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09/03/2011 | FRANCE | N°09/19082

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 09 mars 2011, 09/19082


Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3



ARRET DU 09 MARS 2011



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 09/19082



Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Juin 2009 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 07/09018





APPELANT



Monsieur [G] [O]

[Adresse 3]

[Localité 2]



représenté par la SCP LAGOURGUE - OLI

VIER, avoués à la Cour

assisté de Me Philippe DAL MEDICO, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1270







INTIMEE



Société ORIGINAL CANDY prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse...

Grosses délivréesREPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRET DU 09 MARS 2011

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 09/19082

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Juin 2009 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 07/09018

APPELANT

Monsieur [G] [O]

[Adresse 3]

[Localité 2]

représenté par la SCP LAGOURGUE - OLIVIER, avoués à la Cour

assisté de Me Philippe DAL MEDICO, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1270

INTIMEE

Société ORIGINAL CANDY prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par la SCP FANET - SERRA, avoués à la Cour

assistée de Me Jean-claude BOUHENIC, avocat au barreau de PARIS, toque : A0861

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 novembre 2010, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame BARTHOLIN, Présidente et Madame BLUM, conseiller chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame BARTHOLIN, Présidente

Madame IMBAUD-CONTENT, Conseiller

Madame BLUM, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame BASTIN.

ARRÊT :

- contradictoire,

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Madame BARTHOLIN, Présidente, et par Madame BASTIN, greffier, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

*************

Par acte du 26 janvier 2000, M. et Mme [E] ont donné à bail, pour neuf ans à compter du 1er octobre 1999, à la société Confiserie biscuiterie de l'Essonne des locaux commerciaux situés [Adresse 1] destinés au commerce de confiserie, biscuiterie, chocolaterie gros et demi-gros à l'exclusion de tout autre.

La société Confiserie biscuiterie de l'Essonne a été déclarée en liquidation judiciaire le 4 avril 2001par le tribunal de commerce de Paris qui a désigné la s.c.p. Brouard-Daudé en qualité de liquidateur. Avant l'expiration du délai donné au liquidateur de la société Confiserie biscuiterie de l'Essonne pour opter sur la poursuite ou non du bail, M. [O], devenu propriétaire des murs suivant acte notarié du 8 mars 2001, a donné à bail les locaux du [Adresse 1] à la société One Shoe's s.a.r.l. à compter du 1er avril 2001, par acte sous seing privé daté du 1er avril 200, enregistré le 18 juillet 2001.

Par jugement du 27 novembre 2001, le tribunal de commerce de Paris, infirmant une ordonnance du juge commissaire, a ordonné la cession du fonds de commerce de la société Confiserie biscuiterie de l'Essonne à M. [M], agissant pour la société en formation Original Candy, au prix de 225.000 francs (34.301,03 euros). Par acte du 4 mars 2002, la s.c.p. Brouard-Daudé a en conséquence cédé à la société Original Candy le fonds de commerce exploité par la société Confiserie biscuiterie de l'Essonne avec le droit au bail.

Par ordonnance du 9 octobre 2002, confirmée par arrêt du 20 juin 2003 sauf sur le montant de l'astreinte, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a enjoint à M. [O] de délivrer les locaux et de les mettre à la disposition de la société Original Candy et ce sous astreinte.

Par arrêt du 5 octobre 2006, la cour d'appel de Paris a infirmé les décisions du juge de l'exécution ayant liquidé l'astreinte prononcée et a débouté la société Original Candy de sa demande à cette fin au motif que l'astreinte n'a aucun caractère réparatoire, qu'elle est distincte des dommages et intérêts et qu'il appartient à la société Original Candy de saisir le juge compétent d'une demande de dommages et intérêts si elle estime que l'inexécution par M. [O] de l'arrêt du 20 juin 2003 lui a causé préjudice.

La société Original Candy qui n'a pu obtenir la délivrance des locaux, a alors assigné M. [O] au fond, par acte du 18 juin 2007, en paiement de dommages et intérêts

Par jugement rendu le 18 juin 2009, le tribunal de grande instance de Paris a :

- dit que M. [G] [O] a commis une faute contractuelle du fait de l'inexécution de son obligation de délivrance à l'égard de la s.a.r.l. Original Candy, cessionnaire suivant acte sous seing privé en date du 4 mars 2002 d'un fonds de commerce exploité dans les locaux situés [Adresse 1] appartenant à M. [O], cette cession de fonds comprenant la cession du droit au bail ;

- condamné en conséquence M. [O] à payer à la s.a.r.l. Original Candy la somme de 234.301 euros en réparation du préjudice subi et la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

- condamné M. [O] aux entiers dépens.

M. [O] a relevé appel de cette décision et, par ses conclusions du 4 janvier 2010, demande à la cour d'infirmer le jugement et de :

- débouter la société Original Candy de toutes ses demandes,

-condamner la société Original Candy à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions du 30 avril 2010, la société Original Candy demande à la cour, au visa des articles 1134,1719 et 1382 du code civil, 33 et suivants de la loi du 9 juillet 1991 et du jugement en date du 27 novembre 2001, de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

- "statuant à nouveau", condamner M. [O] à lui payer la somme de 362.000 euros au titre du préjudice subi ;

- constater que le bail signé le 1er avril 2001 arrive à son terme le 1er avril 2010 et qu'au 1er avril 2010, M. [O] peut donner congé à la société Univers Lingerie,

- dire qu'en conséquence, il n'existe aucun obstacle à l'exécution de M. [O] de son obligation de délivrance ;

- condamner M. [O] "à une astreinte de 300 euros par jour dans le délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt, d'avoir à délivrer et mettre à la disposition de la société Original Candy les locaux sis [Adresse 1]" ;

- condamner M. [O] à lui payer la somme de 10.000 euros pour résistance abusive ;

- débouter M. [O] de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner M. [O] à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

SUR CE,

Considérant qu'au soutien de son appel, M. [O] fait valoir :

- que la société Original Candy a acquis le fonds en acceptant la présence d'un tiers dans les locaux, déclarant faire son affaire personnelle de la procédure d'expulsion de la société One Shoe's et dispensant le vendeur du fonds de son obligation de délivrance ;

- que la faute qu'il a commise d'avoir consenti un bail irrégulier à la société One Shoe's est une faute commise non pas envers la société Original Candy mais envers la liquidation de la société Confiserie biscuiterie de l'Essonne ;

- que cette faute a été judiciairement sanctionnée par l'inopposabilité à la liquidation de la société Confiserie biscuiterie de l'Essonne et à la société Original Candy du bail consenti à la société One Shoe's et le jugement du 27 novembre 2001 forme un "contrat judiciaire" de sorte que les dispositions spécifiques de la cession du fonds prévalent sur l'obligation de droit commun de délivrance du bailleur, celui-ci étant dans l'impossibilité d'exécuter cette obligation ;

- qu'il n'était pas investi, à la différence de la société Original Candy, de l'action en expulsion de la société One Shoe's et il ne peut lui être reproché de n'avoir pas engagé des procédures d'expulsion sérieuses eu égard aux décisions de justice produites ;

- que ses actions fondées sur l'article L 621-28 ancien du code de commerce en résiliation de bail à l'encontre de la société Biscuiterie Confiserie de l'Essonne n'ont eu aucune incidence sur les conditions d'entrée en possession des locaux par la société Original Candy ;

- que la société Original Candy, en renonçant depuis sept ans à exercer les droits et actions qu'elle-seule détient ou à faire valoir ses droits en référé et au fond dans les instances qu'il a lui-même introduites, a créé le préjudice dont elle se plaint et dont, au surplus, elle ne rapporte pas la preuve ;

Sur la faute :

Considérant que M. [O] reconnaît avoir commis une faute en consentant un bail irrégulier à la société One Shoe's ; que l' irrégularité a pour effet de rendre ce bail inopposable à la liquidation judiciaire de la société Confiserie biscuiterie de l'Essonne et à la société Original Candy ; que la faute, contractuelle à l'égard de la liquidation judiciaire de la société confiserie biscuiterie de l'Essonne , l'est aussi à l'égard de la société Original Candy aux droits de celle-ci ; que la connaissance et l'acceptation par la société Original Candy de la présence d'un tiers dans les locaux et sa déclaration de faire son affaire personnelle de la procédure d'expulsion de la société One Shoe's n'ont d'effet qu'à l'égard du vendeur de fonds de commerce, dispensant ce dernier de son obligation de délivrance ; qu'elles ne sont pas de nature à libérer le bailleur de sa propre obligation de délivrance et en tout état de cause, dans le cadre de la présente action en dommages et intérêts, à l'exonérer des conséquences de la faute qu'il a commise en signant un bail irrégulier avec la société One Shoe's pour des locaux déjà loués à la société Confiserie Biscuiterie de l'Essonne aux droits de laquelle vient la société Original Candy ; que le fait que la société Original Candy ait renoncé à tout recours à l'encontre de la liquidation judiciaire de la société Confiserie Biscuiterie de l'Essonne n'emporte pas renonciation à recours à l'encontre de M. [O] ;

Que si le jugement du 27 novembre 2001 a de fait constaté l'inopposabilité à la société Original Candy du bail consenti à la société One Shoe's en ordonnant la cession du fonds de commerce, il ne peut avoir pour effet d'exonérer M. [O] des conséquences pécuniaires de la faute qu'il a commise à l'encontre de la société Confiserie biscuiterie de l'Essonne ou de son ayant droit ;

Considérant par ailleurs que les premiers juges ont pertinemment relevé que c'est par un fait volontaire que M. [O] n'a pu exécuter son obligation de délivrance et non compte tenu d'un cas de force majeure ce qu'il n'invoque d'ailleurs pas ; que la responsabilité contractuelle de M. [O] est engagée à l'égard de la société Original Candy pour le non respect de son obligation de délivrance ;

Sur le préjudice :

Considérant que M. [O] n'est pas fondé à reprocher à la société Original Candy de n'avoir pas poursuivi l'expulsion de l'occupant des locaux pour obtenir leur libération ; qu'il ne prétend pas que la société One Shoe's avait connaissance de l'existence du bail conclu avec la société Biscuiterie Confiserie de l'Essonne ; qu'il n'établit pas que la société Original Candy disposait des moyens juridiques et d'un droit propre lui permettant d'obtenir l'expulsion de l'occupant ; qu'en effet la société One Shoe's disposait d'un titre locatif consenti par le légitime propriétaire ce qui faisait obstacle à son éviction par la société Original Candy avec laquelle elle était sans lien de droit ; qu'il ne peut valablement soutenir que la prétendue inaction de la société Original Candy est à l'origine du préjudice dont elle demande réparation et qui est né de sa propre faute ;

Considérant que c'est par des motifs pertinents que la cour approuve que les premiers juges, relevant que la société Original Candy ne demande pas la résiliation du bail dont elle est titulaire, ont débouté celle-ci de sa demande de dommages et intérêts tenant à la perte du fonds de commerce ainsi, par ailleurs que de celle née de la perte prétendue de la valeur des revenus tirés de la "location du studio" qui ne fait pas partie du bail ; qu'ils ont également débouté à juste titre la société Original Candy de sa demande en réparation d'un préjudice propre à son dirigeant ;

Considérant que la société Original Candy étant toujours titulaire du fonds de commerce et du droit au bail qu'elle a acquis et dont elle demande la délivrance, le prix d'acquisition dont elle demande le remboursement à titre de dommages et intérêts ne peut constituer un préjudice indemnisable tant que le bail est en cours ; qu'ayant cependant été privée dès l'origine de la possibilité d'exploiter le fonds de commerce et de retirer les revenus de son investissement, elle subit un préjudice directement lié à la faute commise par M. [O] ; que ce préjudice ne peut être évalué sur la base de seuls comptes de résultats prévisionnels dont la réalité n'a pas été démontrée par des résultats réels d'exploitation ; que s'agissant de la reprise d'un fonds de commerce en liquidation judiciaire dont les éléments incorporels ont été évalués à 26.678,58 euros, la cour dispose des éléments pour fixer à la somme de 100.000 euros le préjudice subi par la société Original Candy du fait de l'impossibilité d'exploitation du fonds de commerce ;

Sur la demande en délivrance de la société Original Candy :

Considérant que la société Original Candy fait valoir que le bail consenti par M. [O] étant venu à échéance le 1er avril 2010, le bailleur a recouvré la possibilité d'y mettre fin en donnant congé à la société One Shoe's afin de respecter son obligation de délivrance des lieux à son égard ;

Considérant qu'il est effectif que du fait la survenance du terme du bail consenti à la société One Shoe's, M. [O] recouvre la possibilité de mettre fin à la situation juridique qu'il a créée par sa faute et qui rendait impossible, pendant la durée du bail qui lui était consenti, l'éviction de la société One Shoe's ou des sociétés venant à ses droits ; qu'il sera également observé que le propre bail de la société Original Candy est venu à son terme en 2006 se prorogeant depuis lors par tacite reconduction ;

Qu'il sera en conséquence fait droit à la demande de la société Original Candy dans les termes du dispositif ;

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive :

Considérant que compte tenu de la situation procédurale complexe dans laquelle M. [O] se trouve, et du bien fondé partiel de son appel, la société Original Candy n'établit pas l'abus de droit qu'elle lui impute ; qu'elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts ;

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

Considérant que le jugement sera confirmé sur les dépens de première instance ; que M. [O] supportera les dépens d'appel ; que vu l'article 700 du code de procédure civile, le jugement sera confirmé en ce qu'il a alloué à ce titre la somme de 5.000 euros à la société Original Candy et les parties seront déboutées des demandes qu'elles forment sur ce fondement en appel ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement sauf sur le montant des dommages et intérêts ;

Statuant à nouveau sur le chef infirmé,

Condamne M. [O] à payer à la société Original Candy la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Y ajoutant,

Ordonne à M. [O] de délivrer à la société Original Candy les locaux objets du bail qu'elle a acquis de la liquidation judiciaire de la société Confiserie Biscuiterie de l'Essonne dans un délai de 6 mois à compter de la signification du présent arrêt, sauf pour M. [O], s'il préfère, de donner congé à la société Original Candy ;

Dit que passé le délai ci-dessus et faute pour lui d'avoir satisfait à son obligation de délivrance ou donné congé à la société Original Candy, M. [O] sera redevable d'une astreinte de 130 euros par jour de retard, pendant douze mois, après quoi il sera à nouveau fait droit ;

Déboute les parties de leurs autres demandes ;

Condamne M. [O] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 09/19082
Date de la décision : 09/03/2011

Références :

Cour d'appel de Paris I3, arrêt n°09/19082 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-03-09;09.19082 ?
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