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27/01/2011 | FRANCE | N°10/02263

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 2, 27 janvier 2011, 10/02263


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2



ARRET DU 27 Janvier 2011



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/02263



Décision déférée à la Cour : ordonnance rendue le 02 Mars 2010 par le conseil de prud'hommes de PARIS - RG n° R 09/02576





APPELANTE

SA LANCRY PROTECTION SECURITE

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Nathalie MASSART, avocat au barreau de PARIS,

toque : P 20





INTIME

Monsieur [Z] [I]

[Adresse 2]

[Localité 4]

comparant en personne, assisté de Me Michel HENRY, avocat au barreau de PARIS, toque : P0099











COMPOSITI...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2

ARRET DU 27 Janvier 2011

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 10/02263

Décision déférée à la Cour : ordonnance rendue le 02 Mars 2010 par le conseil de prud'hommes de PARIS - RG n° R 09/02576

APPELANTE

SA LANCRY PROTECTION SECURITE

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Nathalie MASSART, avocat au barreau de PARIS, toque : P 20

INTIME

Monsieur [Z] [I]

[Adresse 2]

[Localité 4]

comparant en personne, assisté de Me Michel HENRY, avocat au barreau de PARIS, toque : P0099

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 09 décembre 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Catherine TAILLANDIER, Président

Madame Catherine BÉZIO, Conseiller

Madame Martine CANTAT, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER : Madame FOULON, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par Madame Catherine TAILLANDIER, Président

- signé par Madame Catherine TAILLANDIER, Président et par Madame FOULON, Greffier présent lors du prononcé.

*******

Statuant sur l'appel formé par M.[Z] [I] à l'encontre de l'ordonnance de référé en date du 2 mars 2010 par laquelle le conseil de prud'hommes de Paris, en formation de départage, a ordonné la réintégration de M.[I] dans son emploi au sein de la société LANCRY PROTECTION SECURITE -dans les quinze jours de la notification de l'ordonnance, sous astreinte, passé ce délai, de 150 € par jour de retard- et a ordonné à la société LANCRY PROTECTION SECURITE de reprendre le paiement des salaires et accessoires à partir du 1er avril 2009 -la société LANCRY PROTECTION SECURITE étant condamnée enfin à verser à M.[I] la somme de 1000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions remises et soutenues, à l'audience du 9 décembre 2010 par la société LANCRY PROTECTION SECURITE qui demande à la Cour d'infirmer l'ordonnance entreprise et de condamner M.[I] à lui rembourser les sommes perçues en exécution provisoire de cette décision, soit :

-10 541, 90 € nets correspondant à la période d'avril 2009 à février 2010

-1711, 08 € correspondant à la période de mars 2010

-3289, 75 € correspondant à la période d'avril 2010

la société LANCRY PROTECTION SECURITE réclamant de plus le paiement par M.[I] de la somme de 2500 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile;

Vu les écritures développées à la barre par M.[I] tendant à voir confirmer l'ordonnance déférée et condamner la société LANCRY PROTECTION SECURITE à lui verser la somme de 3500 € sur le fondement de ce même article;

SUR CE LA COUR

Sur les faits et la procédure

Considérant qu'il résulte des pièces et conclusions des parties que M.[I] a été engagé le 7 juillet 1991 par le société EUROP de PROTECTION; qu'il a été régulièrement désigné, en qualité de délégué syndical et représentant syndical au comité d'entreprise, à compter de 1994 et en dernier lieu au mois de mars 2001, alors que, dans l'intervalle, son contrat de travail était transféré à diverses sociétés, dont la dernière, la société PEDUS, était déclarée en redressement judiciaire ;à nouveau

Que c'est dans ces conditions que, le 27 janvier 2004, Me [V], le mandataire judiciaire de la société PEDUS, a licencié M.[I], pour motif économique,- le licenciement de ce dernier, qui avait d'abord fait l'objet d'un refus d'autorisation de la part de l'administration le 4 novembre 2003, étant finalement autorisé par décision de l'inspecteur du travail du 16 janvier 2004;

Que cette autorisation était confirmée par décision ministérielle du 27 mai 2004, à la suite du recours hiérarchique formé par M.[I], puis, infirmée aux termes d'un jugement du tribunal administratif de PONTOISE du 25 mars 2008;

Que les activités de la société PEDUS auxquelles participait M.[I], ayant été successivement transférées, dans l'intervalle,à diverses sociétés et, en dernier lieu, à la société LANCRY PROTECTION SECURITE , c'est à la société LANCRY PROTECTION SECURITE que M.[I], faisant application de ce jugement administratif, a adressé, le 30 mai 2008, sa demande de réintégration;

Que saisi, en référé, de cette demande, le conseil de prud'hommes de Paris, après s'être mis en partage de voix , a rendu, en formation de départage, le 24 mars 2009, une ordonnance dans laquelle il a constaté que la société LANCRY PROTECTION SECURITE reconnaissait désormais le bien fondé de la demande de réintégration de M.[I] , a donné acte en conséquence à la société LANCRY PROTECTION SECURITE de ce qu'elle acceptait de réintégrer M.[I] et, en tant que de besoin, a condamné, sous astreinte, cette société à procéder à la réintégration de M.[I];

Que, le 17 mars 2009, la société a convoqué M.[I] à un entretien fixé au 25 mars, concernant les modalités de sa reprise;

Que cet entretien a eu lieu à la date ainsi prévue ; que par lettre du 26 mars , la société LANCRY PROTECTION SECURITE a convoqué M.[I] à un entretien préalable, pour raison disciplinaire -cet entretien étant suivi de l'envoi d'une lettre de licenciement pour faute grave, en date du 22 avril 2009, reprochant à l'intéressé les propos injurieux et menaçants qu'il aurait tenus lors de l'entretien du 25 mars 2009;

Que M.[I] a de nouveau saisi le conseil de prud'hommes, statuant en référé, afin d'obtenir la réintégration à son poste -le salarié faisant valoir, en particulier, qu'aucun licenciement ne pouvait être prononcé à son égard, sans autorisation administrative préalable, compte tenu de la protection dont il continuait à bénéficier en raison de son statut d'ancien délégué et représentant syndical;

Qu'après un nouveau partage de voix, le Conseil, en formation de départage, a rendu, le 2 mars 2010, l'ordonnance dont appel, enjoignant la société LANCRY PROTECTION SECURITE d'avoir à réintégrer M.[I] et à reprendre, en faveur de celui-ci, le paiement de ses salaires et accessoires depuis le 1er avril 2009;

Sur les prétentions des parties

Considérant que, pour solliciter l'infirmation de l'ordonnance entreprise et le rejet de la demande de réintégration formée par M.[I] et accueillie par cette décision, la société LANCRY PROTECTION SECURITE fait, tout d'abord, valoir qu'indépendamment des dispositions de l'ordonnance du 2 mars 2010, ayant prescrit la réintégration de M.[I] en son sein, M.[I] n'était pas occupé, de par son emploi, à l'activité de la société PEDUS qui s'est trouvée cédée et a finalement été reprise par elle, -la cession ayant porté sur la seule activité du "service d'exploitation" auquel M.[I] n'a jamais été affecté, selon elle;

Que la cession judiciaire partielle de la société PEDUS, intervenue au profit de la société EUROPE INTERVENTIONS, n'ayant pu ainsi opérer le transfert de plein droit du contrat de M.[I] au sein cette dernière société, M.[I] ne peut se prévaloir d'un quelconque droit à réintégration en son propre sein à elle, qui vient aux droits de la société EUROPE INTERVENTIONS;

Que M.[I] peut d'autant moins se prévaloir d'un droit à transfer et donc à réintégration quelconque que, selon le mandataire de justice de la société PEDUS, Me [V], il était personnellement visé par le licenciement autorisé par le jugement du tribunal de commerce du 29 juillet 2003, ayant autorisé la cession;

Considérant que la société LANCRY PROTECTION SECURITE soutient ensuite qu'à la date de l'engagement de la procédure de licenciement de M.[I], initiée par la convocation du 26 mars 2010, M.[I] ne bénéficiait d'aucun statut protecteur de représentant ou de délégué syndical qui aurait pu justifier une demande d'autorisation préalable administrative de licenciement;

Qu'en outre, toute protection liée aux mandats antérieurs avait cessé de produire ses effets - la société LANCRY PROTECTION SECURITE faisant observer, d'une part, qu'elle n'a eu personnellement connaissance d'aucune nouvelle désignation de M.[I], en qualité de représentant ou délégué syndical, et d'autre part, que les anciens mandats de M.[I] avaient pris fin depuis plus de douze mois à la date du licenciement annulé, l'intéressé ne prouvant pas, de surcroît, -comme il le devrait, d'après l'appelante- avoir exercé ces mandats pendant plus de douze mois à la date de son licenciement annulé;

Sur la motivation

Mais considérant tout d'abord que, devant le Conseil de prud'hommes, lors de l'audience de référé ayant conduit à l'ordonnance précitée du 24 mars 2009, la société LANCRY PROTECTION SECURITE a reconnu, sans réserve, le bien fondé de la demande de réintégration de M.[I], au point que , dans le dispositif de sa décision, le Conseil a donné acte à la société de son "engagement de réintégrer M.[I] dans son effectif", et, en tant que de besoin, a condamné la société à respecter cet engagement;

Qu'en l'état de cette décision, la société LANCRY PROTECTION SECURITE est désormais irrecevable à revenir sur un litige tranché par une décision définitive -puisque non frappée d'appel- et qu'il serait contraire à tout principe de loyauté de l'autoriser à remettre en cause à l'occasion du présent litige, alors que cette décision est fondée sur un engagement sans réserve de sa part;

Que pour ce même motif , la société LANCRY PROTECTION SECURITE est irrecevable à soutenir qu'en définitive, M.[I] n'aurait pas rempli les conditions tenant aux modalités d'exercice de ses mandats et n'aurait pu prétendre ainsi à une protection justifiant sa réintégration;

Considérant que le seul litige susceptible d' opposer désormais les parties a trait, non pas à la réintégration de M.[I], celle-ci étant acquise, mais au point de savoir si, à la date où la société LANCRY PROTECTION SECURITE a engagé une nouvelle procédure de licenciement contre M.[I], selon convocation préalable du 26 mars 2009 (finalement achevée par un licenciement prononcé, sans autorisation, le 22 avril suivant), M.[I] était encore, ou non, un salarié protégé par l'effet de ses anciens mandats syndicaux;

Qu'au cas d'espèce, il n'est pas discutable que M.[I] était délégué syndical et représentant syndical au comité d'entreprise au sein de la société PEDUS, lorsqu' a été engagé son premier licenciement, à l'origine finalement de la décision du tribunal administratif du de CERGY-PONTOISE du 25 mars 2008, -annulant la décision ministérielle autorisant son licenciement- dont s'est prévalu M.[I] le 30 mai 2008, auprès de la société LANCRY PROTECTION SECURITE, pour solliciter sa réintégration;

Considérant que la société LANCRY PROTECTION SECURITE, venant aux droits de Me [V], bénéficiaire des autorisations administratives antérieures de licenciement, ainsi mises à néant, et s'étant de surcroît engagée judiciairement le 24 mars 2009, ainsi qu'il a été précédemment rappelé, à procéder à la réintégration ainsi requise, devait, donc, et a, d'ailleurs, procédé à un commencement de réintégration de l'intéressé par sa convocation le 17 mars 2009 à l'entretien du 25 mars 2009 -comme indiqué dans l'exposé des faits ci-dessus;

Que le seul point de droit à trancher a trait à la persistance, ou non, d'une protection pour M.[I], au jour de l'engagement de la procédure initiée par la convocation susvisée du 26 mars 2009 ayant conduit au licenciement du 22 avril suivant, -puisqu'il n'est pas contestable que l'intéressé ne peut plus prétendre, et ne prétend d'ailleurs pas , exercer au sein de la société LANCRY PROTECTION SECURITE, les anciens mandats dont il disposait au sein de la société PEDUS;

Or considérant qu'ainsi que l'a rappelé le Conseil dans l'ordonnance entreprise, les dispositions de l'article L 2411-3 du code du travail énoncent que le licenciement d'un délégué syndical ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail et cette autorisation est également requise pour le licenciement de l'ancien délégué syndical durant les douze mois suivant la date de cessation de ses fonctions s'il a exercé ces dernières pendant un an;

Qu'en outre, selon l'article L 2411-8 du même code l'ancien représentant syndical au comité d'entreprise qui désigné depuis deux ans n'est pas reconduit dans ses fonctions lors du renouvellement du comité bénéficie également de cette protection pendant les six premiers mois suivant l'expiration de son mandat ou la disparition de l'institution;

Que la durée de la procédure administrative consécutive à l'autorisation administrative nécessaire au licenciement d'un salarié protégé ne peut priver celui-ci de sa protection post mandat, lorsque l'autorisation de licencier est annulée, ce dont il résulte que la durée de cette protection ne peut commencer à courir avant la réintégration effective du salarié;

Considérant que vainement la société LANCRY PROTECTION SECURITE prétend qu'elle n'aurait pas été informée, lors du licenciement aujourd'hui litigieux, de la persistance des effets protecteurs des mandats de M.[I], alors, d'une part, que les éléments de fait, nécessaires à son information, résultent des diverses décisions administratives intervenues et débattues au cours de la précédente instance en référé qui l'a opposée à M.[I] et d'autre part, en tout état de cause, que cette persistance s'impose à elle, peu important la connaissance ou non par elle de cette persistance, compte tenu du caractère d'ordre public du statut protecteur des représentants du personnel;

Considérant que la société LANCRY PROTECTION SECURITE ayant licencié M.[I] sans autorisation le 22 avril 2009 alors qu'elle avait initié sa réintégration le 17 mars 2009, il s'ensuit que le salarié était encore protégé à la date de l'engagement de cette nouvelle procédure de licenciement, sur convocation du 26 mars 2009;

Que ce licenciement est dès lors constitutif d'un trouble manifestement illicite; qu'il a été justement déclaré sans effet par les premiers juges dont la décision sera intégralement confirmée;

Considérant qu'en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile la Cour allouera à M.[I] la somme de 2000 €;

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance entreprise ;

Condamne la société LANCRY PROTECTION SECURITE aux dépens d'appel et au paiement, au profit de M.[I], de la somme de 2000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 10/02263
Date de la décision : 27/01/2011

Références :

Cour d'appel de Paris K2, arrêt n°10/02263 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-01-27;10.02263 ?
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