RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 11
RENVOI APRES CASSATION
ARRÊT DU 27 Janvier 2011
(n° 21 , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/05949 EG
Décision déférée à la Cour : Sur renvoi d'un arrêt de la Cour de Cassation du 7 juillet 2009
APPELANTE
MUTUELLE RENAULT
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Alexandre ROTCAJG, avocat au barreau de PARIS, toque : C1461
INTIMÉES
Madame [S] [W]
[Adresse 1]
[Localité 5]
comparant en personne, assistée de Me Rachel LEFEBVRE, avocat au barreau de PARIS, toque : R295
ASSEDIC DE L'OUEST FRANCILIEN
Service juridique et contentieux
[Localité 3]
non représentée
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 02 Décembre 2010, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, Président
Madame Evelyne GIL, Conseillère
Madame Isabelle BROGLY, Conseillère qui en ont délibéré
Greffier : Mademoiselle Séverine GUICHERD, lors des débats
ARRÊT :
- réputé contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Jean-Michel DEPOMMIER, président et par Séverine GUICHERD, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Vu l'appel régulièrement formé le 21 juin 2006 par la MUTUELLE RENAULT contre un jugement du conseil de prud'hommes de BOULOGNE BILLANCOURT (Hauts-de-Seine) en date du 31 mai 2006 ayant statué sur le litige qui l'oppose à son ancienne employée, [S] [W].
Vu le jugement déféré ayant :
- dit que le licenciement de [S] [W] est sans cause réelle et sérieuse,
- condamné la MUTUELLE RENAULT à lui payer, avec intérêts légaux, les sommes de :
10'334,19 € à titre d'indemnité de préavis,
1 033,41 € à titre de congés payés sur préavis,
2 288,64 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,
56'000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
750 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné la MUTUELLE RENAULT à rembourser à l'ASSEDIC six mois des indemnités perçues par la salariée,
- débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- condamné la MUTUELLE RENAULT aux dépens.
Vu l'arrêt prononcé par la cour d'appel de VERSAILLES, le 31 octobre 2007, sur l'appel de la MUTUELLE RENAULT, ayant :
- confirmé partiellement le jugement du 31 mai 2006,
- condamné la MUTUELLE RENAULT à verser à [S] [W] la somme de 88'000 € au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- rejeté les demandes formées par la salariée au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents,
- confirmé pour le surplus les dispositions non contraires du jugement déféré,
- condamné la MUTUELLE RENAULT à verser à [S] [W] la somme de
2 000 € au titre des frais de procédure engagés en cause d'appel,
- dit que la créance au titre du solde de l'indemnité conventionnelle de licenciement sera productive d'intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation et que les créances indemnitaires produiront des intérêts de retard à compter de la notification de l'arrêt,
- rejeté toute autre demande,
- condamné la MUTUELLE RENAULT aux dépens.
Vu l'arrêt de la Cour de Cassation en date du 7 juillet 2009
- ayant cassé et annulé, sauf en ce qu'il a condamné la MUTUELLE RENAULT à payer à Mme [W] la somme de 2 288,64 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, l'arrêt rendu le 31 octobre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remis, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, renvoyé devant la cour d'appel de Paris ;
- condamné Mme [W] aux dépens ;
- vu l'article 700 du Code de procédure civile, rejeté la demande de la MUTUELLE RENAULT.
Vu les conclusions après cassation visées par le greffier et développées oralement à l'audience aux termes desquelles :
La MUTUELLE RENAULT, appelante, poursuit :
- l'infirmation du jugement entrepris,
- la validation du licenciement de [S] [W] et la constatation du respect par l'employeur de son obligation de reclassement,
- la condamnation de la salariée, en deniers ou quittances, à lui restituer les sommes versées en exécution du jugement du 31 mai 2006,
avec intérêts au taux majoré à compter du 18 août 2006 et avec capitalisation des intérêts,
- le débouté de [S] [W] de toute ses demandes,
- subsidiairement, la réduction de l'indemnité de licenciement à 6 mois de salaires maximum,
- la condamnation de l'intimée à lui payer la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en sus des entiers dépens.
[S] [W], intimée et appelante incidente, conclut :
- à la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a déclaré son licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné la MUTUELLE RENAULT au paiement de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés sur préavis et du solde de l'indemnité de licenciement,
- y ajoutant, à la condamnation de la MUTUELLE RENAULT à lui payer les sommes de :
11'071,59 € au titre du trouble dans la gestion de la rupture,
22'143,18 € à titre de dommages et intérêts pour violation de l'article L. 1121-1 du Code du travail,
88'000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans motif réel ni sérieux,
5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en sus des dépens,
avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes.
L'ASSEDIC de l'Ouest francilien, régulièrement convoquée à l'audience du 2 décembre 2010 ainsi que cela résulte de l'avis de réception de la lettre de convocation portant le cachet du PÔLE EMPLOI, ne s'est pas fait représenter à l'audience.
FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
La Caisse de Secours Mutuels (CSM) pour le personnel de la société RENAULT Frères, créée en 1900, est devenue, en 1985, après plusieurs autres dénominations, la MUTUELLE RENAULT, qui est la mutuelle des salariés, partenaires et prestataires du Groupe RENAULT.
Par lettre d'engagement signée le 3 avril 1967 valant contrat de travail, la société mutualiste et d'entraide sociale de la régie nationale Renault a embauché [V] [W], à compter de cette date et pour une durée indéterminée, en qualité de sténodactylo.
Par lettre du 2 novembre 1971, la même société mutualiste l'a engagée en qualité de secrétaire qualifiée. Un avenant à cette lettre a modifié sa situation à compter du 1er janvier 1995 en lui attribuant la qualification d'assistante de direction.
La salariée a été placée en arrêt de travail pour cause de maladie du 7 février 2003 au
30 septembre 2004.
Le 1er octobre 2004, le médecin du travail a émis l'avis suivant :
' Inapte à son poste d'assistante de direction. Pas de second examen médical en raison de la procédure de $gt; citée à l'art. R. 241. 51.1 du Code du travail. Il n'y aura pas de 2nde visite. étude de poste faite le 30/09/ 04 pas de reclassement possible dans l'entreprise '.
Par lettre du 26 octobre 2004, il a confirmé à la MUTUELLE RENAULT que [S] [W] était 'inapte à tous les postes de l'entreprise'.
Le 24 novembre 2004, l'employeur a notifié à la salariée une proposition de reclassement sur le poste de 'gestionnaire contentieux' consistant à suivre et gérer les dossiers des adhérents victimes d'accidents afin que la mutuelle se retourne contre les sociétés d'assurances, ses horaires et sa rémunération demeurant inchangés.
Le 1er décembre 2004, [S] [W] a refusé cette offre au motif que le médecin du travail avait estimé que son état de santé était incompatible avec une reprise de travail dans l'entreprise.
Le 3 décembre 2004, la Mutuelle l'a convoquée à se présenter le 13 décembre 2004 à un entretien préalable à une mesure de licenciement envisagée.
Le 16 décembre 2004, elle lui a notifié son licenciement en ces termes :
' J'ai le regret de vous notifier votre licenciement pour le motif suivant : inaptitude physique à tout emploi dans l'entreprise et impossibilité de reclassement suite au refus de la proposition de poste émise le 24 novembre 2004........................................................................
Votre situation ne vous permettant pas d'exécuter votre préavis, votre licenciement prendra effet dès présentation de la présente lettre de notification. Votre contrat de travail prendra donc fin le 17 décembre 2004.
Le règlement définitif de votre situation ne pourra cependant intervenir que lorsque vous aurez restitué, à la Mutuelle Renault, les éléments suivants :
- la carte d'accès au parking
- la carte d'accès aux locaux de l'Entreprise
- la carte de salarié de la Mutuelle Renault.
Dès réception de ces documents nous procéderons à la remise de votre solde de tout compte, de l'attestation ASSEDIC ainsi que du certificat de travail.'
[S] [W] a saisi le conseil de prud'hommes de BOULOGNE-BILLANCOURT, le 1er juillet 2005, de ses demandes en paiement d'indemnité de préavis, de congés payés sur préavis, d'indemnité conventionnelle de licenciement et de dommages-intérêts en réparation de divers chefs de préjudice.
Au soutien de son appel, la MUTUELLE RENAULT fait valoir :
- qu'elle constitue une société régie par le Code de la Mutualité française totalement indépendante du Groupe RENAULT et des entreprises qui le composent,
- que ses adhérents ne sont plus exclusivement des salariés du Groupe RENAULT puisqu'elle est ouverte à toute personne extérieure à celui-ci, sans exclusion,
- qu'elle n'avait donc pas à rechercher un emploi de reclassement pour [S] [W] au sein du Groupe RENAULT auquel elle n'appartient pas,
- que la salariée ayant été déclarée par le médecin du travail inapte à son poste d'assistante de direction, sans possibilité de reclassement dans l'entreprise, et qu'ayant refusé la seule proposition de reclassement pouvant lui être faite au poste équivalent de gestionnaire contentieux, l'employeur n'avait pas d'autre solution que de lui notifier son licenciement,
- qu'inapte pendant la durée du préavis à l'emploi qu'elle occupait, elle ne peut prétendre à aucune indemnité compensatrice au titre dudit préavis,
- que l'obligation de remettre au salarié licencié les documents sociaux étant quérable et non portable, la mutuelle n'a commis aucune faute en demandant à [S] [W] de venir les chercher et qu'en tout état de cause, pour lui être agréable, elle les lui a adressés par envoi recommandé,
- qu'après avoir été décidée par le conseil d'administration de la MUTUELLE RENAULT, la création de la Mutuelle de Prévoyance dite MPS a été à l'origine de conflits ayant donné lieu à différents procès opposant les deux mutuelles,
- que, dans de telles circonstances, il était légitime que la direction de la MUTUELLE RENAULT demandât à [S] [W] de renoncer à son mandat d'administrateur de la Mutuelle MPS.
[S] [W] expose :
- que, promue assistante de direction le 1er janvier 1995, elle était chargée du secrétariat de la direction et du conseil d'administration et responsable de plusieurs services avec autorité sur 7 employés,
- qu'après sa nomination, le 22 février 2001, le nouveau directeur de la Mutuelle RENAULT allait réduire ses responsabilités et secteurs d'intervention puis, en janvier 2003, la mettre en demeure de quitter ses fonctions bénévoles au profit de la MUTUELLE DE PRÉVOYANCE DES SALARIÉS MPS ou de renoncer à son poste de salarié de la MUTUELLE RENAULT,
- que dans le même temps, son emploi d'assistante de direction était disqualifié sur son bulletin de salaire en 'chef de bureau administratif ',
- que l'isolement qui lui a été imposé, la suppression de ses fonctions de secrétaire du conseil d'administration et du bureau, l'interdiction des échanges avec la MPS et la privation de l'accès intranet et du télécopieur général dont elle avait l'usage ont provoqué une souffrance psychique qui a causé l'arrêt maladie du 7 février 2003, renouvelé sans interruption jusqu'au 30 septembre 2004,
- que préalablement à son licenciement pour inaptitude notifié le 16 décembre 2004, la Mutuelle RENAULT lui a proposé un poste de reclassement dans l'entreprise, avec une activité faisant déjà partie de ses attributions mais de niveau inférieur puisqu'il ne comportait plus l'encadrement de salariés, et ce, en contradiction avec l'avis du médecin du travail,
- qu'elle n'a recherché aucune possibilité de reclassement au sein du Groupe RENAULT dont elle fait partie, non pas au sens capitalistique mais au sens purement fonctionnel,
- qu'elle a été fondée, à l'origine, pour porter secours au personnel de la société des Frères RENAULT,
- qu'aujourd'hui encore, son site Internet précise qu'elle est la mutuelle des salariés, partenaires et prestataires du Groupe RENAULT et son logo illustre l'évolution des véhicules RENAULT,
- que le siège de la Mutuelle est situé à [Localité 6], à proximité des locaux de la SA RENAULT,
- qu'elle dispose de bureaux sur le site RENAULT du Technocentre et du PLESSIS-ROBINSON ainsi que des correspondants, salariés RENAULT, sur les différents sites du Groupe,
- qu'il existe un service de courrier interne RENAULT dont bénéficient les salariés de la Mutuelle ainsi qu'un réseau intranet constitué pour le groupe RENAULT dans lequel elle dispose d'une adresse électronique,
- que lors du licenciement litigieux, le personnel de la Mutuelle bénéficiait de la convention collective de la métallurgie et des accords RENAULT ainsi que des activités du comité d'entreprise du siège,
- que les augmentations générales de salaires et les primes étaient toujours alignées sur celles de la société RENAULT,
- que les conditions générales de vente des véhicules RENAULT prévoient que le personnel de la Mutuelle bénéficie des avantages RENAULT,
- que les cotisations de la MUTUELLE RENAULT sont directement prélevées sur les salaires par RENAULT qui effectue les mises à jour pour le compte de la Mutuelle,
- que son conseil d'administration est composé d'administrateurs qui sont des salariés ou des retraités du Groupe RENAULT, qu'il comporte également deux observateurs désignés par le comité central d'entreprise de RENAULT,
- que lors de son licenciement, le président de la Mutuelle était un cadre du service juridique de la direction générale des ressources humaines et ce, depuis plusieurs années,
- que son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, notifié après 36 années de travail apprécié, à l'âge de 55 ans, lui a causé un préjudice très important en la laissant sans ressources pendant 15 mois puisqu'elle a épuisé ses droits aux ASSEDIC le 9 mars 2008 et n'a pu bénéficier de sa retraite, avec décote, qu'à partir du 1er août 2009,
- que son préavis qui n'a pu être exécuté qu'en raison du défaut de reclassement par l'employeur lui est donc dû, de même qu'un solde de l'indemnité conventionnelle qui aurait dû être calculée sur le salaire moyen incluant les primes conventionnelles,
- qu'après son licenciement, la Mutuelle Renault a poursuivi ses tracasseries en conditionnant la remise des documents administratifs à la restitution des différentes cartes professionnelles et en lui délivrant une attestation destinée à l'ASSEDIC erronée,
- que par ailleurs, elle a enfreint les dispositions de l'article 1121-1 du Code du travail en exigeant qu'elle renonce au poste bénévole d'administrateur de la MPS qu'elle exerçait avec son plein accord et en toute transparence depuis la création de cette mutuelle.
SUR CE
- Sur la qualification du licenciement et ses conséquences
Aux termes de sa lettre du 16 décembre 2004, la MUTUELLE RENAULT motive le licenciement de [S] [W] par son inaptitude physique à tout emploi dans l'entreprise et par l'impossibilité de la reclasser en raison du refus qu'elle a opposé à la proposition de poste qui lui a été présentée le 24 novembre 2004.
L'inaptitude de l'intimée à son poste d'assistante de direction est établie par l'avis émis par médecin du travail, le 1er octobre 2004, à l'issue de la procédure de 'danger immédiat' dispensant la salariée d'un second examen médical.
Cet avis qui précise également que le reclassement n'est pas possible dans l'entreprise a été suivi d'une réponse du médecin du travail à l'employeur confirmant, le 26 octobre 2004, que [S] [W] était inapte à tous les postes de l'entreprise.
Dans ces conditions, il apparaît que la MUTUELLE RENAULT n'a pas satisfait à son obligation de reclassement en se limitant à proposer un poste de gestionnaire contentieux qui ne tenait pas compte des observations formulées par le médecin du travail dans son avis d'inaptitude dans la mesure où il s'exerçait au sein de l'entreprise.
Elle aurait dû en effet rechercher les possibilités de reclassement au sein du groupe auquel elle appartient, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permet d'effectuer la permutation de tout ou partie de leur personnel.
Si la MUTUELLE RENAULT n'a pas de liens contractuels ou capitalistiques avec les membres du Groupe RENAULT, elle bénéficie de l'appellation commune et a fixé son siège à [Localité 6], site historique des usines RENAULT. Par ailleurs, il n'a pas été contesté qu'elle a développé une organisation lui permettant d'être présente ou représentée sur les sites RENAULT ainsi que des outils de communication communs avec la SA RENAULT et les différentes sociétés du Groupe qui prélèvent directement ses cotisations sur les rémunérations de leurs salariés. Il n'a pas été davantage contesté que ses administrateurs proviennent du groupe, que ses salariés bénéficient d'avantages réservés aux employés du groupe et qu'il existe des mouvements de personnel entre la mutuelle et les entreprises du groupe, ainsi :
- madame [U] a intégré la société RENAULT à la suite de la fermeture du centre médical de la Mutuelle en 1985,
et en provenance du Groupe RENAULT, avec conservation de leur ancienneté :
- monsieur [X], a été directeur de la Mutuelle de 1977 à 2001,
- monsieur [I], directeur adjoint en 1989 puis directeur en 2001,
- monsieur [O] est devenu agent d'entretien en 1990 à la suite de la fermeture de l'Ile Seguin, avec le même salaire,
- monsieur [B], a été accueilli en qualité de responsable de la paie, après la restructuration du comité d'entreprise RENAULT Siège,
- [S] [W], elle-même, qui a rejoint la Régie RENAULT en mars 1970 avant de réintégrer la MUTUELLE RENAULT, le 2 novembre 1971, avec reprise d'ancienneté.
La permutabilité du personnel caractérisant le groupe, la MUTUELLE RENAULT devait, pour satisfaire à son obligation de reclassement, étendre ses recherches de possibilités de reclassement à l'ensemble du groupe. Ceci n'ayant pas été effectué avant le licenciement de la salariée déclarée inapte, cette mesure se trouve dépourvue de cause réelle et sérieuse.
Sur la demande en paiement d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents (10'334,19 € + 1 033,41 €)
Dès lors que l'employeur n'a pas satisfait à son obligation de reclassement, le salarié a droit à une indemnité compensatrice de préavis sans qu'il y ait lieu de rechercher s'il était ou non dans l'impossibilité d'effectuer son préavis.
Les condamnations prononcées à ce titre par le conseil de prud'hommes doivent donc être confirmées.
Sur la demande en paiement du solde de l'indemnité de licenciement (2 288,64 €)
La cour d'appel de VERSAILLES, dans son arrêt du 31 octobre 2007, a confirmé la condamnation prononcée à ce titre par le conseil de prud'hommes de BOULOGNE-BILLANCOURT, le 31 mai 2006.
Cette décision n'a pas été cassée par la Cour de Cassation au terme de son arrêt du 7 juillet 2009.
[S] [W] qui dispose d'une décision définitive faisant droit à ce chef de demande n'est pas recevable à solliciter une nouvelle confirmation de la condamnation à paiement prononcée par le conseil de prud'hommes.
Sur la demande de réparation du trouble dans la gestion de la rupture (11'071,59 €)
La salariée fait valoir, à l'appui de sa demande, les tracasseries et les retards apportés par la MUTUELLE RENAULT dans l'exécution des obligations lui incombant à la suite du licenciement et notamment, le retard à lui remettre une attestation destinée à l'ASSEDIC correctement établie.
L'examen des pièces du dossier montre qu'une attestation ASSEDIC conforme n'a été adressée à [S] [W] qu'après le prononcé de l'ordonnance de référé du
25 février 2005 ayant ordonné à la MUTUELLE RENAULT de lui délivrer une telle attestation, l'attestation initiale étant erronée en ce qu'elle mentionnait un salaire mensuel de 19'220,17 € au lieu de 2 480,10 € et la date d'entrée de la salariée dans l'entreprise au
2 novembre 1971 au lieu du 3 avril 1967.
Le préjudice qui en est résulté pour l'intimée sera réparé par l'allocation d'une indemnité de 500 €.
Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse
En considération de l'ancienneté de [S] [W], de sa carrière au sein de la mutuelle Renault, de son âge lors du licenciement et des circonstances de celui-ci, il y a lieu de fixer à 75'000 € l'indemnité destinée à réparer le préjudice résultant du licenciement.
Sur le point de départ des intérêts légaux
La salariée demande que les sommes accordées portent intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes.
En l'absence de toute indication au dossier de cette juridiction de la date d'envoi et de réception des convocations devant le bureau de conciliation, les intérêts légaux courront sur le montant des condamnations à caractère salarial à compter du 7 septembre 2005, date de l'audience du bureau de conciliation.
Les sommes allouées à caractère indemnitaire porteront intérêts à taux légal à compter de la date du présent arrêt, sauf l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui portera intérêts à compter du jugement déféré dans la limite de la condamnation prononcée à ce titre par le conseil de prud'hommes.
Sur la demande de la MUTUELLE RENAULT en restitution des sommes versées au titre de l'exécution du jugement du 31 mai 2006
Les condamnations à paiement prononcées par le conseil de prud'hommes étant confirmées,
il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande.
- Sur la demande de dommages et intérêts pour violation de l'article L. 1121-1 du Code du travail
Il est justifié qu'il existait un conflit d'intérêt entre la MUTUELLE RENAULT et la Mutuelle de Prévoyance des Salariés dite MPS qui, se manifestant par une action en justice, expliquait que l'employeur imposât, à ce moment-là, à [S] [W] une restriction à sa liberté individuelle en lui demandant de mettre fin à sa double appartenance aux mutuelles en cause.
La violation alléguée n'étant pas constituée, il y a lieu de confirmer la décision de rejet de ce chef de demande prononcée par les premiers juges.
- Sur les demandes d'indemnité au titre de l'article 700 du Code de procédure civile
Au vu des circonstances de la cause, il serait inéquitable de laisser à la charge de [S] [W] les frais non taxables qu'elle a exposés à l'occasion du renvoi sur cassation.
Il y a lieu de lui accorder à ce titre une indemnité de 2 500 €, de rejeter la demande formée sur le même fondement par la MUTUELLE RENAULT et de confirmer l'application qui a été faite par le conseil de prud'hommes des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
- Sur l'application d'office de l'article L. 1235-4 du Code du travail en faveur du
PÔLE EMPLOI
Le remboursement des indemnités de chômage ne s'appliquant pas au licenciement prononcé pour inaptitude du salarié, il convient d'infirmer la condamnation de la MUTUELLE RENAULT à rembourser à l'ASSEDIC six mois des indemnités perçues par [S] [W] prononcée par le conseil de prud'hommes.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté [S] [W] de sa demande en réparation du trouble dans la gestion de la rupture et en ce qu'il a condamné la MUTUELLE RENAULT à rembourser à l'ASSEDIC six mois d'indemnités perçues par la salariée licenciée ;
Le réforme sur le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit que les sommes allouées par le jugement du 31 mai 2006 au titre de l'indemnité de préavis, des congés payés sur préavis et de l'indemnité conventionnelle de licenciement porteront intérêts au taux légal à compter du 7 septembre 2005 ;
Condamne la MUTUELLE RENAULT à payer à [S] [W] les sommes de :
75'000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,
avec intérêts au taux légal à compter du 31 mai 2006 sur la somme de 56'000 € et à compter du présent arrêt sur le surplus,
500 € à titre de dommages-intérêts,
2 500 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile,
avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
Rejette le surplus des demandes ;
Condamne la MUTUELLE RENAULT aux dépens de l'appel.
Le Greffier, Le Président,