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06/01/2011 | FRANCE | N°09/03400

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 06 janvier 2011, 09/03400


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRET DU 06 Janvier 2011

(n° 14, 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/03400



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 Mars 2009 par le conseil de prud'hommes de LONGJUMEAU Commerce RG n° 07/00023





APPELANTE

Madame [C] [X] épouse [Z]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Sylvie GOBARD, avocat au barreau de PARIS, toqu

e : E524







INTIMEE

SNC OTTO BOCK

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Karine MUZEAU-COUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : T03









COMPOSITI...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRET DU 06 Janvier 2011

(n° 14, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 09/03400

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 Mars 2009 par le conseil de prud'hommes de LONGJUMEAU Commerce RG n° 07/00023

APPELANTE

Madame [C] [X] épouse [Z]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Sylvie GOBARD, avocat au barreau de PARIS, toque : E524

INTIMEE

SNC OTTO BOCK

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Karine MUZEAU-COUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : T03

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Novembre 2010, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Michèle BRONGNIART, Présidente, chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Michèle BRONGNIART, Président

Monsieur Thierry PERROT, Conseiller

Monsieur Bruno BLANC, Conseiller

Greffier : Véronique LAYEMAR, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

- signé par Madame Michèle BRONGNIART, Président et par Mlle Véronique LAYEMAR, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA COUR,

Le 30 juin 1992, Mme [Z] a été engagée par la société Otto Bock France, par contrat à durée indéterminée, en qualité de facturière, aux conditions générales de la convention collective nationale de la métallurgie.

Après un congé parental de trois ans, Mme [Z] a repris ses fonctions le 16 septembre 1996.

Le 2 mai 2006, il a été demandé à Mme [Z] d'établir un planning de ses principales tâches quotidiennes et ce jusqu'au 30 juin.

Le 11 mai 2006, la société Otto Bock France a notifié à Mme [Z] un avertissement en raison d'erreurs de saisie commises au cours du mois d'avril.

Le 15 septembre 2006, un nouvel avertissement a été notifiée à Mme [Z] pour des erreurs de saisie des bons de livraisons.

Le 9 octobre 2006, Mme [Z] a été convoquée à un entretien préalable à un licenciement et le18 octobre, elle a été licenciée pour fautes professionnelles répétées et volontaires portant préjudice à l'entreprise, avec dispense d'effectuer son préavis.

Par note du 4 décembre 2006, la société Otto Bock France a annoncé à ses collaborateurs 'qu'en date du 29 novembre 2006, le groupe Otto Bock a acquis la totalité des actions de la société [U] [O]'.

La cour statue sur l'appel interjeté le 27 mars 2009 par Mme [Z] du jugement rendu par le Conseil des prud'hommes de Longjumeau le 13 mars 2009 qui a

- constaté que son licenciement est pourvu d'une cause réelle et sérieuse,

- l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes,

en la condamnant aux entiers dépens et en déboutant la société Otto Bock France de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Vu les conclusions du 19 novembre 2010 au soutien de ses observations orales par lesquelles Mme [Z] demande à la cour

- d'infirmer le jugement dont appel,

et statuant à nouveau,

- d'annuler les avertissements,

- de dire que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse,

- de condamner la société Otto Bock France à lui payer, avec intérêts aux taux légal à compter de la demande,

. 40 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour mesures vexatoires,

. 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

en fixant la moyenne mensuelle des salaires à 1 675,56 €.

Vu les conclusions du 19 novembre 2010 au soutien de ses observations orales par lesquelles la société Otto Bock France demande à la cour de

- confirmer le jugement entrepris,

- débouter Mme [Z] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner Mme [Z] à lui verser la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens.

SUR CE,

Sur les avertissements

Considérant que l'avertissement du 11 mai 2006 est fondé sur 23 erreurs de saisie recensées au cours du mois d'avril 2006 ; que celui du 15 septembre vise la saisie de bons de livraison en totale décalage avec le bon de commande initial, ces erreurs ayant entraîné le report de la livraison urgente de 150 gants ;

Considérant que pour infirmation de la décision déférée, Mme [Z] soutient s'agissant du premier avertissement, que l'organisation mise en place était structurellement source d'erreurs et que celles-ci pouvaient également avoir été commises par le service de production, de 'teintage' ou d'expédition, et s'agissant du second, que le retard de livraison ne lui est pas imputable car elle avait dû travailler dans l'urgence à partir d'une feuille de planning totalement incompréhensible ; qu'elle ajoute que des erreurs de saisie étaient possibles à chaque étape, outre un mauvais rangement récurrent des stocks et une illisibilité des documents remis ; que la société Otto Bock France réplique que Mme [Z] n'a jamais contesté le premier avertissement, qu'elle était responsable de la vérification de l'état des stocks et de l'éventuelle commande au service de production, que les feuilles de non-conformité établissent l'imputabilité des 'erreurs stock SAP' ou 'écart de stock' à Mme [Z] ; que les attestations versées par Mme [Z] ne sont pas probantes faute par leurs auteurs d'avoir été présents dans l'entreprise à la date des faits reprochés ou d'avoir travaillé dans le même service que Mme [Z] ;

Considérant que pour imputer à Mme [Z] les erreurs fondant ces deux avertissements, l'employeur verse des fiches de non conformité, un courrier adressé à Mme [Z] par son supérieur hiérarchique et une attestation de ce supérieur selon laquelle Mme [Z] 'était la seule à saisir les gants, mains et capotages sur le logiciel SAG' ;

Mais considérant que l'absence de contestation par la salariée des avertissements ne vaut pas acquiescement ; que les déclarations de Mme [Z] sont corroborées par les attestations de quatre salariés qui ont travaillé en liaison avec elle et d'une salariée qui l'a remplacée pendant ses absences ; qu'ils mettent tous en cause l'organisation du travail et la logistique comme source d'erreurs ;qu'ils attestent de la mauvaise qualité des documents remis à Mme [Z] ('rayés, difficilement lisibles', 'torchons'...), de l'initiative que pouvait prendre le service de production dont les salariés percevaient une prime de production à la pièce ; que s'agissant de la gestion des stocks, ils identifient plusieurs autres causes possibles d'erreurs (erreur d'étiquetage, mauvais rangement), commises par d'autres salariés ; que certaines des feuilles de production produites sont manuscrites avec des chiffres mal formés ou surchargés ;

Qu'en l'absence d'instructions relatives à la procédure applicable, rien ne permet d'écarter ces attestations qui portent sur les méthodes de travail en vigueur dans l'entreprise peu important que ces salariés n'aient pas travaillé dans le service administration des ventes du moment que leur travail leur imposait de travailler en liaison avec Mme [Z], ou que ces salariés aient, pour certains, quitté l'entreprise au moment des faits dès lors que la société Otto Bock France ne prétend pas et n'offre d'établir une évolution des méthodes de travail pendant la période écoulée entre la date de leur départ et 2006 ;

Que l'impact du nombre d'erreurs commises est aussi fonction du nombre global de saisie à effectuer chaque mois ; qu'aucune information n'est donnée sur ce point, alors que la société Otto Bock France affirme que les 'erreurs récurrentes' de Mme [Z] 'entraînent des perturbations d'organisation au niveau de l'entreprise'  ;

Qu'il ressort des mentions portées sur fiches de non-conformité que de nouveaux systèmes de contrôles ont été mis en place pour remédier aux erreurs ('applicatif Excell mis en place le 21/04 (2006) au soir, ce type d'erreur devrait être maintenant très rare', 'mise en place depuis, un pointage de saisie') ; Que Mme [G] qui a travaillé dans l'entreprise de mars 2003 à avril 2010, comme assistante logistique et export, atteste qu'après le départ de Mme [Z], la direction a mis en place des contrôles en amont ; que la société Otto Bock France indique dans ses écritures qu'elle a embauché un ingénieur qualité pour mettre en place les processus d'audit interne ;

Que la société Otto Bock France impute vainement à Mme [Z] les dysfonctionnements constatés dans l'organisation de l'entreprise alors que le 3octobre 2006, elle a procédé au licenciement pour faute grave de l'adjoint au responsable de production, en lui reprochant notamment de ne pas 'avoir mis en place volontairement les mesures nécessaires pour redresser la situation' de sorte que 'la production s'est enrayée et a accumulé des retards incompressibles de production, des demandes de délais de livraison restées sans réponse, des importants retards dans la livraison, des mécontentements graves de la clientèle finale' ;

Que s'agissant de la formation de Mme [Z] au logiciel SAP, la société Otto Bock France ne verse qu'un questionnaire vierge d'évaluation des connaissances sans produire ceux informés par Mme [Z] alors qu'elle soutient que 'des questionnaires d'évaluation des connaissances sont régulièrement transmis aux salariés devant utiliser ce logiciel' ;

Qu'au vu de ces éléments, le doute profitant au salarié, il convient d'annuler les avertissements ;

Sur le licenciement

Considérant que par erreur les premiers juges ont retenu que dans la lettre de licenciement, l'employeur avait retenu une faute grave, alors qu'il a notifié un licenciement pour cause réelle et sérieuse avec dispense d'effectuer le préavis ('Aussi, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour cause réelle et sérieuse. Nous vous dispensons d'effectuer votre préavis de 2 mois qui vous sera néanmoins payés ...') ; que la qualification de 'faute grave' n'apparaît pas dans la lettre de licenciement ;

Considérant que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, lie les parties et le juge, est libellée comme suit :

'... nous avons décidé de procéder à votre licenciement pour fautes professionnelles répétées portant préjudice à l'entreprise.

...

Vous êtes responsables en tant que facturière depuis plus de 10 ans de la saisie des commandes à l'édition des bons de livraison de gants. Or le 27 septembre 2006, nous avons de nouveau relevé 3 écarts de non-conformité, négligences répétées qui fait suite à de nombreux rappels à l'ordre au cours des derniers mois. Malgré les nombreux avertissements antérieurs et tous les mails de rappel de votre supérieur hiérarchique, vous continuez et répétez exactement les mêmes erreurs de saisie, sans effectuer les contrôles nécessaires.

Ces erreurs répétées dont vous êtes responsable entraînent :

. des écarts dans le stock, inexplicables,

. de la production inutile,

. des écarts sur les bordereaux de livraison,

. des livraisons erronées à notre client final.

et donc des coûts supplémentaires.

(et suit les rappels d'erreurs signalées par un client le 14 octobre 1996, de la plainte d'un nouveau client le 12 mai 1999 puis se poursuit par) en avril 2004 votre supérieur vous rappelle que vous devez faire attention et vérifier votre travail car trop d'erreurs s'accumulent.

(rappel des avertissements du 11 mai 2006 et du 13 septembre 2006)

Nous nous étonnons que compte tenu de votre ancienneté sur la fonction vous continuez à délibérément faire des erreurs qui déstabilisent l'organisation du service logistique et la chaîne qui suit.

C'est dans ce contexte que votre supérieur hiérarchique vous a demandé une nouvelle fois de vous ressaisir et de vous concentrer afin d'obtenir compte tenu de votre ancienneté aucune erreur.

Malgré tout, le 27 septembre 2006, d'autres erreurs apparaissent similaires aux erreurs passées aussi devant ces fautes professionnelles répétées et volontaires et la désorganisation que cela entraîne pour l'entreprise vous comprendrez que nous ne pouvons continuer à travailler dans ces conditions.

...

Aussi nous vous notifions par la présente votre licenciement pour cause réelle et sérieuse.'...;

Considérant que Mme [Z] est fondée à invoquer la prescription des faits remontant à plus de trois ans à savoir une lettre d'un client du 14 octobre 1996, les plaintes d'un client du 12 mai 1999, les erreurs constatées en avril 2004 par son supérieur ; que les avertissements étant annulés, l'employeur ne peut plus les invoquer pour justifier du bien fondé du licenciement prononcé ;

Que la fiche de non conformité du 27 septembre 2006 mentionne trois erreurs dont deux de saisie ('erreur rentrée à la place') ; qu'en tout état de cause, de telles erreurs ne constituent pas, faute par l'employeur d'établir leur caractère répété et volontaire invoqué pour justifier le licenciement, une cause réelle et sérieuse ;

Qu'en conséquence, par infirmation du jugement déféré le licenciement de Mme [Z] sera déclaré sans cause réelle et sérieuse ;

Considérant que compte tenu de l'effectif du personnel de l'entreprise, de l'ancienneté et de l'âge de la salariée (née en juin 1962) ainsi que des conséquences matérielles et morales du licenciement à son égard, telles qu'elles résultent des pièces produites et des débats, il lui sera alloué, en application de l'article L.122-14-4 du Code du travail ancien devenu L 1235-3, 19000 € à titre de dommages-intérêts ;

Que faute d'établir les mesures vexatoires commises par la société Otto Bock France dans le déroulement de son licenciement, Mme [Z] sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour le comportement vexatoire de l'employeur ;

Considérant qu'en vertu l'article L 122-14-4 alinéa 2 du code du travail ancien (devenu L 1235-4) dont les conditions sont réunies en l'espèce, le remboursement des indemnités de chômage par la société Otto Bock France, employeur fautif, est de droit ; que ce remboursement sera ordonné ;

Considérant que l'équité et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif ;

PAR CES MOTIFS,

INFIRME le jugement entrepris,

et statuant à nouveau

DECLARE le licenciement de Mme [Z] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la société Otto Bock France à payer à Mme [Z] , avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, 19000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la société Otto Bock France à payer à Mme [Z] 1500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE les parties de toutes demandes, fins ou prétentions plus amples ou contraires, infondées,

ORDONNE, dans les limites de l'article L 122-14-4 alinéa 2 ancien, devenu L 1235-4 du code du travail, le remboursement par la société Otto Bock France à l'organisme social concerné des indemnités de chômage payées à Mme [Z],

CONDAMNE la société Otto Bock France aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 09/03400
Date de la décision : 06/01/2011

Références :

Cour d'appel de Paris K7, arrêt n°09/03400 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-01-06;09.03400 ?
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