RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 4
ARRET DU 01 Février 2011
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 08/09273
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Mai 2008 par le conseil de prud'hommes de paris section activités diverses RG n° 07/05603
APPELANTE
SELARL [X] venant aux droits de la SCP [X]
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par Me Sylvie CAZENEUVE, avocat au barreau de PARIS, toque : C2299
INTIMEES
Madame [T] [O]
[Adresse 2]
[Localité 7]
comparant en personne, assistée de Me Michel VERNIER, avocat au barreau de VERSAILLES
ASSOCIATION SERVAAFA
[Adresse 4]
[Localité 6]
représentée par Me François D'ANDURAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : C2348 substitué par Me Laure SERFATI
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 14 Décembre 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente
Madame Anne-Marie DEKINDER, Conseillère
Madame Denise JAFFUEL, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier : Mademoiselle Sandrine CAYRE, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par Madame Charlotte DINTILHAC, Présidente
- signé par Madame Charlotte DINTILHAC, président et par Mademoiselle Sandrine CAYRE, greffier présent lors du prononcé.
La Cour est saisie de l'appel interjeté par la SELARL [X] du jugement du Conseil des Prud'hommes de PARIS, section Activités diverse - chambre 5 rendu le 16 mai 2008 qui a mis hors de cause l 'Association SERVAAFA qu'elle avait appelée en garantie, déclaré irrecevable la demande de condamnation solidaire entre la SCP [X] et Monsieur [U] [X] , dit le licenciement de Madame [T] [O] abusif et condamné la SCP [X] à payer à la salariée avec exécution provisoire les sommes de :
30000 € à titre de dommages intérêts pour rupture abusive
3280.78 € à titre d'indemnité pour non respect de la procédure de licenciement
3280.78 € à titre de dommages intérêts pour absence de mention du droit individuel à la formation et une même somme pour absence de mention de la priorité de réembauchage
les intérêts légaux de ces sommes à compter du prononcé du jugement
9815.80 € à titre de rappel de 13ème mois plus 981.58 € pour congés payés afférents avec les intérêts légaux à compter de la réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation
750 € en application de l'article 700 du Code de procédure Civile
FAITS ET DEMANDES DES PARTIES
Madame [T] [O] née le [Date naissance 3] 1958 a été engagée à temps complet par contrat verbal le 14 Février 1983 en qualité de secrétaire au sein d'un cabinet d'avocats ; à la suite de la séparation des associés, elle est demeurée à compter de 1990 au sein de la SCP [X] devenue la SELARL [X] le 20 Mars 2009 ; à la date de son licenciement elle était la seule salariée ;
Dans le dernier état de ses fonctions, elle occupait un emploi d' assistante coefficient 285, 3ème échelon;
Les 12 décembre 2006 et 27 décembre 2006 Monsieur [U] [X] unique avocat de la SCP a demandé à Madame [T] [O] d'accepter de travailler à mi-temps en raison d'une diminution des besoins en secrétariat ; Madame [T] [O] a refusé cette proposition ;
Le 16 Février 2007 elle a été convoquée à un entretien préalable en vue d'un licenciement économique; le 28 février 2007 suivant lettre remise en main propre Madame [T] [O] a été licenciée pour motif économique motivé par la diminution de la charge travail du cabinet depuis le départ du collaborateur ; le 13 Mars 2007 Madame [T] [O] a accepté de bénéficier de la CRP qui lui avait été remise le 28 Février 2007.
Ultérieurement, la SELARL [X] a proposé à Madame [T] [O] le 30 Avril 2007 de l'engager pour 42h par mois sur la base du SMIC horaire pour un emploi de dactylo débutant coefficient 207, le 12 Mai 2007 Madame [T] [O] a refusé cet emploi, elle a saisi le Conseil des Prud'hommes le 16 Mai 2007 pour voir juger que son contrat a été rompu abusivement et obtenir le paiement de diverses indemnités.
La convention collective applicable est celle du personnel des cabinets d'avocats.
La SELARL [X] demande à la Cour de constater la rupture d'un commun accord intervenue le 13 Mars 2007 et la réalité du motif économique de la rupture contractuelle ; d' infirmer en conséquence le jugement entrepris et de débouter Madame [T] [O] de ses prétentions tout en la condamnant à lui payer la somme de 3500 € en application de l'article 700 du Code de procédure Civile ;
À titre subsidiaire : de constater la réalité de la substitution de l 'Association SERVAAFA pour les obligations légales de la SELARL [X] et qu'elle a mis en jeu la responsabilité contractuelle de l'association pour défaut de conseil et inexécution et en conséquence « Appeler en garantie l 'Association SERVAAFA pour les éventuelles condamnations qui auraient été mises à la charge de La SELARL [X] et condamner l 'Association SERVAAFA à lui rembourser toutes les sommes et condamnations qu'elle a versées ainsi que les frais et dépens exposés », condamner enfin l 'Association SERVAAFAà lui payer la somme de 3500 € en application de l'article 700 du Code de procédure Civile
Madame [T] [O] demande de condamner la SELARL [X] à lui payer les sommes de :
64062 € à titre de dommages intérêts pour licenciement abusif
3559 € à titre de dommages intérêts pour non respect de la procédure de licenciement ainsi que la même somme pour d'une part l'absence de mention de la priorité de réembauchage et d'autre part de la mention du DIF
16271.93 € à titre de rappel de 13ème mois conventionnel plus 1627.19 € pour congés payés afférents
2816.07 € à titre de rappel d'allocation formation
Elle demande en outre :
la confirmation de la somme de 750 € qui lui a été allouée pour frais irrépétibles et y ajoutant sollicite la condamnation de La SELARL [X] à lui payer celle de 4000 € pour les frais irrépétibles exposés en appel
d'ordonner le remboursement des indemnités chômage aux ASSEDIC
la condamnation de la SELARL [X] aux entiers dépens y compris les frais exposés pour l'exécution du jugement du 18 Mai 2008 et de l'ordonnance du 20 Mars 2009 ainsi que de l' arrêt à intervenir
L 'Association SERVAAFA demande à la Cour de se déclarer matériellement incompétente et de renvoyer l'employeur à se pourvoir devant le Tribunal d'Instance du 8ème arrondissement de Paris ;
Subsidiairement, de déclarer l'appel en garantie irrecevable à raison d'une carence de preuve et confirmer sa mise hors de cause tout en condamnant la SELARL [X] à lui payer la somme de 3000 € en application de l'article 700 du Code de procédure Civile ;
À titre subsidiaire , débouter la SELARL [X] de toutes demandes à son encontre et la condamner à lui payer la somme de 3000 € en application de l'article 700 du Code de procédure Civile.
SUR CE
Il est expressément fait référence aux explications et conclusions des parties visées à l'audience et soutenues oralement à la barre.
Il est constant que le 12 décembre 2006, par courrier remis en main propre, l'employeur avait demandé à Madame [T] [O] de bien vouloir accepter de travailler à mi-temps en raison de la diminution notable de la charge de travail depuis le départ d'un avocat du cabinet ; que cette proposition ayant été déclinée, Madame [T] [O] a été convoquée à un entretien préalable en vue d'une mesure de licenciement économique et que le 28 Février 2007, elle a été licenciée par courrier rédigé en ces termes « [...] je vous confirme mon souhait de procéder à votre licenciement pour motif économique. Depuis le départ de ma collaboratrice M.[G] la charge de travail du cabinet a beaucoup diminué et je me vois dans la nécessité de procéder à votre licenciement pour motif économique » .
Le même jour, Madame [T] [O] a reçu la convention de reclassement personnalisé sur laquelle figurait la mention du délai de réflexion de 14 jours ;
Si l'acceptation par le salarié d'une convention de reclassement personnalisée entraîne une rupture du contrat réputée intervenir d'un commun accord, l'adhésion à cette convention ne le prive pas pour autant de la possibilité de contester le motif économique ;
Madame [T] [O] soutient que son licenciement est abusif faute de motivation ; ce grief n'est pas fondé, en effet la lettre de licenciement comporte l' énoncé de motifs explicites et vérifiables faisant état du motif économique du licenciement, de la diminution de l'activité et du moindre besoin de secrétariat depuis le départ du collaborateur de sorte qu'elle répond et recouvre la définition du motif économique donnée par l'article L 1233-3 du Code du Travail ;
Madame [T] [O] conteste ensuite le caractère réel du motif économique et la diminution de son activité personnelle et du cabinet ;
Le fait que la collaboratrice de la SELARL [X] ait quitté le cabinet en Mai 2004 et que la procédure de licenciement de Madame [T] [O] n'ait été engagée qu'en février 2007 est insuffisant à établir que le motif économique du licenciement ne serait pas fondé et que le cabinet n'aurait pas connu une diminution de son activité ; au contraire, il est établi et non contesté que le cabinet d'avocats est passé de 4 associés au seul gérant à la date du licenciement ;
Par ailleurs, ainsi qu'il en est attesté par l'expert comptable de la SELARL [X], la société SOFIMEC, le gérant, Monsieur [X], n'a pu effectuer aucun prélèvement pour ses besoins personnels, sur les comptes de la SCP de décembre 2005 à mai 2006, la trésorerie étant déficitaire ; les comptes sociaux 2007 laissent encore apparaître pour l'exercice 2007 une perte d'exploitation de 4539 € alors même que les charges salariales avaient été allégées, c'est ainsi que du 1er janvier 2007 au 30 septembre 2007 le cabinet présentait un résultat déficitaire de 11 000 € ; il s'ensuit que les difficultés économiques étaient bien réelles et que le licenciement pour motif économique est fondé de sorte que Madame [T] [O] sera déboutée de sa demande de dommages intérêts pour licenciement abusif ;
Madame [T] [O] invoque d'autre part le non respect de la procédure de licenciement concernant la notification du licenciement, la lettre lui ayant été remise en main propre le jour de l' entretien préalable, l' absence de mention de la priorité de réembauche et des droits à DIF ;
Cependant, il est acquis aux débats que Madame [T] [O] a accepté la CRP qui lui a été remise le 28 février 2007 soit le jour de l' entretien préalable ; en application de l'article L 1233-67 du Code du Travail il découle de l'acception de la CRP par la salariée, la rupture du contrat de travail d'un commun accord de sorte que seule l'absence de mention de la priorité de réembauche et de DIF ont nécessairement causé un préjudice à Madame [T] [O], le préjudice résultant de l'absence de mention du droit de réembauche étant toutefois très relatif puisqu'il est établi que l'employeur a fait part à Madame [T] [O] d'une offre de réembauche qu'elle a refusée en conséquence de quoi, la Cour estime approprié d'allouer à Madame [T] [O] les sommes de 1000 € pour l' absence de priorité de réembauche et 500 € pour l'absence de mention du droit à DIF, toute autre demande étant non fondée et par conséquent rejetée.
Madame [T] [O] soutient que si le 13ème mois prévu par la convention collective lui a bien été versé prorata temporis pour 2007 il ne lui a pas été versé les années précédentes;
L'absence formelle de mention du 13ème mois sur les bulletins de salaire de la salariée pour les années 2002 à 2006 ainsi que le soutient la salariée n'exclut pas qu'il a été payé dès lors qu'il est établi qu'il a été intégré dans la rémunération ; or il résulte des bulletins de salaire communiqués pour 2003 qu'en fait le salaire de Mars 2003 mentionne bien le paiement d'un 13ème mois pour 2338.95 € s'ajoutant au salaire de base de 1981.84 € plus la prime d'ancienneté et l'allocation ENADEP ;
A compter du 1er janvier 2004, Madame [T] [O] a reçu les modalités de paiement de ses salaires ; il lui a été rappelé que son salaire annuel au 31 décembre 2003 s'élevait à la somme de 38859.33 € brut qui jusqu' alors lui était payée sur 16 mois et le serait désormais sur 12 mois ; en conséquence, l'effet de lissage sur 12 mois a conservé le paiement du 13ème mois en l'incluant dans le calcul mensuel du salaire de base ; il s'ensuit que la demande de rappel de 13ème mois et congés payés afférents n' est pas fondée et que Madame [T] [O] en sera déboutée.
La demande de rappel d' allocation formation n'est pas fondée et sera rejetée, en effet les bulletins de salaire de Madame [T] [O] mentionnent un complément de salaire « cycle ENADEP » ;
Eu égard à la teneur de la présente décision, l'association SERVAAFA sera mise hors de cause, celle-ci n'ayant en tout état de cause établi les bulletins de salaire que sur la base des données fournies par la SELARL [X], l' absence de spécification du 13ème mois n'ayant pas porté préjudice à la salariée.
La somme de 1000 € sera mise à la charge de la SELARL [X] au titre des frais irrépétibles exposés par Madame [T] [O] ;
La SELARL [X] et l'association SERVAAFA conserveront chacune leurs propres frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement et statuant à nouveau :
Dit que le licenciement de Madame [T] [O] revêt un caractère économique et la déboute de sa demande de dommages intérêts pour licenciement abusif ;
Condamne la SELARL [X] à payer à Madame [T] [O] la somme de 1000 € à titre de dommages intérêts pour absence de mention de la priorité de réembauche et celle de 500 € pour absence de mention du DIF ;
Met hors de cause l'association SERVAAFA ;
Rejette toutes autres demandes des parties.
Condamne la SELARL [X] aux entiers dépens et à payer à Madame [T] [O] la somme de 1000 € au titre des frais irrépétibles qu'elle a exposés en première instance et en appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT