité du prix de vente à son mari en lui opposant que " celui-ci disposait du pouvoir de le percevoir seul en raison du régime de communauté de biens auquel étaient soumis les époux, encore mariés à l'époque ", le jugement violant ainsi les dispositions de l'article 1424 du code civil selon lequel " les époux ne peuvent, l'un sans l'autre, aliéner ou grever de droits réels les immeubles... Ils ne peuvent, sans leur conjoint, percevoir les capitaux provenant de telles opérations " ;
Considérant enfin qu'elle invoque la perte de sa part de loyer, qu'elle aurait perçue si le bien n'avait pas été vendu ;
Considérant que l'intimé fait valoir que le jugement a fait une juste appréciation du préjudice dès lors que Mme X... se borne à affirmer que le prix du bien a été frauduleusement minoré, sans que l'extrait de la base BIEN constituée par les services d'évaluation immobilière de la Chambre des Notaires de Paris ne permettent d'établir que les biens auraient eu, lors de la vente, une valeur au mètre carré de 4540 € conduisant à une évaluation de 320 251 € cave exclue ; qu'il souligne que l'appelante n'apporte aucune information sur les qualités et l'état d'un bien dont elle connaissait pourtant, à suivre ses explications, la consistance et l'état matériel véritable ; que par ailleurs, il convient de tenir compte du passif hypothécaire dont le bien était grevé, passif de communauté donc également à la charge de Mme X..., composé d'un solde de remboursement de prêt bancaire de 82 308, 98 €, de dettes vis à vis de la copropriété de 52 571, 46 €, le relevé de compte de l'étude faisant apparaître qu'une somme de 40 548, 94 € a été versée à M. X..., remise de fonds qui n'est donc pas fautive ; que sur ce versement, constitutif pour la moitié de sa valeur d'un détournement de deniers de communauté à hauteur de la somme de 20 274, 47 €, le préjudice de Mme X... n'est pas certain, dès lors que l'épouse n'avait pas de droit spécial sur l'immeuble commun ou sur le prix de vente, mais seulement un droit sur l'universalité des biens de la communauté aujourd'hui dissoute par l'effet du divorce prononcé entre les époux ; que si l'appelante produit le jugement de divorce prononcé par le tribunal de Dakar le 29 janvier 2008, ordonnant la liquidation de la communauté, il résulte de l'attestation de M. Z..., notaire à Dakar, commis pour préparer la liquidation de la communauté qu'il n'a reçu aucune pièce de M. X... et n'est pas en mesure de caractériser un quelconque actif de communauté ; qu'ainsi l'appelante ne justifie pas plus qu'en première instance, de ses droits sur la masse à partager ; que s'agissant du préjudice tiré des fruits de la chose vendue, l'appelante ne justifie pas ni que le bien était donné à bail et produisait des loyers, ni qu'elle aurait eu qualité pour percevoir seule lesdits loyers, au lieu et place de son mari ;
Considérant, sur la valeur du bien, que les éléments complémentaires d'évaluation produits aux débats par l'appelante, à caractère très général et non spécifiques au bien en cause, consistant d'ailleurs en pièce 15 en un tableau sommaire non de prix au mètre carré des biens mais seulement d'indices, ne sont pas susceptibles d'être tenus pour probants d'une valeur réelle en mars 2007 de 325 000 € ; que cette valeur, qui non seulement, contrairement aux dires de Mme X..., n'a jamais été tenue pour exacte par le notaire, ne lui serait en tout état pas opposable dès lors que le prix alors convenu entre les parties s'imposait à tous et également au notaire ; que si l'appelante est en mesure de justifier devant la cour, ce qu'elle n'avait pas pu faire en première instance, que la liquidation des biens dépendant de la communauté des époux X... est désormais terminée, produisant sur ce point aux débats, en pièce 17, l'ordonnance de clôture rendue par le juge commissaire au Sénégal, de laquelle il résulte l'absence de tout actif de communauté, force est de constater que l'argumentation qu'elle développe, tout à fait comparable à celle déjà développée devant les premiers juges qui l'ont écartée à juste titre en des motifs pertinents que la cour approuve, n'est pas de nature à établir le caractère certain du préjudice matériel dont elle entend être indemnisée ; qu'en effet, ledit préjudice n'est pas démontré dans son principe, l'épouse ne pouvant avoir de droit que un actif de communauté, susceptible d'être quantifié à partir d'une masse active à partager et au terme d'une liquidation, mais n'ayant pas de droit spécial ni sur l'immeuble commun ni sur le prix de sa vente ; que sur ce dernier point, l'appelante ne fournit aucun argument pertinent qui viendrait contredire l'existence d'un passif hypothécaire de communauté, donc aussi le sien, tel que retenu par le jugement, venant s'imputer sur le produit de la vente, ne laissant disponible que la somme de 40 548, 94 € versée à M. X... ; que cette remise de fonds à l'époux, ayant pouvoir de les percevoir dans le régime matrimonial qui était le sien à l'époque, n'est pas davantage en elle-même fautive, le principe invoqué par l'appelante, à savoir notamment celui posé par l'article 1424 du code civil, étant relatif au fonctionnement de la communauté et aux rapports entre les époux mais non opposable au notaire, précisément persuadé, à tort au regard de la falsification, de disposer de l'accord des époux ; qu'enfin, Mme X... ne justifie ni de la location effective du bien, ni des conditions d'une telle location si elle a existé, ni encore de la perception de loyers, ce qui n'établit pas la réalité d'un préjudice dont elle puisse se prévaloir à ce titre ; qu'en conséquence, faute par l'appelante d'établir la certitude de ses droits sur les sommes versées par le notaire et donc la réalité d'un préjudice, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions ;
Considérant que l'appelante, succombant en toutes ses prétentions, sera déboutée de la demande par elle formée sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; que la faute du notaire ayant été constatée, l'équité ne commande pas de faire application au profit de l'intimé de ces mêmes dispositions et que pour les mêmes motifs, le notaire supportera les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS :
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute les parties de leurs demandes formées au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la Selarl Dominique et Laurent Pargade aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 2 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 10/02352
Date de la décision : 29/03/2011
Sens de l'arrêt : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2011-03-29;10.02352 ?
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